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05/10/2010 | FRANCE | N°09PA01203

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 05 octobre 2010, 09PA01203


Vu la requête, enregistrée le 3 mars 2009, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0815437/6-2 du 6 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 29 août 2008 refusant de délivrer un titre de séjour à M. Jinliang A, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant la Chine comme pays à destination duquel il pourra être reconduit à la frontière ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal ;

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Vu la requête, enregistrée le 3 mars 2009, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0815437/6-2 du 6 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 29 août 2008 refusant de délivrer un titre de séjour à M. Jinliang A, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant la Chine comme pays à destination duquel il pourra être reconduit à la frontière ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 septembre 2010 :

- le rapport de M. Rousset, rapporteur,

- les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public ;

- et les observations de Me Oster pour M. A ;

Considérant que le PREFET DE POLICE fait appel du jugement du 6 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 29 août 2008 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A, ressortissant chinois né en 1969, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant la Chine comme pays à destination duquel il pourra être reconduit à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, (...) ; 2° Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a fait l'objet le 31 janvier 2007 d'une condamnation à 8 mois d'emprisonnement avec sursis et à 3 000 euros d'amende pour des faits d'exécution d'un travail dissimulé, emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail et soumission de plusieurs personnes vulnérables à des conditions de travail indignes ; que l'intéressé a notamment été condamné pour avoir soumis plusieurs étrangers en situation irrégulière à une activité de confection dans un sous-sol sans aération ni fenêtre durant plus de douze heures quotidiennes alors que leur vulnérabilité et leur état de dépendance lui étaient connus ; que le PREFET DE POLICE a par l'arrêté contesté du 29 août 2008 rejeté la demande de renouvellement du titre de séjour temporaire dont bénéficiait M. A sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que l'intéressé avait fait l'objet de la condamnation pénale précitée pour des infractions au code du travail à raison desquelles l'article L. 313-5 du code susmentionné prévoyait le retrait du titre de séjour ; que l'arrêté en litige doit ainsi être regardé comme une mesure nécessaire à la prévention des infractions aux dispositions du code pénal et du code du travail visant à réprimer le travail clandestin au sens des stipulations précitées du 2° de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par ailleurs, la circonstance que M. A réside en France depuis 1995 et est en situation régulière depuis 2003 n'est pas, à elle seule, de nature à entacher d'illégalité les décisions querellées au regard des stipulations susvisées du 1° du même article 8 de ladite convention ; que s'il n'est pas contesté que l'épouse de M. A est titulaire d'un titre temporaire de séjour d'un an et que ses deux enfants nés en 1990 et 1999 sont scolarisés en France, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé n'est pas, contrairement à ce qu'il soutient, dépourvu d'attaches familiales en Chine, pays dans lequel vivent ses parents et sa soeur, où le couple a lui même vécu au moins jusqu'en 1995 et où leur fils aîné résidait jusqu'à son arrivée en France en 2005 ; qu'enfin ni la circonstance que M. A est propriétaire de son logement depuis 2006, qu'il exploite avec son épouse un fonds de commerce de restauration depuis 2007, que leurs enfants sont scolarisés et que l'aîné d'entre eux souffrirait de troubles neuropédiatriques ne sont de nature à faire obstacle à la poursuite de la vie familiale en Chine ; que, dans ces conditions, le PREFET DE POLICE est donc fondé à soutenir que, compte tenu notamment de la gravité des infractions commises par M. A à l'encontre de personnes vulnérables, c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté en litige ;

Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

Considérant, en premier lieu, que par arrêté n° 2008-00466 du 7 juillet 2008, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris n° 55 du 11 juillet 2008, le PREFET DE POLICE a donné délégation à Mme Cécile B, attachée d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, adjointe au chef du 10ème bureau de la préfecture de police, pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi ni même allégué qu'elles n'auraient pas été absentes ou empêchées ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté attaqué comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que par conséquent et, alors même que le PREFET DE POLICE n'a pas précisé les raisons pour lesquelles il a estimé qu'il n'était pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, il est suffisamment motivé au regard de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ;

Considérant, en troisième lieu, que la circonstance, au demeurant inexacte, que la date de l'arrêté édicté le 29 août 2008 serait illisible, est, en tout état de cause, sans influence sur sa légalité ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en mentionnant dans l'arrêté contesté l'article L. 341-6 du code du travail, qui était en vigueur à la date des faits constitutifs des infractions reprochées à l'intéressé et en précisant qu'il avait été remplacé, après son abrogation le 1er mai 2008, par l'article L. 8251-1 du code du travail, le PREFET DE POLICE n'a commis aucune erreur de droit ;

Considérant, en cinquième lieu, que pour les mêmes motifs qu'exposés précédemment, l'arrêté litigieux, qui est notamment justifié par la gravité des faits reprochés à M. A et qui contrairement à ce qu'il soutient ne révèle pas d' attitude hostile à l'égard de la communauté étrangère installée en France n'est entaché d'aucune erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention étudiant ; (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) ; que M. A, qui ne résidait régulièrement en France que depuis le 6 mars 2003, date à laquelle lui a été délivrée sa première carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale et qui n'est parent d'aucun enfant français, n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée lui faisant obligation de quitter le territoire français aurait méconnu les dispositions des 4° et 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en septième lieu, qu' il ressort des pièces du dossier que l'épouse de M. A n'est titulaire que d'un titre temporaire de séjour d'un an , que leur fils ainé qui souffre d'un handicap a toutefois vécu en Chine jusqu'en 2005 et que leur second fils n'était âgé que de neuf ans à la date de l'arrêté attaqué ; que dans ces conditions M. A, qui a la faculté de poursuivre en Chine sa vie familiale accompagné de son épouse et de leurs deux fils, n'est pas fondé à soutenir que l'intérêt supérieur de leurs enfants, protégé par la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990, aurait été méconnu ;

Considérant, en dernier lieu, que les moyens tirés de la violation des articles 7, 24 et 26 de la charte européenne des droits fondamentaux sont inopérants, celle-ci n'ayant pas, par elle-même, de valeur juridique contraignante ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 29 août 2008 ; que, par suite, le présent arrêt n'appelle le prononcé d'aucune mesure d'injonction ; qu'enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, verse à M. A la somme demandée par celui ci au titre des frais exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 6 janvier 2009 est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris par M. A et le surplus de ses conclusions en appel sont rejetés.

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N° 09PA01203


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA01203
Date de la décision : 05/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Olivier ROUSSET
Rapporteur public ?: Mme DESCOURS GATIN
Avocat(s) : OSTER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-10-05;09pa01203 ?
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