LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 21 novembre 2013), que se prévalant d'une ordonnance de non-conciliation, condamnant Mme X..., à lui payer une contribution mensuelle au titre du devoir de secours entre époux, à laquelle il a été mis un terme par leur divorce, prononcé par une décision ayant acquis force de chose jugée le 1er mars 2004, M. Y... a déposé, le 5 avril 2006, une demande d'aide juridictionnelle pour l'exécution de cette ordonnance, accordée le 28 avril 2006, puis fait délivrer un commandement aux fins de saisie-vente le 10 juin 2010 à Mme X..., qui en a contesté la validité devant un juge de l'exécution ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'annuler le commandement de saisie-vente du 10 juin 2010, alors, selon le moyen, que la caducité de la décision d'admission à l'aide juridictionnelle lorsque la juridiction n'a pas été saisie dans l'année de sa notification n'a d'effet qu'en ce qui concerne le bénéfice de l'aide juridictionnelle et n'a pas d'incidence sur l'interruption des délais résultant de l'aide juridictionnelle ; qu'en estimant que M. Y... ne pouvait invoquer à titre de cause d'interruption de la prescription la demande d'aide juridictionnelle formée le 28 avril 2006, au motif que cette demande s'était trouvée frappée de caducité faute d'avoir été mise en oeuvre dans un délai d'un an, cependant que cette caducité de la décision d'admission à l'aide juridictionnelle ne concernait que le bénéfice de l'aide elle-même et ne remettait pas en cause l'interruption des délais résultant de la demande d'aide juridictionnelle, la cour d'appel a violé les articles 38 et 54 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Mais attendu que l'interruption de la prescription prévue à l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne s'appliquant qu'aux actions en justice, la demande d'aide juridictionnelle formée en vue de l'exécution d'une décision de justice, lorsque la procédure d'exécution ne nécessite pas la saisine préalable d'une juridiction, n'interrompt pas le délai de prescription de la créance objet de cette demande ; que par ce motif de pur droit, substitué, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux, erronés, de l'arrêt, celui-ci se trouve légalement justifié ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. Y...
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé le commandement de saisie-vente du 10 juin 2010 ;
AUX MOTIFS QUE la demande au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire est sans objet considérant que cette aide a été définitivement accordée à M. Y... suivant une décision du 24 avril 2013 ; que le jugement de divorce du 4 décembre 2003 qui a mis fin à l'obligation de secours entre époux a été signifié suivant un procès-verbal de recherches infructueuses du 29 janvier 2004 qui est versé aux débats en cause d'appel ; que l'huissier a mentionné toutes les diligences effectuées caractérisant l'impossibilité de le remettre à son destinataire, s'étant en effet enquis mais en vain de la nouvelle adresse de M. Y... après sa libération de la maison d'arrêt de Mont-de-Marsan, tant auprès de ses anciens logeurs que des mairies et gendarmeries du secteur et même de son avocat ; que cette signification étant régulière, le jugement de divorce est devenu définitif le 1er mars 2004, d'où il suit que M. Y... ne peut prétendre au-delà au paiement de quelque somme que ce soit au titre de la pension fixée par l'ordonnance de non-conciliation ; qu'il est constant depuis notamment l'arrêt de la Cour de cassation du 10 juin 2005 en chambre plénière (Bull. 2005, Ass. Plén. n° 6) que si le créancier peut poursuivre pendant trente ans l'exécution d'un jugement condamnant au paiement d'une somme payable à termes périodiques, telle une pension alimentaire, il ne peut, en vertu de l'article 2277 du code civil, applicable en raison de la nature de la créance, obtenir le recouvrement des arriérés échus plus de cinq ans avant la date de sa demande ; que la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 a inséré un article 3-1 à la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 en disposant désormais que l'exécution des décisions judiciaires ayant force exécutoire ne peut être poursuivie que pendant dix ans ; qu'elle a également substitué selon l'article 2224 du code civil un délai de cinq ans à l'ancienne prescription trentenaire pour toutes les actions personnelles ou mobilières ; qu'il s'ensuit que M. Y... ne peut, conformément aux articles 2277 ancien et 2224 actuel du code civil, applicables en raison de la nature de la créance, obtenir le recouvrement des arriérés des pensions qui étaient intégralement échues depuis plus de cinq ans à la date du commandement de payer du 10 juin 2010 ; qu'il ne peut se prévaloir comme cause d'interruption ou de suspension de la prescription du dépôt du 28 avril 2006 d'une demande d'aide juridictionnelle pour l'exécution d'une décision de divorce et caduque en vertu de l'article 54 du décret du 19 décembre 1991 faute d'avoir été mise en oeuvre dans le délai de un an à compter de sa notification, ni du procès-verbal de difficultés du notaire du 20 mai 2008, en l'absence de toute réclamation au titre d'une créance alimentaire, ni enfin des dispositions de l'article 2236 du code civil puisqu'il n'avait plus la qualité d'époux depuis le prononcé du divorce le 4 décembre 2003 ;
ALORS QUE la caducité de la décision d'admission à l'aide juridictionnelle lorsque la juridiction n'a pas été saisie dans l'année de sa notification n'a d'effet qu'en ce qui concerne le bénéfice de l'aide juridictionnelle et n'a pas d'incidence sur l'interruption des délais résultant de l'aide juridictionnelle ; qu'en estimant que M. Y... ne pouvait invoquer à titre de cause d'interruption de la prescription la demande d'aide juridictionnelle formée le 28 avril 2006, au motif que cette demande s'était trouvée frappée de caducité faute d'avoir été mise en oeuvre dans un délai d'un an (arrêt attaqué p. 5, alinéa 6), cependant que cette caducité de la décision d'admission à l'aide juridictionnelle ne concernait que le bénéfice de l'aide elle-même et ne remettait pas en cause l'interruption des délais résultant de la demande d'aide juridictionnelle, la cour d'appel a violé les articles 38 et 54 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991.