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02/02/2015 | FRANCE | N°14PA01075

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 02 février 2015, 14PA01075


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 mars 2014 et 12 janvier 2015, le Syndicat national des praticiens de la mutualité agricole (SNPMA), représenté par Me Clément, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2013 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, fixant la liste des organisations syndicales reconnues représentatives dans la convention collective des praticiens-conseils de la mutualité sociale agricole, publié le 3 janvier 2014 ;

) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fo...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 mars 2014 et 12 janvier 2015, le Syndicat national des praticiens de la mutualité agricole (SNPMA), représenté par Me Clément, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2013 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, fixant la liste des organisations syndicales reconnues représentatives dans la convention collective des praticiens-conseils de la mutualité sociale agricole, publié le 3 janvier 2014 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le syndicat soutient que :

- le signataire de l'arrêté ne justifie pas d'une délégation régulière du ministre ;

- l'arrêté a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors que la mesure d'audience mentionnée au 3° de l'article L. 2122-5 du code du travail n'a pas été réalisée au niveau de la branche professionnelle des praticiens de la mutualité sociale agricole, dont l'existence se déduit de celle d'une convention collective ; le ministre a, en effet, réalisé une audience commune pour les deux branches " praticiens " et " agents de direction " qui ont chacune leur convention collective, tout en prenant un arrêté par branche ; en outre, le ministre a fait une confusion en évoquant dans l'arrêté attaqué les " praticiens conseils " alors que la convention collective concerne les " praticiens " c'est-à-dire les praticiens conseils et les médecins du travail ; dès lors, il n'a pas comptabilisé les médecins du travail ;

- il existe un conflit d'intérêt qui porte atteinte à la validité de la procédure de vérification de la mesure d'audience dès lors que le Haut Conseil du dialogue social est composé des cinq confédérations syndicales qui ont été déclarées représentatives par le ministre ;

- il n'est pas produit de procès-verbaux du Haut Conseil du dialogue social attestant des conditions dans lesquelles la validation de la mesure d'audience a été réalisée ;

- il est possible pour le ministre, en application des articles L. 2324-11 et R. 2324-3 du code du travail, de modifier la répartition du personnel entre les collèges pour les élections professionnelles ;

- l'évaluation de la représentativité est erronée dès lors que le ministre s'est fondé sur une mesure d'audience elle-même erronée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2014, la Fédération générale agroalimentaire FGA-CFDT, représentée par la SCP Masse-Dessen, G. Thouvenin et O. Coudray, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge du SNPMA sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La fédération soutient que :

- la contestation du nombre des collèges électoraux et de la détermination d'une branche professionnelle n'est pas détachable des opérations électorales et relève de la compétence du juge judiciaire ; le SNPMA n'est donc pas recevable à contester devant le juge administratif le principe de l'inclusion des praticiens de la MSA au sein du 2ème collège électoral, également composé des agents de direction ;

- en tout état de cause, les moyens soulevés par le SNPMA ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 août 2014, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que les moyens soulevés par le SNPMA ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

- la loi n° 2010-1215 du 15 octobre 2010 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le décret du 25 août 2006 ;

- le décret n° 2008-1163 du 13 novembre 2008 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marino, président assesseur,

- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,

- les observations de Me Clément, avocat du Syndicat national des praticiens de la mutualité agricole ;

- les observations de M.A..., représentant le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

- et les observations de Me Crusoé, avocat de la Fédération générale agroalimentaire FGA-CFDT.

Une note en délibéré, enregistrée le 19 janvier 2015, a été présentée pour le Syndicat national des praticiens de la mutualité agricole.

1. Considérant que le Syndicat national des praticiens de la mutualité agricole (SNPMA) demande l'annulation de l'arrêté du 24 décembre 2013 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, fixant la liste des organisations syndicales reconnues représentatives dans la convention collective des praticiens-conseils de la mutualité sociale agricole ;

2. Considérant en premier lieu, qu'il résulte des dispositions du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement que M. B...C..., nommé directeur général du travail par un décret publié au Journal officiel de la République française le 26 août 2006, avait du fait de cette nomination qualité pour signer, au nom du ministre, l'arrêté attaqué ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 2122-5 du code du travail : " Dans les branches professionnelles, sont représentatives les organisations syndicales qui : 1° Satisfont aux critères de l'article L. 2121-1 ; / 2° Disposent d'une implantation territoriale équilibrée au sein de la branche ; / 3° Ont recueilli au moins 8 % des suffrages exprimés résultant de l'addition au niveau de la branche, d'une part, des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires aux comités d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, et, d'autre part, des suffrages exprimés au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés dans les conditions prévues aux articles L. 2122-10-1 et suivants. La mesure de l'audience s'effectue tous les quatre ans " ; que, s'agissant des comités d'entreprise, l'article L. 2423-11 du même code dispose que : " Les représentants du personnel sont élus sur des listes établies par les organisations syndicales pour chaque catégorie de personnel : - d'une part, par le collège des ouvriers et employés ; / d'autre part, par le collège des ingénieurs, chefs de service, techniciens, agents de maîtrise et assimilés. / Dans les entreprises d'au moins cinq cent un salariés, les ingénieurs, les chefs de service et cadres administratifs, commerciaux ou techniques assimilés ont au moins un délégué titulaire au sein du second collège, élu dans les mêmes conditions./ En outre, dans les entreprises, quel que soit leur effectif, dont le nombre des ingénieurs, chefs de service et cadres administratifs, commerciaux ou techniques assimilés sur le plan de la classification est au moins égal à vingt-cinq au moment de la constitution ou du renouvellement du comité, ces catégories constituent un troisième collège " et l'article L. 2324-12 que : " Le nombre et la composition des collèges électoraux ne peuvent être modifiés par une convention, un accord collectif de travail, étendu ou non, ou un accord préélectoral que lorsque la convention ou l'accord est signé par toutes les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise. / L'accord conclu ne fait pas obstacle à la création du troisième collège dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l'article L. 2324-11 (...) " ;

4. Considérant que le SNPMA fait valoir que l'arrêté a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors que la mesure d'audience mentionnée au 3° de l'article L. 2122-5 du code du travail n'a pas été réalisée au niveau de la branche professionnelle des praticiens de la mutualité sociale agricole puisqu'il ressort des tableaux de mesure d'audience que le nombre de votants et de suffrages valablement exprimés dans la branche des praticiens est identique à celui de la branche des agents de direction, alors que chacune de ces catégories socio professionnelles dispose d'une convention collective et que le ministre a pris un arrêté fixant la liste des organisations syndicales représentatives dans chacune de ces branches ;

5. Considérant, cependant, qu'il résulte des dispositions précitées que, sauf convention ou accord collectif contraires signés par les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise, les représentants du personnel aux comités d'entreprise sont élus par deux ou éventuellement trois collèges ; qu'aucune convention ou accord dérogeant à la composition des collèges telle que mentionnée à l'article L. 2324-11 du code du travail n'a été signé au sein de la mutualité sociale agricole ; que les dispositions de l'article L. 2324-12 s'opposent à ce que le ministre du travail prenne l'initiative de la création d'un collège électoral différent de ceux prévus par l'article L. 2324-11 ; que, dans ces conditions, en retenant les résultats exprimés par le collège cadre au premier tour des élections des représentants titulaires des comités d'entreprise de la mutualité sociale agricole pour apprécier la mesure d'audience des praticiens, le ministre n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 2122-5 du code précité ; que, par suite, le moyen susmentionné, lequel n'a pas trait à la régularité des opérations électorales et dont il appartient en conséquence, et contrairement à ce que soutient la Fédération générale agroalimentaire FGA-CFDT, au juge administratif de connaître, doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article D. 723-147 du code rural et de la pêche maritime, les conditions d'emploi des praticiens-conseils et des médecins-conseils chefs de service de la mutualité sociale agricole sont fixées, par une même convention collective nationale, dénommée " convention collective des praticiens-conseils de la mutualité sociale agricole " ; que, par suite, la circonstance que l'arrêté fasse référence à l'intitulé de cette convention ne suffit pas à démontrer que les suffrages exprimés par les médecins conseils chef de service n'auraient pas été pris en compte pour établir la mesure d'audience dans la catégorie des praticiens de la mutualité sociale agricole ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article R. 2122-1 du code précité : " Le Haut Conseil du dialogue social mentionné à l'article L. 2122-11 du code du travail comprend : / 1° Cinq représentants des organisations syndicales de salariés nationales et interprofessionnelles et, en nombre égal, des représentants des organisations représentatives d'employeurs au niveau national désignés par ces organisations. Des représentants suppléants en nombre égal à celui des titulaires sont désignés dans les mêmes conditions. Ils ne siègent qu'en l'absence des titulaires ; / 2° Trois représentants du ministre chargé du travail ; / 3° Trois personnes qualifiées proposées par le ministre chargé du travail. " ;

8. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal établi à l'issue de la séance du 30 août 2013 que le Haut Conseil du dialogue social était régulièrement composé lorsqu'il a rendu son avis préalable sur l'arrêté attaqué ; d'autre part, qu'il ne ressort d'aucune disposition du code du travail que le sens de la position de chacun des membres du Haut Conseil au dialogue social doive être précisé ;

9. Considérant, en cinquième lieu, qu'en se bornant à soutenir qu'il existerait un conflit d'intérêt portant atteinte à la validité de la procédure de vérification de la mesure d'audience réalisée par le Haut Conseil du dialogue social dès lors que les cinq organisations syndicales déclarées représentatives par l'arrêté attaqué sont également membres de cette instance, le SNPMA qui ne conteste pas la régularité de cette composition au regard des dispositions de l'article R. 2122-1 du code du travail, ni n'invoque aucune disposition ou principe qui aurait ainsi été méconnu, n'assortit pas son moyen des précisions permettant à la Cour d'en apprécier le bien fondé ;

10. Considérant, en dernier lieu, que si le SNPMA soutient que le ministre a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il a obtenu la totalité des sièges des représentants titulaires à la suite des élections des membres de la commission disciplinaire nationale des praticiens conseils des organismes de mutualité sociale agricole qui se sont déroulées le 14 février 2013, il ressort des pièces du dossier que le syndicat requérant a recueilli 4,79% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires aux comités d'entreprise ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait dû figurer au nombre des organisations syndicales représentatives dans la convention collective des praticiens-conseils de la mutualité sociale agricole ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête du Syndicat national des praticiens de la mutualité agricole doit être rejetée ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la fédération générale agroalimentaire FGA-CFDT présentées sur le même fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du Syndicat national des praticiens de la mutualité agricole est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la Fédération générale agroalimentaire FGA-CFDT présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Syndicat national des praticiens de la mutualité agricole, au ministre du travail, de l'emploi, de formation professionnelle et du dialogue social, à la Fédération générale agroalimentaire FGA-CFDT, à la Confédération générale de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC), à la Confédération générale du travail (CGT), à la Confédération générale du travail - Force ouvrière (CGT-FO) et à la Confédération française des travailleurs Chrétiens (CFTC).

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Marino, président assesseur,

- Mme Dhiver, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 février 2015.

Le rapporteur,

Y. MARINOLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

L. BARRIERE

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de formation professionnelle et du dialogue en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA01075


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA01075
Date de la décision : 02/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-05-01 Travail et emploi. Syndicats. Représentativité.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Yves MARINO
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : SELARL CLEMENT DELPIANO

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-02-02;14pa01075 ?
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