Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2012, présentée pour la société Jurispol, dont le siège social est situé 4 avenue du Commandant Destremeau, BP 450 à Papeete (98713), par Me B... ; la société Jurispol demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1100685/1 du 20 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'autorisation de travaux immobiliers n° 10.078-2 MAE.AU.PPTE du 21 septembre 2011 accordé à la SC Forge par la Polynésie française ;
2°) d'annuler le permis de construire précité ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code de l'aménagement de Polynésie française ;
Vu le Plan d'Aménagement de la ville de Papeete ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2013 :
- le rapport de M. Gouès, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public ;
1. Considérant que la société Jurispol relève appel du jugement du 20 mars par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'autorisation de travaux immobiliers n° 10.078-2 MAE.AU.PPTE du 21 septembre 2011 accordée à la SC Forge par la Polynésie française pour la construction d'un immeuble à usage de bureaux et d'un appartement ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article D. 114-7 du code de l'aménagement de Polynésie française : " §.1.- Les permis de travaux immobiliers sont le permis de terrassement, le permis de construire et l'autorisation de lotir. Ils sont délivrés ou refusés par l'autorité compétente, sur avis du service de l'urbanisme qui recueille l'avis du maire et vérifie la conformité du dossier technique fourni par le pétitionnaire avec les règles d'aménagement et d'urbanisme. Le maire dispose d'un délai d'un mois, à compter de la réception du dossier, pour donner son avis. Passé ce délai, son avis est réputé favorable. " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'avant l'autorisation de travaux précitée la société Forge en avait obtenu une autre, pour le même immeuble, mais comportant en sus du projet actuel des commerces en rez-de-chaussée ; que le tribunal administratif avait alors annulé cette autorisation au motif " qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier et qu'il n'était pas allégué que la commission de sécurité ait été consultée " ; que c'est à la suite de cette annulation que la société Forge a alors déposé une nouvelle demande d'autorisation ; qu'il ressort du dossier qu'elle a déposé sa demande le 20 septembre 2011, qu'elle l'a modifiée le lendemain, soit le 21 septembre à la mairie de Papeete et que le même jour le service de l'urbanisme de la Polynésie française lui a accordé l'autorisation sollicitée ; que, si la société Jurispol soutient qu'en raison de ces délais très courts cette demande d'autorisation de travaux immobiliers n'a pas fait l'objet d'une nouvelle instruction, d'une part, il ne résulte pas des dispositions réglementaires précitées du code de l'aménagement qu'un délai minimal d'instruction soit prévu, d'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu des modifications apportées au projet, se bornant à la suppression d'un niveau de parking résultant du remplacement des commerces envisagés en rez-de-chaussée par des bureaux, le délai très court d'instruction puisse être regardé comme révélant une absence d'instruction ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article D. 511-2 du code de l'aménagement de Polynésie française susvisé : " Pour l'application du présent titre, constituent des établissements recevant du public tous bâtiments, locaux et enceintes dans lesquels des personnes sont admises soit librement, soit moyennant une rétribution ou une participation quelconque, ou dans lesquels sont tenues des réunions ouvertes à tout venant ou sur invitation payante ou non. Sont considérées comme faisant partie du public toutes les personnes admises dans l'établissement à quelque titre que ce soit en plus du personnel. " ; qu'aux termes de l'article A. 512-1 du même code : " Les établissements sont classés en type, selon la nature de leur exploitation : a) Etablissements normalement installés dans un bâtiment : Type Etablissement : L Salles d'audition, de conférences, de réunions, de spectacles ou à usage multiple ; M A...de vente, centres commerciaux ; N Restaurants et débits de boissons ; O Hôtels et pensions de famille ; P Salles de danse et salles de jeux ; R Etablissements d'enseignement, colonies de vacances ; S Bibliothèques, centres de documentation, musées ; T Salles d'expositions ; U Etablissements sanitaires ; V Etablissements de culte ; W Administrations, banques, bureaux ; X Etablissements sportifs couverts ; Y Musées. " ;
5. Considérant que la société Jurispol soutient que, dans la mesure où même si les surfaces commerciales prévues dans le premier projet ont été remplacées dans le second projet par des bureaux, ceux-ci devant être regardés comme des établissements recevant du public, la commission de sécurité aurait dû être consultée ; que, toutefois, compte tenu de la circonstance que le dossier de demande de permis de construire, et notamment la notice descriptive de l'immeuble projeté, fait ressortir clairement que les locaux à usage de bureaux n'accueilleront pas de public, ce moyen doit être écarté ; qu'en outre, une attestation du 13 décembre 2010 du gérant de la société Forge précise que le nombre maximum d'occupants ne dépassera jamais 100 personnes et que les locaux ne seront en aucun cas accessibles au public ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 122-1 du code de l'environnement : " I. - Les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements publics et privés qui, par leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine sont précédés d'une étude d'impact. Ces projets sont soumis à étude d'impact en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d'entre eux, après un examen au cas par cas effectué par l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement. " ; qu'aux termes de l'article LP. 232-2 modifiant l'article D. 232-2 du code de l'environnement : " ... 5° une analyse des effets sur l'environnement des actions projetées sur les milieux décrits à l'alinéa précédent, et en particulier sur les sites et paysages, la faune et la flore, les milieux naturels et les équilibres biologiques, les aspects socio-économiques, le voisinage, l'hygiène et la salubrité publique, les eaux, l'air, les pollutions et nuisances potentielles produites ; 7° - une description des mesures prévues par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, prévenir et compenser les effets dommageables du projet sur l'environnement, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes. Un programme de surveillance des effets sur l'environnement sera, le cas échéant, projeté ;... " ;
7. Considérant que la société Jurispol soutient qu'une nouvelle étude d'impact était nécessaire compte tenu des changements intervenus entre les deux projets précités ; que, si elle fait valoir que l'immeuble projeté engendrerait de graves nuisances, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que, compte tenu de la suppression de la galerie commerciale et d'un niveau de parking, les nuisances à prévoir en relation avec le second projet puissent être supérieures à celles qui avaient déjà été envisagées par l'étude d'impact relative au premier projet, à l'occasion de laquelle la société Jurispol n'avait d'ailleurs dénoncé aucune nuisance potentielle dans le cahier de doléances ouvert au public ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article UA 12.3 du plan général d'aménagement(PGA) de Papeete : " Le nombre minimal de places de stationnement ou de garages obligatoires, avec aires de manoeuvre connexes est ainsi fixé (dispositions cumulatives) : • 1,5 place par logement (avec arrondissement à l'entier supérieur) ; • 1 place par tranche de 30 m2 ou partie de tranche de 30 m2 complémentaire de surface de plancher hors oeuvre affectés aux activités secondaires ou tertiaires (bureaux, commerces, équipements, ateliers, etc...), y compris les entrepôts et stockages accessibles à la clientèle ; la surface affectée est prise pour les 3/4 de la superficie totale de plancher brute lorsque le projet ne prévoit pas d'aménagement particulier) ; qu'aux termes de l'article UA.12-2 du même plan : " chaque construction doit prévoir les places de stationnement nécessaires à son fonctionnement et aux visiteurs, en fonction des différents types de véhicules y compris les deux roues " ;
9. Considérant que la société Jurispol soutient que le nombre de places de stationnement prévu au projet est largement sous-estimé compte tenu du fait que les bureaux sont aménagés et cloisonnés et que, par conséquent, la règle précitée des 3/4 ne peut s'appliquer ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice descriptive, du tableau récapitulatif des places de stationnement et des plans de coupe AA, CC et DD qu'au rez-de-chaussée est prévu un bureau d'un seul tenant de 170,3 m2, au niveau R+3 deux bureaux non aménagés et non cloisonnés pour une surface de 239,6 m2, au niveau R+4 deux bureaux non aménagés et non cloisonnés pour une surface de 242 m2 et au niveau R+5, un seul bureau de 242,6 m2, soit, en appliquant la règle des 3/4, une surface totale de 650,2 m2, impliquant, pour cette superficie de bureaux, une place de parking par tranche de 30 m2, aboutissant à un total de 24 places ; que dans la mesure où le projet prévoit 21 places de stationnement pour les voitures et 5 places pour les deux-roues, le nombre de places requis est ainsi atteint, contrairement à ce qui est soutenu par la société Jurispol ; que si cette dernière conteste l'existence des cinq places prévues pour les deux-roues qui seraient, selon elle, largement surestimée, il ne ressort pas des dispositions précitées de l'article UA.12-2 du plan d'aménagement que des différences entre les deux roues et les véhicules automobiles soient prévues en ce qui concerne les places de stationnement ; que la société Jurispol ne peut utilement se prévaloir de ce que des plans généraux d'aménagement d'autres communes de Polynésie française comporteraient des dispositions différentes pour les véhicules automobiles et les deux roues, contrairement à celui de Papeete, dont elle n'excipe pas de l'illégalité ; qu'enfin si elle soutient que les aires de manoeuvre seraient insuffisantes, il ne ressort pas du plan général d'aménagement de Papeete qu'une réglementation spécifique serait prévue sur ce point ; que, par suite, ces moyens doivent être écartés ;
10. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article UA.3.2 du PGA : " Le permis de construire peut être refusé pour les terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance et à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles qui y sont édifiés ou doivent y être édifiés, en ce qui concerne la commodité de la circulation et des accès (pompiers, ramassage des ordures...). " ; qu'aux termes de moyen l'article UA.7.1 du même PGA : " la galerie couverte doit permettre un acheminement continu à l'abri du soleil et de la pluie sans présenter d'interruption le long de la voie " ;
11. Considérant que la société Jurispol soutient que l'impact du projet sur la circulation automobile et piétonne a été sous-estimé et que, compte tenu des entrées et sorties potentielles de véhicules de l'immeuble et de la forte circulation existant sur la rue Destremeau, les dispositions précitées ont été méconnues ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que pour pallier ce surcroît de circulation automobile le projet a prévu, d'une part, que l'entrée dans le bâtiment se fera dans le sens Papeete-Faa'a et, d'autre part, que des feux tricolores réguleront les entrées et les sorties ; qu'en ce qui concerne la circulation des piétons, si la société Jurispol fait valoir, sans d'ailleurs apporter d'autre précision sur ce point, qu'elle sera perturbée sous la galerie piétonne, il ne ressort pas des pièces du dossier que tel pourrait être le cas compte tenu, notamment, de la présence des feux tricolores ; que ce moyen doit, par suite, être écarté ;
12. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article UA.10-1 du PGA : " Les façades des constructions ne peuvent dépasser une hauteur de 16,50 m. " et qu'aux termes de l'article UA.10-2 du même plan : " Les toitures sont délimitées par des pentes à 45° sous lesquelles doivent être contenus tous les accessoires tels que cage d'escalier, machinerie d'ascenseur, dispositifs de climatisation, chauffe eau solaire. La hauteur maximale au faîtage (ou en bordure haute d'un pan de couverture assimilable) ne peut dépasser la valeur de 25 m. (...) Des saillies pour des relevés de sécurité contre la propagation des incendies (pour bâtiments en contiguïté, ou sur murs de refends de recoupement) sont possibles sous réserve d'être limitées à un maximum de 1 m en hauteur. " ;
13. Considérant que la société Jurispol soutient que le bâtiment projeté a une hauteur de 23 mètres, disproportionnée par rapport à celle des bâtiments voisins, alors que la hauteur autorisée par le plan général d'aménagement n'est que de 16.50 mètres ; que, toutefois, il ressort des plans de l'immeuble que, d'une part, sa façade a une hauteur de 16.35 m, corrigée à 16.50 m compte tenu du terrain naturel, et, d'autre part, la hauteur maximale au faîtage est de 23.40 m selon la coupe AA, de 22.87 m selon la coupe BB et de 22.87 selon la coupe CC ; que le moyen tiré du non respect des dispositions précitées de l'article UA.10.1 du PGA manque en fait et doit être écarté ;
14. Considérant, en septième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article A. 514-13 du code de l'aménagement : " §1. Les dégagements, c'est-à-dire toutes les parties de la construction permettant le cheminement d'évacuation des occupants (porte, sortie, issue, circulation horizontale, zone de circulation, escalier, couloir, rampe...), doivent permettre l'évacuation rapide et sûre de l'établissement ; en particulier, aucun dépôt, aucun matériel, aucun objet ne doit faire obstacle à la circulation des personnes. Les escaliers desservant les étages doivent être continus jusqu'au niveau permettant l'évacuation vers l'extérieur. Les escaliers desservant les étages doivent être dissociés, au niveau d'évacuation sur l'extérieur, de ceux desservant les sous-sols. §2. Toutes les portes permettant au public d'évacuer un local ou un établissement doivent pouvoir s'ouvrir par une manoeuvre simple. Toute porte verrouillée doit pouvoir être manoeuvrable, de l'intérieur, dans les mêmes conditions. Les portes coulissantes ou à tambour ne peuvent pas compter dans le nombre d'issues réglementaires sauf si elles sont situées en façade et dans la mesure où elles respectent les dispositions suivantes :- les portes coulissantes doivent être motorisées et doivent libérer la largeur totale de la baie en cas de défaillance du dispositif de commande ou du dispositif d'alimentation ;- les portes à tambour ne doivent pouvoir être empruntées dans un sens que par une seule personne à la fois et elles doivent être doublées par une porte d'au moins une unité de passage comportant à hauteur de vue l'inscription " sortie de secours ". Dans les établissements ou dans les locaux recevant plus de 50 personnes, les portes donnant sur l'extérieur doivent s'ouvrir dans le sens de l'évacuation. §3. Pour l'application des règles de sécurité, on appelle : - Dégagement normal, un dégagement comptant dans le nombre minimal de dégagements imposés par les dispositions de l'article A. 514-15. - Dégagement accessoire, un dégagement imposé lorsque exceptionnellement les dégagements normaux ne sont pas judicieusement répartis dans le local, l'étage, le secteur ou l'établissement, un tel dégagement pouvant être constitué par : - un escalier, une coursive, une passerelle ou un chemin de circulation facile et sûr d'une largeur minimale de 0,60 mètre ; - ou encore un balcon filant, une échelle de sauvetage, une terrasse, une manche d'évacuation...- Dégagement de secours, un dégagement qui, pour des raisons d'exploitation, n'est pas utilisé en permanence par le public. - Dégagement supplémentaire, un dégagement en surnombre des dégagements définis ci-dessus. " ;
15. Considérant que si la société Jurispol soutient que les dégagements prévus au projet en litige sont insuffisants et ne respectent pas les dispositions précitées de l'article A. 514.13 et suivants du code de l'aménagement en cas d'évacuation de l'immeuble par ses utilisateurs, elle n'assortit pas ce moyen de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier son bien-fondé ; qu'il en va de même du moyen tiré de ce que le bureau Socotec aurait suspendu son avis à la réalisation de prescriptions pour les 2ème et 3ème niveau ;
16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Jurispol n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Polynésie française a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu en revanche, en application du même article, de mettre à la charge de la société Jurispol, une somme de 1 000 euros chacun à la Polynésie française et à la société Forge au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Jurispol est rejetée.
Article 2 : La société Jurispol versera la somme de 1 000 euros au Gouvernement de la Polynésie française et la même somme à la société Forge en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 12PA02163