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21/01/2016 | FRANCE | N°14NT02721

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 21 janvier 2016, 14NT02721


Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler le titre exécutoire n° 301 émis à son encontre le 26 octobre 2012 par le maire de Montreuil-sur-Ille pour le recouvrement de la somme de 33 890,52 euros résultant de l'illégalité de sa nomination au grade d'attaché territorial principal.
Par un jugement n° 1205229 du 21 août 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 21

octobre 2014 et les 23 octobre et 24 décembre 2015, Mme A...D... , représentée par...

Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler le titre exécutoire n° 301 émis à son encontre le 26 octobre 2012 par le maire de Montreuil-sur-Ille pour le recouvrement de la somme de 33 890,52 euros résultant de l'illégalité de sa nomination au grade d'attaché territorial principal.
Par un jugement n° 1205229 du 21 août 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 21 octobre 2014 et les 23 octobre et 24 décembre 2015, Mme A...D... , représentée par Me Collet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 21 août 2014 ;
2°) d'annuler le titre exécutoire litigieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Montreuil-sur-Ille le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.Elle soutient que :- le titre exécutoire, qui ne mentionne ni le nom, ni le prénom du maire, est contraire aux dispositions des articles L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales et 4 de la loi du 12 avril 2000 ; - les bases de la liquidation de ce titre exécutoire sont insuffisantes dès lors que cette décision ne fait pas apparaître clairement les modalités de calcul ayant permis de déterminer la somme litigieuse ;- l'arrêté du 13 décembre 2010 prononçant sa nomination en qualité d'attaché principal ne constitue pas une décision inexistante et la commune ne pouvait lui demander le reversement des sommes indues au-delà d'un délai de quatre mois ;- le jugement du tribunal correctionnel de Rennes du 3 novembre 2015 confirme son analyse.
Par un mémoire enregistré le 18 février 2015, le ministre des finances et des comptes publics indique à la cour qu'il n'est pas concerné par ce litige qui a pour objet de contester la créance mise à la charge de Mme D... par l'ordonnateur ainsi que la forme du titre exécutoire.Par des mémoires, enregistrés les 31 juillet et 28 décembre 2015, la commune de Montreuil-sur-Ille, représentée par Me Quesnel, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.Vu les autres pièces du dossier.
Vu :- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ; - le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 ;- le code général des collectivités territoriales ;- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :- le rapport de Mme Gélard,- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public ;- les observations de MeB..., substituant Me Collet, avocat de Mme D... ;- et les observations de MeF..., substituant Me Quesnel, avocat de la commune de Montreuil-sur-Ille.1. Considérant que, par arrêté du 23 juillet 1973 du maire de Montreuil-sur-Ille , prenant effet à compter du 30 juillet 1973, Mme D... a été nommée secrétaire de mairie stagiaire dans cette commune ; qu'elle a été titularisée dans ce grade à compter du 1er août 1974, puis reclassée dans le grade d'attaché de 2ème classe au 1er janvier 1988 avant d'être promue au grade d'attaché de 1ère classe au 1er janvier 1990 ; que, par arrêté du 23 janvier 1994, elle a été reclassée au 1er août 1993 dans le grade d'attaché territorial ; que, sur le fondement d'un arrêté du 13 décembre 2010 la nommant attaché territorial principal à compter du 1er janvier 2008, elle a perçu un salaire correspondant à son nouveau grade jusqu'au 1er mai 2012, date à laquelle elle a fait valoir ses droits à la retraite ; que, le 26 octobre 2012, à la suite d'un contrôle de la chambre régionale des comptes de Bretagne, le maire de Montreuil-sur-Ille a émis à l'encontre de Mme D... un titre exécutoire n° 301 d'un montant de 33 890,52 euros en raison de l'illégalité de sa nomination au grade d'attaché territorial principal ; que Mme D... , qui a reçu la notification de cette décision le 21 novembre 2012, a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de ce titre exécutoire ; qu'elle relève appel du jugement du 21 août 2014 par lequel le tribunal a rejeté sa demande ; 2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " (...) En application de l'article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis ainsi que les voies et délais de recours. / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation (...) " ; qu'il est constant que le volet du titre exécutoire destiné au débiteur formant avis des sommes à payer qui a été adressé à Mme D... n'est pas signé et n'indique ni le nom, ni le prénom, ni la qualité de son auteur ; que toutefois, il résulte de l'instruction que le bordereau-journal de titres produit en première instance par le comptable public de la commune est signé par l'ordonnateur de la commune et comporte le cachet de la mairie ; qu'en outre, la lettre de notification du titre exécutoire litigieux datée du 16 novembre 2012, reçue par l'intéressée le 21 novembre suivant, est signée par M. D... E..., maire de la commune de Montreuil-sur-Ille ; que ce courrier est accompagné d'un tableau indiquant les modalités de calcul de la somme de 33 890,52 euros qui comporte les mêmes mentions ; qu'ainsi, il n'en résultait pour Mme D... , secrétaire de mairie depuis 1974, aucune ambigüité quant à l'identité du signataire de cette décision ; que, par suite, le moyen invoqué par l'intéressée tiré de ce que le titre exécutoire litigieux serait contraire aux dispositions précitées de L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ne peut qu'être écarté ; 3. Considérant, en deuxième lieu, qu'un état exécutoire doit indiquer les bases de liquidation de la dette, alors même qu'il est émis par une personne publique autre que l'Etat, pour lequel cette obligation était à la date du titre exécutoire litigieux expressément prévue par l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique alors en vigueur ; qu'en application de ce principe, le créancier ne peut mettre en recouvrement un prélèvement sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par référence à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge du débiteur ; qu'il est constant que le volet du titre exécutoire adressé à la requérante porte pour seule mention " remboursement trop perçu sur salaire par Mme D... " ; que, si ce titre ne se réfère expressément à aucun document, il résulte de l'instruction que la lettre du 16 novembre 2012, reçue le 21 novembre suivant, par laquelle ce titre a été notifié à l'intéressée précise clairement que sa promotion au grade d'attaché territorial principal est illégale dès lors que cet emploi n'a pas été créé et que la commune entend recouvrer les sommes perçues à tort ; que cette lettre précise en outre qu'un document annexé sous forme de fiche de paye reprend le calcul réalisé pour parvenir à la somme réclamée de 33 890,52 euros et indique que le montant brut global figurant sur ce document résulte de la différence entre ce qu'elle a perçu et ce qu'elle aurait dû percevoir depuis le 1er janvier 2008 ; que ce document, dont la requérante a ainsi eu connaissance, est parfaitement compréhensible et indique de façon suffisante les bases de liquidation de la créance détenue par la commune sur Mme D... ; que la requérante, compte tenu de sa formation et de son niveau de responsabilité et qui ne peut utilement se prévaloir des montants théoriques des primes versées aux attachés et attachés territoriaux, ne pouvait ignorer le montant des traitements et primes qu'elle avait effectivement perçus, selon l'administration, à tort ; qu'elle a ainsi été mise en mesure de connaître de façon précise les bases de liquidation de ce titre ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le titre exécutoire contesté serait insuffisamment motivé et dès lors entaché d'irrégularité doit être écarté ; 4. Considérant en troisième lieu, que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ; qu'aux termes de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 : " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive./ (...) / Les deux premiers alinéas ne s'appliquent pas aux paiements ayant pour fondement une décision créatrice de droits prise en application d'une disposition réglementaire ayant fait l'objet d'une annulation contentieuse ou une décision créatrice de droits irrégulière relative à une nomination dans un grade lorsque ces paiements font pour cette raison l'objet d'une procédure de recouvrement. " ;
5. Considérant que Mme D... a produit à l'appui de sa demande introductive d'instance devant le tribunal administratif de Rennes un exemplaire de l'arrêté du 13 décembre 2010 prononçant sa nomination au grade d'attaché principal à compter du 1er janvier 2008 ; que cet arrêté est revêtu du cachet de la mairie et de la signature du maire ; que le maire de la commune a contesté avoir personnellement signé un tel arrêté et a soutenu que Mme D... avait " elle-même créé son poste sans avoir bénéficié de décision de nomination dans son grade " ; qu'il a fait valoir que le conseil municipal n'avait pas créé un tel emploi d'attaché principal ;
6. Considérant qu'il n'est pas contesté que Mme D... , qui a exercé les fonctions de secrétaire de mairie de 1974 jusqu'à ce quelle fasse valoir ses droits à la retraite à compter du 1er mai 2012, disposait, en cette qualité, du cachet de la mairie ainsi que de la griffe du maire représentant sa signature ; que si l'intéressée soutient que d'autres personnes pouvaient également disposer de cette griffe ou y avoir accès, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elles auraient eu un quelconque intérêt à l'apposer sur l'acte litigieux ; que cet arrêté ne vise pas de délibération créant l'emploi d'attaché principal mais seulement " la délibération fixant les ratios promus-promouvables " sans d'ailleurs en indiquer la date ; qu'une délibération du 21 décembre 2007 ayant pour objet la création d'un emploi d'attaché principal à compter du 1er janvier 2008 et justifiant cette création par le fait que la secrétaire générale titulaire du poste d'attaché était plafonnée dans son avancement, a été produite devant le tribunal et porte la signature du maire et le cachet de la commune ; que toutefois, l'ordre du jour de cette séance du conseil municipal ne mentionne pas cette question ; qu'au surplus, l'extrait du registre des délibérations du conseil municipal précisant les décisions prises par l'assemblée délibérante sur chacun des points à l'ordre du jour et signé par l'ensemble des élus présents lors de cette séance ne contient aucune décision relative à la création de cet emploi ; que le centre de gestion de la fonction publique territoriale d'Ille-et-Vilaine a confirmé le 9 mai 2014 ne disposer d'aucune délibération relative à la création d'un emploi d'attaché principal dans cette commune ; qu'il n'est ainsi justifié d'aucune délibération qui aurait été régulièrement prise en ce sens par le conseil municipal de Montreuil-sur-Ille antérieurement à l'arrêté du 13 décembre 2010 ; que l'extrait de la délibération du 21 décembre 2007, qui doit être regardé comme comportant la griffe du maire et le cachet de la mairie dont la requérante avait également la disposition en 2007, constitue, dans les circonstances de l'espèce et ainsi que la commune l'a constamment soutenu, un acte juridiquement inexistant ; qu'il ne ressort pas davantage du dossier que l'arrêté du 13 décembre 2010, pris sur le fondement d'un tel acte, aurait été signé par le maire ; que cet arrêté, sur lequel ont été apposés la griffe du maire et le cachet de la mairie, constitue également un acte juridiquement inexistant ; que cet arrêté, établi de manière frauduleuse, n'a pu créer des droits au profit de la requérante ; que, dans ces conditions, le maire de Montreuil-sur-Ille a pu légalement émettre le titre exécutoire litigieux afin de procéder à la répétition des sommes indument perçues par Mme D... , sans que lui soit opposable le délai de droit commun de quatre mois mentionné au point 4 ou les dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, lesquels ne sont applicables qu'aux seuls actes créateurs de droit ; 7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que Mme D... , qui ne peut se prévaloir de l'autorité absolue de la chose jugée qui s'attacherait au jugement du tribunal correctionnel de Rennes du 3 novembre 2015 dès lors qu'il n'est pas définitif, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Montreuil-sur-Ille, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme D... de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme D... le versement à la commune de Montreuil-sur-Ille de la somme de 2 000 euros qu'elle demande au titre des mêmes frais ;
DÉCIDE :Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.Article 2 : Mme D... versera à la commune de Montreuil-sur-Ille la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et à la commune de Montreuil-sur-Ille.

Délibéré après l'audience du 5 janvier 2016, à laquelle siégeaient :- M. Bachelier, président de la cour,- Mme Gélard, premier conseiller,- M. Lemoine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 janvier 2016.Le rapporteur,V. GÉLARDLe président,G. BACHELIER Le greffier,M. C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''''''''3N° 14NT02721


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02721
Date de la décision : 21/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BACHELIER
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : AARPI VIA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-01-21;14nt02721 ?
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