LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 28 fructidor an III ;
Attendu que le 28 juillet 2004, M. X..., qui participait à un stage de préparation organisé par la Fédération française de vol libre (FFVL), assurée auprès de la société AXA, en vue des épreuves du championnat de France de deltaplane, a été victime d'un accident, l'aile delta qu'il pilotait et qui était tractée sur un chariot par un ULM ayant "piqué du nez" au moment du décollage ; que, grièvement blessé, il a, au vu d'expertises technique et médicale, assigné la FFVL et AXA en réparation de son préjudice devant une juridiction de l'ordre judiciaire; qu'un juge de la mise en état s'est déclaré compétent pour apprécier la responsabilité contractuelle de la FFVL et a condamné celle-ci et AXA à verser une certaine somme à M. X... à titre de provision ;
Attendu que pour rejeter l'exception d'incompétence de la juridiction de l'ordre judiciaire l'arrêt attaqué retient que si la FFVL, agréée, participe à une mission de service public, les décisions qu'elle prend ne ressortissent de la compétence de la juridiction administrative que si elles impliquent la mise en oeuvre d'une prérogative de puissance publique et que la mise en place de l'organisation des stages et des règles de sécurité ne confère pas à cette association une prérogative de puissance publique ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les normes concernant les matériels mis en oeuvre, les consignes de sécurité, les règles de pratique concernant la technique particulière de décollage d'un deltaplane à partir d'un chariot tiré par un ULM et le suivi précis de l'encadrement du stage dont l'absence était reprochée à la FFVL qui avait reçu délégation du ministre des sports en application de l'article 17 de la loi du 16 juillet 1984, relevaient d'un pouvoir de décision destiné à satisfaire les besoins du service public assuré par cette association et constituaient ainsi l'exercice d'une prérogative de puissance publique, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Vu l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Et attendu que la Cour de cassation est en mesure de mettre fin au litige ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que les juridictions de l'ordre judiciaire sont incompétentes pour connaître du litige ;
Renvoie M. X... à mieux se pourvoir ;
Condamne M. X... aux dépens exposés devant le tribunal de grande instance de Nice, la cour d'appel d'Aix-en-Provence et la Cour de cassation ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Bachellier et Potier de La Varde, avocat aux Conseils, pour la société Axa Corporate Solutions assurance et l'association Fédération française de vol libre.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception d'incompétence de la juridiction de l'ordre judiciaire.
AUX MOTIFS QUE si la FEDERATION FRANCAISE DE VOL LIBRE agréée participe à une mission de service public, les décisions qu'elle prend ne ressortent de la compétence de la juridiction administrative que si elles impliquent la mise en oeuvre d'une prérogative de puissance publique ; que la mise en place de l'organisation de stages de formation et des règles de sécurité ne confèrent pas à cette association une prérogative de puissance publique susceptible d'attribuer compétence à la juridiction administrative ; en conséquence, l'exception d'incompétence doit être rejetée ;
ALORS QUE la définition de règles techniques propres à sa discipline, de règlements relatifs à l'organisation de toute manifestation ouverte à ses licenciés, de règlements fédéraux relatifs aux normes des équipements sportifs requises pour la participation aux compétitions sportives organisées par elles ainsi que l'organisation de manifestations sportives nécessitant des conditions particulières de sécurité par la Fédération Française de Vol Libre, procède, dans le cadre de sa participation au service public du sport, de l'exercice des prérogatives de puissance publique qui lui ont été conférées par la délégation qui lui a été accordée par le ministre chargé des sports pour sa discipline ; dès lors en l'espèce Monsieur X..., accidenté au cours d'un stage fédéral de préparation aux championnats de France de deltaplane pour lesquels il était sélectionné dans la filière espoirs, recherchant la responsabilité de la F.F.V.L. en invoquant, se prévalant des rapports d'expertise technique judiciaire, non seulement un défaut de recommandations et de consignes de sécurité lors du stage, mais en outre l'absence de définition par la Fédération des caractéristiques techniques et des conditions d'emploi des matériels mis en oeuvre ainsi que l'absence de règles fédérales de pratique concernant la technique particulière de décollage de deltaplane à partir d'un chariot remorqué par ULM, en affirmant, pour rejeter l'exception d'incompétence de la juridiction de l'ordre judiciaire, que la mise en place de l'organisation de stages de formation et des règles de sécurité ne confère pas à la F.F.V.L. une prérogative de puissance publique susceptible d'attribuer compétence à la juridiction administrative, la Cour a violé les articles 16, 17, 18, 42 bis de la loi du 16 juillet 1984 ensemble le principe de la séparation des pouvoirs, la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 28 fructidor An III.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la F.F.V.L. et la compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS à régler à Monsieur Jérôme X... une provision de 50 000 € à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel.
AUX MOTIFS QU' il résulte du rapport de l'expert Y... en date du 12 mars 2006 que des fautes ont été commises dans l'organisation de ce stage de formation tenant tant au défaut d'informations suffisantes sur les règles de sécurité qu'au matériel utilisé ou à l'absence d'instrument (rétroviseur, fusibles de sécurité) ; que la faute éventuellement commise par M. X... ou l'incidence de son état de santé antérieur, ne sont pas de nature à exonérer totalement la F.F.V.L. de sa responsabilité dans la survenance de l'accident, de sorte que l'obligation de cette dernière n'apparaît pas sérieusement contestable ;
ALORS QUE le juge de la mise en état ne peut accorder une provision au créancier que lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; dès lors, en l'espèce, la société AXA CORPORATE SOLUTIONS et son assurée ayant contesté la responsabilité de la F.F.V.L. en invoquant le comportement inapproprié du pilote mais aussi, expertises médicales à l'appui, des lésions neurologiques qui le rendaient inapte à la pratique du vol libre et auraient dû conduire, si ces renseignements avaient été communiqués, à une interdiction de pratique, ce qui était de nature à écarter tout lien entre une faute éventuelle de la F.FV.L. et le dommage subi par Monsieur X... ; en affirmant que la faute éventuellement commise par Monsieur X... ou l'incidence de son état antérieur ne sont pas de nature à exonérer totalement la F.F.V.L. de sa responsabilité dans la survenance dans l'accident de sorte que l'obligation de cette dernière n'est pas sérieusement contestable, pour condamner in solidum la F.F.V.L. et AXA à lui payer une provision de 50.000 € à valoir sur son préjudice corporel, la Cour, qui s'est ainsi prononcée sur la responsabilité de la FFVL et plus particulièrement sur l'existence d'un lien de causalité entre sa faute éventuelle et le dommage subi par la victime, a tranché une contestation sérieuse et partant violé l'article 771 du Code de procédure civile.