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30/03/2012 | FRANCE | N°10PA04857

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 30 mars 2012, 10PA04857


Vu le recours, enregistré par télécopie le 30 septembre 2010, confirmé par un mémoire enregistré le 4 octobre 2010, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) A titre principal, d'annuler l'article 1er du jugement n° 0613889/2 et 0719945/2 du 21 mai 2010, par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle audit impôt, et des pénalités correspondantes, auxquelles la société Seurlin Immo

bilier, a été assujettie au titre des exercices clos le

31 décembre 1999...

Vu le recours, enregistré par télécopie le 30 septembre 2010, confirmé par un mémoire enregistré le 4 octobre 2010, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) A titre principal, d'annuler l'article 1er du jugement n° 0613889/2 et 0719945/2 du 21 mai 2010, par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle audit impôt, et des pénalités correspondantes, auxquelles la société Seurlin Immobilier, a été assujettie au titre des exercices clos le

31 décembre 1999 et le 31 décembre 2003 et de remettre ces impositions à la charge de la société Seurlin immobilier à hauteur respectivement de 812 646 euros pour l'exercice clos le 31 décembre 1999 et de 1 044 401 euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2003;

2°) A titre subsidiaire, d'annuler l'article 1er du jugement n° 0613889/2 et 0719945/2 du 21 mai 2010, par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle audit impôt, dans la limite de 8 118 492 euros en bases, assorties des seuls intérêts de retard, auxquelles la société Seurlin Immobilier, a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2003 et de remettre ces impositions à la charge de la société Seurlin Immobilier ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mars 2012 :

- le rapport de Mme Pons-Deladrière, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Blanc, rapporteur public ;

Sur le recours du MINISTRE :

En ce qui concerne l'avoir fiscal :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours de l'exercice clos le 31 décembre 1999, la Société Seurlin Immobilier a liquidé ses actifs financiers ; que le 17 décembre 1999, elle a acquis 1468 titres de la société Items pour un montant de 9 910 793 Francs ; qu'elle a encaissé, à raison de cette participation, des dividendes à hauteur de 9 798 900 Francs le 23 décembre et qu'enfin, elle a cédé ces titres pour un montant de 11 893 francs le 28 décembre de la même année, créant ainsi une moins value à court terme égale aux dividendes ; que grâce à ces dividendes, elle a pu bénéficier d'un avoir fiscal total de 3 919 560 Francs ; que par l'imputation d'une partie de cet avoir fiscal, elle a réduit sa charge fiscale de 2 613 040 Francs au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1999, en application des dispositions des articles 158 bis et 209 bis du code général des impôts dans leur rédaction alors applicable ; que l'administration, constatant que les dividendes perçus n'avaient subi aucune imposition dès lors que leur montant avait été neutralisé par la moins-value sur titres, a réintégré l'avoir fiscal reçu sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; qu'il en est résulté une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés, assortie d'intérêts de retard et de pénalités au taux de 80 % prévus à l'article 1729 du code général des impôts, soit un redressement total de 812 646 euros ; que la société Seurlin Immobilier a obtenu devant le Tribunal administratif de Paris la décharge de cette somme ;

Considérant que si un acte de droit privé opposable aux tiers est en principe opposable dans les mêmes conditions à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par le juge judiciaire, il appartient à l'administration, lorsque se révèle une fraude commise en vue d'obtenir l'application de dispositions de droit public, d'y faire échec même dans le cas où cette fraude revêt la forme d'un acte de droit privé ; que ce principe peut conduire l'administration à ne pas tenir compte d'actes de droit privé opposables aux tiers ; qu'il s'applique également en matière fiscale, dès lors que le litige n'entre pas dans le champ d'application des dispositions particulières de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales qui, lorsqu'elles sont applicables, font obligation à l'administration fiscale de suivre la procédure qu'elles prévoient ; qu'ainsi, hors du champ de ces dispositions, l'administration, qui peut toujours écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors qu'elle établit que ces actes ont un caractère fictif, peut également se fonder sur le principe sus-rappelé pour écarter les actes qui, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;

Considérant qu'aux termes de l'article 158 bis du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition en litige : " I- Les personnes qui perçoivent des dividendes distribués par des sociétés françaises disposent à ce titre d'un revenu constitué : a) par les sommes qu'elles reçoivent de la société ; b) par un avoir fiscal représenté par un crédit ouvert sur le Trésor. -Ce crédit d'impôt est égal à la moitié des sommes effectivement versées par la société. Il ne peut être utilisé que dans la mesure où le revenu est compris dans la base de l'impôt sur le revenu dû par le bénéficiaire. Il est reçu en paiement de cet impôt. Il est restitué aux personnes physiques dans la mesure où son montant excède celui de l'impôt dont elles sont redevables "; qu'aux termes de l'article 209 bis du même code dans sa rédaction en vigueur lors de cette même année : " Les dispositions des articles 158 bis et 158 ter sont applicables aux personnes morales ayant leur siège social en France, dans la mesure où le revenu distribué est compris dans la base de l'impôt sur les sociétés dû par le bénéficiaire. Le crédit d'impôt est reçu en paiement de cet impôt. Il n'est pas restituable " ;

Considérant qu'il ressort de l'ensemble des travaux préparatoires de l'article 1er de la loi du 12 juillet 1965 créant l'avoir fiscal, alors codifiée à l'article 158 bis précité du code général des impôts, que le législateur a eu comme objectifs de favoriser l'actionnariat des entreprises ainsi que le développement de la place financière de Paris et d'éliminer à cet effet la double imposition qui frappait les dividendes ; qu'eu égard à l'objet de la loi, l'actionnaire, imposable à raison des dividendes qu'il perçoit, est en droit de prétendre à l'avoir fiscal qui leur est attaché, de sorte que ces dividendes ne soient pas soumis à une double imposition ; que le droit à l'avoir fiscal n'est nullement subordonné à une durée minimum de détention des titres avant ou après la mise en paiement des dividendes auxquels il est attaché ; que, s'agissant des personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés, l'avoir fiscal, s'il constitue aussi un élément du bénéfice de l'actionnaire, est essentiellement, aux termes mêmes des articles 158 bis et 209 bis du code général des impôts, un moyen de paiement de l'impôt dû par ce dernier au titre de ses résultats d'ensemble d'une année donnée ; que ces articles excluent ainsi qu'il puisse être restitué par l'administration, en particulier dans l'hypothèse où l'avoir fiscal excède l'impôt dû, ainsi qu'en présence de résultats déficitaires ; que, par suite, dès lors qu'une société a effectivement la qualité d'actionnaire, les dividendes qu'elle perçoit à raison des titres qu'elle détient ouvrent droit à son profit au bénéfice de l'avoir fiscal qui y est attaché ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les opérations en litige n'ont été ni dissimulées ni réalisées en méconnaissance d'aucune des dispositions applicables aux achats et reventes de titres et aux distributions de dividendes ; que si, dans le contexte où elles ont été réalisées, et eu égard à la brièveté de la durée de détention des titres, les opérations d'achats puis de reventes des titres effectuées par la Société Seurlin Immobilier ont été inspirées par la volonté d'acquérir les moyens de payer les charges fiscales qu'elle aurait dû normalement acquitter eu égard à sa situation et à ses activités réelles, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT ne prouve cependant pas que ces opérations, qui se sont traduites par l'élimination de la double imposition frappant les dividendes, auraient présenté un caractère artificiel et que la société n'aurait pas effectivement acquis la qualité d'actionnaire et n'aurait pas encouru les risques qui s'y attachent ; que, dès lors, le ministre n'établit pas que ces opérations auraient procédé de la recherche par la contribuable du bénéfice d'une application littérale des dispositions de l'article 158 bis du code général des impôts relatifs à l'avoir fiscal, à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs ;

En ce qui concerne l'application du régime " mère-filiales " :

Considérant qu'aux termes de l'article 145 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " 1. Le régime fiscal des sociétés mères, tel qu'il est défini aux articles 146 et 216, est applicable aux sociétés et autres organismes soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal qui détiennent des participations satisfaisant aux conditions ci-après : a. Les titres de participations doivent revêtir la forme nominative ou être déposés dans un établissement désigné par l'administration ; b. les titres de participation doivent représenter au moins 5 % du capital de la société émettrice ; ce pourcentage s'apprécie à la date de mise en paiement des produits de la participation. Si, à la date mentionnée au premier alinéa, la participation dans le capital de la société émettrice est réduite à moins de 5 % du fait de l'exercice d'options de souscription d'actions dans les conditions prévues à l'article L. 225-183 du code de commerce, le régime des sociétés mères lui reste applicable si ce pourcentage est à nouveau atteint à la suite de la première augmentation de capital suivant cette date et au plus tard dans un délai de trois ans ; c. Les titres de participations doivent avoir été souscrits à l'émission. A défaut, la personne morale participante doit avoir pris l'engagement de les conserver pendant un délai de deux ans " ; qu'aux termes du I de l'article 216 du même code : " Les produits nets des participations, ouvrant droit à l'application du régime des sociétés mères et visées à l'article 145, touchés au cours d'un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges.(...) " ; qu'aux termes de l'article 219, I, a ter, troisième alinéa, du code général des impôts : " Pour l'application des premier et deuxième alinéas, constituent des titres de participation les parts ou actions de sociétés revêtant ce caractère sur le plan comptable. Il en va de même des actions acquises en exécution d'une offre publique d'achat ou d'échange par l'entreprise qui en est l'initiatrice ainsi que des titres ouvrant droit au régime des sociétés mères ou, lorsque leur prix de revient est au moins égal à 22 800 000 euros, qui remplissent les conditions ouvrant droit à ce régime autres que la détention de 5 % au moins du capital de la société émettrice, si ces actions ou titres sont inscrits en comptabilité au compte de titres de participation ou à une subdivision spéciale d'un autre compte du bilan correspondant à leur qualification comptable " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Société Seurlin immobilier a acquis, en 2003, des titres composant le capital des sociétés Kalpa, Mach, Nouveau Jeu, Financière MN et PJM Participation, qu'elle a inscrits à un compte de valeurs mobilières de placement ; qu'au cours de son exercice clos le 31 décembre 2003, elle a perçu des sociétés susmentionnées des dividendes à hauteur de 9 066 436 euros ; qu'au titre de cet exercice, elle a, d'une part, constitué une provision pour dépréciation des titres susmentionnés pour un montant égal aux dividendes perçus, et, d'autre part, opté pour le régime d'exonération des dividendes perçus par les sociétés mères prévu aux articles 145 et 216 précités du code général des impôts ; qu'à ce titre, elle a pris l'engagement de conserver la pleine propriété des titres acquis pour une durée d'au moins deux ans, conformément aux dispositions de l'article 54 de l'annexe II au même code ; que ces opérations lui ont ainsi permis de réduire son résultat imposable au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2003 ; que l'administration a estimé que la combinaison de ces éléments révélait un montage fiscal constitutif d'un abus de droit au sens des dispositions de l'article L.64 du livre des procédures fiscales et a, en conséquence, remis en cause la déduction extracomptable des dividendes susmentionnés opérée sur le fondement des articles 145 et 216 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Seurlin Immobilier et les sociétés Hartmann, Kalpa, Mach, Nouveau Jeu, Financière MN et PJM Participation, existaient antérieurement à l'opération de distribution des dividendes, sans que le bénéfice de l'avantage fiscal ait été permis par l'interposition d'une société spécialement créée à cet effet ; que, dans les circonstances dans lesquelles elle a été réalisée, l'exonération des dividendes n'a pas méconnu les objectifs des auteurs de l'article 216 du code général des impôts, issu de la codification de l'article 2-I du décret n° 52-804 du 30 juin 1952 pris en application de l'article 45 de la loi n° 52-401 du 14 avril 1952, dès lors qu'il n'est pas contesté que les sociétés Hartmann, Kalpa, Mach, Nouveau Jeu, Financière MN et PJM Participation, qui ont versé les dividendes à la société Seurlin immobilier, avaient été imposées à raison des bénéfices qui avaient donné lieu à ces distributions et que l'absence d'option pour le régime des sociétés mères aurait conduit à une seconde imposition des sommes distribuées ; que si, pour l'application des dispositions de l'article 219, I, a, ter du code général des impôts, relatif à l'application du régime des plus-values et moins-values à long terme, les titres de participation sont ceux qui revêtent ce caractère sur le plan comptable, en revanche, la détention de titres pour l'application du régime des sociétés mères n'est pas subordonnée à cette condition par les dispositions précitées de l'article 145 du code général des impôts et les auteurs de l'article 216 de ce code n'ont pas, contrairement à ce que soutient le ministre, entendu réserver le bénéfice de l'avantage que prévoit cet article aux seules sociétés mères qui entendent, par la prise de participation dans une société émettrice, s'assurer, de manière durable, du contrôle de celle-ci aux fins de prendre part à la gestion de son activité économique ; que, dans ces conditions, l'administration n'est pas fondée à soutenir que les opérations en cause seraient constitutives d'un abus de droit ;

En ce qui concerne la demande de " substitution de base légale " :

Considérant que le MINISTRE demande, à titre subsidiaire, une " substitution de base légale " afin que l'imposition litigieuse concernant l'exercice clos le 31 décembre 2003, soit fondée sur les dispositions des articles 219 I a et a ter 1er et 2ème alinéas , à raison de la remise en cause de la déduction pour dépréciation des participations prises dans les sociétés Kalpa, Mach, Nouveau Jeu, Financière MN et PJM Participations ; que toutefois cette demande concerne une matière imposable différente de celle qui a effectivement été imposée en conséquence de redressements relatifs au régime mère filles ; que par suite cette demande doit être regardée comme une demande de compensation au sens de l'article L 203 du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'aux termes de cet article, l'administration peut à tout moment de la procédure demander la compensation entre les dégrèvements reconnus justifiés et les erreurs ou omissions de toute nature constatées au cours de l'instruction dans l'assiette ou le calcul de l'imposition contestée ;

Considérant que l'administration, qui disposait de l'ensemble des éléments propres à lui permettre d'établir, au titre de la période litigieuse, les impositions supplémentaires dues par la société avant que celle-ci n'introduise son action contentieuse, n'a pas remis en cause la déduction pour dépréciation des participations prises dans les sociétés Kalpa, Mach, Nouveau Jeu, Financière MN et PJM Participations dans la notification de redressement ; que, par suite, cette absence de remise en cause doit être regardée comme résultant d'une volonté délibérée de l'administration exprimée antérieurement à la réclamation et ne peut donc être regardée comme une erreur ou une omission constatée au cours de l'instruction de celle-ci ; que le ministre n'est dès lors pas fondé à demander la compensation entre l'insuffisance d'imposition résultant de la déduction de cette charge et les décharges prononcées par le tribunal et confirmées par le présent arrêt ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge des impositions en litige ;

Sur l'appel incident de la société SEURLIN IMMOBILIER concernant les compléments d'imposition résultant de redressements au titre d'actes anormaux de gestion :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction antérieure à la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2004-281 du 25 mars 2004 : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation " ; qu'aux termes de ce même article, dans sa rédaction postérieure à cette date : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation " ;

Considérant que la société SEURLIN IMMOBILIER soutient que les redressements au titre d'actes anormaux de gestion ont été insuffisamment motivés ; que, toutefois, il ressort des notifications de redressement et propositions de rectification que l'administration a indiqué, pour chacune des activités de prestations de services, la méthode retenue pour déterminer les charges à prendre en compte, ainsi que le taux de marge qu'elle appliquait auxdites charges ; que, ces activités s'exerçant de manière indifférenciée pour le compte de l'ensemble des sociétés faisant partie du même groupe informel, l'administration pouvait se borner à retenir un montant global de charges exposées par la société SEURLIN IMMOBILIER, sans qu'il fût besoin d'individualiser une prestation pour chaque société ; que, s'agissant des activités d'intermédiation, l'administration a indiqué de manière détaillée les opérations auxquelles la Société Seurlin immobilier avait pris part ainsi que le taux de marge qu'elle retenait pour ces opérations ; que ces précisions étaient suffisantes pour permettre à la société SEURLIN IMMOBILIER de présenter de manière entièrement utile ses observations en réponse aux notifications de redressement et propositions de rectification de l'administration, ou de faire connaître son acceptation ; que celles-ci étaient donc suffisamment motivées au sens des dispositions précitées de l'article L.57 du livre des procédures fiscales ; que le moyen soulevé est donc dépourvu de fondement et doit être écarté ;

En ce qui concerne le bien-fondé des redressements :

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que les renonciations à recettes consenties par une entreprise au profit de tiers, incluant des sociétés non affiliées membres d'un même groupe informel, ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que les avantages octroyés par une entreprise à un tiers constituent un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ; que, dans l'hypothèse où elle s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite à l'administration, si elle s'y croit fondée, d'apporter la preuve de ce que cet avantage est dépourvu de contrepartie, qu'il a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour l'entreprise ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant, en premier lieu, que la société SEURLIN IMMOBILIER exerçait, au cours des périodes d'imposition en litige, des activités de prestation de service consistant notamment en la tenue de la comptabilité au profit de plusieurs dizaines de sociétés constituant avec elle un groupe informel; qu'elle était la seule, parmi ces sociétés, à exercer ces prestations et disposait à cet effet de moyens humains et matériels ; que l'administration a constaté une disproportion entre les ressources d'exploitation courantes de la société et ses charges, de l'ordre de 1 à 20, 30 ou 50 selon les exercices vérifiés ; qu'elle en a tiré la conséquence que celle-ci avait renoncé à percevoir une rémunération à raison de ses prestations de service au profit des autres sociétés de son groupe informel ; que, si la société SEURLIN IMMOBILIER, qui ne conteste pas la réalité de ces prestations, soutient qu'une simple disproportion ne suffit pas à établir l'existence d'un acte anormal de gestion, les arguments qu'elle développe ne sont pas de nature à justifier une disproportion d'une telle ampleur ; qu'ainsi, l'administration établit la réalité des faits qu'elle invoque à l'appui de son analyse, sans qu'il soit besoin pour ce faire d'individualiser les prestations réalisées au profit de chacune des sociétés mentionnées ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, la société SEURLIN IMMOBILIER doit être regardée comme ayant renoncé à percevoir, de la part des sociétés faisant partie du même groupe informel, une rémunération à raison des prestations de services qu'elle effectuait à leur profit ; qu'une telle renonciation constitue un acte anormal de gestion à défaut de contrepartie reçue ; que c'est donc à bon droit que l'administration a réintégré à son résultat taxable au titre des exercices 1997 à 2003 le bénéfice correspondant à cette rémunération ;

Considérant, en second lieu, que la société SEURLIN IMMOBILIER a exercé, au profit des sociétés faisant partie du même groupe informel, de multiples opérations d'achat et de revente de titres de sociétés faisant également partie de ce groupe ; qu'une telle activité d'intermédiation est de nature commerciale et devait être rémunérée ; que l'administration établit la réalité des faits qu'elle retient au soutien de son analyse ; que la société SEURLIN IMMOBILIER n'apporte aucun élément de nature à justifier l'absence de rémunération au titre de cette activité d'intermédiation ; que, par suite, elle doit être regardée comme ayant effectué, pour ce motif, des actes de gestion anormale ; que c'est donc à bon droit que l'administration a réintégré à son résultat taxable au titre des exercices 1999 à 2002 le bénéfice correspondant à cette rémunération ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'appel incident de la société SEURLIN IMMOBILIER doit être rejeté ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT est rejeté.

Article 2 : L'appel incident de la société SEURLIN IMMOBILIER est rejeté

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N° 10PA04857


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA04857
Date de la décision : 30/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-083 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Relations entre sociétés d'un même groupe.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: Mme Geneviève PONS DELADRIERE
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : CABINET FISCAL CHRISTIAN TROUSSIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-03-30;10pa04857 ?
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