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08/12/2010 | FRANCE | N°08PA04195

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 08 décembre 2010, 08PA04195


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 août 2008, présentée pour M. Jean A, demeurant ..., par Me Hadjiveltchev ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0214399/2 du 5 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1995 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme que la Cour déterminera au titre de l'article L. 761-1 du code de

justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 août 2008, présentée pour M. Jean A, demeurant ..., par Me Hadjiveltchev ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0214399/2 du 5 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1995 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme que la Cour déterminera au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention fiscale conclue entre la France et le Grand Duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 1er avril 1958, modifiée par l'avenant du 8 septembre 1970 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2010 :

- le rapport de Mme Dhiver, rapporteur,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

Considérant que M. A, qui exerçait une activité professionnelle au Luxembourg, s'est fiscalement domicilié en France pour la période du 1er février au 19 décembre 1995 ; qu'il a porté, dans la déclaration d'ensemble de ses revenus de l'année 1995 déposée auprès du centre des impôts de Thionville, la somme de 596 124 euros qui lui avait été versée le 31 mars 1995 par son ancien employeur, la société de droit luxembourgeois Paribas Luxembourg, à la suite de son départ en retraite ; que cette somme, déclarée pour le calcul du taux effectif, a été regardée par l'administration comme une pension de retraite taxable en France ; que le requérant conteste cette imposition au motif que la somme en cause ne serait pas imposable ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant que, si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition ; que, par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification ; qu'il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus (...) ; qu'aux termes de l'article 79 du même code : Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu ;

Considérant que la somme de 596 124 euros en litige a été versée à M. A le 31 mars 1995 dans le cadre d'un régime dit de prévoyance extra-légale institué par son employeur, la société luxembourgeoise Paribas Luxembourg, par un règlement adopté le 8 août 1979 ; que ce régime, alimenté exclusivement par des cotisations de l'entreprise, prévoit le versement aux personnels de direction de l'entreprise d'un capital tenant lieu de pension de retraite ou de survie ; qu'il résulte des stipulations dudit règlement que ce régime, créé au profit de l'ensemble d'une catégorie de salariés, a institué, à la charge de l'entreprise, une obligation juridique de caractère général et impersonnel ; qu'il a pour objet principal la fourniture d'un revenu complémentaire, versé en capital ou, sur option des salariés, sous la forme de rente viagère, aux personnels visés lors de leur admission à la retraite, et pour objet accessoire la fourniture à titre de prévoyance d'une couverture du risque décès du bénéficiaire ; qu'il revêt ainsi le caractère d'une couverture complémentaire de retraite, nonobstant la présence d'une clause de prévoyance ; que, dès lors, sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'elle ait fait l'objet d'un versement unique, la somme litigieuse présente le caractère d'une pension au sens des dispositions précitées de l'article 79 du code général des impôts taxable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements, salaires, pensions et rentes viagères ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. A entend se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction 5-F 121 du 29 décembre 1992 selon laquelle les sommes perçues au titre de pensions et rentes viagères sont considérées comme entrant dans le champ de l'impôt sur le revenu dès lors que les allocations ou indemnités constituent un revenu, c'est-à-dire un produit qui se renouvelle ou est susceptible de se renouveler ; que, toutefois, cette instruction, qui énonce également que ne constituent pas, en principe, un revenu passible de l'impôt les sommes qui, eu égard à leur nature ou aux conditions dans lesquelles elles ont été attribuées, ont le caractère de secours. En règle générale, il s'agit d'allocations exceptionnelles, non renouvelables, d'un montant limité, attribuées à titre individuel compte tenu des résultats d'une enquête sociale , n'a pas entendu exclure du champ de l'impôt les sommes ayant fait l'objet d'un versement unique, à l'exception de celles qui ne répondraient pas aux caractéristiques ci-dessus énoncées ; qu'en l'espèce, la somme de 596 124 euros versée à M. A le 31 mars 1995 sous forme d'un capital ne répond à aucune de ces caractéristiques ;

Considérant, en troisième lieu, que M. A ne saurait, en tout état de cause, utilement se prévaloir de l'instruction 14 B-1-96 du 16 février 1996, dès lors qu'il résulte de l'instruction que la somme en litige lui a été versée par son employeur, la société de droit luxembourgeois Paribas Luxembourg, et non par une institution de prévoyance ayant son siège en Suisse ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 13 de la convention fiscale signée le 1er avril 1958 entre la France et le Luxembourg : Les pensions privées et les rentes viagères provenant d'un des Etats contractants et payées à des personnes ayant leur domicile fiscal dans l'autre Etat sont exemptées d'impôt dans le premier Etat ; qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que la somme en cause constitue une pension privée versée au titre de l'année 1995 ; qu'en application desdites stipulations, elle était donc imposable en France, où M. A était domicilié fiscalement du 1er février au 19 décembre 1995 ;

Sur les intérêts de retard et la majoration de 10 % prévue à l'article 1728 du code général des impôts :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : I. - Toute somme, dont l'établissement ou le recouvrement incombe à la direction générale des impôts, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard (...) ;

Considérant, d'une part, que l'intérêt de retard institué par les dispositions de l'article 1727 du code général des impôts, qui vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non respect par les contribuables de leur obligation de déclarer et payer l'impôt aux dates légales, n'a pas le caractère d'une sanction et n'a dès lors pas à faire l'objet de la motivation exigée par les dispositions de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales ; que, d'autre part, si M. A sollicite l'application d'un taux de 6,65 %, sa demande est sans objet, dès lors que, dans sa décision d'admission partielle du 20 août 2002, l'administration a admis de ramener à 4,5 % le taux des intérêts de retard appliqués au montant des droits rectifiés et a prononcé, en conséquence, un dégrèvement de 47 111,32 euros ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa version applicable à l'espèce : 1. Lorsqu'une personne physique (...) tenue de souscrire une déclaration (...) s'abstient de souscrire cette déclaration (...) dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration (...) est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 10 % ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A n'a souscrit la déclaration d'ensemble de ses revenus de l'année 1995 que le 3 décembre 1996, soit après l'expiration du délai légal ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a appliqué la majoration de 10 % visée par les dispositions précitées de l'article 1728 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A une somme, dont au demeurant il ne précise pas le montant, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 08PA04258

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N° 08PA04195


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 08PA04195
Date de la décision : 08/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-12-08;08pa04195 ?
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