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10/04/2025 | FRANCE | N°24LY02180

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 2ème chambre, 10 avril 2025, 24LY02180


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 12 octobre 2023 par lesquelles le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois mois.



Par un jugement n° 2310001 du 28 juin 2024, le tribunal admin

istratif de Lyon a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour



Par une requête, enregistr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 12 octobre 2023 par lesquelles le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois mois.

Par un jugement n° 2310001 du 28 juin 2024, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2024, M. B... A..., représenté par Me Trabelsi, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire en date du 12 octobre 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire, un récépissé assorti d'une autorisation de travail et de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, une somme de 2 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est entachée de défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois mois méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le préfet de la Loire, qui a reçu communication de la requête, n'a pas présenté d'observations.

Par décision du 27 novembre 2024, la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M. A... a été constatée.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Porée, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité chinoise, né le 18 février 1974, est entré régulièrement sur le territoire français le 22 février 2004 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa C valable du 6 février au 6 mars 2004 délivré par les autorités françaises. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de la Commission des recours des réfugiés du 28 juin 2005. M. A... a demandé, le 23 novembre 2021, la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 12 octobre 2023, après avoir recueilli l'avis favorable de la commission du titre de séjour réunie le 10 mars 2023 sur cette décision, le préfet de la Loire a refusé de faire droit à la demande du requérant, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé, à son encontre, une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois mois. M. A... relève appel du jugement du 28 juin 2024 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la décision attaquée, que le préfet de la Loire a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A... avant d'édicter cette décision. Si des courriels du conseil de M. A... se réfèrent à une lettre du 27 juin 2023, qui mentionne une augmentation de salaire entre le dépôt de la demande de titre de séjour et le 27 juin 2023, ainsi que des pièces jointes, le requérant ne démontre pas que les pièces visées par cette lettre ont été effectivement adressées à la préfecture de la Loire, et alors qu'il ressort d'un courriel du 11 août 2023 que le conseil de M. A... propose de déposer en préfecture ou d'envoyer par courrier des pièces. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation personnelle du requérant doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. Si M. A... soutient qu'il vit en France depuis le 22 février 2004, soit presque vingt ans, il ressort des pièces du dossier que le séjour en France du requérant procède d'une situation durablement irrégulière et que l'intéressé ne justifie pas d'une présence continue sur le territoire français dès lors qu'il s'est vu délivrer le 20 septembre 2016 un brevet technique supérieur de cuisinier de la cuisine chinoise par les autorités de la province du Henan en Chine, après la qualification aux épreuves de contrôle, et que les pièces produites à l'appui de ses écritures ne permettent pas de tenir pour établie sa présence continue sur le territoire national au cours des années 2008 à 2013, et de 2016 à septembre 2019. M. A... a vécu à tout le moins trente années en Chine où il ne peut être dépourvu de toute attache personnelle. Si M. A... soutient qu'il a vécu en concubinage depuis le 24 décembre 2014 puis s'est pacsé le 30 décembre 2021 avec la gérante, Mme A..., de la société Ou Lian, constituée le 19 décembre 2013, qui l'emploie en tant que cuisinier, il résulte de ce qui précède qu'il ne prouve pas avoir séjourné de manière continue sur le territoire français entre 2016 et septembre 2019. Il ressort, par ailleurs, de la demande de titre de séjour de M. A... qu'il ne sait ni lire, ni écrire le français, et le requérant ne justifie pas d'une insertion particulière dans la société française en se limitant à démontrer avoir travaillé en tant que cuisinier à temps plein depuis le 1er octobre 2019, avoir acquis le 9 décembre 2022 une maison avec terrain par un crédit immobilier souscrit avec Mme A..., et s'être inscrit le 15 novembre 2021 à un atelier socio-linguistique, sans justifier y avoir effectivement participé. Enfin, M. A... ne démontre pas qu'il n'a plus de liens avec son enfant majeur, sa mère et une sœur qui vivent dans son pays d'origine. Dans ces conditions, en édictant la décision attaquée, le préfet de la Loire n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale du requérant une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent être écartés.

5. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. (...) ".

6. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 4 du présent arrêt, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois mois :

7. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 4 du présent arrêt.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2025, à laquelle siégeaient :

M. Haïli, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

Mme Djebiri, première conseillère,

M. Porée, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 avril 2025.

Le rapporteur,

A. Porée

Le président,

X. Haïli

La greffière,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY02180


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY02180
Date de la décision : 10/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. HAILI
Rapporteur ?: M. Arnaud POREE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : TRABELSI ZOHIR

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-10;24ly02180 ?
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