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30/12/2011 | FRANCE | N°09PA00847

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 30 décembre 2011, 09PA00847


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 février 2009 et 26 mars 2009, présentés pour la SOCIETE ENTREPRISE GENERALE DE CONSTRUCTION (ENGECO), dont le siège est PK 3 - côté mer - Auae à Faa'a (98704), représentée par son président directeur général en exercice, par la SCP Monod-Colin ;

la SOCIETE ENGECO demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0800063 du 2 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Polynésie Française a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur l

es sociétés, ainsi que des pénalités pour manoeuvres frauduleuses, auxquelles elle a é...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 février 2009 et 26 mars 2009, présentés pour la SOCIETE ENTREPRISE GENERALE DE CONSTRUCTION (ENGECO), dont le siège est PK 3 - côté mer - Auae à Faa'a (98704), représentée par son président directeur général en exercice, par la SCP Monod-Colin ;

la SOCIETE ENGECO demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0800063 du 2 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Polynésie Française a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, ainsi que des pénalités pour manoeuvres frauduleuses, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1999 à 2001 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française une somme de 300 000 CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu le code des impôts de la Polynésie française ;

Vu la loi n° 96-313 du 12 avril 1996 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2011 :

- le rapport de Mme Ghaleh-Marzban, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Blanc, rapporteur public ;

Considérant que le service des contributions de la Polynésie française a remis en cause le crédit d'impôt dont la SOCIETE ENGECO avait bénéficié, en application des dispositions de l'article 115-1-1 du code des impôts de la Polynésie française, au titre du financement d'un projet d'investissement d'une construction immobilière réalisée par la S.C.I. Vairaatoa Nui ; que la SOCIETE ENGECO relève appel du jugement du 2 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités pour manoeuvres frauduleuses, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1999, 2000 et 2001 ;

Sur les conclusions à fin de décharge des impositions litigieuses :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 115-1-1 du code des impôts de la Polynésie française dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige, issue de la délibération n° 96-111 du 12 septembre 1996 de l'assemblée de la Polynésie française : Les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés bénéficient d'un crédit d'impôt pour tout financement égal ou supérieur à 10 millions de francs dans un projet de construction immobilière (...) d'un coût total égal ou supérieur à 100 millions de francs dont la demande de permis de construire aura été déposée avant le 1er décembre 1999. La valeur du terrain est prise en compte au plus pour un cinquième du montant global du projet de construction. (...) Sont considérés comme financement au sens du présent article : - les souscriptions d'action et de parts en numéraire (...) effectuées lors de la constitution ou de l'augmentation du capital de la société s'engageant à réaliser le projet, ainsi que les souscriptions en numéraire par voie d'incorporation au capital des sommes laissées en compte courant à la disposition de la dite société./ Le bénéfice du crédit d'impôt est subordonné à l'engagement pris par le bénéficiaire de conserver les immeubles, les actions ou les parts pendant 18 mois au moins ou jusqu'à la date de délivrance du certificat de conformité si celle-ci intervient avant l'expiration de ce délai./ Ce crédit d'impôt s'élève à [...] 30% si ce financement intervient entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 1999 (...) / Ces avantages sont remis en cause, et l'impôt dont le crédit a été préalablement accordé devient immédiatement exigible, nonobstant le cas échéant l'expiration des délais de prescription, dans les circonstances suivantes : - non-respect des conditions prévues par les dispositions du présent article (...) ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient la Polynésie française, les dispositions précitées de l'article 115-1-1 du code des impôts de la Polynésie française ne peuvent être regardées, dès lors qu'elles écartent de manière générale l'application des délais de prescription, comme réservant implicitement l'application de la prescription trentenaire de droit commun alors prévue par le code civil ou comme limitant implicitement à sept ans le délai dans lequel l'administration peut remettre en cause le crédit d'impôt institué par ces dispositions, au motif que, en vertu de l'article 444-1 de ce code, les contribuables ne sont tenus de conserver les documents sur lesquels peut s'exercer le droit de communication dont jouit l'administration que pendant cette durée ; qu'il résulte des termes mêmes des dispositions précitées de l'article 115-1-1 que le crédit d'impôt qu'elles instituent peut être remis en cause par l'administration sans limitation dans le temps, notamment dans le cas où les conditions permettant l'octroi de l'avantage fiscal n'étaient pas remplies dès l'origine ;

Considérant que le principe de sécurité juridique s'oppose à ce que puisse être légalement édictée une disposition qui institue un droit de reprise au profit de l'administration fiscale en excluant, de façon générale et absolue, l'application de toute prescription ;

Considérant que la SOCIÉTÉ ENGECO est dès lors fondée à soutenir, par la voie de l'exception d'illégalité, que les dispositions précitées de l'article 115-1-1 du code des impôts de la Polynésie française, en tant qu'elles excluent tout délai de prescription, méconnaissent le principe de sécurité juridique ; qu'il s'ensuit qu'il y a lieu d'en écarter l'application dans le présent litige ;

Considérant qu'il y a lieu, en conséquence, de faire application des dispositions de droit commun prévues, en ce qui concerne la prescription du droit de reprise de l'administration fiscale, par le code des impôts de la Polynésie française ;

Considérant qu'aux termes de l'article 451-1 du code des impôts de la Polynésie française dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : Les omissions totales ou partielles constatées dans l'assiette ou la liquidation des impôts et taxes visés au présent code ainsi que les erreurs commises dans l'établissement des impositions, dans l'application des tarifs ou dans le calcul des cotisations peuvent être réparées jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due ;

Considérant que l'administration disposait en application de ces dispositions d'un délai expirant au plus tard, s'agissant de l'année 2001, le 31 décembre 2004, pour réparer les omissions et insuffisances constatées dans l'assiette ou la liquidation de l'impôt sur les sociétés au titre des années 1999 à 2001 ; que la notification de redressements portant sur les impositions en litige, intervenue le 21 février 2006, soit après l'expiration du délai de prescription, n'a pu interrompre celui-ci ; que, dès lors, la société requérante est fondée à soutenir que ces impositions étaient prescrites à la date du 4 juin 2007 à laquelle elles ont été mises en recouvrement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIÉTÉ ENGECO est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions litigieuses ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en mettant à la charge de la Polynésie française le versement à la SOCIÉTÉ ENGECO de la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°0800063 du Tribunal administratif de la Polynésie française en date du 2 décembre 2008 est annulé.

Article 2 : La SOCIETE ENTREPRISE GENERALE DE CONSTRUCTION est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités pour manoeuvres frauduleuses auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1999, 2000 et 2001.

Article 3 : Les conclusions de la SOCIETE ENTREPRISE GENERALE DE CONSTRUCTION tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 09PA00847


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA00847
Date de la décision : 30/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - violation directe de la règle de droit - Principes généraux du droit - Principes intéressant l'action administrative.

Outre-mer - Droit applicable dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie - Autres lois et règlements - Autres collectivités d'outre-mer et Nouvelle-Calédonie - Polynésie française.


Composition du Tribunal
Président : M. COUVERT-CASTERA
Rapporteur ?: Mme Stéphanie GHALEH-MARZBAN
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : MAÎTRES MONOD / COLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-12-30;09pa00847 ?
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