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23/04/2013 | FRANCE | N°11VE03330

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 23 avril 2013, 11VE03330


Vu la requête, enregistrée le 15 septembre 2011, présentée pour la société AUTOBUS AIXOIS par la société VEOLIA TRANSPORT, dont le siège social est Clos Pervil, Chemin du Viaduc Pont de l'Arc à Aix-en-Provence (13090), présenté par son représentant légal, par Mes Grousset etA..., avocats ; la société AUTOBUS AIXOIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0913154 du 12 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande en restitution des cotisations de taxe sur les salaires acquittées au titre des années 2006, 2007 et 2008, ai

nsi que les intérêts et pénalités y afférents ;

2°) de lui restituer la to...

Vu la requête, enregistrée le 15 septembre 2011, présentée pour la société AUTOBUS AIXOIS par la société VEOLIA TRANSPORT, dont le siège social est Clos Pervil, Chemin du Viaduc Pont de l'Arc à Aix-en-Provence (13090), présenté par son représentant légal, par Mes Grousset etA..., avocats ; la société AUTOBUS AIXOIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0913154 du 12 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande en restitution des cotisations de taxe sur les salaires acquittées au titre des années 2006, 2007 et 2008, ainsi que les intérêts et pénalités y afférents ;

2°) de lui restituer la totalité de ces impositions ;

3°) à titre subsidiaire, de lui restituer 278 610 euros au titre de l'année 2006, 288 622 euros au titre de l'année 2007 et 355 628 euros au titre de l'année 2008, ainsi que les intérêts y afférents ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société AUTOBUS AIXOIS soutient :

- en premier lieu, que le droit pour le Trésor de percevoir l'impôt s'apprécie au jour du fait générateur de l'impôt ; que la date de l'effet générateur est, en l'espèce, celle à laquelle sont perçus les salaires ; que la requérante était redevenue redevable de la taxe sur les salaires en raison d'une modification de la législation la rendant non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée au titre d'une partie de ses recettes ; qu'il n'est pas contesté que la requérante était redevable de la taxe sur la valeur ajoutée sur l'intégralité de ses recettes au cours des années litigieuses, en application d'une interprétation administrative opposable sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; que, dès lors, elle n'était pas redevable de la taxe sur les salaires ; que les évènements postérieurs sont sans incidence sur cette exigibilité ;

- qu'en deuxième lieu, les subventions en litige ne devaient pas être comprises dans le rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires ; qu'en effet, ne devaient être prises en compte que les recettes placées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée mais exonérées et les recettes situées hors du champ de la taxe sur la valeur ajoutée à la condition qu'elles constituent la contrepartie " d'opérations " au sens de la directive taxe sur la valeur ajoutée ;

- qu'en troisième lieu, les rémunérations versées aux personnels roulant devaient être comprises dans l'assiette de la taxe sur les salaires ; que le personnel de la société doit être différencié selon qu'il est exclusivement affecté au transport public de voyageurs, activité intégralement assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée , et qu'il est affecté à l'ensemble de l'activité de la société qu'il s'agisse de l'activité taxable ou encore des opérations concourant à l'activité ; que le personnel affecté exclusivement à des opérations ouvrant droit à la taxe sur la valeur ajoutée ne pouvait être passible de la taxe sur les salaires ;

- que, s'agissant en quatrième lieu, du bénéfice de la doctrine, le Tribunal a indiqué de manière erronée que la requérante ne pouvait le demander au motif qu'elle contesterait une imposition primitive et non un rehaussement d'imposition ; que, toutefois, la doctrine doit s'apprécier au jour du fait générateur de l'imposition et, à la date du fait générateur, la requérante avait bien fait application de la doctrine et pouvait en obtenir le bénéfice ; que, s'agissant de la décharge partielle demandée à titre subsidiaire, il s'agissait de rehaussements d'impositions pour lesquels la doctrine est opérante ;

- qu'en dernier lieu, s'agissant des pénalités pour déclaration tardive, le délai pour déposer les déclarations de taxe sur le salaires ne pouvait tant en droit qu'en équité courir qu'à compter de la date à laquelle l'administration a remboursé la taxe sur la valeur ajoutée collectée à tort par la requérante ; que ces sanctions fiscales n'ont pas été motivées en application de l'article 80 D du livre des procédures fiscales ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, notamment ses articles 6 et 13 ;

Vu la Constitution, notamment son article 61-1 ;

Vu la décision n° 2010-28 QPC du 17 septembre 2010 par laquelle le Conseil constitutionnel a déclaré l'article 231 du code général des impôts conforme à la Constitution ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 9 avril 2013 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Dioux, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la société AUTOBUS AIXOIS ;

1. Considérant que la société AUTOBUS AIXOIS, qui exploite le réseau de transports publics de voyageurs de la ville d'Aix-en-Provence dans le cadre d'une convention de délégation de service public, a soumis les subventions forfaitaires d'équilibre dont elle était bénéficiaire à la taxe sur la valeur ajoutée en admettant la " condition financière ", règle édictée par l'administration fiscale dans l'instruction 3 D.-1-85 du 21 janvier 1985 ; que, par deux décisions du 6 octobre 2005, la Cour de justice des communautés européennes a jugé que les règles dites de " la condition financière " limitaient le droit à déduction de certains assujettis et étaient, comme telles, incompatibles avec les règles de la sixième directive ; qu'en se fondant sur ces décisions, par réclamation contentieuse la société AUTOBUS AIXOIS a demandé la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée collectée à tort au titre des subventions de la période comprise entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2006 ; que cette réclamation a fait l'objet d'une admission totale par l'administration fiscale, soit par voie de remboursement, soit par voie d'imputation directe sur ses déclarations de chiffre d'affaires, dans les conditions prévues à l'article 208 de l'annexe II au code général des impôts ; que l'administration fiscale a estimé que la société était alors assujettie à la taxe sur les salaires, à raison d'un rapport d'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée inférieur à 90 % de son chiffre d'affaires de ces mêmes années ; que la société a spontanément souscrit ses déclarations à la taxe sur les salaires au titre des années 2006 et 2007 ; que le 26 janvier 2009, la société AUTOBUS AIXOIS, au titre de l'année 2008, a déclaré et payé la taxe sur les salaires ; que la société AUTOBUS AIXOIS a toutefois présenté le 20 février 2009 une réclamation contentieuse visant à obtenir la restitution de la taxe pour les années 2006, 2007 et 2008 et de la majoration de 10 % pour retard de déclaration et des intérêts de retard des années 2006 et 2007 ; que les services fiscaux ont rejeté cette réclamation par une décision du 1er octobre 2009 ; que le Tribunal administratif de Montreuil ayant rejeté sa demande en décharge, elle relève régulièrement appel dudit jugement ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que par une décision du 17 janvier 2012, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des grandes entreprises a accordé à la société AUTOBUS AIXOIS un dégrèvement correspondant au montant de la pénalité de 10 % applicable pour retard de déclaration pour les années 2006 et 2007, soit la somme totale de 60 432 euros ; que les conclusions de la requête de la société AUTOBUS AIXOIS relatives à ces impositions sont, dès lors, devenues sans objet ;

Sur le bien-fondé de la taxe sur les salaires :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 231 du code général des impôts : " 1. Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale ou pour les employeurs de salariés visés aux articles L. 722-20 et L. 751-1 du code rural, au titre IV du livre VII dudit code, et à la charge des personnes ou organismes (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédent celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 % au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (...) " ; que les règles du rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires sont autonomes par rapport au calcul du prorata de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée depuis l'intervention de l'article 18 de la loi de finances rectificative n° 93-1353 du 30 décembre 1993, qui a modifié l'article 231 du code général des impôts, à caractère interprétatif ;

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

4. Considérant, en premier lieu, que la requérante fait valoir qu'à la date du fait générateur de l'imposition soit, pour la taxe sur les salaires, la mise à disposition du salarié des sommes imposables que constituaient leurs salaires à la fin du mois, la législation applicable l'exemptait de taxe sur les salaires, il est toutefois constant que, pour l'ensemble de cette période, l'entreprise était assujettie à la taxe sur les salaires en application de la loi ; que la circonstance qu'à cette même date, elle aurait été assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée sur les subventions en litige par l'effet d'une doctrine dont elle avait demandé les bénéfices, au nombre desquels se trouvait l'exemption de la taxe sur les salaires, et que la Cour de justice des communautés européennes a ultérieurement déclaré non conforme à la 6ème directive, est sans incidence sur le fait générateur de l'impôt à cette même période, dès lors qu'elle a volontairement présenté à l'administration fiscale une demande de remboursement ou de restitution de la taxe sur la valeur ajoutée déjà acquittée, en renonçant ainsi au bénéfice de la doctrine dont elle s'était prévalu, intégralement satisfaite en l'espèce ; qu'elle n'est pas fondée à soutenir que le principe de sécurité juridique aurait été méconnu dès lors qu'elle a renoncé au bénéfice de la doctrine et que l'administration fiscale l'a, en conséquence, assujettie à la taxe sur les salaires dans le respect du délai légal de reprise, qui ne présente pas en lui-même de caractère rétroactif ; que, par suite, les moyens tirés de ce qu'à la date du fait générateur, pour l'ensemble de ces années, elle n'était pas redevable de la taxe sur les salaires et que son assujettissement ultérieur méconnaîtrait le principe de sécurité juridique doivent être écartés ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 % de son montant s'entend, tel qu'il résulte clairement des termes de la loi, du total des " recettes et autres produits ", y compris ceux qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, pour examiner si la société AUTOBUS AIXOIS était redevable de la taxe sur les salaires, les subventions devaient être prises en compte puisqu'elles sont des produits au sens comptable et au sens de la loi fiscale et qu'elles n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, si la requérante fait valoir que pour le calcul du dénominateur du prorata de la taxe sur les salaires, les subventions en litige auraient dû être retirées, il résulte des termes mêmes de la loi que le chiffre d'affaires total s'entend du total des " recettes et autres produits ", y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée sans que la société puisse utilement faire valoir que le terme " d'opérations " devait être entendu au sens strict que lui donnent les articles 1 et 2 de la directive TVA 2006/112/CE du 28 novembre 2006, soit les livraisons de biens et de services effectuées à titre onéreux et assorties de contreparties, cette directive n'étant pas applicable à la taxe sur les salaires ; que, s'agissant du calcul du chiffre porté au numérateur, les subventions y étaient nécessairement comprises en tant qu'opérations hors champ ; que la société ne peut utilement se prévaloir de la circonstance, inopérante, suivant laquelle les subventions ne seraient pas prises en compte pour le calcul du numérateur du prorata de taxe sur la valeur ajoutée en application de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, le calcul du prorata de déduction en matière de taxe sur la valeur ajoutée étant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, autonome au regard de celui applicable à la taxe sur les salaires ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les subventions en litige devraient être retirées du chiffre d'affaires de la société AUTOBUS AIXOIS pour examiner si elle pouvait être assujettie à la taxe sur les salaires, en application de l'article 231 du code général des impôts précité ou pour calculer le ratio prévu par les dispositions législatives ci-dessus rappelées tant au dénominateur qu'au numérateur, doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'en application des dispositions du premier alinéa de l'article 231 du code général des impôts précitées, les collectivités locales ne sont pas assujetties à la taxe sur les salaires, sans qu'y fassent obstacle les dispositions de l'article 1654 du même code qui concernent les établissements et les exploitations industrielles et commerciales de l'Etat ou des collectivités locales qui effectuent les mêmes opérations que les entreprises privées et sont assujetties aux impôts et taxes de toute nature dans les conditions de droit commun, ni celles de l'article 165 de l'annexe IV au même code qui ne concernent que les établissements publics à caractère industriel et commercial ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que la société AUTOBUS AIXOIS soutient que le non assujettissement des collectivités locales à la taxe sur les salaires serait discriminatoire, en application des stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1 du premier protocole additionnel à la même convention, au motif qu'une collectivité locale qui exploiterait elle-même, en régie directe, les transports en commun, ne serait pas assujettie à la taxe alors qu'une entreprise qui bénéficierait d'une délégation de service public le serait ; qu'aux termes des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation " ; qu'en vertu des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes " ;

8. Considérant qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de conditions objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères rationnels en rapport avec les buts de la loi ;

9. Considérant que la société AUTOBUS AIXOIS soutient que les dispositions du premier alinéa du 1 de l'article 231 du code général seraient discriminatoires ; qu'ainsi que l'a d'ailleurs jugé le Conseil constitutionnel, dans sa décision susvisée du 17 septembre 2010, les critères d'assujettissement à la taxe sur les salaires correspondent eux-mêmes à une différence de situation entre des contribuables qui relèvent de secteurs d'activités différents, nonobstant l'existence d'une masse salariale identique ; qu'il suit de là que la distinction ainsi introduite par le législateur entre les collectivités locales qui exercent une activité de transports en régie directe sans personnalité juridique distincte et les entreprises délégataires de services publics de transports, qui se trouvent placés dans des situations différentes, est fondée sur des critères rationnels en rapport avec les buts de la loi, n'a pas abouti à des effets disproportionnés au regard des buts poursuivis et ne peut être regardée comme une discrimination prohibée par les stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1 du premier protocole additionnel à cette convention ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté ;

En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales " ;

11. Considérant que les termes de la documentation de base 5-L 122 à jour au 1er juin 1995 prévoient que l'employeur n'est redevable d'aucune taxe sur les salaires au titre de la même année dès lors qu'il était assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée sur 90 % au moins de son chiffre d'affaires au cours de l'année précédente ; que si la société requérante s'en est prévalue pour n'être pas assujettie à la taxe sur les salaires, il est constant, toutefois, qu'elle a demandé la restitution et, selon les années, le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée en renonçant ainsi au bénéfice de la doctrine, jugée non conforme à la sixième directive par les décisions de la Cour de justice des communautés européennes ; que, par suite, elle devenait imposable à la taxe sur les salaires, qu'elle a d'ailleurs acquittée sans se prévaloir de la doctrine ; que, par suite, elle ne peut plus utilement se prévaloir de ces dispositions ;

Sur les conclusions subsidiaires :

12. Considérant qu'aux termes de l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts : " Lorsqu'un assujetti a des secteurs d'activité qui ne sont pas soumis à des dispositions identiques au regard de la TVA, ces secteurs font l'objet de comptes distincts pour l'application du droit à déduction (...) " ; et qu'aux termes de l'article 209 de la même annexe applicable au 1er janvier 2008 : " les opérations situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et les opérations imposables doivent être comptabilisées dans des comptes distincts pour l'application du droit à déduction. Il en va de même pour les secteurs d'activité qui ne sont pas soumis à des dispositions identiques au regarde la taxe sur la valeur ajoutée " ;

13. Considérant que la société AUTOBUS AIXOIS demande le bénéfice de la constitution en secteurs distincts pour obtenir l'assujettissement total à la taxe sur la valeur ajoutée d'un de ses secteurs qui échapperait à la taxe sur les salaires, soit la rémunération des personnels affectés à la circulation des bus, les subventions versées par les collectivités locales n'affectant, selon elle, aucunement ce secteur ; que doivent être regardés comme relevant de secteurs différents, pour l'exercice des droits à déduction de taxe sur la valeur ajoutée , et, par suite, pour la détermination du rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires, des activités qui mettent en oeuvre des cycles distincts d'opérations, le caractère distinct impliquant que soient fournis ou livrés à des tiers des services non liés entre eux ; qu'il résulte de l'instruction que le secteur des personnels dits " roulant ", assurant le transport des voyageurs par bus et le secteur administratif qui gère et dirige l'activité et comptabilise les subventions versées pour le fonctionnement et l'équilibre du secteur public de transports de voyageurs, participent à la même activité, la société ayant pour seule et unique activité le transport public de voyageurs ; qu'ainsi, ces deux secteurs complémentaires, alors même qu'ils feraient appel à des personnels distincts et à des techniques propres, ne peuvent être regardés comme mettant en oeuvre des cycles distincts d'opérations, eu égard aux liens étroits existant entre leurs activités ; que, dès lors que le critère tenant à l'existence d'un cycle d'activités distinct n'est pas rempli en l'espèce, la circonstance que ces activités relèveraient d'une comptabilité analytique séparée est sans influence sur la solution du litige ; que, par suite, si dans son instruction administrative référencée 5 L-4-95 du 10 mars 1995, l'administration admet explicitement la constitution d'un compte distinct pour la perception de dividendes, ce point qui n'ajoute rien à la loi fiscale et qui concerne, en outre, un secteur d'activité différent, ne peut être davantage utilement invoqué ; que, dans ces conditions, la demande de la société requérante tendant à la prise en compte de secteurs distincts d'activité n'est pas fondée au regard tant des dispositions précitées de l'article 213 du code général des impôts que de celles de l'article 209 de l'annexe II au même code qui n'ont pas été, en l'espèce, méconnues et n'est pas davantage fondée sur le terrain de la doctrine ;

Sur le point de départ des intérêts de retard :

14. Considérant qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : " I. - Toute somme, dont l'établissement ou le recouvrement incombe à la direction générale des impôts, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard. A cet intérêt s'ajoutent, le cas échéant, les sanctions prévues au présent code " ; que l'intérêt de retard institué par ces dispositions vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ;

15. Considérant que l'administration fiscale a prononcé, en cours d'instance, la décharge de la pénalité de retard de 10 % infligée à la société AUTOBUS AIXOIS alors que les intérêts de retard ont été, en l'espèce, maintenus ; qu'ils sont applicables aux années d'imposition 2006 et 2007 et sont prévus par le premier alinéa ou le I de l'article 1727 du code général des impôts, selon la rédaction applicable à l'année d'imposition en litige ; qu'ils sont dus par le contribuable dès lors qu'il n'a pas acquitté l'imposition dans le délai légal ; que la société AUTOBUS AIXOIS fait valoir que l'administration a, à tort, considéré que le point de départ des intérêts de retard était le 31 janvier de l'année suivant l'année d'imposition, soit respectivement les 31 janvier 2007 et 2008, alors que l'impôt n'aurait été exigible qu'en mars 2008, si l'on s'en rapporte aux propres écritures de l'administration fiscale et que cette date constituerait le point de départ du délai légal ; qu'il ne résulte toutefois pas de l'instruction ni d'ailleurs d'aucune disposition législative ou réglementaire applicable que cette date aurait constitué le point de départ du délai légal mentionné à l'article 1727 du code général des impôts, d'ailleurs mentionné dans les avis de mise en recouvrement adressés à la requérante soit, respectivement, les 31 janvier 2007 et 2008 ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société AUTOBUS AIXOIS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de la société AUTOBUS AIXOIS tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle, d'une part, à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société AUTOBUS AIXOIS demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, une collectivité publique qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat ne saurait présenter une demande à ce titre en se bornant à faire état d'un surcroît de travail pour ses services, sans se prévaloir de frais spécifiques exposés par elle en indiquant leur nature ; que, par suite, les conclusions du ministre de l'économie et des finances ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de se prononcer sur la pénalité de 10 % appliquée pour retard de déclaration au titre des années 2006 et 2007, pour un montant de 60 432 euros.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société AUTOBUS AIXOIS et les conclusions du ministre de l'économie et des finances présentés sur le fondement des dispositions de l'article l. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetés.

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N° 11VE03330 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11VE03330
Date de la décision : 23/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-05-01 Contributions et taxes. Impôts assis sur les salaires ou les honoraires versés. Versement forfaitaire de 5 p. 100 sur les salaires et taxe sur les salaires.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : C/M/S/ BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-04-23;11ve03330 ?
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