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21/06/2017 | FRANCE | N°15NT02728

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 21 juin 2017, 15NT02728


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les décisions des 30 avril 2014, 5 septembre 2014 et la décision implicite de rejet née le 8 janvier 2015 par lesquelles la directrice générale de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire a rejeté ses demandes de licence en vue d'être autorisé à créer une officine de pharmacie sur la commune de La Pouëze.

Par un jugement n° 1404195, 1408271 et 1501287 du 2 juillet 2015, le tribunal administratif de Nantes, après avoir join

t les demandes de M.A..., a annulé les décisions du 30 avril 2014, du 5 septembre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les décisions des 30 avril 2014, 5 septembre 2014 et la décision implicite de rejet née le 8 janvier 2015 par lesquelles la directrice générale de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire a rejeté ses demandes de licence en vue d'être autorisé à créer une officine de pharmacie sur la commune de La Pouëze.

Par un jugement n° 1404195, 1408271 et 1501287 du 2 juillet 2015, le tribunal administratif de Nantes, après avoir joint les demandes de M.A..., a annulé les décisions du 30 avril 2014, du 5 septembre 2014 et du 27 novembre 2014.

Procédure devant la cour :

Par un recours et des mémoires, enregistrés le 1er septembre 2015, le 9 octobre 2015 et le 4 novembre 2015, le ministre des affaires sociales et de la santé demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 juillet 2015 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. A...devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

- le courrier du 27 novembre 2014 ne constitue pas une décision de la directrice de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire mais une réponse à la demande de M. A...de communication des motifs de rejet fondant l'arrêté du 5 septembre 2014 ; le jugement est entaché d'une erreur matérielle ;

- les premiers juges ont entaché leur jugement d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 5125-11 du code de la santé publique.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2015, M.A..., représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande en outre que le versement d'une somme de 2 400 euros soit mis à la charge du ministre des affaires sociales et de la santé au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par le ministre des affaires sociales et de la santé ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, l'article L. 5125-11 du code de la santé publique contrevient aux exigences européennes, matérialisées par l'article 49 du Traité de l'Union européenne, qui protège la liberté d'établissement, en conditionnant la création d'une officine de pharmacie, à l'existence d'un seuil minimal de population ; cet article méconnaît pour les mêmes motifs l'article 1er du premier protocole ; l'arrêté du 30 avril 2014 est illégal dès lors qu'il méconnait le principe d'impartialité et l'article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant M.A....

Une note en délibéré présentée par M. A...a été enregistrée le 6 juin 2017.

1. Considérant que le ministre des affaires sociales et de la santé relève appel du jugement du 2 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes, à la demande de M. C...A..., a annulé les décisions des 30 avril 2014, 5 septembre 2014 et 27 novembre 2014 par lesquelles la directrice générale de l'agence régionale de santé (ARS) des Pays de la Loire a rejeté sa demande de licence en vue d'être autorisé à créer une officine de pharmacie sur la commune de La Pouëze ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'en application de l'article L. 5125-4 du code de la santé publique, toute création d'une officine de pharmacie est soumise à l'octroi d'une licence délivrée par le directeur général de l'agence régionale de santé ; qu'aux termes de l'article L. 5125-11 du code de la santé publique, dans sa version applicable à la date des arrêtés en litige : " L'ouverture d'une officine dans une commune qui en est dépourvue peut être autorisée par voie de transfert lorsque le nombre d'habitants recensés dans la commune est au moins égal à 2 500. / L'ouverture d'une nouvelle officine dans une commune de plus de 2 500 habitants où au moins une licence a déjà été accordée peut être autorisée par voie de transfert à raison d'une autorisation par tranche entière supplémentaire de 4 500 habitants recensés dans la commune. / Lorsque la dernière officine présente dans une commune de moins de 2 500 habitants a cessé définitivement son activité et qu'elle desservait jusqu'alors une population au moins égale à 2 500 habitants, une nouvelle licence peut être délivrée pour l'installation d'une officine par voie de transfert dans cette commune. / Dans les communes qui sont dépourvues d'officine (...) l'ouverture d'une officine peut être autorisée par voie de création si les conditions prévues au premier, deuxième ou troisième alinéa sont remplies depuis au moins deux ans à compter de la publication d'un recensement mentionné à l'article L. 5125-10 et si aucune décision autorisant cette ouverture par voie de transfert ou regroupement n'a été prise dans ce délai. " ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsqu'il est saisi d'une demande de licence pour la création d'une officine dans une commune de moins de 2 500 habitants qui en est dépourvue à la date de l'arrêté en litige, le directeur général de l'ARS est tenu de la refuser si les conditions de population ne sont pas réunies pendant les deux années qui suivent la publication du recensement de la population qui a suivi la cessation définitive d'activité de la dernière officine ou si un transfert ou un regroupement d'officine est intervenu pendant le même délai ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler les arrêtés du 30 avril 2014 et du 5 septembre 2014, le tribunal administratif de Nantes, au lieu d'examiner les conditions de délivrance de la licence à la date des arrêtés en litige, a estimé qu'en application des dispositions combinées des alinéas 3 et 4 de 1'article L. 5125-11 du code de la santé publique précité, il incombait à l'agence régionale de santé des Pays de la Loire de déterminer si l'officine de pharmacie exploitée antérieurement à La Pouëze desservait, à la date de sa cessation d'activité, soit le 31 décembre 2011, au moins 2 500 habitants, si cette condition était, à cette date, remplie depuis au moins deux ans à compter de la publication d'un recensement général ou complémentaire, et si aucune décision autorisant cette ouverture par voie de transfert ou regroupement n'avait été prise dans ce délai ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif et devant la cour ;

5. Considérant, en premier lieu, que M.A..., qui n'a invoqué aucun moyen de légalité externe devant les premiers juges, n'est pas recevable à soutenir pour la première fois en appel que l'arrêté du 30 avril 2014 serait entaché d'un vice de procédure au motif que l'avis rendu par la chambre syndicale des pharmaciens de Maine-et-Loire le 12 mars 2014 caractériserait un manquement au principe d'impartialité en raison des termes polémiques employés ; que cette décision n'émanant pas d'une juridiction ou d'un organe assimilé, le §1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut, en tout état de cause, être utilement invoqué ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant que le dernier recensement concernant la commune de La Pouëze, qui fait état d'une population municipale de 1 844 habitants, a été publié le 29 décembre 2012 ; que la commune de La Pouëze étant dépourvue d'officine depuis le 31 décembre 2011, la directrice de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire a pu, le 30 avril 2014 et le 5 septembre 2014, sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation, rejeter les demandes de licence déposées par M. A...en vue de l'ouverture d'une officine sur le territoire de la commune de La Pouëze ; que la circonstance surabondante que la précédente officine aurait desservi une population au moins égale à 2 500 habitants est, en conséquence, sans incidence sur la légalité des arrêtés du 30 avril 2014 et du 5 septembre 2014 ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'en ce qui concerne la décision implicite de rejet née le 8 janvier 2015, il ressort des pièces du dossier, et notamment des données fournies par la caisse primaire d'assurance maladie de Maine-et-Loire et la mutualité sociale agricole relatives au dernier semestre d'exploitation de l'officine exploitée antérieurement à La Pouëze, qui ont été produites en première instance, que 80% des patients desservis résidaient dans la commune de La Pouëze, les autres patients représentant une clientèle de passage résidant dans les communes d'Angers, de Brain-sur-Longuenée et de Saint-Clément de la Place ; que six communes situées à moins de 10 kilomètres de la Pouëze disposent d'une officine de sorte que le maillage pharmaceutique est dense dans la zone ; que c'est en raison de la diminution de son activité liée à la conjoncture économique locale que le précédent exploitant a cessé d'exercer ; que, dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date à laquelle le précédent exploitant a cessé son activité, l'officine desservait une population d'au moins 2 500 habitants ;

8. Considérant, en quatrième lieu, que les dispositions de l'article L. 5125-11 du code de la santé publique, si elles empêchent de façon temporaire la création de pharmacies dans les communes situées dans les zones rurales et dénombrant moins de 2 500 habitants, autorisent l'ouverture d'une pharmacie par la voie d'un transfert ou d'un regroupement ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de la liberté d'établissement au sens de l'article 49 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne doit être écarté ;

9. Considérant, en cinquième lieu, que les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne font pas obstacle à ce que le législateur adopte des dispositions encadrant les modalités d'exercice d'une profession ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les arrêtés et la décision en litige auraient méconnu l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne saurait être accueilli ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, que le ministre des affaires sociales et de la santé est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé les arrêtés du 30 avril 2014 et du 5 septembre 2014 et la décision implicite de rejet née le 8 janvier 2015 par lesquels la directrice générale de l'ARS des Pays de la Loire a rejeté les demandes présentées par M. A...d'octroi de la licence en vue d'être autorisé à créer une officine de pharmacie sur la commune de La Pouëze ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par M. A...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1404195, 1408271 et 1501287 du 2 juillet 2015 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. A...devant le tribunal administratif de Nantes et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des solidarités et de la santé et à M. C...A....

Une copie en sera transmise pour information au directeur général de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 juin 2017.

Le rapporteur,

M-P. Allio-RousseauLe président,

L. Lainé

Le greffier,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT02728


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02728
Date de la décision : 21/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : PLATEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 12/09/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-06-21;15nt02728 ?
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