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14/01/2014 | FRANCE | N°13LY01282

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 14 janvier 2014, 13LY01282


Vu la requête, enregistrée le 22 mai 2013, présentée pour la commune de Montmélian (Savoie), représentée par son maire ;

La commune de Montmélian demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003895 du tribunal administratif de Grenoble du 21 mars 2013 en tant que, par ce jugement, le tribunal a annulé la décision par laquelle son maire a implicitement refusé de faire droit au recours gracieux du 2 juillet 2010 que la société Lidl a exercé à l'encontre de l'arrêté du 9 juin 2010 refusant de lui accorder un permis de construire un supermarché ;

2°)

de rejeter la demande d'annulation de cette décision implicite présentée par la sociét...

Vu la requête, enregistrée le 22 mai 2013, présentée pour la commune de Montmélian (Savoie), représentée par son maire ;

La commune de Montmélian demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003895 du tribunal administratif de Grenoble du 21 mars 2013 en tant que, par ce jugement, le tribunal a annulé la décision par laquelle son maire a implicitement refusé de faire droit au recours gracieux du 2 juillet 2010 que la société Lidl a exercé à l'encontre de l'arrêté du 9 juin 2010 refusant de lui accorder un permis de construire un supermarché ;

2°) de rejeter la demande d'annulation de cette décision implicite présentée par la société Lidl devant le tribunal administratif ;

3°) de condamner la société Lidl à lui verser une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Montmélian soutient que, comme le tribunal l'a jugé, à la suite de l'avis négatif de la commission départementale d'aménagement commercial, le maire était tenu de rejeter la demande de permis de construire de la société Lidl ; que, par contre, c'est à tort que le tribunal a estimé que le maire était tenu d'abroger ce refus de permis de construire ; qu'en effet, aucun changement dans les circonstances de droit ou de fait n'est intervenu après l'édiction de cette décision, la Commission nationale d'aménagement commercial n'ayant pas statué dans le délai d'un mois imparti sur le recours formé par la société Lidl à l'encontre de l'avis négatif de la commission départementale et, par suite, étant réputée avoir implicitement rejeté ce recours ; que la commission nationale, qui était ainsi dessaisie, n'était plus compétente pour prendre les deux décisions explicites des 12 mai 2010 et 22 juillet 2010 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 juillet 2013, présenté pour la société Lidl, qui demande à la cour :

- de rejeter la requête ;

- par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement attaqué du 21 mars 2013 en tant que, par ce jugement, le tribunal a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 9 juin 2010 par lequel le maire de la commune de Montmélian a rejeté sa demande de permis de construire un supermarché ;

- d'annuler cet arrêté ;

- de condamner la commune de Montmélian à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société Lidl soutient que c'est à bon droit que le tribunal a estimé que la Commission nationale d'aménagement commercial pouvait légalement substituer un avis favorable exprès à l'avis défavorable implicite né au terme du délai d'un mois imparti à cette commission pour se prononcer, ce délai n'étant en effet pas prescrit à peine de dessaisissement de la commission ; que cette dernière doit simplement se prononcer dans le délai d'instruction du permis de construire ; qu'en l'espèce, ce délai arrivait à expiration le 17 août 2010 ; que la Commission nationale d'aménagement commercial était donc fondée à se prononcer par un avis exprès favorable le 12 mai 2010, ainsi qu'à rectifier le 22 juillet 2010 cet avis, affecté d'une erreur matérielle ; que la commune a disposé d'un avis favorable de la commission à compter de la date de réception de cet avis, lequel est constitutif d'un changement dans les circonstances ; que la commune devait prendre en compte cet avis favorable pour abroger le refus de permis, l'avis défavorable de la commission départementale ayant disparu de l'ordonnancement juridique ; qu'en réalité, dès lors que la commune connaissait l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial dès la date du refus de permis du 9 juin 2010, le maire a également commis une erreur de droit en prenant cette décision ; qu'ainsi, contrairement à ce que le tribunal a jugé, ce refus est lui-même entaché d'illégalité ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 17 juillet 2013, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 septembre 2013 ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 septembre 2013, présenté pour la commune de Montmélian, représentée par son maire, tendant aux mêmes fins que précédemment et, en outre, au rejet de l'appel incident de la société Lidl ;

La commune soutient, en outre, que l'appel incident de la société Lidl ne pourra qu'être rejeté, dès lors que, comme indiqué précédemment, le maire était tenu, à la suite de la confirmation par la Commission nationale d'aménagement commercial de l'avis défavorable de la commission départementale, de rejeter la demande de permis de construire ; que l'arrêté du 9 juin 2010 n'est donc pas entaché d'illégalité ;

En application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, par une ordonnance du 12 septembre 2013, l'instruction a été rouverte ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 octobre 2013, présenté pour la société Lidl, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 décembre 2013, présentée pour la société Lidl ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 décembre 2013 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., représentant le cabinet CMS Bureau Francis Lefebvre Lyon, avocat de la commune de Montmélian, et celles de MeA..., représentant la SCP Baker et Mckenzie, avocat de la société Lidl ;

1. Considérant que, par un arrêté du 9 juin 2010, le maire de la commune de Montmélian a rejeté la demande de permis de construire présentée par la société Lidl en vue de la construction d'un supermarché ; que cette société a présenté le 2 juillet 2010 un recours gracieux à l'encontre de cet arrêté que le maire a implicitement rejeté ; que, par un jugement du 21 mars 2013, à la demande de la société Lidl, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision implicite, mais a rejeté les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 juin 2010 présentées par la société ; que la commune de Montmélian relève appel de ce jugement, en tant qu'il procède à cette annulation ; que, par la voie de l'appel incident, la société Lidl demande à la cour d'annuler le jugement ainsi attaqué en tant que, par celui-ci, le tribunal a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation dudit arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes des dispositions alors applicables de l'article L. 752-4 du code de commerce : " Dans les communes de moins de 20 000 habitants, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme peut, lorsqu'il est saisi d'une demande de permis de construire un équipement commercial dont la surface est comprise entre 300 et 1 000 mètres carrés, proposer au conseil municipal ou à l'organe délibérant de cet établissement de saisir la commission départementale d'aménagement commercial afin qu'elle statue sur la conformité du projet aux critères énoncés à l'article L. 752-6. / Dans ces communes, lorsque le maire ou le président de l'établissement public compétent en matière d'urbanisme est saisi d'une demande de permis de construire un équipement commercial visé à l'alinéa précédent, il notifie cette demande dans les huit jours au président de l'établissement public de coopération intercommunale ou du syndicat mixte visé à l'article L. 122-4 du code de l'urbanisme sur le territoire duquel est projetée l'implantation. Celui-ci peut proposer à l'organe délibérant de saisir la commission départementale d'aménagement commercial afin qu'elle statue sur la conformité du projet aux critères énoncés à l'article L. 752-6. / La délibération du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale est motivée. Elle est transmise au pétitionnaire sous un délai de trois jours. / En cas d'avis défavorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial, le permis de construire ne peut être délivré. / La commission départementale d'aménagement commercial se prononce dans un délai d'un mois. / En cas d'avis négatif, le promoteur peut saisir la Commission nationale d'aménagement commercial qui se prononce dans un délai d'un mois. Le silence de la commission nationale vaut confirmation de l'avis de la commission départementale " ; qu'aux termes de l'article R. 425-22-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet a été soumis pour avis à la commission départementale d'aménagement commercial en application de l'article L. 752-4 du code de commerce, le permis de construire ne peut être délivré en cas d'avis défavorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 423-36-1 du même code : " Lorsque le projet a été soumis pour avis à la commission départementale d'aménagement commercial en application de l'article L. 752-4 du code de commerce et a fait l'objet d'un avis défavorable, le délai d'instruction est prolongé de deux mois à compter du recours si le promoteur a déposé un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du présent chapitre " ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que la Commission nationale d'aménagement commercial ne peut utilement se prononcer après l'expiration du délai d'un mois au terme duquel elle est réputée, en vertu de l'article L. 752-4 du code de commerce, confirmer l'avis défavorable rendu par la commission départementale et que le maire, au vu de l'avis réputé défavorable résultant du silence de la commission nationale dans ce délai, est tenu de rejeter la demande de permis de construire ; que la Commission nationale d'aménagement commercial étant dessaisie après l'expiration du délai d'un mois, un promoteur ne peut utilement se prévaloir d'un avis favorable exprès rendu par cette commission postérieurement à ce délai ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Lidl a déposé en décembre 2009 une demande de permis de construire un supermarché sur un terrain situé sur le territoire de la commune de Montmélian ; qu'en application de l'article L. 752-4 précité du code de commerce, le syndicat mixte Métropole Savoie a décidé de saisir pour avis la commission départementale d'équipement commercial de ce projet de supermarché, d'une surface de vente de 901 m² ; que, le 8 février 2010, cette commission a rendu un avis défavorable ; qu'en application de l'article L. 752-4, la société Lidl a décidé de saisir la Commission nationale d'aménagement commercial ; que ce recours a été enregistré le 2 mars 2010 par cette dernière ; que, ne s'étant pas prononcée dans le délai d'un mois prévu par les dispositions précitées du même article, la commission nationale doit être réputée avoir confirmé l'avis défavorable de la commission départementale ; que, dès lors, le maire de la commune de Montmélian était tenu de rejeter la demande de permis de construire de la société Lidl, comme il l'a fait par son arrêté litigieux du 9 juin 2010, fondé sur la confirmation implicite par la Commission nationale d'aménagement commercial de l'avis défavorable du 8 février 2010 de la commission départementale ; que, de même, le maire avait compétence liée pour rejeter le recours gracieux que cette société a formé le 2 juillet 2010 à l'encontre de ce refus de permis de construire ; que, pour les motifs exposés précédemment, la société Lidl ne peut utilement invoquer le fait que, le 12 mai 2010, la commission nationale, après ledit délai d'un mois, s'est explicitement prononcée sur le projet de supermarché pour émettre un avis favorable ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Montmélian est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision par laquelle son maire a implicitement rejeté le recours gracieux du 2 juillet 2010 de la société Lidl ; qu'à l'inverse, cette dernière ne peut soutenir, par la voie de l'appel incident, que l'arrêté du 9 juin 2010 est entaché d'illégalité ; qu'en conséquence, il y a lieu, d'une part, d'annuler le jugement attaqué en tant que, par ce jugement, le tribunal a annulé cette décision implicite et de rejeter la demande d'annulation de cette décision présentée par la société Lidl devant le tribunal, d'autre part, de rejeter l'appel incident de la société Lidl ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Montmélian, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer à la société Lidl la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette société le versement d'une somme de 1 500 euros au bénéfice de cette commune sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 mars 2013 est annulé en tant que, par ce jugement, le tribunal a annulé la décision par laquelle le maire de la commune de Montmélian a implicitement rejeté le recours gracieux du 2 juillet 2013 de la société Lidl.

Article 2 : La demande de la société Lidl devant le tribunal administratif de Grenoble tendant à l'annulation de la décision par laquelle le maire de la commune de Montmélian a implicitement rejeté son recours gracieux du 2 juillet 2013 est rejetée.

Article 3 : L'appel incident de la société Lidl est rejeté.

Article 4 : La société Lidl versera à la commune de Montmélian une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de la société Lidl tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Montmélian et à la société Lidl.

Délibéré à l'issue de l'audience du 10 décembre 2013, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président,

M. Picard, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 janvier 2014.

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N° 13LY01282

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01282
Date de la décision : 14/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SCP BAKER et MCKENZIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-01-14;13ly01282 ?
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