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03/07/2012 | FRANCE | N°11VE00278

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 03 juillet 2012, 11VE00278


Vu le recours, enregistré le 17 janvier 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0809640 du 23 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette des cotisations minimales de taxe professionnelle auxquelles elle avait été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ;

2°) de rétablir la SAS Grands Magasins Galeries Lafaye

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Vu le recours, enregistré le 17 janvier 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0809640 du 23 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette des cotisations minimales de taxe professionnelle auxquelles elle avait été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ;

2°) de rétablir la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette aux rôles de la cotisation minimale de taxe professionnelle au titre des années 2004 et 2005 à hauteur des impositions initiales ;

Le ministre soutient que si la restructuration de juin 2003 a eu pour objet de localiser les fonds de commerce antérieurement détenues par la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette dans deux entités entièrement détenues par cette société, qui deviennent locataires des actifs (immeubles et agencements) détenus par cette société, c'est toujours la société mère qui conserve la maîtrise totale du dispositif et demeure en mesure de déterminer les orientations de la politique du groupe, notamment en ce qui concerne les modalités de mise en oeuvre des moyens mobilisés, dont elle est la seule propriétaire ; que si les opérations d'apports partiels opérées en 2003 se sont traduites par la dissociation de la propriété immédiate d'une fraction des actifs, cette disjonction juridique ne modifie pas leur objet et leur destination ; que la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette n'a nullement le rôle passif d'un gestionnaire civil d'immeubles se bornant à percevoir des rentes foncières en contrepartie de concessions de jouissance d'actifs indifférenciés à des preneurs quelconques ; que les concessions de jouissance ne sont que les modalités juridiques d'une stratégie économique d'ensemble ; que les contrats de location stipulent que les locaux seront obligatoirement exploités sous l'enseigne Galeries Lafayette, que les sous-locations ne pourront être conclues qu'à l'égard du GIE Cofinoga ou de Galeries Lafayette Voyages, membres du groupe Galeries Lafayette et que le droit au bail ne pourra être cédé qu'à l'acquéreur du fonds, qu'aucun dépôt de garantie ne sera exigé et que l'adhésion à l'association des commerçants est obligatoire ; que le souci du contrat est de permettre à la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette d'assurer la continuité d'exploitation du groupe et non d'assurer la simple gestion patrimoniale de ses biens ; que c'est pour cette raison que plusieurs contrats de bail conviennent d'un loyer qui ne représente pas nécessairement la valeur du marché ; que les locations ne portent pas sur des locaux nus indifférenciés susceptibles d'une pluralité d'utilisations mais sur des établissements munis des agencements fixes nécessaires aux fonctions d'un grand magasin à l'identité caractérisée ; qu'il ne saurait être considéré que la restructuration dont la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette a pris l'initiative a pour effet de retirer toute coloration professionnelle aux opérations dont elle organise l'agencement ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2012 :

- le rapport de M. Tar, premier conseiller,

- les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public,

- et les observations de Me Bussac, pour la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette ;

Considérant que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT relève régulièrement appel du jugement du 23 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette des cotisations minimales de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : " I. La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée. " ; que selon l'article 1647 E du même code : " I. La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7 600 000 euros est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie au II de l'article 1647 B sexies.(...) " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, jusqu'en 2003, la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette était propriétaire des murs et des fonds de commerce exploités sous les enseignes Galeries Lafayette et Nouvelles Galeries, à l'exception du magasin du boulevard Haussmann à Paris, et que ces fonds étaient donnés en location-gérance à des sociétés du Groupe Galeries Lafayette ; qu'à la suite d'une restructuration du groupe en 2003, la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette a fait apport à la société Magasins Galeries Lafayette et à la société Les Galeries des fonds de commerce des magasins des enseignes Galeries Lafayette et Nouvelles Galeries ; qu'elle est restée propriétaire, et à titre accessoire crédit preneur, des immeubles dans lesquels les fonds apportés sont exploités, et a donné à bail ces immeubles à la société Magasins Galeries Lafayette et à la société Les Galeries ;

Considérant que la location d'un immeuble nu par son propriétaire ne présente pas le caractère d'une activité professionnelle au sens des dispositions précitées de l'article 1447 du code général des impôts ; que si le ministre soutient que les locations et sous-locations effectuées par la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette ne portent pas sur des locaux nus indifférenciés mais sur des établissements munis des agencements nécessaires aux fonctions d'un grand magasin à l'identité caractérisée, il résulte de l'instruction que la valeur des biens mobiliers, restant inscrits au bilan de la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette après l'opération d'apport, qui doivent donc être regardés comme étant destinés à l'aménagement de ces immeubles en vue de leur exploitation, représente une valeur globale d'environ 1,8 millions d'euros ; qu'au regard de la valeur globale de ces immeubles, d'environ 370 millions d'euros, et de celle des biens mobiliers nécessaires à cette exploitation, d'environ 187 millions d'euros à la fin de l'année 2005, cette valeur ne constitue qu'un pourcentage modeste des actifs immobilisés des exploitants insuffisant pour considérer que les biens faisant l'objet de la location par la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette seraient aménagés en vue de leur exploitation ; qu'ainsi, sauf à démontrer que la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette exerce son activité de location d'immeubles nus de manière régulière et que cette activité repose sur la mise en oeuvre de moyens matériels ou intellectuels ou encore que le bail a le caractère d'un bail commercial et que le bailleur partage avec le preneur les risques de l'exploitation, le ministre ne peut soutenir que la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette serait susceptible d'être assujettie à la taxe professionnelle au titre de son activité de location de locaux commerciaux nus ;

Considérant, d'une part, que pour caractériser l'existence de moyens matériels ou intellectuels mis en oeuvre par la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette pour les besoins de son activité de location, dont le caractère régulier n'est pas contesté, le ministre fait état du versement d'une somme de 279 999 euros de salaires à ses collaborateurs au titre de la gestion de cette activité et d'une somme de 345 798 euros à des sous-traitants, également dans le cadre de cette gestion, mais pour la seule année 2006, qui ne fait pas l'objet du présent litige ; que ces salaires versés ne paraissent pas excéder ceux qui résulteraient de la gestion civile d'une activité de location d'un parc d'immeubles dont la valeur, comme il l'a déjà été dit, est d'environ 370 millions d'euros et qui ont produit environ 58 millions d'euros de loyers au cours de l'année 2006 ; qu'au surplus, la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette a indiqué au cours de ses observations orales à l'audience que la somme versée à des sous-traitants s'expliquait presque entièrement par des honoraires qu'elle a versé à des avocats dans le cadre d'une restructuration qui s'est déroulée au cours de la seule année 2006 ; que compte tenu de ces éléments, la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette ne peut être regardée comme ayant mis en oeuvre des moyens matériels et intellectuels excédant ceux nécessaires à une activité civile de location ;

Considérant, d'autre part, que si le ministre affirme que plusieurs contrats de bail conviennent d'un loyer qui ne représente pas la valeur du marché, il n'établit ni même n'allègue que la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette partagerait avec les sociétés Magasins Galeries Lafayette et Les Galeries les risques de leur exploitation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et nonobstant les clauses des baux qui traduisent les liens entre ces sociétés et la volonté d'assurer la continuité d'exploitation du groupe, que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a estimé que les activités de location et de sous-location de la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette ne devaient pas être assujetties à la taxe professionnelle et a déchargé cette société des cotisations minimales de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ; qu'ainsi, son recours ne peut qu'être rejeté ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la SAS Grands Magasins Galeries Lafayette une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 11VE00278


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE00278
Date de la décision : 03/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-04-01 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Professions et personnes taxables.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Gabriel TAR
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : C/M/S/ BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-07-03;11ve00278 ?
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