LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- Le procureur général près la cour d'appel de Paris,- L'Etat, partie civile,
contre l'arrêt n° 407 de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, 2e section, en date du 23 juin 2011, qui, dans l'information suivie notamment contre M. Haroun X... du chef de blanchiment en bande organisée d'escroqueries aggravées, a prononcé sur une mesure de saisie de patrimoine ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 avril 2012 où étaient présents : M. Louvel président, Mme Guirimand conseiller rapporteur, M. Blondet, Mme Koering-Joulin, MM. Beauvais, Guérin, Straehli, Finidori, Monfort, Buisson conseillers de la chambre, Mme Divialle, MM. Maziau, Barbier conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Gauthier ;
Greffier de chambre : Mme Leprey ;
Sur le rapport de Mme le conseiller GUIRIMAND, et les observations de Me FOUSSARD, de la société civile professionnelle BORÉ et SALVE de BRUNETON, de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ et de la société civile professionnelle BOULLEZ, avocats en la Cour, les conclusions de M. l'avocat général GAUTHIER ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 21 novembre 2011, joignant les pourvois et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen relevé d'office et pris de l'application de l'article 706-148 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 27 mars 2012 ;
Vu ledit article, ensemble l'article 112-2-2° du code pénal ;
Attendu, d'une part, qu'en application de l'article 112-2-2° du code pénal, les lois fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure sont applicables immédiatement à la répression des infractions commises avant leur entrée en vigueur ;
Attendu, d'autre part, qu'il ressort des dispositions de l'article 706-148 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 27 mars 2012, que la saisie à titre conservatoire des biens de la personne mise en examen, ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, des biens dont celle-ci a la libre disposition, peut être autorisée au cours de l'instruction lorsque la loi qui réprime le crime ou le délit poursuivi prévoit leur confiscation ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 13 décembre 2010, le juge d'instruction a, en application des dispositions de l'article 706-148 du code de procédure pénale alors en vigueur, ordonné la saisie d'un bien immobilier appartenant à la société civile immobilière Joinville Quai de la Seine dont toutes les parts étaient détenues par des membres de la famille de M. X..., mis en examen du chef de blanchiment en bande organisée d'escroqueries aggravées, au motif que ce dernier était le véritable dirigeant de la société au sens de ce texte ; que la société civile immobilière et M. X... ont relevé appel de la décision ;
Attendu que, pour accueillir l'argumentation des appelants qui faisaient valoir que la mesure conservatoire n'aurait pu être envisagée qu'à l'égard de la SCI, seule propriétaire de l'immeuble saisi, et infirmer l'ordonnance entreprise, l'arrêt énonce que M. X... ne détient aucune part dans la société civile immobilière Joinville Quai de la Seine, et que le bien en cause est la propriété de cette société, qui dispose d'un patrimoine propre ;
Mais attendu que si la chambre de l'instruction n'encourt aucune censure pour avoir statué comme elle l'a fait au jour de sa décision, la saisie de patrimoine contestée ne pouvant alors s'effectuer que sur les seuls biens appartenant au mis en examen, l'arrêt attaqué doit cependant être annulé afin qu'il soit prononcé au vu des dispositions de procédure précitées de la loi du 27 mars 2012, qui concernent une mesure conservatoire d'application immédiate ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les moyens de cassation proposés :
ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt n° 407 susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 23 juin 2011, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de I'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le neuf mai deux mille douze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;