LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article R. 421-68 du code des assurances ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 21 novembre 1999, Eric X..., garde frontière de nationalité suisse, a été mortellement blessé au cours d'un accident à la frontière franco-suisse, du côté de la Suisse, après avoir été percuté par un véhicule appartenant à M. Y..., assuré auprès de la société Axa France IARD (la société Axa), conduit par le jeune Z..., qui venait de le dérober ; que par arrêt du 9 décembre 2003, une cour d'assises des mineurs, après avoir déclaré ce dernier coupable de l'infraction de vol suivi de violences ayant entraîné la mort d'Eric X..., commises pour favoriser la fuite ou assurer l'impunité de son auteur, a, par arrêt civil du même jour, condamné in solidum M. Z... et sa mère Mme A..., en sa qualité de civilement responsable, à indemniser les ayants-droit d' Eric X... de leur préjudice moral ; que ceux-ci ont reçu leur indemnisation de la société de droit suisse Zurich assurances, qui a elle-même été remboursée par le Bureau central français (le BCF) ; que la société Axa ayant, dès l'ouverture de l'instruction contre M. Z..., refusé sa garantie par lettre du 2 février 2000 adressée au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (le FGAO), au motif que les dommages ne résultaient pas d'un accident de la circulation mais d'une infraction volontaire, le BCF a obtenu de cet organisme le remboursement de la somme totale de 756 251,76 euros ; que par lettre du 2 décembre 2004 adressée à la société Axa, le FGAO a contesté le refus de garantie qui lui était opposé par lettre adressée à l'assureur du véhicule, puis, par acte du 6 décembre 2006, a fait assigner celui-ci en remboursement de la somme versée au BCF ; que la société Axa lui a opposé la fin de non-recevoir de son action pour cause de prescription ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, lorsqu'un contrat d'assurance a été souscrit pour garantir les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile découlant de l'emploi du véhicule qui a causé l'accident et si l'assureur invoque une exception pour refuser sa garantie ou en réduire l'étendue, le fonds de garantie doit satisfaire à l'obligation de remboursement prévue à l'article R. 421-64 du même code ; que dans le cas prévu à l'alinéa précédent, l'assureur doit déclarer au fonds de garantie l'exception invoquée dans le délai maximal de six mois à compter de la date à laquelle il a eu connaissance des faits motivant cette exception ; que le fonds de garantie peut, dans le délai de six mois à compter de la date de cette déclaration, contester le bien fondé de l'exception invoquée ; que si le fonds de garantie use de son droit de contestation, l'assureur lui rembourse les sommes mises à la charge du fonds de garantie en vertu du premier alinéa du présent article ; que si l'assureur n'effectue pas ce remboursement, il peut y être contraint par ordonnance rendue par le juge des référés à la requête du fonds de garantie ;
Attendu que pour déclarer le FGAO irrecevable en son action tendant à obtenir le remboursement par la société Axa de la somme de 756 251,76 euros versée au BCF, l'arrêt énonce qu'aux termes de l'article R. 421-68 du code des assurances, l'assureur, qui invoque une exception pour refuser sa garantie, doit déclarer au fonds de garantie l'exception invoquée dans le délai maximal de six mois à compter de la date à laquelle il a eu connaissance des faits motivant cette exception, et que le fonds de garantie peut, dans le délai de six mois à compter de la date de cette déclaration, contester le bien-fondé de l'exception invoquée ; que cette disposition a été instituée lorsqu'une compagnie d'assurance dénie sa garantie, dans le cadre des procédures applicables aux accidents automobiles survenus à l'étranger et sans qu'elle soit limitée à la procédure de référé, afin de faire trancher dans un délai déterminé le contentieux pouvant naître entre l'assureur et le Fonds, qu'elle fixe donc, dans un souci d'intérêt général et de bonne administration de la justice, un délai de recours qui s'impose à peine de forclusion ; qu'en l'espèce, à la date du 2 février 2000, l'assureur écrivait au FGAO « qu'il ressort d'ores et déjà que nous sommes en présence d'un fait volontaire de la part du conducteur du véhicule, ce qui constitue un acte non assurable » ; que par courriers des 27 mai et 19 septembre 2003, il confirmait sa position au Fonds, qui ne s'y est opposé que par lettre du 2 décembre 2004, au-delà de six mois ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'article R. 421-68, alinéa 2, du code des assurances, lui offrant une simple faculté, laisse ouvert au FGAO le droit d'agir en justice pour contester le bien-fondé de l'exception de non-garantie invoquée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages la somme de 2 850 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'action du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages tendant à obtenir le remboursement par la société Axa de la somme de 756.251,76 ¿ versée au Bureau central français ;
Aux motifs qu'« aux termes de l'article R 421-68 du code des assurances "l'assureur (qui invoque une exception pour refuser sa garantie) doit déclarer au fonds de garantie l'exception invoquée dans le délai maximal de six mois à compter de la date à laquelle il a eu connaissance des faits motivant cette exception" et que "le fonds de garantie peut, dans le délai de six mois à compter de la date de cette déclaration, contester le bien-fondé de l'exception invoquée" ; que cette disposition a été instituée lorsqu'une compagnie d'assurance dénie sa garantie, dans le cadre des procédures applicables aux accidents automobiles survenus à l'étranger et sans qu'elle soit limitée à la procédure de référé, afin de faire trancher dans un délai déterminé le contentieux pouvant naître entre l'assureur et le Fonds, qu'elle fixe donc, dans un souci d'intérêt général et de bonne administration de la justice, un délai de recours qui s'impose à peine de forclusion ; qu'en l'espèce, à la date du 2 février 2000, l'assureur écrivait au Fonds qu'"il ressort d'ores et déjà que nous sommes en présence d'un fait volontaire de la part du conducteur du véhicule, ce qui constitue un acte non assurable" ; que par courriers des 27 mai et 19 septembre 2003, il confirmait sa position au Fonds, qui ne s'y est opposé que par lettre du 2 décembre 2004, au-delà de six mois ; que la forclusion est donc acquise et l'action du Fonds irrecevable » (arrêt attaqué, p. 3, § 2 à 4) ;
Alors que l'écoulement du délai de six mois laissé au Fonds de garantie pour user du droit de contestation que lui ouvre l'article R. 421-68, deuxième alinéa, du code des assurances a pour seule conséquence de le priver de la faculté d'obtenir de plein droit le reversement par l'assureur de l'indemnisation remboursée au Bureau central français ; qu'en revanche, à l'expiration de ce délai, le Fonds conserve le droit d'agir en justice pour faire reconnaître le mal-fondé du refus de garantie de l'assureur, et obtenir la condamnation de ce dernier à supporter la charge définitive de la dette d'indemnisation ; qu'en jugeant le contraire, en l'espèce, et en estimant que l'inobservation du délai précité de six mois rendait le Fonds de garantie irrecevable à agir contre la société Axa, la cour d'appel a violé l'article R. 421-68 du code des assurances.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages au paiement des dépens de première instance et d'appel ;
Alors que seules peuvent être prises en charge par le F.G.A.O. les indemnités dues aux victimes d'accidents de la circulation ; que les dépens ne figurent pas au rang des charges que le F.G.A.O. peut être tenu d'assurer ; qu'en condamnant le Fonds de garantie aux dépens de première instance et d'appel, la cour d'appel a violé les articles L. 421-11, R. 421-64 et R. 421-68 du code des assurances.