LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen qui est recevable :
Vu l'article 3 du code civil, ensemble l'article 9 de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981 relative au statut des personnes et de la famille ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes qu'il incombe au juge français, s'agissant de droits dont les parties n'ont pas la libre disposition, de mettre en oeuvre, même d'office, la règle de conflit de lois et de rechercher, au besoin avec le concours des parties, la teneur du droit étranger applicable ; qu'en vertu du second, la dissolution du mariage est prononcée selon la loi de celui des deux Etats dont les parties ont la nationalité à la date de la présentation de la demande ou de l'Etat où les époux avaient leur dernier domicile commun s'ils ne sont pas de même nationalité ;
Attendu que M. X... et Mme Y... se sont mariés au Maroc en 1976 ; que M. X... a assigné son épouse en divorce le 26 décembre 2003 sur le fondement de l'article 242 du code civil français et que celle-ci a formé une demande reconventionnelle en séparation de corps ; que le divorce a été prononcé aux torts partagés des époux en application de l'article 297 du même code, dans sa rédaction alors applicable ;
Qu'en statuant ainsi, sans déterminer la loi applicable à la dissolution du mariage alors que la nationalité marocaine du mari ressortait des écritures d'appel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de répondre aux autres griefs ;
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 avril 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé sur le fondement du droit français le divorce de madame Y... et monsieur X... tous deux de nationalité marocaine ;
ALORS QUE le juge est tenu d'appliquer d'office la règle de conflit de lois résultant d'un traité ratifié par la France ; que l'article 9 de la convention frranco-marocaine du 10 août 1981 relative aux statuts des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire, prévoit que la dissolution du mariage est prononcée selon la loi de celui des deux états dont les époux ont tous deux la nationalité à la date de la présentation de la demande ; qu'en prononçant le divorce de monsieur X... et madame Y... au regard du droit français, sans rechercher d'office la loi applicable au litige, alors qu'il résultait des pièces de la procédure que les deux époux étaient de nationalité marocaine, la cour d'appel a violé l'article 3 du Code civil et l'article 9 de la convention franco–marocaine du 10 août 1981.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé le divorce de madame Y... et monsieur X... aux torts partagés ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte des témoignages de monsieur A..., de Monsieur B..., de Monsieur C... que rien ne justifie d'écarter des débats que l'épouse se montrait agressive avec son mari et l'insultait devant des tiers, qu'elle multipliait les absences du domicile conjugal, les allégations contraires des pièces produites par l'épouse étant insuffisantes à mettre en doute la réalité de cette attitude d'hostilité à l'égard du mari ; qu'ainsi sont établis à la charge de chacun des époux des faits constituant des violations graves des obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune et justifiant d'accueillir la demande en divorce de monsieur X... et la demande reconventionnelle en séparation de corps de madame Y... et de prononcer le divorce aux torts partagés des époux par application de l'article 297 du Code civil ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE les demandes principales et reconventionnelle étant accueillies, le divorce sera prononcé aux torts partagés des époux conformément à l'article 245 alinéa 2 du Code civil ;
ALORS QUE l'attestation établie en vue de sa production en justice doit être écrite, datée et signée de la main de son auteur ; que les attestations de monsieur A..., de Monsieur B... et de Monsieur C..., qui affirmaient que madame Y... était agressive avec son mari et qu'elle multipliait les absences du domicile conjugal, étaient rédigées de façon très proche et écrites par la même personne ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de madame Y... (p. 6 § 3,4 et 5), si la simple apposition de leur signature sur des attestations rédigées par un tiers en termes très proches n'était pas de nature à les priver de tout caractère probant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 202 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté madame Y... de sa demande de prestation compensatoire ;
AUX MOTIFS QUE madame Y... née en 1949, percevait les prestations familiales pour les enfants à charge et pour tout revenu le revenu minimum soit 586 euros par mois ; qu'elle assumait les charges courantes et a bénéficié d'aides ponctuelles des services sociaux et d'allocations mensuelles du conseil général pour subvenir aux besoins des enfants en 2003 ; que pour sa part, monsieur X..., invalide, né en 1948, déclarait ainsi que cela résulte de son avis d'imposition 2005 un revenu de 6.642 euros soit 553 euros par mois correspondant à une pension d'invalidité de 80% ; qu'il perçoit également une allocation compensatrice pour tierce personne du Conseil général qui s'est élevée à 9.316 euros pour l'année 2005 et depuis le 1er janvier 2006 à 776,40 euros mensuels . Il assume le remboursement d'un prêt de 86 euros, les mensualités d'un crédit à la consommation, à la charge d'EDF de 34 euros ;
ALORS QUE D'UNE PART, l'aide versée à la famille, sous forme d'allocations familiales, est destinée à bénéficier aux enfants et non à procurer des revenus à celui qui la reçoit ; que pour apprécier l'existence d'une éventuelle disparité dans les conditions de vie respectives des époux, le juge ne peut tenir compte des allocations familiales ou aides perçues par l'épouse pour subvenir aux besoins des enfants qui sont à sa charge ; qu'en prenant en compte le fait que madame Y... percevait les prestations familiales pour les enfants à charge et des aides ponctuelles des services sociaux et d'allocations mensuelles du conseil général pour subvenir aux besoins des enfants, pour en déduire que la rupture du mariage n'entraînera aucune disparité dans les conditions de vie des époux, la cour d'appel a violé les articles 270, 271 et 272 du Code civil.
ALORS QUE D'AUTRE PART, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; que le juge doit prendre en considération le patrimoine tant en capital qu'en revenu des époux, après la liquidation du régime matrimonial ; qu'en décidant que la rupture du mariage ne créera pas une disparité dans les conditions de vie des époux, après avoir pourtant constaté que madame Y... percevait un revenu de 586 euros et que monsieur X... percevait un revenu de 1209,40 euros (553 euros + 776,40 euros – (34 euros + 86 euros)), ce dont il résultait que le mari percevait plus du double de revenus que madame Y..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 271 et 272 du Code civil.