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25/10/2012 | FRANCE | N°11NT02197

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 25 octobre 2012, 11NT02197


Vu la requête, enregistrée le 8 août 2011, présentée pour M. Gérard X, demeurant ..., par Me Gerges, avocat au barreau de Chartres ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902932 du tribunal administratif d'Orléans en date du 27 mai 2011 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2004, 2005 et 2006 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de lui accorder la décharge demandée ;

3°) de met

tre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code d...

Vu la requête, enregistrée le 8 août 2011, présentée pour M. Gérard X, demeurant ..., par Me Gerges, avocat au barreau de Chartres ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902932 du tribunal administratif d'Orléans en date du 27 mai 2011 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2004, 2005 et 2006 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de lui accorder la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

...........................................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2012 :

- le rapport de M. Francfort, président-assesseur,

- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;

Considérant que M. X était, au cours des années 2004 à 2006, trésorier et salarié des associations Centre National de Formation Coiffure (CNFC) et Eure-et-Loir Arts TV (ELA TV) ; que ces associations ont fait l'objet de vérifications de comptabilité au titre des exercices 2004, 2005 et 2006, à l'issue desquelles l'administration les a assujetties à des cotisations d'impôt sur les sociétés et a considéré qu'une partie des sommes réintégrées constituaient des revenus distribués, qu'elle a imposés entre les mains de M. X dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que celui-ci fait appel du jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 27 mai 2011 en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a de ce fait été assujetti au titre des années 2004 à 2006, ainsi que des pénalités y afférentes ; que, par la voie du recours incident, le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat demande l'annulation dudit jugement en tant qu'il a réduit la base imposable de M. X de 14 172 euros au titre de l'année 2005 et de 360 euros au titre de l'année 2006 ;

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que M. X ne peut utilement invoquer les irrégularités qui entacheraient les propositions de redressements notifiées à l'issue des vérifications de comptabilité des associations à l'origine des distributions ; qu'en tout état de cause les deux propositions de rectification adressées à M. X, la première le 18 décembre 2007 au titre de l'année 2004 et la seconde le 29 avril 2008 au titre des années 2005 et 2006, comportent la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition ; qu'elles comportent en annexe le détail des rehaussements à l'impôt sur les sociétés des associations à l'origine des revenus distribués et énoncent ainsi de manière suffisante les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés ; que le service a ainsi satisfait à l'obligation de motivation imposée par l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution " ; que ces dispositions, qui se bornent à autoriser l'administration fiscale à inviter la société qui a manqué aux obligations déclaratives prévues à l'article 223.2.2° du même code à révéler l'identité des bénéficiaires de revenus distribués non déclarés, n'obligent pas le service à recourir à cette procédure avant d'imposer des revenus distribués sur le fondement des dispositions des articles 109 et suivants du code lorsque le bénéficiaire des distributions est clairement identifiable comme c'est le cas en l'espèce ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ;/ (...). /Les sommes imposables sont déterminées pour chaque période retenue pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés par la comparaison des bilans de clôture de ladite période et de la période précédente selon des modalités fixées par décret en conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés " ;

Considérant que l'administration a, sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, réintégré dans les revenus imposables de M. X des sommes considérées comme lui ayant été distribuées par l'association ELA TV pour un montant de 53 839 euros au titre de l'année 2004 et de 12 671 euros au titre de l'année 2005, ainsi que par l'association CNFC pour un montant de 85 616 euros au titre de l'année 2006 ;

Considérant, en premier lieu, que l'association ELA TV, bien qu'exerçant une activité commerciale par nature et étant donc soumise aux impôts commerciaux, n'a pas tenu de comptabilité et n'a déposé aucune déclaration de taxe sur la valeur ajoutée ou de résultats à l'impôt sur les sociétés, malgré l'envoi de mises en demeure ; qu'ainsi, en l'absence de précision dans les statuts de l'association sur la date de clôture de ses comptes, comme en l'absence de déclaration de ses résultats et de tout autre élément en faveur d'une autre date de clôture, les exercices de l'association étaient réputés coïncider avec l'année civile ; que les contrôles effectués ont révélé que les exercices des années 2004, 2005 et 2006 étaient bénéficiaires s'agissant des deux premiers et déficitaire s'agissant du troisième ; qu'en ce qui concerne l'association CNFC, celle-ci a déposé hors délai une déclaration de résultats à l'impôt sur les sociétés faisant apparaitre un déficit pour l'exercice du 14 janvier 2005 au 31 décembre 2005 et n'a pas souscrit de déclaration pour l'année 2006, malgré une mise en demeure ; que, de ce fait, la procédure de rectification contradictoire lui a été appliquée pour l'année 2005 et celle de la taxation d'office pour l'année 2006 ; que ces procédures ont conduit à arrêter un résultat bénéficiaire pour les deux exercices 2005 et 2006 ; qu'ainsi M. X n'est pas fondé à soutenir que l'administration ne démontrerait pas, pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, la réalisation par ces deux associations de bénéfices rattachés à une période donnée ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. X fait valoir qu'un certain nombre de dépenses dont la déductibilité été remise en cause pour des motifs de forme ont été versées à d'autres personnes, notamment des formateurs de mannequins ; qu'en réponse à ce moyen imprécis l'administration a fait valoir, sans être contredite, que toutes les sommes réintégrées dans les résultats des associations n'ont pas été imposées entre les mains de M. X, celles étant identifiées comme perçues par un tiers ayant été exclues de la masse des revenus distribués ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que les présidents des associations ELA TV et CNFC, dont l'un était introuvable et l'autre travaillait à l'étranger, n'intervenaient pas dans la gestion quotidienne de ces associations, qui était intégralement assurée par M. X, lequel disposait de la signature sur les comptes bancaires ; que le requérant a été l'unique interlocuteur de l'administration au cours de la vérification de comptabilité dont ont fait l'objet les deux associations et a admis présider de fait l'association ELA TV aux termes d'un procès-verbal daté du 3 décembre 2007 ; que, dans ces conditions, et nonobstant la circonstance que M. X, tout en étant trésorier, a également été salarié des associations pendant une certaine période et a d'ailleurs assigné l'association CNFC devant la juridiction prud'homale, l'administration doit être regardée comme établissant que le requérant était " maître de l'affaire " et pouvait disposer sans contrôle des fonds des deux associations ; qu'ainsi, elle établit que les sommes considérées comme distribuées ont été appréhendées par M. X ;

Considérant, en dernier lieu, que M. X soutient que l'administration ne démontre pas un désinvestissement égal aux sommes redressées au niveau des deux associations, et fait valoir qu'une grande partie des encaissements, qui ont eu lieu dans le cadre de la procédure collective de liquidation judiciaire, ne peuvent être imposées entre ses mains ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que les résultats distribués entre les mains de M. X ont été déterminés à partir des recettes encaissées, et non des recettes déclarées ; qu'en ce qui concerne les recettes prises en compte pour la détermination des résultats de l'association CNFC en 2006, le montant du résultat distribué a été déterminé à partir des crédits bancaires portés sur les comptes de l'association en 2006 ; qu'ainsi, le moyen tiré d'une confusion avec les sommes encaissées par le mandataire judicaire en 2008 ne peut qu'être écarté comme manquant en fait ;

En ce qui concerne les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années en litige : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ;

Considérant qu'en relevant, pour l'association ELA TV, l'absence de tenue et de présentation de documents comptables obligatoires, l'importance du montant des recettes encaissées non déclarées et le caractère lucratif de l'association et, pour l'association CNFC, l'existence d'une comptabilité irrégulière et non probante, la comptabilisation de factures sans justificatifs ou fausses et les avantages en nature que s'est octroyé l'intéressé, l'administration doit, compte tenu de ce que le requérant était " maître de l'affaire ", être regardée comme rapportant la preuve qui lui incombe du manquement délibéré commis par M. X ; que c'est dès lors à bon droit qu'elle a fait application de la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

Sur le recours incident :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices(...) " ; que sur le fondement de ces dispositions l'administration a réintégré dans les revenus imposables de M. X des sommes considérées comme lui ayant été distribuées par l'association ELA TV pour un montant de 719 euros au titre de l'année 2004, de 4 320 euros au titre de l'année 2005 et de 360 euros au titre de l'année 2006 ainsi que par l'association CNFC pour un montant de 14 172 euros au titre de l'année 2005 ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a accordé à M. X la décharge des impositions correspondantes au motif que les conditions d'application des dispositions précitées au membre d'une association n'étaient pas réunies ; que, par la voie du recours incident, le ministre demande à la cour de procéder à une substitution de base légale et de rétablir dans la base imposable les sommes de 14 172 euros au titre de l'année 2005 et de 360 euros au titre de l'année 2006, sur le fondement des dispositions du c de l'article 111 du code général des impôts, selon lesquelles sont notamment considérés comme revenus distribués les rémunérations et avantages occultes ;

Considérant que l'administration est en droit d'invoquer à tout moment de la procédure contentieuse, et sans être tenue d'adresser une nouvelle proposition de rectification au contribuable, tout moyen nouveau propre à donner un fondement légal à une imposition contestée devant le juge de l'impôt, sous réserve de ne pas priver le contribuable des garanties de procédure prévues par la loi ;

Considérant que la somme de 14 172 euros correspond à des frais réglés en 2005 par l'association CNFC et non justifiés par celle-ci et la somme de 360 euros à la location en 2006 par l'association ELA TV d'un véhicule qui n'a que partiellement été utilisé pour les besoins de celle-ci ; qu'en tant que " maître de l'affaire " M. X est présumé avoir appréhendé lesdites sommes, qui n'ont pas été comptabilisées, et avoir ainsi bénéficié de rémunérations et avantages occultes au sens du c de l'article 111 du code général des impôts ;

Considérant que la substitution de base légale demandée par le ministre n'est pas de nature à priver M. X d'une garantie de procédure ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à demander que les sommes de 14 172 euros s'agissant de l'année 2005 et de 360 euros s'agissant de l'année 2006 soient réintégrées dans la base imposable de M. X sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête susvisée de M. X est rejetée.

Article 2 : Les sommes de 14 172 euros s'agissant de l'année 2005 et de 360 euros s'agissant de l'année 2006 sont réintégrées dans la base imposable de M. X.

Article 3 : M. X est rétabli à l'impôt sur le revenu, en droits et pénalités, à raison d'un complément en base de 14 172 euros au titre de l'année 2005 et de 360 euros au titre de l'année 2006.

Article 4 : Le jugement susvisé du tribunal administratif d'Orléans en date du 27 mai 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Gérard X et au ministre de l'économie et des finances.

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N° 11NT02197


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11NT02197
Date de la décision : 25/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. PIOT
Rapporteur ?: M. Jérôme FRANCFORT
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : GERGES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-10-25;11nt02197 ?
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