Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SAS Danish Crown France a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler dix-sept titres de recettes émis le 26 avril 2011 à son encontre par l'établissement national des produits de l'agriculture et de la Mer (France AgriMer) pour un montant global de 526 909,88 euros, incluant le reversement de restitutions à l'exportation à hauteur de 337 597,93 euros, des sanctions pécuniaires à hauteur de 168 799,06 euros et des majorations de 10% à hauteur de 20 512,89 euros.
Par un jugement n° 1103812 du 7 février 2013, le tribunal administratif d'Orléans a fait droit à sa demande et déchargé la société de l'obligation de payer les sommes en cause.
Par un arrêt n° 13NT00996 du 18 septembre 2014, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel que France AgriMer a formé contre ce jugement.
Par une décision n° 385935 du 17 mars 2016, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt du 18 septembre 2014 et a renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Nantes.
Procédure devant la cour :
Avant cassation
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 avril 2013 et le 26 août 2014, France AgriMer, représenté par Me Alibert, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 7 février 2013 ;
2°) de rejeter la demande présentée par la SAS Danish Crown France devant le tribunal administratif d'Orléans ;
3°) de mettre à la charge de la SAS Danish Crown France la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est intervenu au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il ne vise et n'analyse que de manière imparfaite les mémoires produits et a annulé, sans en avoir au préalable informé les parties, certains titres de recettes sur le fondement des dispositions du paragraphe 4 de l'article 52 du règlement (CE) n° 800/1999 qui n'ont jamais été invoquées par la société Danish Crown France ;
- s'agissant des titres de recettes n° 2011000046 à 2011000051, rien ne permettait au juge de première instance d'estimer que la première information de la société Danish Crown France n'avait pas eu lieu dans le délai de 4 ans suivant la notification des décisions définitives d'octroi des restitutions à l'exportation, dès lors que plusieurs procès-verbaux lui avaient été transmis entre les mois de juin 2003 et décembre 2005 ;
- s'agissant des titres de recettes n° 2011000052 à 2011000062, seule la prescription résultant des dispositions transitoires de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 était applicable et il avait donc jusqu'au 19 juin 2013 pour poursuivre le recouvrement de sa créance ; ce délai n'est en rien disproportionné et le fait d'exclure l'application de cette loi serait source d'insécurité juridique pour les organismes de contrôle ;
- le caractère contradictoire de la procédure a été suffisamment assuré ;
- il ne s'est pas senti lié par l'avis de la direction générale des douanes ;
- il appartenait à la société de s'assurer qu'elle disposait d'éléments alternatifs susceptibles d'établir la mise sur le marché de la viande bovine exportée ;
- la demande de la société ne pouvait prospérer pour les autres motifs exposés dans ses écritures de première instance, auxquelles il se réfère expressément.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2013, la SAS Danish Crown France conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de France AgriMer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- s'agissant des titres de recettes n° 2011000046 à 2011000051, France AgriMer a pu produire une note en délibéré lui permettant de répondre au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 52 du règlement n° 800/99 de la Commission du 15 avril 1999 ;
- France AgriMer n'établit pas en ce qui concerne ces titres de recettes qu'elle aurait été informée de l'existence de l'irrégularité litigieuse par plusieurs procès-verbaux antérieurs à 2005 ;
- pour les autres titres de recettes concernant des exportations réalisées entre les mois de février et octobre 2000, France AgriMer n'établit pas que des procès-verbaux auraient été notifiés avant le 12 décembre 2005 ; la prescription de 4 ans prévue par le paragraphe 1 de l'article 3 du règlement n° 2988/95 était acquise à cette date ; à titre subsidiaire, à supposer que la prescription ait été interrompue en temps utile, les poursuites de France AgriMer étaient enfermées dans le délai butoir de 8 ans conformément au paragraphe 1 de l'article 3 du règlement n° 2988/95 ; l'établissement devait donc imposer une sanction dans le délai de 8 ans après la commission des irrégularités, alors qu'elle ne l'a été qu'en 2011 ; c'est à bon droit que le tribunal a jugé que seul le délai quadriennal prévu par l'article 3 du règlement n° 2988/95 s'appliquait, dès lors qu'en 2004 la réforme de la prescription en matière civile n'avait pas été adoptée et que la règle nationale de la prescription trentenaire alors en vigueur était contraire au droit communautaire ; elle a attendu 11 ans pour être fixée sur les suites réservées à cette affaire, ce qui constitue un délai anormal pour une société commerciale ; elle n'a pu retrouver toutes les preuves que France AgriMer exigeait dans la mesure où les destinataires et transporteurs avaient disparus ;
- la prétendue irrégularité alléguée serait nécessairement réputée intervenue soit au moment du dépôt de chaque déclaration d'exportation soit au plus tard lors du dédouanement intervenu en Russie dans des conditions que France AgriMer qualifie d'irrégulières ; le dépôt d'une preuve d'arrivée à destination regardée comme irrégulière ne saurait en soi caractériser l'irrégularité et la date du dépôt ne saurait avoir une quelconque incidence sur le point de départ du délai ; il en va de même concernant l'expiration d'un délai maximum pour présenter la preuve d'arrivée à destination dès lors que l'Ofival n'avait soulevé aucune objection à l'époque à l'encontre des preuves qui avaient été présentées sans tarder ;
- l'office de l'élevage n'a notifié aucune décision de suspension de la procédure administrative dans l'attente de la fin de la procédure pénale engagée par la douane en décembre 2008 contrairement aux exigences du paragraphe 1 du règlement n° 2988/95 ;
- à titre subsidiaire, la procédure n'a pas été menée de manière contradictoire dès lors qu'elle n'a pas eu connaissance notamment des échanges entre la douane et France AgriMer ;
- France AgriMer n'a pas exercé sa compétence en tenant pour conforme un avis de la douane qu'il n'était pas tenu de solliciter et qui avait terminé son enquête depuis 2005 ; la rédaction des titres de recettes litigieux montre que France AgriMer s'est purement et simplement plié à l'avis de la douane ;
- les réponses des autorités russes ne suffisaient pas à invalider ses déclarations d'importation ; les preuves alternatives qu'elle a fournies étaient expressément admises par la doctrine administrative et ne pouvaient être rejetées sur la seule base d'un avis de la douane ; France AgriMer a exigé que deux preuves alternatives soient fournies pour valider chaque dossier, ce qui constitue une exigence impossible dès lors que ces preuves n'étaient pas réclamées en 2000, ni même en 2008 ; enfin, les preuves alternatives produites démontrent l'arrivée à destination des marchandises.
Après cassation
Par un mémoire, enregistré le 21 avril 2016, auquel est joint la note en délibéré enregistrée le 8 septembre 2014, et un mémoire complémentaire enregistré le 5 janvier 2017, la société Danish Crown France conclut à nouveau au rejet de la requête et demande désormais que la somme de 10 000 euros soit mise à la charge de France AgriMer sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- s'agissant des restitutions payées en avance, le point de départ du délai de prescription doit être fixé au 20 novembre 2001, de sorte que le délai de 4 ans prévu par l'article 3 du règlement n° 2988/95 était expiré le 12 décembre 2005, date du procès-verbal d'infraction dont le Conseil d'Etat a estimé qu'il interrompait la prescription et en tout état de cause le délai butoir de 8 ans était expiré au moment où les titres exécutoires ont été adoptés, en avril 2011 ;
- s'agissant des restitutions n'ayant pas fait l'objet d'avances, la prescription du paragraphe 4 de l'article 52 du règlement n° 800/1999 a commencé à courir à compter du paiement définitif des restitutions, soit entre le 28 août 2000 et le 29 juin 2011, de sorte que le délai était expiré le 12 décembre 2005 ;
- la procédure n'a pas été conduite de manière contradictoire ;
France AgriMer n'a pas exercé sa compétence et s'est senti lié par l'avis de la Douane, qu'il n'était pas tenu de solliciter ;
- la créance alléguée par France AgriMer est inexistante.
Par un mémoire, enregistré le 2 janvier 2017, France Agrimer, conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens.
Il soutient que :
- les créances n'étaient pas prescrites le 29 août 2008, lorsqu'elle a informé la société de la demande de reversement envisagé ;
- la procédure suivie était parfaitement régulière ;
- il ne s'est pas senti lié par l'avis des douanes ;
- les preuves fournies n'étaient pas probantes de sorte que sa créance est parfaitement fondée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (CEE, Euratom) n° 2988/95 du Conseil du 18 décembre 1995 relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes ;
- le règlement (CE) n° 800/1999 de la Commission du 15 avril 1999 portant modalités communes d'application du régime des restitutions à l'exportation pour les produits agricoles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rimeu,
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,
- et les observations de Me Alibert, avocat de France Agrimer et celles de Me Le Roy, avocat de la SAS Danish Crown France.
1. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du règlement n° 2988/95 du 18 décembre 1995 : " 1. Aux fins de la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, est adoptée une réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit communautaire. / 2. Est constitutive d'une irrégularité toute violation d'une disposition du droit communautaire résultant d'un acte ou d'une omission d'un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une dépense indue " ; qu'aux termes de l'article 3 du même règlement : " 1. Le délai de prescription des poursuites est de quatre ans à partir de la réalisation de l'irrégularité visée à l'article 1er paragraphe 1. Toutefois, les réglementations sectorielles peuvent prévoir un délai inférieur qui ne saurait aller en deçà de trois ans. / (...). / La prescription des poursuites est interrompue par tout acte, porté à la connaissance de la personne en cause, émanant de l'autorité compétente et visant à l'instruction ou à la poursuite de l'irrégularité. Le délai de prescription court à nouveau à partir de chaque acte interruptif. Toutefois, la prescription est acquise au plus tard le jour où un délai égal au double du délai de prescription arrive à expiration sans que l'autorité compétente ait prononcé une sanction, sauf dans les cas où la procédure administrative a été suspendue conformément à l'article 6 paragraphe 1. (...) " ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du règlement n° 800/1999 du 15 avril 1999 : " Le présent règlement établit (...) les modalités communes d'application du régime des restitutions à l'exportation, ci-après dénommées " restitutions ", prévu par : / (...) - l'article 13 du règlement (CEE) n° 805/68 du Conseil (viande bovine) (...) " ; que l'article 24, paragraphe 1, du même règlement prévoit que, sur demande de l'exportateur, les Etats membres avancent tout ou partie du montant de la restitution, à condition que soit constituée une garantie dont le montant est égal au montant de l'avance, majoré de 10 % ; que son article 25, paragraphe 1, prévoit que lorsque le montant avancé est supérieur au montant effectivement dû, l'autorité compétente demande à l'exportateur le remboursement de la différence, augmentée de 10 % ; qu'aux termes de son article 51, paragraphe 1 : " Lorsqu'il est constaté que, en vue de l'octroi d'une restitution à l'exportation, un exportateur a demandé une restitution supérieure à la restitution applicable, la restitution due pour l'exportation en question est la restitution applicable à l'exportation effectivement réalisée, diminuée d'un montant correspondant : / a) à la moitié de la différence entre la restitution demandée et la restitution applicable à l'exportation effectivement réalisée ; / b) au double de la différence entre la restitution demandée et la restitution applicable si l'exportateur a fourni intentionnellement des données fausses " ; que son article 52, paragraphe 1, prévoit que, le bénéficiaire de la restitution est tenu de rembourser les montants indûment perçus, y compris toute sanction applicable conformément à l'article 51, paragraphe 1, augmentés d'intérêts ; qu'aux termes du paragraphe 4 de l'article 52 : " L'obligation de remboursement visée au paragraphe 1 ne s'applique pas : / (...) b) si le délai qui s'est écoulé entre le jour de la notification au bénéficiaire de la décision définitive sur l'octroi de la restitution et celui de la première information du bénéficiaire par une autorité nationale ou communautaire concernant la nature indue du paiement concerné est supérieur à quatre ans. Cette disposition ne s'applique que si le bénéficiaire a agi de bonne foi. / (...) Les dispositions du présent paragraphe ne s'appliquent pas aux avances de restitutions (...) " ;
3. Considérant que la société Ess-Food a réalisé, entre le 4 janvier et le 10 novembre 2000, des exportations de viande bovine à destination de la Fédération de Russie et a bénéficié, à ce titre, de restitutions à l'exportation en application du règlement susvisé n° 800/1999, dont certaines lui ont été versées sous forme d'avances ; qu'un contrôle de l'administration des douanes, réalisé au cours des années 2003, 2004 et 2005, ayant conclu à l'invalidité de certaines preuves d'arrivée à destination des denrées exportées, l'établissement public national des produits de l'agriculture et de la mer (France AgriMer) a notifié à la société Ess-Food, par un courrier du 30 août 2011, dix-sept titres de recettes émis le 26 avril 2011 pour un montant global de 526 909,88 euros, par lesquels il lui a demandé le remboursement du montant des restitutions indument payées ou avancées, augmenté de la sanction prévue par les dispositions de l'article 51, paragraphe 1, sous a) du règlement n° 800/1999 et, pour les restitutions ayant fait l'objet d'avances, de la majoration de 10 % prévue à l'article 25, paragraphe 1 du même règlement ; que par un jugement du 7 février 2013, le tribunal administratif d'Orléans a annulé ces dix-sept titres de recettes et déchargé la SAS Danish Crown France, laquelle vient aux droits de la société Ess-Food, de son obligation de payer les sommes mises à sa charge par ces titres, au motif que les créances correspondantes étaient prescrites ; que l'appel formé contre ce jugement par France AgriMer a été rejeté par un arrêt de la présente cour du 18 septembre 2014 ; que par une décision du 17 mars 2016, le Conseil d'Etat a cassé cet arrêt pour erreur de droit et a renvoyé l'affaire à la cour ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
4. Considérant, d'une part, que lorsqu'une des parties présente une note en délibéré, il appartient au juge, dans tous les cas, de prendre connaissance de cette note avant de rendre sa décision, et de la viser sans l'analyser ; qu'il ressort de la minute du jugement attaqué que la demande présentée le 26 octobre 2011 par la SAS Danish Crown France, le mémoire en défense de France AgriMer reçu le 18 avril 2012 ainsi que le mémoire en réplique de la société parvenu au greffe du tribunal administratif le 14 juin 2012 et communiqué à France AgriMer le 19 juin 2012 ont été visés et analysés par le tribunal administratif ; que si la note en délibéré présentée le 29 janvier 2013 par France AgriMer a été seulement visée sans être analysée, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle contenait l'exposé d'une circonstance de fait dont cet établissement public n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pouvait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, ou d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devait relever d'office ; que, par suite, France AgriMer n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait intervenu au terme d'une procédure irrégulière pour ce motif ;
5. Considérant en revanche, d'autre part, que le moyen tiré de ce que la créance de l'administration est prescrite n'est pas d'ordre public ; que si un requérant invoque, au soutien de sa demande, un régime de prescription qui n'est pas applicable, il n'appartient pas au juge de rechercher, d'office, si une autre règle de prescription, n'ayant pas été invoquée par le débiteur, est de nature à faire obstacle au recouvrement de la créance de l'administration et, le cas échéant, de faire application de cette autre règle de prescription ;
6. Considérant qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction que, pour ce qui concerne les titres de recettes nos 2011000046 à 2011000051 relatifs à des restitutions à l'exportation n'ayant pas donné lieu au versement d'avances, le tribunal administratif d'Orléans a fait application de la règle de prescription prévue à l'article 52 du règlement n° 800/1999 alors que la société Danish Crown France avait uniquement invoqué devant lui le bénéfice des dispositions de l'article 3 du règlement susvisé n° 2988/1995 ; qu'en statuant ainsi, sur le fondement d'un régime de prescription non invoqué par le débiteur, le tribunal administratif d'Orléans a méconnu son office ; qu'il suit de là que le jugement attaqué du 7 février 2013, en tant qu'il se prononce sur ces titres de recettes nos 2011000046 à 2011000051, est entaché d'irrégularité et doit, dans cette mesure, être annulé ;
7. Considérant qu'il y a lieu pour la cour administrative d'appel de se prononcer immédiatement sur les conclusions visant les titres de recettes nos 2011000046 à 2011000051 par voie d'évocation et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus des conclusions de la requête ;
Sur le bien fondé des titres de recettes nos 2011000046 à 2011000051 relatifs à des restitutions à l'exportation n'ayant pas donné lieu au versement d'avances :
8. Considérant que la requérante soulève expressément en appel la prescription prévue par les dispositions précitées du paragraphe 4 de l'article 52 du règlement n° 800/1999 ; qu'il résulte de l'instruction que les restitutions en cause ont été versées à la société Ess-Food, pour les dernières d'entre elles le 29 juin 2001 ; que cette date, qui correspond à la date la plus tardive de notification au bénéficiaire des décisions définitives d'octroi des restitutions, doit être retenue comme point de départ du délai de prescription de quatre ans prévu par les dispositions précitées du règlement n° 800/1999 ; qu'il résulte de l'instruction que la première information de la société Ess-Food par une autorité nationale du caractère indu de ces restitutions n'a été réalisée que par le procès-verbal d'infraction du 12 décembre 2005, soit plus de quatre ans après le 29 juin 2001 ; que, par suite, la société Danish Crown France est fondée à soutenir que les créances mises à sa charge par les titres de recettes nos 2011000046 à 2011000051 relatifs à des restitutions à l'exportation n'ayant pas donné lieu au versement d'avances étaient prescrites ; qu'il suit de là qu'elle est fondée à demander l'annulation de ces titres de recettes ;
Sur le bien fondé du jugement en ce qui concerne les titres de recettes nos 2011000052 à 2011000062 relatifs à des avances de restitutions à l'exportation :
9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le point de départ du délai de prescription de quatre ans prévu par l'article 3 précité du règlement n° 2998/95 doit être fixé le jour de la réalisation de l'irrégularité, telle que définie par le premier paragraphe de l'article 1er du même règlement, soit lorsque la violation en cause du droit communautaire porte préjudice au budget de l'Union ; qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction que les restitutions ayant fait l'objet d'avances ont été définitivement régularisées, avec libération des garanties, pour les dernières d'entre elles le 20 novembre 2001 ; qu'à cette date, était déjà intervenue la violation du droit communautaire, reprochée à la société requérante, qui réside non pas dans le fait de n'avoir pas fourni le dossier exigé par l'article 16 du règlement n° 800/1999 mais dans la fourniture de pièces douteuses et non valides ; que par suite, le point de départ du délai de prescription doit être fixé, pour les dernières restitutions ayant fait l'objet d'avances, au 20 novembre 2011, date à laquelle, la violation du droit communautaire ayant causé un préjudice au budget de l'Union, l'irrégularité était constituée ; que les procès-verbaux établis par la direction générale des douanes les 19 juin 2003, 12 février 2004 et 21 avril 2004, qui portent sur les exportations réalisées à compter du 18 juin 2000, ne mentionnent pas, dans la liste des dossiers de restitution concernés, ceux qui font l'objet de demandes de reversement en vertu de la lettre du 29 août 2008 ; que par suite, ces procès-verbaux ne peuvent en tout état de cause être regardés comme de nature à interrompre le délai de prescription ; que si le procès-verbal établi le 12 décembre 2005 par les agents de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, qui relève les irrégularités commises par la société Ess-Food, doit être regardé comme un acte, pris par une autorité compétente, au sens de l'article 3 du règlement n° 2988/95, de nature à interrompre valablement la prescription des poursuites au titre de ces irrégularités, cet acte est en tout état de cause intervenu après l'expiration du délai de prescription de quatre ans, prévu à l'article 3 précité du règlement n° 2988/95 ; que, par suite, les créances mises à la charge de la société Danish Crown France par les titres de recettes nos 2011000052 à 2011000062 relatifs à des restitutions à l'exportation ayant donné lieu au versement d'avances étaient prescrites ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que France AgriMer n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 7 février 2013, le tribunal administratif d'Orléans a annulé les titres de recettes nos 2011000052 à 2011000062 et déchargé la société Danish Crown France du paiement des sommes mises à sa charge par ceux-ci ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de la société Danish Crown France, qui n'est pas la partie perdante, les sommes demandées par France AgriMer au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
12. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de France AgriMer la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Danish Crown France et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 7 février 2013, en tant qu'il statue sur les titres de recettes nos 2011000046 à 2011000051 et décharge la société Danish Crown France de son obligation de payer les sommes mises à sa charge par ces titres de recettes est annulé.
Article 2 : Les titres de recettes nos 2011000046 à 2011000051 émis le 26 avril 2011 par France AgriMer sont annulés et la société Danish Crown France est déchargée de son obligation de payer les sommes mises à sa charge par ces titres de recettes.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de France AgriMer est rejeté.
Article 4 : France AgriMer versera à la société Danish Crown France la somme de 1500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Danish Crown France et à France AgriMer.
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 janvier 2017 .
Le rapporteur,
S. RIMEULe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
M. A...
La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT00950