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19/12/2013 | FRANCE | N°13NC00302

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 19 décembre 2013, 13NC00302


Vu la requête, enregistrée le 19 février 2013, complétée par un mémoire de production enregistré le 22 novembre 2013, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Chaton, avocat ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001574 du 19 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 septembre 2010 par lequel le préfet du Jura a déclaré d'utilité publique le projet de réhabilitation d'immeubles déclarés en état d'abandon manifeste à Archelange et a

déclaré cessibles les propriétés nécessaires à la réalisation de cette opération ;

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Vu la requête, enregistrée le 19 février 2013, complétée par un mémoire de production enregistré le 22 novembre 2013, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Chaton, avocat ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001574 du 19 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 septembre 2010 par lequel le préfet du Jura a déclaré d'utilité publique le projet de réhabilitation d'immeubles déclarés en état d'abandon manifeste à Archelange et a déclaré cessibles les propriétés nécessaires à la réalisation de cette opération ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 8 septembre 2010 par lequel le préfet du Jura a déclaré d'utilité publique le projet de réhabilitation d'immeubles déclarés en état d'abandon manifeste à Archelange et a déclaré cessibles les propriétés nécessaires à la réalisation de cette opération ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 035 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le tribunal a jugé à tort que le service des domaines avait été consulté ; or, aucune preuve de cette consultation obligatoire n'a été apportée ;

- l'avis du service des domaines n'a pas été joint au dossier d'enquête publique ;

- la publicité faite préalablement au déclenchement de l'enquête publique a été insuffisante ; il n'a pas été publié un avis plus de huit jours avant le début de l'enquête publique dans deux journaux diffusés dans le département ; les dispositions de l'article R. 11-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ont été méconnues ;

- le procès-verbal provisoire d'état d'abandon manifeste est irrégulier ; il ne reproduit pas les dispositions des articles L. 2243-1 à L. 2243-4 du code général des collectivités territoriales ; il n'est pas établi qu'il ait été affiché pendant trois mois à la mairie et ait fait l'objet d'une insertion dans deux journaux diffusés dans le département ; les dispositions de l'article L. 2243-2 du code général des collectivités territoriales ont été méconnues ;

- l'utilité publique de l'opération projetée n'est pas démontrée ; il n'y avait pas de nécessité publique de développer l'offre locative de logements et de réimplanter un commerce de proximité ; le coût de l'opération, estimé à 684 000 euros, est prohibitif au regard des capacités financières limitées de la commune ; l'atteinte au droit de propriété de l'appelante est excessive ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 14 août 2013, le mémoire en défense, présenté pour le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- l'enquête publique, qui a débuté le 14 décembre 2009, a été précédée de la publication d'un avis dans les journaux Le progrès et La voix du Jura, le 3 décembre 2009 ; cet avis a été repris par les mêmes journaux le 17 décembre 2009 ;

- il se réfère au mémoire en défense produit par le préfet du Jura devant le tribunal administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 novembre 2013 :

- le rapport de M. Tréand, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me Brey, avocat de MmeA... ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

1. Considérant qu'une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'opération déclarée d'utilité publique par l'arrêté contesté du préfet du Jura en date du 8 septembre 2010 avait pour objet principal, à travers l'acquisition et la réhabilitation de deux bâtiments et de parcelles environnantes, la création de quatre logements et d'un commerce de proximité-restaurant ainsi que de seize places de parking place Saint-Hubert à Archelange ; que l'estimation sommaire des dépenses figurant au dossier soumis à enquête publique indique que le coût de l'opération s'élève à 684 200 euros ; qu'il ressort du plan de financement lacunaire figurant au IV de la notice explicative, également comprise dans le dossier soumis à enquête publique, que les subventions de l'Etat et du département du Jura envisagées représenteront au maximum 20 % de ce montant ; qu'il n'est pas plus démontré à hauteur d'appel qu'en première instance que la commune d'Archelange, qui est un village rural qui comptait 235 habitants à la date de l'arrêté litigieux et dont le taux d'endettement est inconnu, puisse financer le solde de cette somme par autofinancement et par recours à l'endettement ; que le commissaire-enquêteur a d'ailleurs émis de sérieux doutes sur le caractère soutenable du sommaire montage financier retenu, plaçant les " aspects financiers et budgétaires " dans " les contraintes ou inconvénients liés au projet " ; qu'ainsi, l'intérêt de l'opération déclarée d'utilité publique par arrêté du préfet du Jura le 8 septembre 2010, à le supposer établi, ne pouvait, à lui seul, lui conférer un caractère d'utilité publique, eu égard à son coût financier excessif au regard des possibilités financières de la commune ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 septembre 2010 par lequel le préfet du Jura a déclaré d'utilité publique le projet de réhabilitation d'immeubles déclarés en état d'abandon manifeste à Archelange et a déclaré cessibles les propriétés nécessaires à la réalisation de cette opération ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation " ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à Mme A...la somme de 1 500 euros au titre des frais qu'elle a exposés au cours de la présente instance ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 19 décembre 2012, ainsi que l'arrêté en date du 8 septembre 2010 par lequel le préfet du Jura a déclaré d'utilité publique le projet de réhabilitation d'immeubles déclarés en état d'abandon manifeste à Archelange et a déclaré cessibles les propriétés nécessaires à la réalisation de cette opération, sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à Mme A...la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié Mme B...A...et au ministre de l'intérieur.

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13NC00302


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC00302
Date de la décision : 19/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

34-01-01-01 Expropriation pour cause d'utilité publique. Notions générales. Notion d'utilité publique. Absence.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Olivier TREAND
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : CHATON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-12-19;13nc00302 ?
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