LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'ordonnance de référé attaquée rendue en dernier ressort, que MM. X..., Y... et Z...
A... ont travaillé en qualité de responsable de chantier pour le premier et d'ouvrier pour les deux autres, sur un chantier SPA sis à Marly-le-Roi sur lequel intervenaient les sociétés Saire Etoile, EMCR et Petit Vinci ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale notamment d'une demande en paiement d'un rappel de salaire formée à l'encontre de ces trois entreprises ;
Sur le moyen unique en ce qu'il concerne MM. X... et Y... :
Attendu que la société Saire Etoile fait grief à l'ordonnance de dire qu'elle était l'employeur de MM. X... et Y... pour la période allant du 6 octobre au 28 novembre 2010 et de la condamner au paiement d'un rappel de salaire à ce titre, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, l'attestation de M. B... mentionnait : « en charge du chantier SPA de Marly, certifie que les personnes ci-dessous travaillent sur le chantier depuis début octobre 2010, X..., Y..., Z...
A... » ; qu'en affirmant qu'il avait certifié « avoir vu ces trois personnes travailler sur le chantier de la société Saire Etoile sur la commune de Marly-le-Roi », le conseil de prud'hommes a dénaturé par adjonction ce document, en violation de l'article 1134 du code civil et du principe sus-énoncé ;
2°/ qu'il appartient au demandeur de rapporter la preuve d'un contrat de travail le liant à la société défenderesse ; qu'une déclaration unique d'embauche est insuffisante à établir l'existence d'un contrat de travail qui implique la mise à disposition effective d'une personne au service, pour le compte et sous la subordination d'une autre personne, l'employeur, pour un travail et une durée convenus et moyennant un salaire ; qu'en l'espèce, en l'état d'une attestation de M. B... mentionnant « en charge du chantier SPA de Marly, certifie que les personnes ci-dessous travaillent sur le chantier depuis début octobre 2010, X..., Y..., Z...
A... » et de deux déclarations uniques d'embauche produites aux débats à compter du 6 octobre 2010, le juge des référés, qui en a déduit qu'il apparaît clairement que les demandeurs avaient bien été engagés par la société Saire Etoile du 6 octobre jusqu'au 28 novembre 2010, a violé, ensemble, les articles 1315 du code civil, L. 1221-1 et L. 1221-10 du code du travail ;
3°/ que le juge des référés ne peut trancher le litige au fond et ne peut, en cas d'urgence, ordonner que les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ; qu'en l'espèce, le juge des référés ne pouvait dire que les trois demandeurs avaient été salariés de la société Saire Etoile du 6 octobre au 28 novembre 2010, au prétexte qu'un ingénieur de travaux avait certifié les avoir vus travailler sur un chantier à Marly-le-Roi et que des déclarations uniques d'embauche à compter du 6 octobre 2010 avaient été produites et que la société EMCR produisait une déclaration à compter du 29 novembre 2010, quand ces constatations étaient insuffisantes à établir un travail effectif des trois demandeurs au profit et sous la subordination de la société Saire Etoile pour la période considérée et moyennant un salaire correspondant aux sommes allouées ; qu'en statuant comme il l'a fait, le juge des référés a violé, ensemble, les articles L. 1221-1, R. 1455-5, R. 1455-7 du code du travail et 484 du code de procédure civile ;
4°/ que le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que dans les cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'excède ses pouvoirs le juge des référés qui, en l'état de la contestation de l'exposante et sans lui-même constater que les parties étaient convenues de payer les montants réclamés à titre de salaire, condamne une société à payer aux trois demandeurs les sommes réclamées par les différentes demandeurs, et les leur octroie à titre de salaire des mois d'octobre et novembre 2010, quand seule une provision pouvait en tout état de cause être allouée en référé ; qu'en statuant comme il l'a fait, le juge des référés a excédé ses pouvoirs et violé les articles R. 1455-5, R. 1455-7 du code du travail et 484 du code de procédure civile ;
Mais attendu que le conseil de prud'hommes, qui a constaté que la société Saire Etoile avait, s'agissant de MM. X... et Y..., établi une déclaration unique d'embauche produite aux débats, a fait ressortir l'existence d'un contrat de travail apparent dont la société n'établissait pas le caractère fictif ; qu'il a, par ces seuls motifs, légalement justifié la qualité d'employeur de la société Saire Etoile à l'égard de MM. X... et Y..., et a pu décider, sans excéder ses pouvoirs, que la créance des salariés n'était pas sérieusement contestable ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique en ce qu'il concerne M. Z...
A... :
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
Attendu que pour dire la société Saire Etoile employeur de M. Z...
A... et la condamner au paiement d'un rappel de salaire à ce titre, le conseil de prud'hommes, après avoir constaté qu'aucune déclaration unique d'embauche établie par la société Saire Etoile au profit de l'intéressé n'était produite aux débats, retient qu'il résulte de l'attestation signée par M. B..., ingénieur travaux de la société Petit Vinci, que celui-ci certifie avoir vu notamment M. Z...
A... travailler sur le chantier de la société Saire Etoile sur la commune de Marly-le-Roi ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'attestation établie par M. B... se limitait à dire que l'intéressé travaillait sur le chantier SPA de Marly-le-Roi, le conseil de prud'hommes a dénaturé ce document clair et précis ;
PAR CES MOTIFS :
Met hors de cause la société Petit Vinci ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elle dit la société Saire Etoile, employeur de M. Z...
A... pour la période allant du 6 octobre au 28 novembre 2010 et la condamne à payer à ce dernier un rappel de salaire à ce titre, l'ordonnance de référé rendue le 27 mai 2011, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Versailles ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Petit Vinci ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la société Saire Etoile.
Il est fait grief à l'ordonnance de référé attaquée D'AVOIR rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société SAIRE ETOILE, D'AVOIR dit que Messieurs Z...
A..., X... et Y... ont été salariés de la société SAIRE ETOILE du 6 octobre au 28 novembre 2010 et d'AVOIR condamné cette société à payer à Monsieur X... la somme de 3 400 euros et à Messieurs Z...
A... et Y... celle de 1 460 euros au titre de leur salaire des mois d'octobre et novembre 2010, ordonné la remise d'un bulletin de salaire, d'un certificat de travail et d'une attestation destinée à POLE EMPLOI et au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la compétence territoriale : que le lieu de travail est situé sur la commune de MARLY-LE-ROI, commune du ressort de la juridiction du Conseil des Prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye ; que l'exception d'incompétence est ainsi irrecevable ; Sur les salaires dus : aux termes de l'article R. 1455-5 du Code du travail, la formation de référé peut, dans tous les cas d'urgence, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ; Messieurs X..., Y... et Z...
A... produisent aux débats une attestation signée par Monsieur Bernard B..., ingénieur travaux de la société PETIT VINCI, certifiant avoir vu ces trois personnes travailler sur le chantier de la société SAIRE ETOILE sur la commune de MARLY-LE-ROI ; … ; que le contrat de travail ne se limite pas à la rédaction et la signature d'un contrat écrit pour emporter la valeur de celui-ci pour une embauche à durée indéterminée et à temps complet ; que des déclarations uniques d'embauche (DUE) sont produites aux débats à compter du 6 octobre 2010, que la société EMCR produit aussi une même déclaration à compter du 29 novembre 2010 ; qu'en conséquence, il apparaît clairement que les demandeurs furent bien engagés par la société SAIRE ETOILE ; que la société SAIRE ETOILE n'apporte pas au Conseil la preuve d'avoir payé ses trois salariés ; des déclarations faites à la barre par l'ensemble des demandeurs et ce qui est dit ci-dessus, le Conseil entend faire droit aux demandes salariales de ces derniers » ;
1./ ALORS QU'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, l'attestation de M. B... mentionnait : « en charge du chantier SPA DE MARLY, certifie que les personnes ci-dessous travaillent sur le chantier depuis début octobre 2010, X..., Y..., Z...
A... » ; qu'en affirmant qu'il avait certifié « avoir vu ces trois personnes travailler sur le chantier de la société SAIRE ETOILE sur la commune de MARLY-LE-ROI », le conseil de prud'hommes a dénaturé par adjonction ce document, en violation de l'article 1134 du Code civil et du principe sus-énoncé ;
2./ ALORS QU'il appartient au demandeur de rapporter la preuve d'un contrat de travail le liant à la société défenderesse ; qu'une déclaration unique d'embauche est insuffisante à établir l'existence d'un contrat de travail qui implique la mise à disposition effective d'une personne au service, pour le compte et sous la subordination d'une autre personne, l'employeur, pour un travail et une durée convenus et moyennant un salaire ; qu'en l'espèce, en l'état d'une attestation de M. B... mentionnant « en charge du chantier SPA DE MARLY, certifie que les personnes ci-dessous travaillent sur le chantier depuis début octobre 2010, X..., Y..., Z...
A... » et de deux déclarations uniques d'embauche produites aux débats à compter du 6 octobre 2010, le juge des référés qui en a déduit qu'il apparaît clairement que les demandeurs avaient bien été engagés par la société SAIRE ETOILE du 6 octobre jusqu'au 28 novembre 2010, a violé, ensemble, les articles 1315 du Code civil, L. 1221-1 et L. 1221-10 du Code du travail ;
3./ ALORS QUE le juge des référés ne peut trancher le litige au fond et ne peut, en cas d'urgence, ordonner que les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ; qu'en l'espèce, le juge des référés ne pouvait dire que les trois demandeurs avaient été salariés de la société SAIRE ETOILE du 6 octobre au 28 novembre 2010, au prétexte qu'un ingénieur de travaux avait certifié les avoir vus travailler sur un chantier à MARLY-LE-ROI et que des déclarations uniques d'embauche à compter du 6 octobre 2010 avaient été produites et que la société EMCR produisait une déclaration à compter du 29 novembre 2010, quand ces constatations étaient insuffisantes à établir un travail effectif des trois demandeurs au profit et sous la subordination de la société SAIRE ETOILE pour la période considérée et moyennant un salaire correspondant aux sommes allouées ; qu'en statuant comme il l'a fait, le juge des référés a violé, ensemble, les articles L. 1221-1, R. 1455-5, R. 1455-7 du Code du travail et 484 du Code de procédure civile ;
4./ ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que dans les cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'excède ses pouvoirs le juge des référés qui, en l'état de la contestation de l'exposante et sans lui-même constater que les parties étaient convenues de payer les montants réclamés à titre de salaire, condamne une société à payer aux trois demandeurs les sommes réclamées par les différentes demandeurs, et les leur octroie à titre de salaire des mois d'octobre et novembre 2010, quand seule une provision pouvait en tout état de cause être allouée en référé ; qu'en statuant comme il l'a fait, le juge des référés a excédé ses pouvoirs et violé les articles R. 1455-5, R. 1455-7 du Code du travail et 484 du Code de procédure civile.