LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :
Attendu, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Forbach, 1er septembre 2009), que M. X... engagé en 1972 par la caisse régionale du crédit agricole mutuel de Lorraine (le Crédit agricole) après avoir fait valoir ses droits à la retraite le 1er janvier 2008 a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en paiement de rappel de salaire des jours fériés du 26 décembre et du vendredi Saint, selon le droit local en Alsace-Moselle, pour les années 2003 à 2007 ;
Attendu que le Crédit agricole fait grief au jugement de le condamner à payer au salarié une somme au titre des jours de RTT indûment retenus, alors, selon le moyen :
1°/ qu'une convention collective peut valablement inclure des jours fériés attribués par la loi ou le droit local applicable dans le département de la Moselle (ordonnance du 16 août 1892), qu'ils soient ou non chômés, dans le décompte total des jours de repos et de congés dus au salarié, dès lors que la durée du travail n'excède pas la limite fixée par la loi, cette limite étant fixée, s'agissant des entreprises soumises à l'annualisation du temps de travail, à 1 600 heures annuelles pour la période du 18 janvier 2003 au 1er juillet 2004 et à 1 607 heures pour la période postérieure à cette date ; qu'en l'espèce, il était constant que les dispositions de la convention collective du Crédit agricole applicable au litige fixaient la durée du travail à 1 599 heures par an (annexe 2, chapitre I, article A et chapitre II, article B.1 ), le nombre des jours de congés et de repos attribués aux salariés étant en conséquence fixés comme suit : "Chaque salarié doit bénéficier, au-delà des deux jours de repos hebdomadaires fixés dans l'article 41 de la convention collective, de jours et demi-journées de congés comprenant : - les vingt-cinq jours de congés payés annuels, définis par l'article 19 de la convention collective - les jours chômés dans l'entreprise (jours fériés, jours de fermeture collective ou autres congés supplémentaires attribués par la caisse régionale) - et, des demi-journées ou des journées, qui s'ajoutant aux jours ci-dessus, doivent porter le nombre total des jours de congés et de repos à cinquante-six jours par an (pour un salarié bénéficiant de la totalité des congés ci-dessus)" (annexe 2, chapitre II, de la convention collective nationale du Crédit agricole, applicable, au litige prévoit (article B2.1) ; qu'en retenant que les deux jours fériés résultant du droit local (vendredi Saint et second jour de Noël) devaient nécessairement s'ajouter au nombre de cinquante-six jours de repos fixé par l'accord et comprenant les jours chômés, lorsque l'inclusion des deux jours litigieux dans le total des jours de repos était parfaitement licite dès lors que la durée de travail annuelle demeurait dans la limite fixée par la loi, le conseil de prud'hommes a violé l'ordonnance du 16 août 1892, les articles L. 3133-1 et L. 3133-2 du code du travail, ensemble les dispositions de l'annexe 2 de la convention collective nationale du Crédit agricole ;
2°/ que lorsqu'un accord national inclut dans le nombre annuel limité de jours de repos et de congés accordés aux salariés "les jours chômés dans l'entreprise", l'employeur de salariés qui bénéficient, en vertu du droit local mosellan, de deux jours chômés de plus que les salariés des autres départements français, peut comptabiliser ces deux jours parmi les jours chômés dans l'entreprise, le solde des jours de repos disponible au titre de la réduction du temps de travail se trouverait-il inférieur à celui des salariés des autres départements jouissant d'un nombre moins important de jours chômés ; qu'en décidant du contraire, le conseil de prud'hommes a violé l'ordonnance du 16 août 1892, les articles L. 3133-1 et L. 3133-2 du code du travail, ensemble les dispositions de l'annexe 2 de la convention collective nationale du Crédit agricole ;
3°/ que la seule domiciliation d'une entreprise dans les départements d'Alsace-Moselle ouvrant droit à deux jours de plus que ceux accordés aux salariés des autres départements français, ne justifie pas, lorsque l'accord national dont relève l'entreprise fixe à un nombre limité le nombre annuel de jours de repos octroyés aux salariés et incluant les jours chômés dans l'entreprise, qu'ils puissent prétendre cumuler ces deux avantages et se voir accorder deux jours chômés en sus du nombre limité de jours de repos conventionnellement fixé ; qu'en décidant le contraire, le conseil de prud'hommes a violé le principe "à travail égal, salaire égal" l'ordonnance du 16 août 1892, les articles L. 3133-1 et L. 3133-2 du code du travail, ensemble les dispositions de l'annexe 2 de la convention collective nationale du Crédit agricole ;
4°/ que le chômage des jours fériés mentionnés par l'ordonnance du 16 août 1892 n'est obligatoire que depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005, soit postérieurement au 1er avril 2005 ; qu'en condamnant la CRCAM à payer les jours fériés au titre de la période antérieure au 1er avril 2005 du fait qu'ils étaient "obligatoirement chômés", lorsque le chômage de ces jours n'était pas obligatoire au cours de cette période, le conseil de prud'hommes a violé l'ordonnance du 16 août 1892, les articles L. 3133-1 et L. 3133-2 du code du travail, les dispositions de l'annexe 2 de la convention collective nationale du Crédit agricole, ensemble les dispositions de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 ;
Mais attendu que les jours acquis au titre d'un accord d'aménagement et de réduction du temps de travail ne peuvent pas être positionnés sur un jour férié ;
Et attendu qu'ayant constaté que la pratique de l'employeur faisait perdre au salarié le bénéfice de deux jours fériés auxquels il pouvait prétendre en application du droit local d'Alsace-Moselle, le conseil de prud'hommes a exactement décidé d'accorder à ce dernier les rappels de salaires correspondants ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la quatrième branche du moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le Crédit agricole aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Crédit agricole à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la caisse régionale du crédit agricole mutuel de Lorraine.
Il est fait grief à la décision attaquée D'AVOIR condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de LORRAINE, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Monsieur X... la somme de 1.812,34 euros au titre des jours de RTT indûment retenus, outre 183,21 euros au titre des congés sur jours de RTT
AUX MOTIFS QUE les jours fériés dans le département du Bas-Rhin, du Haut –Rhin et de la Moselle obéissent au droit local maintenu en vigueur dans les trois départements par la loi du 1er juin 1924 ; qu'en vertu de l'article 105 a alinéa 2 du code des professions, sont considérés comme jours de fête dans le sens de la loi organique sur l'industrie : le jour de l'an, le lundi de Pâques, l'Ascension, le lundi de Pentecôte, l'Assomption, la Toussaint, le premier et le second jour de Noël et dans les communes ayant une église protestante ou une église mixte le vendredi saint ; que le droit local s'articule avec le droit général, ainsi que les jours fériés de droit général (11 novembre, 1er mai, 8 mai et 14 juillet) des articles L nouveau L. 3133-1 du Code du travail, sont également obligatoirement chômés et rémunérés ; que les salariés des 3 départements bénéficient donc de 13 jours fériés obligatoirement chômés et rémunérés au contraire des salariés des autres départements français ; que l'article L 3133-2 du Code du travail interdit à l'employeur de faire récupérer les jours fériés qui sont chômés ; que les jours chômés du 26 décembre et du vendredi saint ne peuvent pas être comptabilisés comme jours de repos dans le décompte du temps de travail ; que la réduction du temps de travail permet aux salariés de bénéficier de jours de repos supplémentaires qui sont des jours non travaillés et rémunérés, assimilés à un temps de travail effectif ; que la position de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de LORRAINE fait perdre aux salariés mosellans le bénéfice des deux jours fériés complémentaires que leur offre le droit local ; que la pratique de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de LORRAINE est contraire au droit local qui prévaut sur l'accord national moins favorable ; qu'au visa de l'ordonnance du 16 août 1892 et de l'annexe, des articles L 3133-1 du Code du travail et L. 3133-2 du Code du travail et de l'annexe 2 de la Convention Collective Nationale, ordonne le paiement à Monsieur Christian X... des jours fériés retenus à tort soit : - vendredi saint 18.04.2003 ; - vendredi 26.12.2003 ; vendredi saint 09.04.2004 ; vendredi sain 25.03.2005 ; lundi 26/12/2005 ; - vendredi saint 14.04.2006 ; - vendredi 26.12.2006 ; - vendredi saint 06.04.2007 ; mercredi 26.12.2007 ;
1°) ALORS QU'une convention collective peut valablement inclure des jours fériés attribués par la loi ou le droit local applicable dans le département de la MOSELLE (ordonnance du 16 août 1892), qu'ils soient ou non chômés, dans le décompte total des jours de repos et de congés dus au salarié, dès lors que la durée du travail n'excède pas la limite fixée par la loi, cette limite étant fixée, s'agissant des entreprises soumises à l'annualisation du temps de travail, à 1.600 heures annuelles pour la période du 18 janvier 2003 au 1er juillet 2004 et à 1.607 heures pour la période postérieure à cette date ; qu'en l'espèce, il était constant que les dispositions de la Convention Collective du Crédit Agricole applicable au litige fixaient la durée du travail à 1.599 heures par an (Annexe 2, chapitre I, article A et chapitre II, article B.1 – production n° 3), le nombre des jours de congés et de repos attribués aux salariés étant en conséquence fixés comme suit : « Chaque salarié doit bénéficier, au-delà des 2 jours de repos hebdomadaires fixés dans l'article 41 de la Convention collective, de jours et demi-journées de congés comprenant : - les 25 jours de congés payés annuels, définis par l'article 19 de la Convention collective - les jours chômés dans l'entreprise (jours fériés, jours de fermeture collective ou autres congés supplémentaires attribués par la Caisse régionale) - et, des demi-journées ou des journées, qui s'ajoutant aux jours ci-dessus, doivent porter le nombre total des jours de congés et de repos à 56 jours par an (pour un salarié bénéficiant de la totalité des congés ci-dessus) » (annexe 2, chapitre II, de la Convention Collective Nationale du Crédit Agricole, applicable, au litige prévoit (article B2.1 – production n° 2) ; qu'en retenant que les deux jours fériés résultant du droit local (vendredi saint et second jour de Noël) devaient nécessairement s'ajouter au nombre de 56 jours de repos fixé par l'accord et comprenant les jours chômés, lorsque l'inclusion des deux jours litigieux dans le total des jours de repos était parfaitement licite dès lors que la durée de travail annuelle demeurait dans la limite fixée par la loi, le Conseil de prud'hommes a violé l'ordonnance du 16 août 1892, les articles L. 3133-1 et L. 3133-2 du Code du travail, ensemble les dispositions de l'annexe 2 de la Convention Collective Nationale du Crédit Agricole ;
2°) ALORS QUE lorsqu'un accord national inclut dans le nombre annuel limité de jours de repos et de congés accordés aux salariés « les jours chômés dans l'entreprise », l'employeur de salariés qui bénéficient, en vertu du droit local mosellan, de deux jours chômés de plus que les salariés des autres départements français, peut comptabiliser ces deux jours parmi les jours chômés dans l'entreprise, le solde des jours de repos disponible au titre de la réduction du temps de travail se trouverait-il inférieur à celui des salariés des autres départements jouissant d'un nombre moins important de jours chômés ; qu'en décidant du contraire, le Conseil de prud'hommes a violé l'ordonnance du 16 août 1892, les articles L. 3133-1 et L. 3133-2 du Code du travail, ensemble les dispositions de l'annexe 2 de la Convention Collective Nationale du Crédit Agricole ;
3°) ALORS QUE la seule domiciliation d'une entreprise dans les départements d'ALSACE-MOSELLE ouvrant droit à deux jours de plus que ceux accordés aux salariés des autres départements français, ne justifie pas, lorsque l'accord national dont relève l'entreprise fixe à un nombre limité le nombre annuel de jours de repos octroyés aux salariés et incluant les jours chômés dans l'entreprise, qu'ils puissent prétendre cumuler ces deux avantages et se voir accorder deux jours chômés en sus du nombre limité de jours de repos conventionnellement fixé ; qu'en décidant le contraire, le Conseil de prud'hommes a violé le principe « à travail égal, salaire égal » l'ordonnance du 16 août 1892, les articles L. 3133-1 et L. 3133-2 du Code du travail, ensemble les dispositions de l'annexe 2 de la Convention Collective Nationale du Crédit Agricole ;
4°) ALORS en tout état de cause QUE le chômage des jours fériés mentionnés par l'ordonnance du 16 août 1892 n'est obligatoire que depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005, soit postérieurement au 1er avril 2005 ; qu'en condamnant la CRCAM à payer les jours fériés au titre de la période antérieure au 1er avril 2005 du fait qu'ils étaient « obligatoirement chômés », lorsque le chômage de ces jours n'était pas obligatoire au cours de cette période, le Conseil de prud'hommes a violé l'ordonnance du 16 août 1892, les articles L. 3133-1 et L. 3133-2 du Code du travail, les dispositions de l'annexe 2 de la Convention Collective Nationale du Crédit Agricole, ensemble les dispositions de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005.