La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/01/2014 | FRANCE | N°12NT03083

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 10 janvier 2014, 12NT03083


Vu la requête, enregistrée le 26 novembre 2012, présentée pour le GAEC des Bruyères, dont le siège est lieudit "Les Bruyères" à Saint-Pierre-le-Moutier (58240), par Me Rosenthal, avocat au barreau de Nantes ; le GAEC des Bruyères demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-1942 du 27 septembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux arrêtés du 4 janvier 2011 du préfet du Cher respectivement refusant de lui accorder l'autorisation d'exploiter les parcelles ZA9 et ZA27 d'une surface de 2 hectares 24

ares situés sur la commune de Mornay-sur-Allier et accordant cette auto...

Vu la requête, enregistrée le 26 novembre 2012, présentée pour le GAEC des Bruyères, dont le siège est lieudit "Les Bruyères" à Saint-Pierre-le-Moutier (58240), par Me Rosenthal, avocat au barreau de Nantes ; le GAEC des Bruyères demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-1942 du 27 septembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux arrêtés du 4 janvier 2011 du préfet du Cher respectivement refusant de lui accorder l'autorisation d'exploiter les parcelles ZA9 et ZA27 d'une surface de 2 hectares 24 ares situés sur la commune de Mornay-sur-Allier et accordant cette autorisation à M. D... B..., ensemble les décisions implicites de rejet des recours gracieux formés par lui le 22 février 2010 ;

2°) d'annuler ces arrêtés et décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Cher de délivrer à M. D... C..., membre du GAEC des Bruyères, l'autorisation sollicitée ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient :

- que M. B... devait demander une autorisation d'exploiter dès la reprise du bail portant sur les surfaces litigieuses ; qu'à ce titre, les juridictions judiciaires ayant validé le congé qui leur a été donné qui a pris effet le 11 novembre 2008, M. B... devait, dès cette date, solliciter une autorisation d'exploiter qu'il n'a demandée que le 17 décembre 2010 ; que ce

dernier a exploité les terres sans autorisation entre le 11 novembre 2008 et le 4 janvier 2011 ; que l'administration aurait dû, en application de l'article L. 331-7 du code rural et de la pêche maritime mettre en demeure M. B... de cesser son exploitation ;

- que les surfaces déclarées par M. B... dans sa demande d'autorisation d'exploiter ont été minorées pour apparaître en deçà du seuil de 90 hectares fixé pour une unité de référence ; que cette fausse déclaration a exercé une influence sur la décision de la commission départementale d'orientation de l'agriculture et entache d'illégalité les décisions contestées ;

- que M. B... devait disposer d'une autorisation d'exploiter dès la reprise des terres en novembre 2008, conformément aux dispositions du I de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime ; que M. B... avait, à tort, initialement déposé une déclaration préalable d'exploiter ;

- que seul M. C..., associé du GAEC, et non le GAEC lui-même, est l'auteur de la demande d'autorisation d'exploiter ; qu'en effet le GAEC était déjà titulaire d'une autorisation implicite d'exploiter sur les parcelles en litige depuis le 4 mars 2003 à la suite de la mise à disposition de ces terres au GAEC par Mme C... ;

- que le GAEC des Bruyères n'a pas été informé de l'existence d'une demande d'autorisation d'exploiter concurrente justifiant la prolongation du délai d'instruction de sa demande au-delà du délai de quatre mois ; qu'il n'a pas été informé des suites de la réunion de la commission départementale d'orientation de l'agriculture du 2 novembre 2010 ; que M. B... aurait dû présenter sa demande d'autorisation d'exploiter avant le 19 octobre 2010 pour qu'elle soit regardée comme une demande concurrente justifiant la prolongation du délai d'instruction au-delà de quatre mois, alors qu'elle ne l'a été que le 17 décembre 2010 ; qu'en estimant la demande de M. B... comme concurrente, le préfet a méconnu les dispositions des articles R. 331-5 et R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime ;

- que le GAEC des Bruyères n'a cessé de mettre en valeur les parcelles litigieuses qu'à compter du 28 septembre 2009, date à laquelle il a été contraint par M. B... de libérer ces terres et que la fin de leur exploitation a été à l'origine de pertes financières ;

- que la demande de M. C... aurait dû être classée prioritairement à celle de M. B... ; que l'appréciation portée sur la candidature de M. B... a été faussée en raison des fausses déclarations de surface ; qu'eu égard à la situation de M. B..., celui-ci relevait de la priorité 5-2 i) du schéma départemental ; que la demande de M. C... ne relevait pas de cette priorité 5-2 i) dès lors que sa demande ne concernait pas un agrandissement de son exploitation ; que la situation personnelle de M. C..., âgé de 41 ans, aurait dû primer sur celle de M. B... âgé de 61 ans, compte tenu de la durée de 9 ans de l'autorisation d'exploiter ; que le préfet a fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime en prenant en compte la situation de Mme C... puisque la demande n'a été déposée qu'au nom de son fils M. C... ; que M. et Mme C..., qui ont engagé de lourds investissements, auraient dû, en application de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime, obtenir l'autorisation d'exploiter sollicitée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 28 novembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 4 décembre 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 décembre 2013, présenté par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 423,24 euros soit mise à la charge du GAEC des Bruyères au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il fait valoir :

- que si M. B... a délivré aux consorts C...et au GAEC des Bruyères un congé pour reprise de l'exploitation des parcelles ZA n° 9 et ZA n° 27 avec date d'effet au 11 novembre 2008, il n'a pas, pour autant, récupéré la jouissance de ces parcelles à cette date, compte tenu de la contestation de ce congé par le preneur dont l'instance n'a pris fin qu'après la décision de la Cour de cassation du 14 septembre 2010 ; que si le préfet avait dû faire usage des dispositions de l'article L. 331-7 du code rural et de la pêche maritime et mettre en demeure M. B... de régulariser sa situation, cela n'aurait pu se produire qu'après le départ effectif des preneurs et après qu'il ait constaté que M. B... exploitait effectivement les parcelles litigieuses ; que les dispositions de l'article L. 331-7 du code rural et de la pêche maritime n'ont pas pour effet d'interdire d'office l'exploitation du bien par une personne qui ne se serait pas soumise au contrôle de l'administration préalablement à la mise en valeur du bien ; qu'une éventuelle méconnaissance de cet article, à la supposer établie, est sans incidence sur la légalité des décisions du 4 janvier 2011 ;

- que si le I de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime énumère les opérations pour lesquelles une demande d'autorisation d'exploiter est nécessaire, il n'impose pas, à peine d'irrecevabilité de la demande, que celle-ci soit déposée dans un délai déterminé ; que la circonstance que la demande d'autorisation d'exploiter déposée par M. B... n'ait été enregistrée complète que le 17 décembre 2010 alors que le congés délivré aux consorts C...et au GAEC des Bruyères avait une date d'effet au 11 novembre 2008, est sans incidence sur la légalité des décisions litigieuses, en raison de l'indépendance de la législation du contrôle des structures des exploitations agricoles et de celle des baux ruraux ;

- que le préfet du Cher pouvait légalement décider, même sans demandes concurrentes, de porter le délai d'instruction de la demande dont il était saisi à six mois, soit jusqu'au 17 janvier 2013 ;

- que les dispositions de l'article R. 331-5 du code rural et de la pêche maritime ne prévoient nullement qu'une demande d'autorisation d'exploiter ne peut être considérée comme concurrente qu'à la seule condition qu'elle soit déposée dans les trois mois suivant l'enregistrement complet de la demande initiale ; que ces dispositions se bornent à prévoir qu'en l'absence de demande concurrente déposée dans le délai de trois mois de l'enregistrement de la demande, le préfet n'a pas l'obligation de consulter la commission départementale d'orientation de l'agriculture, dont l'avis devient alors facultatif ; qu'il était tenu de qualifier de " demandeur concurrent " toute personne qui lui a fait connaître qu'elle était candidate à la reprise des mêmes terres dans le délai d'instruction de la demande d'autorisation d'exploiter initialement déposée ; que M. B... s'était déclaré candidat à la reprise au cours du mois de novembre 2010, le préfet du Cher devait, en conséquence, nécessairement tenir compte de la demande de M. B... pour se prononcer sur la demande présentée par le Gaec requérant et présenter les deux dossiers à la même séance de la commission départementale d'orientation de l'agriculture du 4 janvier 2011 ;

- que contrairement à ce que soutient le GAEC requérant, sa demande a bien été déposée pour son compte et non au nom de M. D... C..., en tant qu'exploitant individuel ;

- qu'à la date à laquelle le préfet s'est prononcé sur la demande d'autorisation d'exploiter du GAEC des Bruyères, celui-ci n'était pas le seul candidat à l'exploitation des terres concernées de sorte que le préfet du Cher était tenu d'examiner sa demande au regard de l'ordre des priorités fixé par le schéma directeur départemental des structures ; que la demande de M. B... relevait du rang de priorité n° 2-C de l'article 5 du schéma directeur départemental des structures, quelle que soit l'unité de référence prise en considération ; que la circonstance, à la supposer établie, que la surface réellement exploitée par M. B... correspondrait à 92 ha 80 a, surface indiquée sur ses relevés de déclaration de la direction générale des finances publiques pour les années 2008 et 2009, ne remet pas en cause le classement de sa demande au rang de priorité n° 2-C de l'article 5 dudit schéma ; que le GAEC des Bruyères, qui a déclaré dans son dossier de demande d'autorisation d'exploiter mettre en valeur 257 ha 74 a avant reprise, soit 2,86 UR, relevait donc du rang de priorité n° 2-i de l'article 5 du schéma directeur départemental des structures agricoles relatif aux " autres agrandissements " ; que le Gaec requérant ne peut donc se prévaloir d'un rang de priorité supérieur ou égal à celui de son concurrent, M. B... ;

- que la circonstance que M. B... était âgé, à la date à laquelle le préfet s'est prononcé, de 61 ans, qu'il était célibataire et sans enfant, est sans incidence sur la légalité des décisions attaquées dès lors que de telles critères n'étaient pas pris en compte par le schéma directeur départemental des structures agricoles du Cher pour départager les deux opérations d'agrandissement envisagées ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 décembre 2013, présentée pour le GAEC des Bruyères, après clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu l'arrêté n° 2008-1-1105 du préfet du Cher du 1er octobre 2008 fixant la surface de référence ;

Vu l'arrêté n° 2008-1-1153 du préfet du Cher du 9 octobre 2008 relatif à l'établissement du schéma directeur des structures du département du Cher ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 décembre 2013 :

- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. D... C...et sa mère, Mme E... C..., sont les deux associés du GAEC des Bruyères qui met en valeur une exploitation d'une surface de 257 hectares et 74 ares ; qu'ils ont sollicité le 19 juillet 2010 l'autorisation d'exploiter une surface supplémentaire de 2 hectares 24 ares sur la commune de Mornay-sur-Allier (Cher), référencée sous les numéros ZA 9 et ZA 27, appartenant à M. A... B... ; qu'après avis de la commission départementale d'orientation agricole du 4 janvier 2011, le préfet du Cher a, par deux arrêtés du 4 janvier 2011, refusé cette autorisation au GAEC des Bruyères et accordé l'autorisation d'exploiter ces parcelles à M. B..., également demandeur ; que le GAEC des Bruyères relève appel du jugement du 27 septembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés et des décisions implicites de rejet des recours hiérarchiques formés devant le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt le 22 février 2010 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, qu'à supposer même que M. B... aurait exploité les parcelles en litige dès le mois de novembre 2008 et sans que l'administration l'ait mis en demeure de solliciter une autorisation d'exploiter ces parcelles conformément aux prescriptions du code rural et de la pêche maritime, une telle circonstance est sans incidence sur la légalité des décisions contestées, qui s'apprécient au regard des priorités du schéma directeur départemental des structures agricoles du Cher et de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces versées au dossier que la demande d'autorisation d'exploiter déposée le 19 juillet 2010 en préfecture du Cher a été présentée et enregistrée pour le compte du GAEC des Bruyères qui a déclaré l'ensemble des surfaces exploitées par ses associés ; que l'autorité administrative, saisie de cette demande, devait ainsi prendre en compte la participation de tous les associés du GAEC et la totalité des terres exploitées par ce groupement et non, ainsi qu'il le fait valoir, les seules terres exploitées par M. D... C... ; que, par suite, le GAEC des Bruyères n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Cher aurait, en comparant la situation de M. B... et celle du GAEC des Bruyères pour apprécier l'ordre des priorités au regard des dispositions de l'article L 331-3 du code rural et de la pêche maritime, commis une erreur de fait ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R.331-5 du code rural et de la pêche maritime : " I. - Les demandes d'autorisation d'exploiter sont soumises à l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture instituée aux articles R. 313-1 et suivants. Lorsque des candidatures concurrentes ont été enregistrées sur tout ou partie des biens qui font l'objet de la demande, l'ensemble des dossiers portant sur ces biens est soumis à la même séance de la commission. Les candidats, les propriétaires et les preneurs en place sont informés par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre récépissé de la date d'examen des dossiers les concernant par la commission. II. - Toutefois, il n'est pas procédé à cette consultation si les biens sur lesquels porte la demande n'ont pas fait l'objet de candidatures concurrentes dans les trois mois suivant l'enregistrement du dossier de demande complet et si la reprise envisagée remplit l'une des conditions suivantes : a) Les biens sont libres de location ; b) Les biens font l'objet d'une location et l'exploitant en place consent à la reprise. Cependant, même en l'absence de demandes concurrentes, le préfet peut décider de soumettre le dossier à la commission départementale d'orientation de l'agriculture, notamment s'il estime que le projet méconnaît les orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles et les critères posés aux 2° à 9° de l'article L. 331-3 (...) " ; qu'aux termes de l'article R.331-6 du même code : " I. - Le préfet dispose d'un délai de quatre mois à compter de la date d'enregistrement du dossier complet mentionnée dans l'accusé de réception pour statuer sur la demande. Il peut, par décision motivée, fixer ce délai à six mois à compter de cette date, notamment en cas de candidatures multiples soumises à l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture ou de consultation du préfet d'un autre département. Il en avise alors les intéressés dans les meilleurs délais par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre récépissé. (...) III. - Le préfet notifie sa décision aux demandeurs, aux propriétaires et aux preneurs en place par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre récépissé. Cette décision fait l'objet d'un affichage à la mairie de la commune sur le territoire de laquelle sont situés les biens. Elle est publiée au recueil des actes administratifs. A défaut de notification d'une décision dans le délai de quatre mois à compter de la date d'enregistrement du dossier ou, en cas de prorogation de ce délai, dans les six mois à compter de cette date, l'autorisation est réputée accordée. En cas d'autorisation tacite, une copie de l'accusé de réception mentionné à l'article R. 331-4 est affichée et publiée dans les mêmes conditions que l'autorisation expresse " ;

5. Considérant, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime que le préfet peut fixer à six mois, par décision motivée, le délai dont il dispose pour se prononcer sur la demande d'autorisation d'exploiter à compter de la date d'enregistrement du dossier complet par le demandeur ; qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet du Cher a accusé réception de la demande d'autorisation d'exploiter déposée par le GAEC des Bruyères le 19 juillet 2010 et l'a informé de ce que le point de départ du délai pour statuer sur cette demande était fixé à cette date et qu'il disposait d'un délai de quatre mois expirant le 19 novembre 2010 ; qu'il a ensuite, par une décision motivée du 25 octobre 2010, informé ce groupement de la prolongation à six mois du délai d'instruction de sa demande afin de la soumettre à l'examen de la commission départementale d'orientation de l'agriculture dont la prochaine réunion était prévue le 2 novembre 2010 ; qu'ainsi, et alors même que la commission départementale d'orientation de l'agriculture, réunie en définitive le 4 janvier 2011, s'est trouvée saisie, en raison de la présentation par M. B... d'une demande d'autorisation d'exploiter enregistrée le 24 novembre 2010 et complétée le 17 décembre 2010, de l'examen de deux demandes d'autorisation d'exploiter concernant les mêmes parcelles, le préfet du Cher, à qui les dispositions de l'article R. 331-5 également précitées du code rural et de la pêche maritime donnaient toute latitude pour soumettre une demande d'autorisation d'exploiter à l'avis de la commission départementale alors même qu'il n'était pas saisi d'une demande concurrente en temps utile, n'a, contrairement à ce que soutient le GAEC, pas fait une inexacte application des dispositions précitées en décidant de prolonger à six mois le délai pour statuer sur la demande présentée par le GAEC des Bruyères, puis en soumettant les deux demandes d'autorisation d'exploiter, devenues concurrentes, à la même séance de la commission départementale d'orientation de l'agriculture ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime : " (...) L'objectif prioritaire du contrôle des structures est de favoriser l'installation d'agriculteurs, y compris ceux engagés dans une démarche d'installation progressive. En outre, il vise : soit à empêcher le démembrement d'exploitations agricoles viables pouvant permettre l'installation d'un ou plusieurs agriculteurs ; soit à favoriser l'agrandissement des exploitations agricoles dont les dimensions, les références de production ou les droits à aide sont insuffisants au regard des critères arrêtés dans le schéma directeur départemental des structures ; soit à permettre l'installation ou conforter l'exploitation d'agriculteurs pluriactifs partout où l'évolution démographique et les perspectives économiques le justifient " ; qu'aux termes de l'article L. 331-3 du même code : " L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : 1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande ; 2° S'assurer, en cas d'agrandissement ou de réunion d'exploitations, que toutes les possibilités d'installation sur une exploitation viable ont été considérées ; 3° Prendre en compte les biens corporels ou incorporels attachés au fonds dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; 5° Prendre en compte la participation du demandeur ou, lorsque le demandeur est une personne morale, de ses associés à l'exploitation directe des biens objets de la demande dans les conditions prévues à l'article L. 411-59 (...) " ; qu'aux termes de l'article 5 de l'arrêté relatif au schéma directeur des structures du département du Cher : " (...) 2. En cas de demandes concurrentes, portant sur une exploitation non viable, les autorisations d'exploiter sont délivrées en tenant compte de l'ordre suivant des priorités : (...) c) Agrandissement de l'exploitation d'un agriculteur, qui dispose depuis plus de 5 années d'une exploitation d'au moins 1/2 UR, en vue de constituer une unité économique autonome viable jusqu'à concurrence de 1,5UR et lui permettre de maintenir ou d'obtenir la qualité d'agriculteur à titre principal ; d) Réunion d'exploitations jusqu'à concurrence de 1,5UR afin de constituer une exploitation qui permet au demandeur de maintenir ou d'obtenir la qualité d'agriculteur à titre principal ; e) Agrandissement d'une société ne comportant aucun associé exploitant dont l'âge leur permettrait de prétendre à bénéficier d'un avantage vieillesse au cours des cinq années suivantes et dont il est démontré par le demandeur que la viabilité est remise en question par l'installation d'un nouvel associé exploitant avec ou sans le concours des aides publiques à l'installation ... ; g) Agrandissement d'une exploitation autonome, qui pratique une production spécialisée et qui justifiera de la nécessite de disposer d'une assise foncière lui permettant soit l'épandage des effluents produits par l'exploitation, soit le respect d'un cahier des charges d'un signe officiel de qualité dans la limite des besoins requis ... ; i) Autres installations et agrandissements " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet, saisi de demandes concurrentes d'autorisation d'exploiter portant sur les mêmes terres, doit, pour statuer sur ces demandes, observer l'ordre des priorités établi par le schéma directeur départemental des structures agricoles ;

7. Considérant que si le GAEC des Bruyères soutient que M. B... a sciemment sous-estimé les surfaces exploitées mentionnées pour 89 ha et 21 ares dans sa demande et que la surface à prendre en compte est en réalité celle de 92 ha 80 ares retenue par l'administration fiscale, une telle erreur, à la supposer avérée, serait sans incidence sur l'ordre des priorités retenu par le préfet du Cher dès lors que l'intéressé entrait, dans tous les cas, dans le champ d'application du c) du 2° de l'article 5 du schéma directeur départemental précité ; que si le GAEC soutient, par ailleurs, que les terres exploitées par M. B... étaient supérieures à l'unité de référence fixée à 70 ha depuis l'année 2000, il est constant que la surface de l'unité de référence avait été fixée, par l'arrêté préfectoral susvisé du 1er octobre 2008, à 90 ha pour le département du Cher ; qu'ainsi, le préfet du Cher n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que la demande d'autorisation d'exploiter présentée par M. B..., portant sur un agrandissement de son exploitation en vue de maintenir sa qualité d'agriculteur à titre principal et en vue de constituer une unité économique viable comprise entre 0,5 et 1,5 unité de référence, devait être classée au rang de priorité 2-c) de l'article 5 du schéma directeur départemental des structures agricoles du Cher ;

8. Considérant qu'en se bornant à affirmer que sa demande d'autorisation ne pouvait être considérée comme un agrandissement au motif qu'il avait déjà exploité les parcelles en litige antérieurement à la fin de son congé pour reprise, le GAEC des Bruyères n'établit pas que le préfet du Cher aurait fait une inexacte application des dispositions précitées en estimant que l'autorisation sollicitée portait sur un agrandissement relevant du rang de priorité 2-i) du schéma directeur des structures du département du Cher ;

9. Considérant, ensuite, que le GAEC soutient que la situation de M. C... étant âgé de 41 ans aurait dû primer sur celle de M. B... âgé de 61 ans et que c'est à tort que le préfet a pris en compte l'âge de Mme C..., associée du GAEC ; que toutefois, il ressort des termes mêmes des arrêtés contestés qu'eu égard au classement différent des deux demandes au regard de l'ordre des priorités établi par le schéma directeur départemental des structures agricoles, le préfet du Cher n'était pas tenu de prendre en compte la situation personnelle des demandeurs en ce qui concerne leur âge ; qu'en indiquant que Mme C... et M B...ayant dépassé l'âge légal pour bénéficier d'un avantage vieillesse et que de ce fait, le critère d'âge n'était pas pertinent, le préfet du Cher ne s'est pas mépris sur l'application des critères prévus au 4° de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime ;

10. Considérant, enfin, que le GAEC des Bruyères, qui exploite 257 hectares et 74 ares de terres, soutient que le refus de lui accorder l'autorisation d'exploiter les 2 ha 12 ares en litige compromettrait sa capacité à financer les investissement du GAEC ; que toutefois, l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime énumère, de façon limitative, les critères qui doivent être pris en compte lors de l'examen des demandes d'autorisation d'exploiter ; que la situation financière du groupement et de ses exploitants associés ne figurant pas parmi ces critères, il ne saurait être utilement reproché au préfet de n'en avoir pas tenu compte ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le GAEC des Bruyères n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Cher de lui délivrer la demande d'autorisation d'exploiter sollicitée ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le GAEC des Bruyères demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du GAEC des Bruyères la somme de 1 423,24 euros au titre des frais exposés par l'État et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du GAEC des Bruyères est rejetée.

Article 2 : Le GAEC des Bruyères versera à l'État la somme de 1 423,24 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au GAEC des Bruyères et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Copie en sera adressée au préfet du Cher.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2013 à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président,

- Mme Specht, premier conseiller,

- M. Lemoine, premier conseiller.

Lu en audience publique le 10 janvier 2014.

Le rapporteur,

F. LEMOINE

Le président,

O. COIFFET

Le greffier,

C. GUÉZO

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 12NT03083


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT03083
Date de la décision : 10/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : ROSENTHAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-01-10;12nt03083 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award