Sur le moyen unique :
Attendu que le 22 mars 2000 a été conclu, au sein de la société Crédit industriel d'Alsace et de Lorraine (société CIAL), un accord d'entreprise sur l'aménagement et la réduction du temps de travail (ARTT) fixant en son article 3.2 la durée annuelle du travail à 1 575 heures prenant en compte les vingt-cinq jours de congés payés légaux, un jour de congé conventionnel et "les jours fériés normalement chômés ne tombant pas sur un samedi ou sur un dimanche, y compris ceux issus de l'application du droit local en Alsace-Moselle" ; que l'accord, en son article 4.3.3, relatif à l'organisation de la prise des jours de congés au titre de l'ARTT a précisé : "Pour l'Alsace et la Moselle, deux jours maximum de RTT sont positionnés d'office sur les jours fériés du droit local." ; qu'estimant cette disposition contraire à l'ordonnance de droit local du 16 août 1892 et à l'article 105a du code local des professions, M. X... a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir que les jours de congés de RTT prévus par l'accord d'entreprise et les jours fériés de droit local, soit le vendredi saint et le 26 décembre, ne soient pas confondus ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Colmar, 12 janvier 2006) d'avoir fait droit à cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte de la combinaison de l'article L. 212-8 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 et de l'article L. 212-9-II du code du travail, la possibilité d'instituer une variation sur tout ou partie de l'année de la durée hebdomadaire du travail à condition notamment que, sur un an, cette durée n'excède pas en tout état de cause le plafond de 1 600 heures au cours de l'année, que la durée moyenne est calculée sur la base de la durée légale ou de la durée conventionnelle hebdomadaire si elle est inférieure, diminuée des heures correspondant aux jours de congés légaux et aux jours fériés, mentionnés à l'article L. 222-1 du code du travail ; que les jours fériés particuliers issus de l'ordonnance du 16 août 1892 applicable en Alsace-Moselle, à savoir le 26 décembre et le vendredi saint, ne figurant pas sur cette liste, n'ont pas à être, en l'absence de volonté des partenaires sociaux en ce sens, déduits de la durée annuelle du travail ; qu'ils peuvent en conséquence être comptabilités au titre de la mise en place d'un accord collectif d'aménagement et de réduction du temps de travail ; qu'en estimant que le positionnement sur le 26 décembre et le vendredi saint de jours de repos prévus par l'accord de réduction du temps de travail conclu au sein de la société CIAL portait atteinte aux dispositions d'ordre public du droit applicable dans les départements d'Alsace et de Moselle, la cour d'appel a violé les articles L. 212-8 et L. 212-9-II du code du travail et l'ordonnance du 16 août 1892 ;
2°/ que le chômage obligatoire dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle des jours fériés figurant dans l'ordonnance du 16 août 1892 a été institué par la loi du 31 mars 2005, entrée en vigueur au 1er avril suivant ; qu'il n'a pu avoir pour conséquence de remettre en cause la licéité des dispositions de l'accord d'entreprise du 22 mars 2000, prévoyant que, pour l'Alsace et la Moselle, deux des jours de réduction du temps de travail qu'il instituait, au maximum, seraient positionnés d'office sur les jours fériés issus du droit local ; qu'en déduisant l'illicéité de cette disposition conventionnelle de ce qu'elle entraînerait la perte du statut légal d'ordre public de deux jours chômés et rémunérés, la cour d'appel a violé l'article 2 du code civil et l'article 1er de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 ;
3°/ qu'il est possible aux parties signataires d'un accord d'entreprise portant réduction du temps de travail de convenir l'imputation, pour les salariés relevant de la législation des départements d'Alsace et de Moselle, d'un ou de deux jours de repos prévus par l'accord sur les deux jours de congés spéciaux prévus par l'ordonnance du 16 août 1892, dès lors, d'une part, que ce caractère chômé et rémunéré n'est pas remis en cause et que, d'autre part, à supposer même que ces jours fériés ne puissent être comptabilisés au titre de la réduction du temps de travail, ils ne privent pas les salariés en cause du paiement à titre d'heures supplémentaires des heures effectuées au-delà du plafond prévu par l'article L. 212-9 II du code du travail ; qu'en estimant que le positionnement de deux jours (maximum) de réduction du temps de travail sur les deux jours fériés issus du droit local méconnaissait la disposition d'ordre public de ce dernier, en "neutralisant" l'avantage que les salariés relevant du droit local retiraient par rapport aux salariés qui n'y étaient pas soumis, bien que la durée annuelle du travail ait été fixée par l'accord à 1 575 heures et, qu'en outre, il y ait été expressément stipulé que cette durée annuelle tenait compte des jours fériés normalement chômés issus de l'application du droit local en Alsace-Moselle, la cour d'appel a violé l'article L. 212-9 II et l'article L. 212-8 du code du travail, ainsi que l'ordonnance du 16 août 1892, et l'article 3-2 de l'accord d'entreprise CIAL sur l'aménagement du temps de travail du 22 mars 2000 ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a relevé que l'accord ARTT du 22 mars 2000 admettait que les jours fériés issus du droit local d'Alsace-Moselle étaient chômés et indemnisés ; que contrairement à ce qui est soutenu, elle n'a pas déduit l'illicéité de la disposition conventionnelle, relative au positionnement des jours de RTT sur ces deux jours fériés, d'une application rétroactive de la loi du 31 mars 2005 ;
Et attendu, ensuite, que les jours de repos acquis au titre d'un accord d'aménagement et de réduction du temps de travail ne peuvent pas être positionnés sur un jour férié chômé ; que dès lors, la cour d'appel, en retenant que cette stipulation de l'accord ne pouvait pas être appliquée, a statué à bon droit ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société CIAL aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille sept.