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30/03/2017 | FRANCE | N°15PA03590

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 30 mars 2017, 15PA03590


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Mouvement Raëlien International a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 avril 2011 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a refusé d'autoriser l'exécution du legs consenti en sa faveur par Mme C...A....

Par un jugement n° 1207060 du 2 juillet 2015, le tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué et, d'autre part, mis à la charge de l'Etat la somme de 500 eur

os au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Mouvement Raëlien International a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 avril 2011 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a refusé d'autoriser l'exécution du legs consenti en sa faveur par Mme C...A....

Par un jugement n° 1207060 du 2 juillet 2015, le tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué et, d'autre part, mis à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par un recours enregistré le 11 septembre 2015, le ministre de l'intérieur demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207060 du 2 juillet 2015 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'association Mouvement Raëlien International devant le tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- la circonstance qu'une association revête le caractère d'un mouvement sectaire au sens de la loi du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales n'est pas le seul motif pour lequel l'administration peut refuser l'autorisation d'exécution d'un legs ;

- le décret du 13 juin 1966 ne précise pas les motifs pour lesquels le ministre de l'intérieur peut refuser l'autorisation d'un legs à une association étrangère ; dès lors la décision de refus d'autorisation peut être fondée sur un motif d'intérêt général tel que celui de l'atteinte portée à l'ordre public ;

- les activités du Mouvement Raëlien International portent atteinte à l'ordre public ; il y a lieu de substituer ce motif au premier motif retenu par l'administration qui était tiré de ce que ce mouvement exerce des activités relevant d'une secte.

Par des mémoires en défense enregistrés les 24 novembre 2016 et 24 février 2017, l'association Mouvement Raëlien International, représentée par Me B..., conclut dans le dernier état de ses écritures au rejet du recours et à ce que le versement de la somme de 7 500 euros soit mis à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

- le code civil ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 ;

- la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 ;

- le décret n° 66-388 du 13 juin 1966 ;

- le décret n° 2007-807 du 11 mai 2007 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Amat,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., pour l'association Mouvement Raëlien International.

1. Considérant que le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 2 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 15 avril 2011 par lequel l'administration a refusé d'autoriser l'exécution du legs consenti par Mme C...A...à l'association de droit suisse Mouvement Raëlien International ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 910 du code civil, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Les dispositions entre vifs ou par testament au profit d'établissements d'utilité publique n'ont leur effet qu'autant qu'elles sont autorisées par arrêté du représentant de l'Etat dans le département. / Toutefois, les dispositions entre vifs ou par testament au profit des fondations, des congrégations et des associations ayant la capacité à recevoir des libéralités, à l'exception des associations ou fondations dont les activités ou celles de leurs dirigeants sont visées à l'article 1er de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales, sont acceptées librement par celles-ci. / Si le représentant de l'Etat dans le département constate que l'organisme légataire ou donataire ne satisfait pas aux conditions légales exigées pour avoir la capacité juridique à recevoir des libéralités ou qu'il n'est pas apte à utiliser la libéralité conformément à son objet statutaire, il peut former opposition à la libéralité, dans des conditions précisées par décret, la privant ainsi d'effet " ; qu'aux termes de l'article 3 du décret du 13 juin 1966 relatif à la tutelle administrative des associations, fondations et congrégations, alors en vigueur : " Sous réserve des dispositions des articles 7 et 8 de la loi du 4 février 1901, l'acceptation des dons et legs faits à des Etats ou des établissements étrangers est autorisée par arrêté du ministre de l'intérieur après avis du ministre des affaires étrangères " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'à la date de l'arrêté attaqué, intervenu antérieurement à la modification de l'article 910 du code civil par l'article 21 de la loi du 17 mai 2011 dispensant les libéralités consenties notamment à des associations étrangères de toute autorisation préalable, que l'acceptation du legs en faveur du Mouvement Raëlien International consenti par Mme A...devait être autorisée par le ministre de l'intérieur ; que, pour refuser cette autorisation, le ministre de l'intérieur a fait valoir devant les premiers juges, d'une part, que les activités du Mouvement Raëlien International relèvent d'un mouvement sectaire au sens des dispositions de la loi du 12 juin 2001 et, d'autre part, que ces activités portent atteinte à l'ordre public ;

4. Considérant, d'une part, que, pas plus en appel qu'en première instance, le ministre de l'intérieur qui au demeurant se borne devant la cour à soutenir que les activités de l'association Mouvement Raëlien International portent atteinte à l'ordre public, n'établit que les activités de l'intimée sont constitutives de celles d'une secte au sens de la loi précitée du 12 juin 2001 ;

5. Considérant, d'autre part, que si, ainsi que l'a relevé le tribunal administratif de Paris dans le jugement attaqué, il ressort des pièces du dossier et notamment des énonciations d'arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, que les préceptes diffusés par le Mouvement Raëlien International visent à promouvoir le clonage et que les ouvrages du fondateur de ce mouvement sur la " méditation sensuelle " sont susceptibles de conduire des adeptes à des infractions sexuelles sur des mineurs, le ministre de l'intérieur n'établit pas, ni même n'allègue, que le Mouvement Raëlien International, qui est une association légalement reconnue en Suisse où elle a son siège social, aurait porté atteinte à l'ordre public en France, où elle n'est pas interdite, alors qu'il n'est pas contesté que Mme A..., qui résidait sur le territoire national, a dirigé ce mouvement pendant plus de trente ans sans être défavorablement connue par les services de police ; que, par suite, le ministre de l'intérieur, qui n'établit aucune menace à l'ordre public en France, ne peut en toute hypothèse soutenir que la décision de refus d'autorisation du legs serait légalement justifiée par la sauvegarde de l'ordre public ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 15 avril 2011 refusant d'autoriser l'exécution du legs consenti par Mme A... au profit de l'association Mouvement Raëlien International ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante en la présente instance, la somme de 500 euros au titre des frais exposés par l'association Mouvement Raëlien International pour se défendre ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à l'association Mouvement Raëlien International une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à l'association Mouvement Raëlien International.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Amat, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 30 mars 2017.

Le rapporteur,

N. AMATLa présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA03590


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03590
Date de la décision : 30/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Associations et fondations - Régime juridique des différentes associations - Associations reconnues d'utilité publique - Ressources - Origine - Dons et legs.

Dons et legs - Domaine et procédure de l'autorisation.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Nathalie AMAT
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : BONNEFOI

Origine de la décision
Date de l'import : 11/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-03-30;15pa03590 ?
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