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27/03/2012 | FRANCE | N°10VE03928

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 27 mars 2012, 10VE03928


Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mlle Nadia A, demeurant ..., par Me Tournoud, avocat à la Cour ; Mlle A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0713904 en date du 29 octobre 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2002, 2003 et 2004 ainsi que des pénalités cor

respondantes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de conda...

Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mlle Nadia A, demeurant ..., par Me Tournoud, avocat à la Cour ; Mlle A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0713904 en date du 29 octobre 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2002, 2003 et 2004 ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens ainsi qu'au versement d'une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Elle soutient que l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle a été conduit selon une procédure irrégulière dès lors qu'un exemplaire de la charte du contribuable vérifié ne lui a pas été remis préalablement à l'engagement de la procédure ; que, s'agissant des années 2003 et 2004, la notification de redressements qui lui a été adressée le 21 juin 2006 est insuffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; que le service n'a pas respecté le délai de trente jours de la mise en demeure s'agissant de l'année 2002 ; que la notification de redressements du 28 décembre 2005 ne comporte aucune mention des contributions sociales ; que les premiers juges ont omis de se prononcer sur ce point ; que le virement de 183 000 euros provient du compte de son frère ; que la procédure d'ESFP n'autorise pas l'administration à taxer comme revenus d'origine indéterminée des sommes dont l'origine est parfaitement connue et vérifiable ; que le service n'était donc pas fondé à taxer les virements de la CPAM, les virements de compte à compte, les prêts bancaires et les remboursements de frais de santé ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de procédure civile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2012 :

- le rapport de M. Coudert, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

Considérant que Mlle A a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2002, 2003 et 2004 à l'issue duquel des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales ont été mises à sa charge au titre de ces trois années ; que Mlle A fait appel du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 29 octobre 2010 en tant que ce dernier n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge desdites impositions ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision en date du 18 novembre 2011, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur départemental des finances publiques de la Seine-Saint-Denis a accordé un dégrèvement de la cotisation supplémentaire aux contributions sociales à laquelle Mlle A a été assujettie au titre de l'année 2002 ; que les conclusions de la requête de Mlle A relatives à cette imposition sont donc devenues sans objet ;

Sur le surplus des conclusions de la requête :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration. " ; qu'aux termes de l'article L. 12 du même livre : " (...) l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt. A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal. (...) " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a informé Mlle A de l'engagement à son encontre d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle par avis du 3 juin 2005 ; que ledit avis, auquel était annexé un exemplaire de la charte du contribuable vérifié, a été signifié à l'intéressée par Me Bouaziz, huissier de justice, le 6 juin 2005 ; que contrairement à ce que soutient la requérante, les dispositions du code de procédure civile ne font pas obstacle à ce que les pièces en question soient notifiées par la voie d'une signification d'huissier ; qu'en cas de signification à domicile avec remise de la copie en mairie, la date de la signification est celle du jour de la présentation de l'huissier de justice au domicile du destinataire ; qu'en l'espèce, en l'absence de Mlle A à son domicile, Me Bouaziz, après avoir constaté que personne ne pouvait ou voulait recevoir l'acte en cause et vérifié que la destinataire demeurait bien à l'adresse indiquée, a déposé copie de l'acte en mairie, conformément aux dispositions de l'article 656 du code de procédure civile alors en vigueur, a laissé un avis de passage au domicile de la requérante et lui a adressé la lettre prévue à l'article 658 de ce même code ; qu'il suit de là que l'avis d'engagement de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de Mlle A, accompagné d'un exemplaire de la charte, doit être regardé comme ayant été régulièrement signifié à l'intéressée le 6 juin 2005, sans que cette dernière puisse utilement se prévaloir de la circonstance que la copie de l'acte devait être conservée en mairie pendant trois mois ; que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la charte du contribuable vérifié ne lui aurait pas été remise préalablement à l'engagement des opérations de contrôle, intervenu, tant pour l'année 2002 que pour les années 2003 et 2004, le 5 juillet 2005, date fixée pour le premier entretien, la date du 6 juin 2005 mentionnée sur la première page de la proposition de rectification du 21 juin 2006 relative aux années 2003 et 2004 résultant d'une erreur matérielle ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 16 A du même livre : " Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite. " ;

Considérant que Mlle A soutient que la procédure d'imposition relative à l'année 2002 est entachée d'irrégularité dès lors que l'administration fiscale n'a pas respecté le délai de trente jours ouvert par la réception, le 2 décembre 2005, de la mise en demeure de compléter sa réponse du 12 novembre 2005 à la demande d'éclaircissements et de justifications ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que le conseil de la requérante a répondu à la mise en demeure par courrier du 28 décembre 2005, sans manifester l'intention de fournir ultérieurement des justifications supplémentaires ; que la proposition de rectification établie par l'administration ce même jour fait état du contenu de ce courrier ; qu'il est constant, d'une part, que le pli contenant cette proposition de rectification n'a pas été retiré par la contribuable et ne saurait dès lors être regardé comme lui ayant été notifié avant l'expiration du délai de trente jours, et d'autre part, que Mlle A n'a entre-temps fourni aucun élément complémentaire ; qu'ainsi, la contribuable n'a été privée d'aucune garantie ; qu'il suit de là que Mlle A n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition relative à l'année 2002 est entachée d'irrégularité ;

Considérant, en troisième lieu, que Mlle A ayant fait l'objet d'une procédure d'imposition d'office, la régularité de la motivation de la proposition de rectification qui lui a été adressée le 21 juin 2006 au titre des années 2003 et 2004 doit être appréciée au regard des seules dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales et non à celui des dispositions de l'article L. 57 du même livre qui ne sont applicables que lorsque l'administration a recours à la procédure de redressement contradictoire ; qu'en application de l'article L. 76, la proposition de rectification adressée au contribuable doit indiquer les bases d'imposition retenues par le service, les modalités de calcul et la catégorie des impositions mises à la charge du contribuable ; que contrairement à ce que soutient Mlle A, la proposition de rectification du 21 juin 2006 précise les bases d'imposition retenues par le service pour les deux années concernées ; qu'il est constant que cette proposition de rectification ne fait état d'aucun redressement relatif à une catégorie d'imposition spécifique, les rectifications portant, ainsi que cela était indiqué en page 2, sur l'ensemble du revenu imposable ; que, par ailleurs, le vérificateur a précisé que " la procédure de rectification retenue est la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, applicable lorsque les contribuables se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications du service ou lorsque les réponses formulées sont incomplètes " et a détaillé les " crédits non justifiés ou dont l'origine reste indéterminée " ; qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, dépourvus de toute ambiguïté quant à l'absence d'imposition de certaines sommes dans une catégorie particulière, la circonstance que le vérificateur n'ait pas précisé, comme il l'avait fait dans sa proposition de rectification du 28 décembre 2005 relative à l'année 2002, que " les sommes portées au crédit [des] comptes bancaires sont taxés en tant que crédits d'origine indéterminée " ne saurait être regardée comme entachant d'irrégularité la proposition de rectification du 21 juin 2006 au regard des prescriptions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ladite proposition de rectification doit être écarté ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'en application du dernier alinéa de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, il incombe à un contribuable taxé d'office à l'issue d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, de démontrer le caractère exagéré des sommes imposées au titre des revenus d'origine indéterminée ;

Considérant, d'une part, que Mlle A fait valoir, s'agissant d'un virement de 183 800 euros inscrit au crédit de son compte bancaire le 16 mai 2003, que cette somme lui aurait été versée par son frère, M. Karim A, et correspondrait au produit de la vente d'un bien immobilier ; que les pièces produites par la requérante ne permettent toutefois pas d'établir que la somme en cause lui aurait été versée par son frère ; que la nature de cette somme n'est pas davantage établie par les pièces du dossier dès lors que la requérante ne justifie pas avoir été, comme elle l'allègue, associée de la SCI Sema, propriétaire du bien immobilier dont s'agit ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que l'administration a estimé que cette somme devait être imposée en tant que revenus d'origine indéterminée ;

Considérant, d'autre part, s'agissant des autres sommes figurant au crédit des comptes bancaires de Mlle A, que la requérante soutient que l'origine des sommes en cause était connue et qu'en conséquence, elles ne pouvaient être imposées en tant que revenus d'origine indéterminée ; que, toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 28 décembre 2005 et de la réponse aux observations du contribuable du 2 août 2006 que le vérificateur a extourné les sommes provenant de la Caisse primaire d'assurance maladie de la base imposable de Mlle A ; que s'agissant des " virements de compte à compte, les prêts bancaires et les remboursements de frais de santé " évoqués par la requérante, cette dernière, faute de préciser les crédits qu'elle entend ainsi viser, n'assortit pas son moyen des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande, s'agissant des impositions restant en litige ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'articles L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Mlle A sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire aux contributions sociales à laquelle Mlle A a été assujettie au titre de l'année 2002.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mlle A est rejeté.

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N° 10VE03928


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10VE03928
Date de la décision : 27/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Taxation d'office. Pour défaut de réponse à une demande de justifications (art. L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales).


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Bruno COUDERT
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : TOURNOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-03-27;10ve03928 ?
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