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27/05/2014 | FRANCE | N°13VE00874

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 27 mai 2014, 13VE00874


Vu le recours, enregistré le 20 mars 2013, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1109784 en date du 22 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé la SAS Senoble Holding des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2008 ;

2° de remettre à la charge de la SAS Senoble Holding

les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution addi...

Vu le recours, enregistré le 20 mars 2013, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1109784 en date du 22 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé la SAS Senoble Holding des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2008 ;

2° de remettre à la charge de la SAS Senoble Holding les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt ainsi que les pénalités correspondantes dont le tribunal administratif a prononcé la décharge ;

Il soutient que :

- le Tribunal administratif de Montreuil s'est fondé à tort sur les dispositions de l'alinéa 2 de l'article 38 du code général des impôts dès lors que les suppléments d'apport visés par cet article sont ceux effectués par l'exploitant de l'entreprise individuelle ou les associés de la société assujettie et non ceux effectués par celle-ci ;

- il y a lieu de tirer l'ensemble des conséquences de la qualification, dans la comptabilité de la société Elisabeth The Chief Ltd et, par voie de conséquence, dans le droit comptable britannique, des sommes litigieuses, lesquelles ont été comptabilisées directement dans le compte de fonds propres dénommé " profit and loss reserve ", compte tenant lieu de réserve libre ;

- à titre subsidiaire, l'aide octroyée par la SAS Senoble Holding à la société Elisabeth The Chief Ltd ne peut être analysée, à défaut de relations commerciales entre les deux sociétés, que comme constituant une aide purement financière, qui ne peut être déduite du résultat imposable de la SAS Senoble Holding compte tenu de la situation nette positive de la société Elisabeth The Chief Ltd ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 2014 :

- le rapport de M. Bresse, président assesseur,

- et les conclusions de M. Locatelli, rapporteur public ;

1. Considérant qu'au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2008, la SAS Senoble Holding a consenti à sa filiale britannique, la société Elisabeth The Chief Ltd, dont elle détient l'intégralité du capital, un abandon de créance en compte courant d'un montant de

799 832 euros ; que l'administration fiscale qui a constaté, à l'occasion de la vérification de comptabilité de la SAS Senoble Holding, que l'abandon de créance consenti à la société Elisabeth The Chief Ltd avait, en application du droit comptable anglais, été comptabilisé par celle-ci comme une allocation de fonds propres et non comme un produit, a réintégré dans le résultat imposable de la SAS Senoble Holding cet abandon de créance au motif que l'opération en cause ne pouvait donner lieu à aucune déduction dans les comptes de la société dès lors qu'elle ne traduisait aucune perte ; que le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé la décharge des rappels résultant de cette réintégration en estimant, d'une part, que, dès lors que cet abandon n'avait donné lieu à aucune contrepartie, notamment sous forme de droits sociaux, il ne pouvait être regardé comme ayant le caractère juridique d'un supplément d'apport au sens des dispositions du 2. de l'article 38 du code général des impôts et, d'autre part, que le service ne pouvait demander, par voie de substitution de base légale, le maintien des impositions en litige au motif qu'il s'agissait d'un abandon de créance à caractère financier ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande l'annulation de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " 2. Le bénéfice est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés " ;

3. Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES soutient que les avances versées par la SAS Senoble Holding à sa filiale anglaise Elisabeth The Chief Ltd puis leur abandon à son profit, à hauteur du montant de la perte d'exploitation de cette dernière au titre de l'année 2008, ont constitué un supplément d'apport non dénué de contrepartie pour la société mère et que, dès lors, cet abandon d'avances ne pouvait donner lieu à la constatation d'une perte déductible dans le chef de la société SAS Senoble Holding ; que, contrairement à ce que soutient la SAS Senoble Holding, la nature réelle de l'opération réalisée par elle avec sa filiale anglaise peut être déterminée notamment au regard des écritures comptables que cette dernière a passées en application de la législation anglaise ; qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, l'abandon d'avances consenti à la société anglaise n'a été effectué en contrepartie d'aucune livraison de bien ou prestation de service ; que, d'autre part, suivant le droit comptable britannique, cette filiale l'a enregistré comme un supplément d'apport mis en réserves en compte de " profit and loss reserve " qui ne constitue pas un compte de produit susceptible d'affecter le résultat de l'exercice, lequel n'a d'ailleurs donné lieu à aucune imposition en Angleterre, mais un compte de fonds propres ; qu'alors même que, dans cette hypothèse et à la différence du droit français, le droit britannique ne prévoit pas l'attribution de droits sociaux supplémentaires mais autorise seulement la distribution aux associés, sous certaines conditions, de la somme ainsi mise en réserve, l'abandon d'avances litigieux doit être regardé pour l'application du droit fiscal français comme un apport de fonds ayant eu pour contrepartie équivalente, chez la société mère versante, la valorisation de sa participation à due proportion du montant de cet apport en l'absence de situation nette négative de la filiale bénéficiaire Elisabeth The Chief Ltd, laquelle était, ainsi qu'il a été dit, intégralement détenue par la société SAS Senoble Holding ; que, dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal administratif a prononcé la décharge des suppléments d'impôts en litige au motif que cette opération d'apport était demeurée sans contrepartie faute d'avoir donné lieu à la distribution de droits sociaux alors que l'augmentation, au terme de ladite opération, de la valeur de la participation de la société mère versante constitue une contrepartie équivalente interdisant que l'abandon d'avances soit déduit de ses résultats en tant que perte ;

4. Considérant, toutefois, qu'il y a lieu, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la société SAS Senoble Holding tant en première instance qu'en appel ;

5. Considérant que si la société soutient que l'abandon de créance en cause a été constitutif d'un abandon à caractère commercial dès lors qu'elle aurait entretenu des relations commerciales avec la société Elisabeth The Chief Ltd et que l'abandon aurait été consenti dans le cadre de ces relations, cette allégation est contredite par l'ensemble des éléments précédemment analysés ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a accordé à la société SAS Senoble Holding la décharge des impositions en litige ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1109784 du 22 novembre 2012 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : Les impositions supplémentaires dont le Tribunal administratif de Montreuil a accordé la décharge sont remises à la charge de la SAS Senoble Holding.

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N° 13VE00874 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE00874
Date de la décision : 27/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-083 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Relations entre sociétés d'un même groupe.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Patrick BRESSE
Rapporteur public ?: M. LOCATELLI
Avocat(s) : CABINET FIDAL DIRECTION PARIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-05-27;13ve00874 ?
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