LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 mars 2012), que, le 23 janvier 2006, la société Netmakers ingénierie (la société NMI), filiale de la société Netmakers (la société NM), a cédé à celle-ci divers progiciels dont elle détenait les droits, pour le prix de 950 000 euros réglé par compensation avec une créance de la société mère sur sa filiale, au titre d'une avance en compte courant ; que, le 5 mai 2006, la société NMI a été mise en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce d'Antibes, la date de cessation des paiements étant fixée au 1er avril 2006 ; qu'invoquant la fraude paulienne, le liquidateur a assigné devant ce tribunal la société NM en inopposabilité de la compensation et paiement de la somme de 950 000 euros ;
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt de retenir l'incompétence du tribunal de commerce d'Antibes et de renvoyer l'affaire devant la cour d'appel de Paris alors, selon le moyen, que l'action paulienne exercée après l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire perd son caractère relatif pour produire effet à l'égard et au profit de tous les créanciers y compris ceux dont le droit est né postérieurement à la fraude et qui, sans la survenance de la procédure collective, n'auraient pu ni invoquer les dispositions de l'article 1167 du code civil, ni bénéficier de leur application ; qu'ainsi, les dispositions d'ordre public relatives à l'organisation et à l'administration des procédures collectives modifiant les conditions d'exercice et les effets de l'action tendant à l'annulation d'un acte frauduleux, cette action relève de la seule compétence du tribunal de la faillite ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article R. 662-3 du code de commerce ;
Mais attendu que la compétence exclusive du tribunal de la procédure collective, prévue par l'article R. 662-3 du code de commerce, ne concerne que les contestations nées de cette procédure ou sur lesquelles elle exerce une influence juridique ; que tel n'étant pas le cas de l'action paulienne, distincte de l'action en annulation des actes passés pendant la période suspecte, c'est à bon droit que la cour d'appel a écarté la compétence du tribunal de commerce d'Antibes au profit de celle du tribunal de commerce de Paris, dans le ressort duquel se situe le siège de la société défenderesse et, par application de l'article 79 du code de procédure civile, renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Paris ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société Netmakers ingénierie, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X..., ès qualités
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le Tribunal de commerce d'Antibes n'était pas compétent pour connaitre du litige et d'avoir renvoyé la cause et les parties devant la Cour d'appel de Paris ;
Aux motifs que l'action intentée par Maître Arnaud n'est pas une action dérivant des textes régissant les procédures collectives ou sur laquelle ces textes exercent une influence juridique puisqu'il n'invoque pas l'article L 632-1 du Code de commerce qui rend inopposable à la procédure collective une convention conclue pendant la période suspecte, ce qui n'est d'ailleurs pas le cas, mais bien une action fondée sur l'article 1167 du Code civil contre une société tierce visant à voir déclarer inopposable aux créanciers de son débiteur, qu'il représente, un acte passé avant l'ouverture de la procédure collective, action qui aurait de toutes façons été ouverte à ces créanciers même sans ouverture de la procédure collective ; que c'est donc à tort que le premier juge s'est, faisant application de l'article R 662-3 du Code de commerce en l'état de la proximité de la date de l'acte attaqué avec la période suspecte, déclaré compétent ; qu'en conséquence le jugement doit être réformé et la procédure et les parties renvoyées devant la Cour d'appel de Paris en application de l'article 79 du Code de procédure civile puisque le Tribunal qui aurait dû normalement être saisi par Maître Arnaud est le Tribunal de commerce de Paris dans le ressort duquel l'intimée a son siège social ;
Alors que l'action paulienne exercée après l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire perd son caractère relatif pour produire effet à l'égard et au profit de tous les créanciers y compris ceux dont le droit est né postérieurement à la fraude et qui, sans la survenance de la procédure collective, n'auraient pu ni invoquer les dispositions de l'article 1167 du Code civil, ni bénéficier de leur application ; qu'ainsi, les dispositions d'ordre public relatives à l'organisation et à l'administration des procédures collectives modifiant les conditions d'exercice et les effets de l'action tendant à l'annulation d'un acte frauduleux, cette action relève de la seule compétence du Tribunal de la faillite ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article R 662-3 du Code de commerce.