LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ;
Attendu qu'au sens de ce texte, un véhicule terrestre à moteur est impliqué dans un accident de la circulation dès lors qu'il a joué un rôle quelconque dans sa réalisation ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a perdu le contrôle de sa motocyclette alors qu'il dépassait un tracteur appartenant au conseil général du territoire de Belfort, qui procédait au fauchage du bas côté de la route ; qu'il a assigné le département du territoire de Belfort ainsi que son assureur la société SMACL assurances, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Belfort, pour obtenir la réparation de ses préjudices ;
Attendu que pour débouter M. Y... de sa demande d'indemnisation, l'arrêt retient que la victime doit démontrer que le véhicule avec lequel il n'y a eu aucun contact a eu un comportement perturbateur ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a ajouté une condition à la loi, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne la société SMACL assurances aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. Y...
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le véhicule appartenant au conseil général du Territoire de Belfort n'était pas impliqué au sens de l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985 et d'avoir débouté M. Y... de ses demandes ;
Aux motifs que le 31 août 2011 à 13 heures 10, M. Y... se rendait à son travail, au guidon d'une Kawasaki 1000, quand il a dépassé le véhicule qui le précédait, une Opel Corsa conduite par Sylvie C..., avant de dépasser ensuite un véhicule tracteur appartenant au conseil général du Territoire de Belfort, conduit par M. D..., circulant à vitesse réduite et procédant au fauchage du bas-côté ; qu'à hauteur de ce tracteur, le cyclomotoriste avait perdu le contrôle de son engin, avait été projeté à terre puis était retombé dans le fossé ; que compte tenu du choc subi, M. Y... n'avait gardé aucun souvenir des causes lui ayant fait perdre le contrôle de sa moto ; qu'il était établi que le cyclomotoriste n'avait, à aucun moment, heurté quelque véhicule que ce soit ; que la notion d'implication du véhicule était au coeur du débat ; qu'une présomption d'implication existait en cas de heurt du véhicule et que l'absence de contact n'excluait pas nécessairement l'implication ; qu'il incombait alors à la victime dans cette hypothèse de démontrer en quoi le véhicule litigieux était intervenu, à quelque titre que ce soit, dans la survenance de l'accident ; que dans ces conditions, la victime devait démontrer que le véhicule avec lequel il n'y avait eu aucun contact avait eu un comportement perturbateur ; qu'en l'espèce, le tracteur du conseil général du Territoire de Belfort était positionné partiellement sur la chaussée de façon tout à fait normale, compte tenu de sa mission d'assurer le fauchage des bas-côtés ; qu'il circulait certes à vitesse très réduite, mais comme tout véhicule chargé d'effectuer de tels travaux d'entretien ; que tout usager de la route était amené à suivre ou à dépasser de tels engins dont la présence sur les voies de circulation n'avait rien d'exceptionnel ; que le raisonnement consistant à dire que, sans la présence du tracteur en action de fauchage au bord de la route, le dépassement n'aurait pas été nécessaire et l'accident ne serait pas survenu ne suffisait pas à établir l'implication au sens de la loi du 5 juillet 1985 ;
Alors 1°) qu'un véhicule terrestre à moteur peut être impliqué dans un accident alors même qu'il n'a pas perturbé la circulation ; qu'en ayant énoncé qu'il incombait à la victime de démontrer que le véhicule avec lequel il n'y avait eu aucun contact avait eu un comportement perturbateur, la cour d'appel a violé l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985 ;
Alors 2°) que le véhicule est impliqué dans un accident dès lors qu'il a joué un rôle quelconque dans sa survenance ou qu'il est intervenu à quelque titre que ce soit ; qu'en refusant de reconnaître l'implication du tracteur du conseil général, après avoir constaté qu'il était positionné partiellement sur la chaussée, qu'il circulait à vitesse très réduite et que l'exposant avait été amené à le dépasser et avait perdu le contrôle de son véhicule à hauteur de celui-ci, la cour d'appel a encore violé l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985.