Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 15 mars 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2304547 du 27 mars 2024, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée 19 avril 2024, M. B..., représenté par Me Ulucan, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2304547 du 27 mars 2024 du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 mars 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis en toutes ses décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il doit être regardé comme soutenant que :
- l'arrêté attaqué a été pris en violation des articles L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique .
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant tunisien né le 6 décembre 1969, est entré en France en 2016 selon ses déclarations. Le 17 juin 2021, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 15 mars 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. B... relève appel du jugement du 27 mars 2024 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 / (...) ". Cet article est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien, au sens de l'article 11 de cet accord. Toutefois, si l'accord franco-tunisien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d'observer que ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
3. M. B... soutient qu'il réside sur le territoire français depuis août 2017, avec son épouse, titulaire d'un titre de séjour, et leurs enfants nés le 9 février 2010 et le 8 mars 2012, qu'il travaille depuis août 2017 et qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier que M. B... justifie exercer une activité professionnelle en qualité de chauffeur-livreur pour le compte de la même entreprise depuis août 2017, il est l'auteur de faits caractérisant une menace à l'ordre public rappelés au point 9 du jugement attaqué, dont il ne conteste pas la matérialité. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale de M. B... ne pourrait pas se reconstituer en Tunisie, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 47 ans. Ainsi, la circonstance que son épouse soit titulaire d'un titre de séjour et l'activité professionnelle exercée par l'intéressé ne sauraient constituer à elles seules, au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une considération humanitaire ou un motif exceptionnel de nature à permettre la délivrance d'un titre de séjour. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. B... dans l'exercice de son pouvoir de régularisation.
4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Pour les mêmes motifs que ceux exposées au point 3, l'arrêté par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de délivrer à M. B... un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris. Par suite, cette décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour ces mêmes motifs, l'arrêté litigieux n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. B....
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'annulation, d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Ivan Luben, président de chambre,
- M. Stéphane Diémert, président-assesseur,
- Mme Irène Jasmin-Sverdlin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 novembre 2024.
La rapporteure,
I. C...Le président,
I. LUBEN
La greffière,
C. POVSE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 24PA01837 2