LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 février 2012), que M. et Mme X..., aux droits desquels se trouve la société Gec X..., ont donné à bail à M. Y...un local pour un usage exclusivement professionnel ; que ce bail s'est renouvelé par tacite reconduction sans modification des clauses et conditions du contrat initial ; que se prévalant de la clause d'indexation stipulée au bail, la société Gec X... a délivré à M. Y...un commandement de payer ainsi qu'un congé à effet au 30 juin 2006 ; que M. Y...a alors assigné la bailleresse en annulation du congé et remboursement des sommes payées au titre de la révision du loyer ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y...fait grief à l'arrêt de rejeter les demandes tendant à voir dire non écrite la clause d'indexation et restituer les sommes payées, alors, selon le moyen, que la clause de révision du loyer stipulée au bail à effet du 1er juillet 1988 conclu entre M. Y..., preneur, et les époux X..., bailleurs, mentionnait que « le loyer sera révisé chaque année le 1er juillet. Indice de référence : 4e trimestre 1987. Valeur 890 » ; qu'en jugeant néanmoins, pour débouter le preneur de sa demande de voir dire illicite cette clause en ce que, l'indice de référence étant constant, elle revenait à prendre en compte une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision, ce qui est prohibé par l'article L. 112-1 du code monétaire et financier, qu'il convenait de retenir que les parties étaient convenues de la révision du loyer chaque année à la date anniversaire du contrat, impliquant une évolution de l'indice sur douze mois, la référence à l'indice du quatrième trimestre 1987 n'étant que l'illustration de leur volonté de prendre en compte les derniers indices publiés tant au début qu'à la fin de la période concernée par la révision et de faire coïncider la durée de cette période avec celle de la durée d'évolution des indices retenus, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la clause de révision et ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'ambiguïté des termes de la clause rendait nécessaire, la cour d'appel a pu retenir que les parties étaient convenues de la révision du loyer chaque année à la date anniversaire du contrat, impliquant une évolution de l'indice sur douze mois, la référence à l'indice du quatrième trimestre 1987 n'étant que l'illustration de leur volonté de prendre en compte les derniers indices publiés tant au début qu'à la fin de la période concernée par la révision et de faire coïncider la durée de cette période avec celle de la durée d'évolution des indices retenus et rejeter en conséquence les demandes d'annulation de la clause et de remboursement des sommes versées au titre de l'indexation des loyers ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de débouter M. Y...de ses demandes principale et subsidiaire de restitution de sommes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte des termes clairs et précis de la clause de révision du loyer insérée au bail à usage exclusivement professionnel conclu à effet du 1er juillet 1988 entre M. Y..., preneur, et les époux X..., bailleurs, qu'aucun caractère automatique n'a été donné à cette révision ; qu'en jugeant néanmoins, pour refuser la restitution au preneur des sommes qu'il avait versées au titre d'un rappel de révision de loyer, que la clause litigieuse avait vocation à prendre effet de plein droit et qu'en prévoyant une révision annuelle impérative, les parties, excluant par là-même qu'elle soit subordonnée à la demande des bailleurs, avait exprimé l'intention que l'indexation s'opère automatiquement chaque année le 1er juillet, la cour d'appel a dénaturé les termes de la clause de révision et a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'en tout état de cause, dans ses conclusions d'appel, M. Y...faisait valoir que de juillet 2000 à juin 2009 il avait versé à titre de loyer les sommes de 107 019, 25, 8 756, 33, 11 490, 90, 23 712, 12 et 51 638, 88 euros, soit un total de 202 617, 48 euros ; que la cour d'appel qui, après avoir relevé qu'entre le 1er juillet 2000 et le 30 juin 2009, il était dû au titre des loyers la somme de 198 971, 52 euros, a retenu, pour débouter le preneur de sa demande de restitution de loyers indument versés, qu'il résultait des chiffres non critiqués par le bailleur, annoncés par M. Y...dans ses conclusions, qu'il a été payé durant la période de juillet 2000 à juin 2009 la somme de 195 309, 61 euros, a dénaturé les conclusions de M. Y...et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu que, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'ambiguïté des termes de la clause et des conclusions d'appel de M. Y...rendait nécessaire, la cour d'appel a pu retenir qu'en prévoyant une révision annuelle impérative, les parties avaient exprimé l'intention que l'indexation s'opère automatiquement chaque année le 1er juillet et qu'il résultait des chiffres non critiqués par la partie adverse que M. Y...avait déjà versé une certaine somme au titre des loyers pour la période considérée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y...à payer à la société Gec Baudouin la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de M. Y...;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour M. Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
M. Y...fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté ses demandes tendant à voir dire non écrite la clause d'indexation et de restitution des sommes payées ;
AUX MOTIFS QUE les relations contractuelles entre les parties sont en l'espèce soumises au droit commun et sont régies selon leur commune intention ; que par acte sous seing privé à effet au 1er juillet 1988, M. et Mme X... ont loué à M. Y...à usage exclusivement professionnel pour neuf ans un appartement situé ..., le bail stipulant au titre des conditions générales (article III) : " Le montant du loyer, librement fixé entre les parties, sera payable au domicile du bailleur. Il sera révisé chaque année en fonction de l'indice national INSEE du coût de la construction dont les éléments de référence sont indiqués en page 4 ", et, au titre des conditions particulières (page 4) : " le loyer sera révisé chaque année le 1er juillet, indice de référence : 4ème trimestre 1987 valeur 890 " ; que par lettre du 9 décembre 1996, l'administrateur de biens des bailleurs, aux droits desquels se trouvait alors la société Gec Baudouin, a confirmé l'accord des parties pour un renouvellement du bail pour une durée de six ans (à compter du 1er juillet 1997) moyennant un loyer principal de 10. 500 francs (1. 600, 71 euros) et a indiqué " qu'il ne sera rien changé aux autres clauses et conditions " ; que par lettre du 15 novembre 2005, l'administrateur de biens de la société Gec Baudouin a notifié à M. Y...son intention de lui notifier prochainement " une fin de bail pour le 1er juillet 2006 " ; qu'enfin, ledit administrateur de biens a proposé à M. Y...par lettre du 5 juillet 2006, qui l'a accepté, que le bail soit reconduit pour six années jusqu'au 30 juin 2009 ; (¿) qu'en dépit des termes imprécis de la clause qui ne définissent pas l'indice à prendre en compte chaque année pour le comparer à l'indice de référence, il convient de retenir que les parties sont convenues de la révision du loyer chaque année à la date anniversaire du contrat, impliquant une évolution de l'indice sur douze mois, la référence à l'indice du quatrième trimestre 1987 n'étant que l'illustration de leur volonté de prendre en compte les derniers indices publiés tant au début qu'à la fin de la période concernée par la révision et de faire coïncider la durée de cette période avec celle de la durée d'évolution des indices retenus ; qu'il s'ensuit que la clause est licite ;
ALORS QUE la clause de révision du loyer stipulée au bail à effet du 1er juillet 1988 conclu entre M. Y..., preneur, et les époux X..., bailleurs, mentionnait que « le loyer sera révisé chaque année le 1er juillet.
Indice de référence : 4ème trimestre 1987. Valeur 890 » ; qu'en jugeant néanmoins, pour débouter le preneur de sa demande de voir dire illicite cette clause en ce que, l'indice de référence étant constant, elle revenait à prendre en compte une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision, ce qui est prohibé par l'article L. 112-1 du code monétaire et financier, qu'il convenait de retenir que les parties étaient convenues de la révision du loyer chaque année à la date anniversaire du contrat, impliquant une évolution de l'indice sur douze mois, la référence à l'indice du quatrième trimestre 1987 n'étant que l'illustration de leur volonté de prendre en compte les derniers indices publiés tant au début qu'à la fin de la période concernée par la révision et de faire coïncider la durée de cette période avec celle de la durée d'évolution des indices retenus, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la clause de révision et ainsi violé l'article 1134 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
M. Y...fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de ses demandes principale et subsidiaire de restitution de sommes ;
AUX MOTIFS QUE la clause de révision du loyer stipulée en 1988, qui a pour but de faire varier le montant du loyer en fonction d'un indice choisi par les parties, est une clause d'échelle mobile qui a vocation à prendre effet de plein droit à la période définie ; qu'en prévoyant une révision annuelle impérative, les parties, excluant par la même qu'elle soit subordonnée à la demande des bailleurs, ont ainsi exprimé l'intention que l'indexation s'opère automatiquement chaque année le 1er juillet ; (¿) qu'en définitive, le loyer subissait entre 1988 et 2009 une indexation automatique, selon la formule : nouveau loyer = loyer actuel (hors charges) x nouvel indice connu au 4ème trimestre/ indice du 4ème trimestre précédent, ce qui a autorisé le bailleur, dans les limites de la prescription, à chiffrer des rappels dont M. Y...est mal fondé à soutenir qu'ils seraient, par principe, indus par l'effet de la prétendue illicéité de la clause litigieuse ; qu'il résulte des lettres précitées de l'administrateur de biens du 15 novembre 2005 et du 5 juillet 2006 qu'aucune indexation n'a été appelée jusqu'en 2005, le gestionnaire ayant alors calculé un rappel d'indexation dans la limite de la prescription depuis la révision du 1er juillet 2001 jusqu'à novembre 2005 ; (¿) qu'au 1er juillet 2000, les relations contractuelles étaient soumises à un nouveau contrat ayant prévu, à compter du 1 juillet 1997, un nouveau prix de loyer principal (1. 600, 71 euros), excluant ainsi que soit retenu à cette date comme le suggère M. Y...le loyer applicable en 1988 (1. 372, 04 euros) ; qu'il résulte du décompte annexé à la lettre de l'administrateur de biens du 29 janvier 2007 notifiant à M. Y...un rappel d'indexations sur la base d'une première révision non prescrite du 1er juillet 200l jusqu'au loyer révisé du 1er juillet 2006 que ce rappel a été calculé avec comme point de départ le loyer applicable au 1er juillet 1997 (1. 600, 71 euros) ; que la société Gec Baudouin ne proposant pas de revenir sur les calculs opérés dans ce décompte, il convient de tenir pour acquis un montant de loyer principal de 1. 600, 71 euros au 1er juillet 2000 ; que l'indexation contenue dans le décompte de la bailleresse, qui applique de manière constante pour chacune des révisions, du 1er juillet 2001 au 1er juillet 2006, la formule : nouveau loyer-1. 600, 71 euros x indice du 4ème trimestre précédent)/ indice du 4ème trimestre 1996, est, comme le fait valoir M. Y...(page 5 de ses conclusions et sa lettre du 7 août 2007), non conforme à la clause contractuelle et ne saurait être retenue ; qu'il y a lieu au contraire d'appliquer, pour la première révision du 1er juillet 2001, la formule : 1. 600, 71 x 1098 (indice 4ème trimestre 2000)/ 1072, 50 (indice 4ème trimestre 1999, voir pour le montant de cet indice le décompte annexé à la lettre du 15 novembre 2005), soit un nouveau loyer au 1er juillet 2001 de 1. 638, 77 euros ; que l'extrapolation de la formule pour les années suivantes aboutit, par application des indices non contestés figurant dans le décompte et dans la lettre du 12 janvier 2007 de l'administrateur de biens aux montants de loyer mensuel en principal suivants :- au 1er juillet 2002 : 1. 701, 45 euros,- au 1er juillet 2003 : 1. 749, 21 euros,- au 1er juillet 2004 : 1. 811, 90 euros,- au 1er juillet 2005 : 1. 893, 99 euros,- au 1er juillet 2006 : 1. 988, 01 euros,- au 1er juillet 2007 : 2. 098, 46 euros ; qu'il résulte du rapprochement de la lettre de l'administrateur de biens du 12 juillet 2007 et des avis d'échéances d'août 2008 à juin 2009 qu'aucune indexation n'a été appelée entre le 1er juillet 2008 et le 30 juin 2009 de sorte que l'indu réclamé par M. Y...pour cette dernière période doit être vérifié au regard des montants effectivement dus sur la base de la révision pratiquée en dernier lieu le 1er juillet 2007 ; qu'il résulte de ce qui précède qu'entre le 1er juillet 2000 et le 30 juin 2009, il était dû au seul titre des loyers en principal indexés la somme de 198. 971, 52 euros ; qu'il résulte des chiffres non critiqués par la partie adverse, annoncés par M. Y...dans ses conclusions et dans sa lettre du 8 février 2006 (s'agissant du montant du versement du loyer de décembre 2005), qu'il a été payé durant la même période la somme de 195. 309, 61 euros ; qu'en conséquence, M. Y...n'est créditeur d'aucun indu ; qu'il sera débouté de sa demande de restitution de somme tant principale que subsidiaire ;
1°) ALORS QUE il résulte des termes clairs et précis de la clause de révision du loyer insérée au bail à usage exclusivement professionnel conclu à effet du 1er juillet 1988 entre M. Y..., preneur, et les époux X..., bailleurs, qu'aucun caractère automatique n'a été donné à cette révision ; qu'en jugeant néanmoins, pour refuser la restitution au preneur des sommes qu'il avait versées au titre d'un rappel de révision de loyer, que la clause litigieuse avait vocation à prendre effet de plein droit et qu'en prévoyant une révision annuelle impérative, les parties, excluant par là-même qu'elle soit subordonnée à la demande des bailleurs, avait exprimé l'intention que l'indexation s'opère automatiquement chaque année le 1er juillet, la cour d'appel a dénaturé les termes de la clause de révision et a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
2°) ALORS QUE, en tout état de cause, dans ses conclusions d'appel, M. Y...faisait valoir que de juillet 2000 à juin 2009 il avait versé à titre de loyer les sommes de 107. 019, 25, 8. 756, 33, 11. 490, 90, 23. 712, 12 et 51. 638, 88 euros, soit un total de 202. 617, 48 euros ; que la cour d'appel qui, après avoir relevé qu'entre le 1er juillet 2000 et le 30 juin 2009, il était dû au titre des loyers la somme de 198. 971, 52 euros, a retenu, pour débouter le preneur de sa demande de restitution de loyers indûment versés, qu'il résultait des chiffres non critiqués par le bailleur, annoncés par M. Y...dans ses conclusions, qu'il a été payé durant la période de juillet 2000 à juin 2009 la somme de 195. 309, 61 euros, a dénaturé les conclusions de M. Y...et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile.