Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2014, présentée pour Mme A...B..., demeurant au..., par Me de Baynast, avocat au barreau des Sables d'Olonne ; Mme B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1307164 du 12 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a liquidé à la somme de 10 300 euros l'astreinte précédemment prononcée par jugement du 16 janvier 2014 ; subsidiairement, de supprimer cette astreinte ; à défaut, de réduire son montant et de reporter son point de départ à la date de notification de l'arrêt de la cour statuant sur sa demande de sursis à exécution du jugement du 16 janvier 2014 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que :
- le tribunal a omis de motiver sa réponse au moyen tiré de l'incompétence du préfet de la Loire-Atlantique pour solliciter la liquidation de l'astreinte et omis de répondre au moyen tiré de ce que la demande de sursis à exécution du jugement du 16 janvier 2014 suspendait l'exécution de ce dernier ;
- le préfet n'avait pas compétence pour solliciter la liquidation d'une astreinte relative à l'exécution d'un jugement portant sur le respect d'une servitude bénéficiant à une dépendance du domaine public fluvial du département de la Loire-Atlantique ;
- le jugement du 16 janvier 2014 étant frappé d'appel, la cour administrative d'appel était seule compétente pour liquider l'astreinte ;
- en liquidant l'astreinte avant que la cour ait statué sur la demande de sursis à exécution du jugement du 16 janvier, le tribunal a privé d'effet utile cette demande et, par suite, a méconnu les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantissant les droits de la défense ;
- l'administration a engagé des poursuites dans le seul but de mettre en oeuvre une nouvelle servitude, commettant ainsi un détournement de procédure ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2015, présenté par la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, qui conclut au rejet de la requête ; elle soutient que :
- le jugement attaqué n'est pas entaché des irrégularités alléguées ;
- le tribunal administratif était compétent pour statuer sur la liquidation de l'astreinte, alors même que son jugement était frappé d'appel ;
- en sa qualité de partie à l'instance, le préfet de la Loire-Atlantique était recevable à présenter des conclusions tendant à la liquidation de l'astreinte ;
- malgré la demande de sursis à exécution, le jugement du 16 janvier 2014 demeure exécutoire aussi longtemps que la juridiction d'appel n'infirme pas la solution retenue ; dans les faits, la cour a rejeté la demande de sursis par arrêt du 24 juin 2014 ;
- le moyen tiré du détournement de procédure est inopérant ; en tout état de cause, le détournement allégué n'est pas établi, la servitude de marchepied étant effective de plein droit ;
Vu l'ordonnance du 13 avril 2015 fixant la clôture d'instruction au 27 avril 2015 à 12 heures, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mai 2015 :
- le rapport de M. François, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public ;
- et les observations de Me de Baynast, avocat de Mme B...;
1. Considérant que par jugement du 16 janvier 2014, le tribunal administratif de Nantes, saisi par le préfet de la Loire-Atlantique d'un procès-verbal de contravention de grande voirie dressé le 18 avril 2013 à l'encontre de MmeB..., a condamné la contrevenante au paiement d'une amende de 1 000 euros et prononcé à son encontre une astreinte si elle ne justifiait pas avoir, dans le mois suivant la notification du jugement, procédé à l'enlèvement de la clôture en bois implantée sur l'emprise de la servitude de marchepied grevant sa propriété en bordure de l'Erdre ; que l'intéressée n'ayant pas exécuté les obligations ainsi mises à sa charge, le préfet a demandé la liquidation de l'astreinte ; que Mme B...relève appel du jugement du 12 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a liquidé l'astreinte à la somme de 10 300 euros ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'en se bornant à indiquer dans le jugement attaqué que le préfet de la Loire-Atlantique avait saisi le tribunal du procès-verbal de contravention de grande voirie dressé à l'encontre de Mme B...puis, ayant constaté que le contrevenant n'avait pas exécuté les obligations mises à sa charge par le jugement du 16 janvier 2014, avait demandé la liquidation de l'astreinte, les premiers juges n'ont pas motivé leur réponse au moyen tiré de ce que le préfet n'était pas compétent pour solliciter la liquidation de l'astreinte ; que, dans ces conditions, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité ; que la requérante est par suite fondée à en demander l'annulation ;
3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions du préfet tendant à la liquidation de l'astreinte
Sur le principe de la liquidation de l'astreinte :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L.774-2 du code de justice administrative : " Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procès-verbal de contravention, le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procès-verbal ". ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet de la Loire-Atlantique était seul compétent pour déférer au tribunal la contravention de grande voirie commise par la requérante, alors même qu'elle portait sur une servitude attachée à une dépendance du domaine public départemental ; que, par suite, ce même préfet, en sa qualité de partie à l'instance, était seul recevable à présenter devant le tribunal des conclusions tendant à la liquidation de l'astreinte, laquelle n'est constitutive ni d'une voie de fait ni d'un détournement de procédure ;
5. Considérant qu'il y a lieu de procéder à la liquidation de l'astreinte prononcée, ainsi qu'il a été dit au point 1, par un jugement du 16 janvier 2014 du tribunal administratif de Nantes confirmé par un arrêt de la cour de ce jour ;
Sur le montant de l'astreinte :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution totale ou partielle (...), la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. (...) " ;
7. Considérant qu'il ressort du procès-verbal de constatation d'un agent assermenté du 25 mars 2014, qu'à cette date la requérante n'avait toujours pas exécuté le jugement du 16 janvier 2014 du tribunal administratif de Nantes notifié le 1er février 2014 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'à la date à laquelle statue la Cour, les obstacles existant sur l'espace correspondant à la servitude de marchepied avaient été enlevés ; que, par suite, le préfet est fondé à solliciter la liquidation de l'astreinte pour la période du 2 mars 2014 au 29 mai 2015 inclus ; que toutefois celle-ci doit être modérée et liquidée au taux de 33 euros par jour, soit 14 949 euros ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme demandée à ce titre par Mme B...;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 12 juin 2014 du tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : Mme B...est condamnée à payer à l'Etat la somme de 14 949 euros (quatorze mille neuf cents quarante neuf euros).
Article 3 : Les conclusions de Mme B...tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Une copie sera adressée au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 5 mai 2015, où siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. François, premier conseiller,
- Mme Buffet premier conseiller.
Le rapporteur,
E. FRANÇOISLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
2
N° 14NT01879