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25/07/2017 | FRANCE | N°16NT00966

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 25 juillet 2017, 16NT00966


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...Briand a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Etat à lui verser les fractions de traitement et indemnités correspondant au service à temps plein qu'il a effectué entre le 11 novembre 2010 et le 15 février 2012 dans le cadre du dispositif de cessation progressive d'activité.

Par un jugement n° 1202821 du 4 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Par une décision n° 386953 du 26 février 2016, le Conseil d'Etat a renvoyé à la cou

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...Briand a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Etat à lui verser les fractions de traitement et indemnités correspondant au service à temps plein qu'il a effectué entre le 11 novembre 2010 et le 15 février 2012 dans le cadre du dispositif de cessation progressive d'activité.

Par un jugement n° 1202821 du 4 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Par une décision n° 386953 du 26 février 2016, le Conseil d'Etat a renvoyé à la cour administrative d'appel de Nantes le jugement de la requête formée le 6 janvier 2015 par

M. Briand tendant à l'annulation de ce jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 6 janvier 2015, 7 avril 2015, 4 novembre 2016, 24 novembre 2016 et 22 mai 2017, M. Briand, représenté par MeA..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 4 novembre 2014 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser les fractions de traitement et indemnités correspondant au service à temps plein qu'il a effectué entre le 11 novembre 2010 et le 15 février 2012 dans le cadre du dispositif de cessation progressive d'activité ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'erreur de droit pour avoir considéré que la renonciation au dispositif de cessation progressive d'activité ne pouvait avoir pour effet d'en remettre rétroactivement en cause les conditions d'exécution ;

- c'est également au prix d'une erreur de droit que les premiers juges ont estimé qu'il ne pouvait pas utilement se prévaloir des dispositions de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 et de l'article 64 de la loi du 11 janvier 1984 pour demander la condamnation de l'Etat à lui verser une rémunération supérieure à la fraction de six septièmes de son traitement et de ses indemnités perçue entre le 1er novembre 2010 et le 15 février 2012 ;

- ce jugement est également entaché d'erreur de droit et d'erreur de fait pour avoir considéré que les dispositions de l'article 14 du décret n° 2010-1740 du 30 décembre 2010 ne prévoyaient pas, en cas de renonciation au bénéfice de la cessation progressive d'activité, le versement par l'Etat aux agents ayant opté pour ce dispositif d'une rémunération supérieure à six septièmes de leur traitement pour la période de service à temps plein ;

- c'est à la suite d'une erreur de droit que le tribunal a jugé qu'il ne pouvait pas critiquer le versement de la fraction de six septièmes de son traitement pour la période allant du 1er novembre 2010 au 15 février 2012 sur le fondement de l'enrichissement sans cause, dès lors que les conditions de sa rémunération ont été fixées par les dispositions de l'ordonnance du 31 mars 1982 et du décret du 20 février 1995 applicables aux agents ayant opté pour la cessation progressive d'activité avec cessation totale d'activité six mois avant la date de mise à la retraite et que sa renonciation au bénéfice de ce dispositif n'a pas eu pour effet de les remettre en cause rétroactivement.

Par des mémoires en défense enregistrés les 6 novembre 2015 et 4 mai 2017, le ministre de la Justice conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. Briand ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- l'ordonnance n° 82-297 du 31 mars 1982 portant modification de certaines dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite et relative à la cessation d'activité des fonctionnaires et des agents de l'Etat et des établissements publics de l'Etat à caractère administratif ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites ;

- le décret n° 95-179 du 20 février 1995 relatif à la cessation progressive d'activité des fonctionnaires de l'Etat et pris pour l'application de l'ordonnance n° 82-297 du 31 mars 1982 ;

- le décret n° 2010-1734 du 30 décembre 2010 relatif à l'âge d'ouverture du droit à pension de retraite et portant application des articles 17, 20 (III) et 21 (III) de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Massiou,

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,

- et les observations de M. Briand.

1. Considérant que M. Briand, greffier en chef affecté au casier judiciaire national à Nantes, a, à sa demande, été admis au bénéfice de la cessation progressive d'activité par un arrêté du ministre de la justice du 17 mai 2010, pour la période du 1er novembre suivant au 1er novembre 2013, date alors envisagée de son départ en retraite ; qu'afin de mettre la situation de M. Briand en conformité avec la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, entrée entretemps en vigueur, le ministre de la justice a retiré cet arrêté par un arrêté du 2 février 2011 admettant à nouveau l'intéressé au bénéfice du dispositif concerné, mais reportant son échéance au 9 octobre 2014, date à laquelle l'intéressé pouvait prendre sa retraite en application de ces nouvelles dispositions ; que, par un courrier du 16 novembre 2011, M. Briand a indiqué renoncer au bénéfice de la cessation progressive d'activité, comme l'y autorisait l'article 54 de la loi du 9 novembre 2010, et sollicité le versement des fractions de traitement et indemnités correspondant au service à temps plein qu'il avait effectué dans le cadre de ce dispositif, qui prévoyait qu'il exercerait ses fonctions à temps plein les deux premières années, pour une rémunération correspondant aux six septièmes de son traitement et de ses indemnités ; que, par un arrêté du 17 janvier 2012, le ministre de la justice a, par suite, réintégré M. Briand à temps complet dans ses fonctions à compter du 16 février 2012 ; qu'il n'a, en revanche, pas répondu à sa demande de versement des fractions de traitement et indemnités en cause ; que, par un jugement du 4 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. Briand tendant à ce que l'Etat soit condamné à procéder à ce versement ; que le requérant a déféré ce jugement à la censure du Conseil d'Etat lequel a, par un arrêt du 26 février 2016, renvoyé sa requête à la cour administrative d'appel de Nantes ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu et d'une part, qu'aux termes de l'article 2 de l'ordonnance du 31 mars 1982, alors applicable : " Les fonctionnaires de l'Etat (...) dont la limite d'âge est fixée à soixante-cinq ans, qui sont âgés de cinquante-sept ans au moins et qui justifient de trente-trois années de cotisations ou de retenues au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un ou plusieurs autres régimes de base obligatoires d'assurance vieillesse, et qui ont accompli vingt-cinq ans de services militaires et civils effectifs, effectués en qualité de fonctionnaires ou d'agents publics, peuvent être admis, sur leur demande (...) à bénéficier d'un régime de cessation progressive d'activité. (...) " ; que selon l'article 3-1 de cette même ordonnance : " Pendant la durée de la cessation progressive d'activité, les agents exercent leur fonction à temps partiel. La quotité de temps de travail qu'ils accomplissent est soit : 1° Dégressive en fonction de leur date d'entrée dans le dispositif : 80 % pendant les deux premières années, puis 60 %. / Les intéressés perçoivent alors pendant les deux premières années passées en cessation progressive d'activité six septièmes du traitement, de l'indemnité de résidence, des primes et indemnités de toute nature afférents soit au grade de l'agent et à l'échelon auquel il est parvenu, soit à l'emploi auquel il a été nommé. 2° Fixe avec une quotité de travail de 50 %. (...) " ; qu'aux termes de l'article 3-2 du décret du 20 février 1995 : " (...) II. - Pour l'application de l'article 3 de l'ordonnance du 31 mars 1982 susvisée aux fonctionnaires ne relevant pas d'un régime d'obligations de service, le bénéfice sur demande de la cessation totale d'activité, six mois avant la date de leur mise à la retraite, est ouvert dans les conditions suivantes : (...) 2° Lorsque la quotité de temps de travail est dégressive et sous réserve que l'agent demeure au moins dix trimestres en cessation progressive d'activité, les quotités de temps de travail à effectuer sont : a) 100 % pour les six premiers trimestres ; (...) 4° Les conditions de versement de la rémunération du fonctionnaire en cessation progressive d'activité prévues à l'article 3-1 de l'ordonnance du 31 mars 1982 susvisée ne sont pas affectées par cette option. " ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 161-17-2 de la sécurité sociale résultant de la loi du 9 novembre 2010 : " L'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite mentionné au premier alinéa de l'article L. 351-1 du présent code, (...) au 1° du I de l'article L. 24 et au 1° de l'article L. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite est fixé à soixante-deux ans pour les assurés nés à compter du 1er janvier 1956. / Cet âge est fixé par décret, de manière croissante à raison de quatre mois par génération et dans la limite de l'âge mentionné au premier alinéa du présent article, pour les assurés nés avant le 1er janvier 1956. " ; que selon l'article 54 de cette même loi : " I. L'ordonnance n° 82-297 du 31 mars 1982 (...) [est] abrogée[s]. (...) III. Les personnels mentionnés au II peuvent, à tout moment et sous réserve d'un délai de prévenance de trois mois, demander à renoncer au bénéfice de la cessation progressive d'activité. " ; qu'aux termes de l'article D. 161-2-1-9 du code de la sécurité sociale, résultant du décret du 30 décembre 2010 : " L'âge prévu au second alinéa de l'article L. 161-17-2 est fixé à : (...) 4° Soixante et un ans pour les assurés nés en 1953 ; (...) " ; qu'enfin, selon l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. (...) " ; que selon l'article 64 de la loi du 11 janvier 1984 : " Les fonctionnaires régis par le présent titre ont droit, après service fait, à une rémunération fixée conformément aux dispositions de l'article 20 du titre Ier du statut général. " ;

3. Considérant que l'arrêté du ministre de la justice du 17 mai 2010 prévoyait notamment que M. Briand s'engageait à effectuer une quotité de travail de 100 % du 1er novembre 2010 au 30 avril 2012 inclus ; que sa rémunération avait été fixée pour cette période, conformément aux dispositions précitées de l'article 3-1 de l'ordonnance du 31 mars 1982, à six septièmes de son traitement et de ses indemnités ; que l'arrêté du 2 février 2011 procédant au retrait de celui du 17 mai 2010 a, pour tenir compte du recul de l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite prévu par la loi du 9 novembre 2010, prévu que la fin de la cessation progressive d'activité de M. Briand était reportée au 9 octobre 2014 et modifié les modalités de mise en oeuvre de ce dispositif pour la période courant à compter du 1er novembre 2012 ;

4. Considérant que pour la période du 1er novembre 2010, date à laquelle a été mis en oeuvre le dispositif de cessation progressive d'activité à l'égard de M. Briand, et celle du 15 février 2012, à laquelle il y a été mis fin à la suite de la renonciation par l'intéressé à celui-ci, le requérant a perçu, pour une quotité de travail de 100 %, seulement les six septièmes de son traitement et ses indemnités en application des dispositions précitées de l'ordonnance du 31 mars 1982 et du décret du 20 février 1995 ; que la renonciation volontaire au dispositif de cessation progressive d'activité par les agents déjà admis à son bénéfice, prévue par les dispositions précitées du III de l'article 54 de la loi du 9 novembre 2010, ne saurait avoir eu pour effet, en l'absence de dispositions réglementaires ou législatives en ce sens et dès lors que la rétroactivité ne se présume pas, de remettre rétroactivement en cause les conditions d'exécution financières de ce dispositif ; que M. Briand ne peut pas utilement, par conséquent, se prévaloir de la méconnaissance des dispositions des articles 20 de la loi du 13 juillet 1983 et 64 de la loi du 11 janvier 1984 qui prévoient la rémunération du service fait ;

5. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des énonciations du point précédent que le moyen tiré par M. Briand de l'enrichissement sans cause auquel aboutirait l'absence de versement à son profit de la fraction sollicitée de son traitement et ses indemnités doit également être écarté en tant qu'il est inopérant ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Briand n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. Briand sollicite le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. Briand est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... Briand et au Garde des Sceaux, ministre de la Justice.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2017, où siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Mony, premier conseiller,

- Mme Massiou, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juillet 2017.

Le rapporteur,

B. MASSIOULe président,

H. LENOIR

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au Garde des Sceaux, ministre de la Justice en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT00966


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT00966
Date de la décision : 25/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: Mme Barbara MASSIOU
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-07-25;16nt00966 ?
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