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13/03/2014 | FRANCE | N°12NT02298

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 13 mars 2014, 12NT02298


Vu la requête, enregistrée le 8 août 2012, présentée pour la société Fruitofood dont le siège social est situé à Le Patis à Fontaine-Simon (28240), par Me Massart, avocat au barreau de Fougères ; la société Fruitofood demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103630 du 7 juin 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant au remboursement d'une somme de 113 723 euros en raison de l'éligibilité au titre de l'exercice clos le 30 juin 2010 des projets "Stabilisation des eaux aromatiques Onativ", "Encapsulation des poudres de fru

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Vu la requête, enregistrée le 8 août 2012, présentée pour la société Fruitofood dont le siège social est situé à Le Patis à Fontaine-Simon (28240), par Me Massart, avocat au barreau de Fougères ; la société Fruitofood demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103630 du 7 juin 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant au remboursement d'une somme de 113 723 euros en raison de l'éligibilité au titre de l'exercice clos le 30 juin 2010 des projets "Stabilisation des eaux aromatiques Onativ", "Encapsulation des poudres de fruits", "Solubilisation des poudres de fruit" et "Débactérisation des poudres de fruit" au crédit d'impôt recherche ;

2°) de lui accorder ce remboursement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- l'expert mandaté par la Délégation Régionale à la Recherche et à la Technologie de la région centre a manqué d'impartialité comme le prouve l'occultation, dans le rapport qui lui a été communiqué, du nom et de la signature de l'expert ;

- l'administration a refusé de se rendre sur place ;

- elle a ainsi méconnu le principe du contradictoire et les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- c'est à tort que l'administration a considéré que ses projets n'étaient pas éligibles ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 février 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget ; il conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- les agents chargés d'apprécier la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt recherche n'ont pas à mener un débat oral et contradictoire ;

- aucune disposition n'impose que le nom de l'expert soit communiqué à l'entreprise ;

- c'est à bon droit qu'au vu des éléments en sa possession, les projets n'ont pas été regardés comme éligibles au crédit d'impôt recherche ;

Vu l'ordonnance en date du 20 décembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 24 janvier 2014 ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 5 février 2014, présenté pour la société Fruitofood ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 février 2014 :

- le rapport de M. Etienvre, premier conseiller,

- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;

- et les observations de Me Massart, avocat, représentant la société Fruitofood ;

1. Considérant que la société Fruitofood, qui a pour activité la transformation et la conservation de fruits, a demandé, le 30 septembre 2010, à l'administration fiscale le remboursement d'une créance d'impôt de 113 723 euros en raison de l'éligibilité, au titre de l'exercice clos le 30 juin 2010, au crédit d'impôt recherche de projets intitulés "Stabilisation des eaux aromatiques Onativ", "Encapsulation des poudres de fruits", "Solubilisation des poudres de friut" et "Débactérisation des poudres de fruits" ; que la société Fruitofood relève appel du jugement du 7 juin 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à ce remboursement ;

Sur les conclusions aux fins de remboursement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : "I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 decies, 44 undecies et 44 duodecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...)" ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales : "La réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt mentionné à l'article L. 45 B peut être vérifiée soit par des agents dûment mandatés par le directeur de la technologie, soit par les délégués régionaux à la recherche et à la technologie ou par des agents dûment mandatés par ces derniers. A cet effet, ils peuvent se rendre dans les entreprises après envoi d'un avis de visite pour, notamment : a. Prendre connaissance de la déclaration spéciale si elle ne leur a pas été communiquée précédemment ; b. Consulter les documents comptables prévus par les articles L. 123-12 à L. 123-28 du code du commerce, ainsi que tous les documents annexes ou justificatifs, en vue de s'assurer de la réalité des dépenses affectées à la recherche ; c. Consulter tous les documents techniques, effectuer toutes constatations matérielles, procéder à des vérifications techniques, en vue de s'assurer de la réalité de l'activité de recherche à laquelle les dépenses ont été affectées. Les résultats de ce contrôle sont notifiés à l'entreprise et sont communiqués à l'administration des impôts" ;

4. Considérant, en premier lieu, que si la société soutient que le rapport établi par l'agent mandaté par la Délégation Régionale à la Recherche et à la Technologie de la région Centre est entaché de partialité, il lui appartient cependant d'apporter cette preuve ; qu'à cet égard, la circonstance que l'administration fiscale ait, lors de la communication à la requérante, du rapport établi par l'agent mandaté par la Délégation Régionale à la Recherche et à la Technologie de la région Centre, occulté le nom et la signature de cet agent, ne suffit pas à elle seule pour établir que celui-ci, qui a déclaré dans ce rapport, avoir assuré sa mission avec neutralité, n'ait pas eu l'impartialité requise pour se prononcer utilement sur l'éligibilité des projets au crédit d'impôt recherche ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que ni les dispositions des articles L. 45 B et R. 45 B-I du livre des procédures fiscales, en vertu desquelles les agents du ministère de la recherche et de la technologie peuvent vérifier la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt défini à l'article 244 quater B du même code et peuvent à cette fin se rendre dans l'entreprise, ni aucun principe n'imposent à ces agents d'engager avec celle-ci un débat oral et contradictoire sur la réalité de cette affectation ; que l'administration est seulement tenue d'en notifier les résultats à l'entreprise ; que la société Fruitofood n'est dès lors pas fondée à reprocher à l'administration de ne pas s'être rendue dans les locaux de l'entreprise ni à contester la compétence technique des agents mandatés par la Délégation Régionale à la Recherche et à la Technologie ;

6. Considérant, en dernier lieu, que les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes desquelles : "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle", ne peuvent être utilement invoquées devant le juge de l'impôt, qui, en l'absence de contestation propre aux pénalités, ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas des contestations sur des droits et obligations à caractère civil ;

En ce qui concerne l'éligibilité des projets :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 49 septies de l'annexe III au code général des impôts : "Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : (...) c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté" ;

8. Considérant que la société Fruitofood soutient qu'elle était en droit de bénéficier des dispositions précitées de l'article 244 quater B du code général des impôts dès lors qu'elle avait présenté quatre projets concernant la stabilisation des eaux aromatiques, l'encapsulation, la solubilisation et la débactérisation des poudres de fruit, qui lui ont permis, par ces procédés présentés comme entièrement nouveaux, d'obtenir des types de produits naturels destinés à l'industrie cosmétique ; qu'elle ne démontre toutefois pas, par les éléments dont elle fait état et par la seule circonstance qu'elle commercialise lesdits produits, le caractère erroné des mentions figurant dans l'avis de l'expert mandaté par la Délégation Régionale à la Recherche et à la Technologie de la région Centre et l'appréciation de l'administration fiscale selon laquelle au vu de l'insuffisance des documents et des informations produites, il n'était pas possible d'identifier des progrès technologiques ou des améliorations substantielles dans les procédés concernés ; qu'à défaut, dès lors, pour la requérante de justifier qu'elle a, dans le cadre des projets en cause, procédé à des opérations de recherche en vue de la production d'un nouveau produit ou qui ont abouti à l'amélioration des produits qu'elle commercialisait à partir de modifications découlant non pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes mais présentant un caractère de nouveauté au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts, celle-ci n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale s'est fondée sur les mentions figurant dans l'avis précité de l'agent mandaté par la Délégation Régionale à la Recherche et à la Technologie de la région Centre pour lui refuser l'octroi du bénéfice du crédit impôt recherche en ce qui concerne les quatre projets mentionnés ci-dessus ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Fruitofood n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la société Fruitofood demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Fruitofood est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Fruitofood et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 20 février 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Etienvre, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 mars 2014.

Le rapporteur,

F. ETIENVRE Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. CROIGER

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT02298


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12NT02298
Date de la décision : 13/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : MASSART

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-03-13;12nt02298 ?
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