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11/07/2025 | FRANCE | N°25NT01404

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 3ème chambre, 11 juillet 2025, 25NT01404


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2025 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de renouveler sa carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " et de lui délivrer une carte de résident, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il sera, le cas échéant, renvoyé et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant

une durée d'un an.



Par un jugement n°2501104 du 16 mai 2025, le tribunal administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2025 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de renouveler sa carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " et de lui délivrer une carte de résident, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il sera, le cas échéant, renvoyé et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n°2501104 du 16 mai 2025, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 17 janvier 2025 et enjoint au préfet d'Ille-et-Vilaine de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " et de réexaminer sa demande de carte de résident.

Procédure devant la cour :

I- Par une requête enregistrée le 23 mai 2025, sous le n° 25NT01404, le préfet

d'Ille-et-Vilaine demande à la cour d'annuler le jugement n°2501104 du 16 mai 2025 du tribunal administratif de Rennes.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, la présence en France de M. B... représente une menace pour l'ordre public alors que l'intéressé a été condamné le 29 juin 2022 par le tribunal correctionnel de Rennes à un stage de responsabilisation pour avoir commis des violences suivies d'une incapacité supérieure à 8 jours sur sa compagne, qu'il n'a pas reconnu ses torts soutenant devant la commission du titre de séjour que sa compagne l'a agressé et par ailleurs l'intéressé a été condamné en récidive pour de la conduite en état d'ivresse ;

- les autres moyens soulevés par M. B... en première instance doivent être écartés par les motifs soulevés dans son mémoire en défense de première instance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juin 2025, M. B..., représenté par Me Tessier, conclut :

- au rejet de la requête ;

- à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le préfet d'Ille-et-Vilaine ne sont pas fondés.

II -Par une requête, enregistrée le 23 mai 2025, sous le numéro 25NT01405, le préfet d'Ille-et-Vilaine demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement n°2501104 du

16 mai 2025 du tribunal administratif de Rennes annulant son arrêté du 17 janvier 2025 et lui enjoignant de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " et de réexaminer sa demande de carte de résident.

Il soutient que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, la présence en France de M. B... représente toujours une menace pour l'ordre public dès lors qu'il n'a pas reconnu les violences sexistes et sexuelles suivie d'une incapacité supérieure à 8 jours commises sur sa compagne qui lui ont valu une condamnation, le 29 juin 2022, par le tribunal correctionnel de Rennes à un stage de responsabilisation soutenant devant la commission du titre de séjour que sa compagne l'avait agressé et qu'il était la victime de cette dernière et par ailleurs, l'intéressé a été condamné pour conduite en état d'ivresse et sans permis de conduire en récidive.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juin 2025, M. B..., représenté par Me Tessier, conclut :

- au rejet de la requête en sursis à exécution du jugement n° 2501104 ;

- à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le préfet d'Ille-et-Vilaine ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marion,

- et les observations de Me Tessier, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né le 11 octobre 1986, à Lemba (République démocratique du Congo), est entré en France, le 11 décembre 2002, à l'âge de 16 ans. Il a été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance. Le 6 juin 2003, il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande a été définitivement rejetée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 2 novembre 2006. Le 26 janvier 2006, il a déposé une demande de titre de séjour pour pouvoir travailler. Il a obtenu un premier titre de séjour en qualité de salarié valable du 11 juin 2007 au 10 juin 2008. Cette carte de séjour temporaire valable un an a été renouvelée par la suite durant 16 années jusqu'au 22 juin 2023. Dans le courant de l'année 2022, M. B... a demandé le renouvellement de sa carte de séjour temporaire ainsi qu'une carte de résident. Par un courrier du 21 juin 2022, le préfet d'Ille-et-Vilaine a alerté

M. B... du fait que ses condamnations et signalements judiciaires étaient de nature à lui faire perdre son droit au séjour. Le 6 juin 2023, M. B... a sollicité le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " salarié ". Saisie par le préfet, la commission départementale du titre de séjour a rendu, le 24 juin 2024, un avis défavorable à la demande de renouvellement de titre de M. B.... Par un arrêté du 17 janvier 2025, le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de renouveler sa carte de séjour mention " salarié " et de lui délivrer une carte de résident, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours en fixant le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français durant un an. M. B... a saisi le tribunal administratif de Rennes aux fins d'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 16 mai 2025, ce tribunal a annulé cet arrêté et enjoint au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " et de réexaminer sa demande de carte de résident. Le préfet d'Ille-et-Vilaine fait appel de ce jugement et demande à la cour de surseoir à l'exécution de ce jugement. Il y a lieu de joindre ces deux requêtes pour se prononcer par un seul arrêt.

Sur la requête n°25NT01404 :

2. Aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle et de l'autorisation provisoire de séjour prévue aux articles L. 425-4 ou L. 425-10 ainsi qu'à la délivrance de la carte de résident et de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE ".".

3. Il ressort des pièces du dossier que pour retenir que M. B... représentait toujours une menace à l'ordre public, le préfet d'Ille-et-Vilaine s'est fondé principalement sur des condamnations prononcées par le tribunal correctionnel de Rennes, le 2 novembre 2010, à 450 euros d'amende pour conduite d'un véhicule sans permis, le 7 août 2012, à 4 mois d'emprisonnement avec sursis pour récidive de conduite d'un véhicule sans permis et refus par le conducteur du véhicule d'obtempérer à une sommation de s'arrêter par ce même tribunal correctionnel, le 29 juillet 2014, à 110 heures de travaux d'intérêt général et la suspension du permis de conduire pendant 5 mois à titre principal, pour récidive de conduite d'un véhicule sous l'emprise d'un état alcoolique supérieur à 0,8 g/l de sang et récidive de conduite d'un véhicule sans permis et sans assurance, le 6 juillet 2018, par le tribunal correctionnel de Laval à six mois d'emprisonnement avec sursis et à l'annulation de son permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant quatre mois pour récidive de conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique commise le 22 octobre 2017. Le préfet s'est enfin fondé sur la condamnation du 29 juin 2022 à l'accomplissement par l'intéressé d'un stage de sensibilisation à la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes pour des faits commis le 17 février 2022 de violence suivie d'incapacité supérieure à huit jours par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité.

4. Toutefois, si les infractions routières commises par M. B... sont graves, elles n'en demeurent pas moins anciennes. En effet, le dernier délit routier reproché à l'intéressé a été commis le 22 octobre 2017 soit plus de 7 ans avant l'arrêté en litige et l'intéressé ne s'est plus fait connaître des services de police ou de gendarmerie pour des infractions routières, mêmes mineures, postérieurement à cette dernière date. De plus, la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " de M. B... a été régulièrement renouvelé de 2007 à 2017 en dépit des nombreuses infractions routières commises par l'intéressé. S'agissant des violences commises le 17 février 2022 sur son ancienne compagne et mère de ses trois plus jeunes fils, ces actes délictuels remontent à un peu moins de trois ans avant l'arrêté en litige. Toutefois, si M. B... a minimisé leur gravité au cours de la réunion de la commission du titre de séjour qui a rendu l'avis du 24 juin 2024 défavorable au renouvellement du titre de séjour demandé, il a néanmoins exécuté le stage de responsabilisation auquel le tribunal correctionnel de Rennes l'a condamné. Par ailleurs, il a cessé de vivre avec son ancienne compagne et a su, malgré la séparation, renouer des liens avec cette dernière afin de pouvoir continuer à contribuer à l'entretien et à l'éducation de ses trois plus jeunes fils qui ont la nationalité française et vivent toujours avec leur mère. Par suite, M. B... ne pouvait plus être regardé comme représentant une menace à l'ordre public à la date à laquelle le préfet a pris l'arrêté en litige.

5. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le préfet d'Ille-et-Vilaine n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 17 janvier 2025 refusant de renouveler le titre de séjour de

M. B..., l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination et lui interdisant de retourner sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Sur la requête n° 25NT01405 :

6. Dès lors que le présent arrêt statue sur la requête n° 24NT01404 du préfet d'Ille-et-Vilaine tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Rennes du

16 mai 2025, les conclusions de la requête n°25NT01405 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement deviennent sans objet. Par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur les frais du litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens de l'instance enregistrée sous le n° 25NT01404. En revanche, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par l'intimé sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative dans l'instance enregistrée sous le n° 25NT01045.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête enregistrée sous le n°25NT01404.

Article 2 : La requête n° 25NT01405 du préfet d'Ille-et-Vilaine est rejetée.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 500 euros au titre des frais du litige exposés dans la requête 25NT01404.

Article 4 : Les conclusions de M. B... présentées sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative dans la requête n° 25NT01405 sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à

M. A... B....

Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2025 à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente de chambre,

- Mme Marion, première conseillère,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2025.

La rapporteure,

I. MARION

La présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 25NT01404-25NT01405


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 25NT01404
Date de la décision : 11/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. BRISSON
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: M. CATROUX
Avocat(s) : TESSIER HERVE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-11;25nt01404 ?
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