Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... épouse B... et M. D... B... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2006 à 2010, ainsi que celle des amendes prévues à l'article 1736 du code général des impôts et mises à leur charge au titre des années 2010 et 2011.
Par un jugement n° 1706127 du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements intervenus en cours d'instance, a déchargé M. B... de l'amende prise en application de l'article 1736 du code général des impôts au titre de l'année 2010 et a rejeté le surplus de leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 18 août 2020, 25 janvier 2021, 3 mai 2021 et 3 novembre 2021, Mme C... et M. B..., représentés par Me Albert, avocat, demandent à la cour dans le dernier état de leurs écritures :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux restant en litige au titre des années 2006 à 2010 ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme C... et M. B... soutiennent que :
- l'administration les a privés des garanties accordées au contribuable vérifié en exerçant son contrôle, sous couvert d'un contrôle sur pièces, dans les conditions d'un véritable examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle ;
- ils apportent la preuve, conformément à la décision n° 2016-614 QPC du 1er mars 2017 du Conseil Constitutionnel, que les revenus réellement perçus des entités établies à l'étranger étaient inférieurs au revenu défini forfaitairement par l'administration en application du 3 de l'article 123 bis du code général des impôts ;
- les dispositions de l'article 123 bis du code général des impôts ne s'appliquent qu'aux actifs financiers susceptibles de procurer des revenus de capitaux mobiliers ; or, les actifs détenus par la société Laverna Finance puis, à compter de l'année 2009, par la société Hawkins Resources se composaient majoritairement de lingots d'or, lesquels ne produisent aucun revenu ;
- l'administration n'a pas tenu compte de la date de leur mariage, le 17 juin 2008, pour calculer les impositions dues au titre cette même année; une répartition au prorata temporis aurait dû être effectuée ;
- l'administration a pris en compte le solde de chacun des deux comptes bancaires pour le calcul des revenus imposables au titre de l'année 2009, alors que les avoirs de la société Lavera Finance ont été intégralement transférés sur le compte de la société Hawkins Resources en 2009 ;
- les pénalités de 80% pour manœuvres frauduleuses dont les redressements ont été assortis au titre des années 2008 à 2010, sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, sont injustifiées.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 décembre 2020, 15 février 2021, 6 septembre 2021 et 9 novembre 2021, le ministre chargé des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... et M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lerooy ;
- et les conclusions de Mme Deroc, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Le 30 septembre 2011, Mme C... et M. B..., mariés depuis le 17 juin 2008, ont spontanément déposé des déclarations rectificatives d'impôt de solidarité sur la fortune au titre des années 2006 à 2010, puis, le 30 décembre 2011 des déclarations rectificatives de revenus au titre des mêmes années. A l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale leur a notifié, au titre de ces années, et sur le fondement des dispositions de l'article 123 bis du code général des impôts, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, à raison de revenus de capitaux mobiliers produits par les avoirs qu'ils détenaient à l'étranger. Ces rectifications ont été assorties, pour les années 2006 et 2007, de la majoration de 40 % prévue en cas de manquement délibéré et, pour 2008 à 2010 de la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses. L'administration a également notifié à M. B... deux amendes prises en application des dispositions de l'article 1736 du code général des impôts pour les années 2010 et 2011. Par un jugement du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a notamment déchargé M. B... de l'amende prise en application de l'article 1736 du code général des impôts au titre de l'année 2010 et a rejeté le surplus de leur requête. Mme C... et M. B... font appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'obligation prévue au deuxième alinéa de l'article 1649 A ou à l'article 1649 AA du code général des impôts n'a pas été respectée au moins une fois au titre des dix années précédentes, l'administration peut demander, indépendamment d'une procédure d'examen de situation fiscale personnelle, à la personne physique soumise à cette obligation de fournir dans un délai de soixante jours toutes informations ou justifications sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte ou le contrat d'assurance-vie. / Lorsque la personne a répondu de façon insuffisante aux demandes d'informations ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours, en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite. ". Aux termes de l'article 1649 A du code général des impôts : " Les administrations publiques, les établissements ou organismes soumis au contrôle de l'autorité administrative, les établissements bénéficiant des dispositions des articles L. 511-22 et L. 511-23 du code monétaire et financier pour leurs opérations avec des résidents français et toutes personnes qui reçoivent habituellement en dépôt des valeurs mobilières, titres ou fonds doivent déclarer à l'administration des impôts l'ouverture et la clôture des comptes de toute nature ainsi que la location de coffres-forts. / (...) ".
3. Il résulte de l'instruction que, le 30 septembre 2011, Mme C... et M. B... ont déposé des déclarations rectificatives d'impôt de solidarité sur la fortune au titre des années 2006 à 2010. Le 5 décembre 2013, l'administration fiscale leur a adressé une demande de justification de la consistance de ce patrimoine déclaré. Par un courrier en réponse du 12 février 2014, les requérants ont révélé que ce patrimoine correspondait à la détention de fonds dans deux comptes bancaires luxembourgeois ouverts auprès des banques Edmond de Rothschild et CBP Quilvest aux noms de deux sociétés domiciliées, l'une dans les Îles Vierges britanniques, la SA Laverna, l'autre au Panama, la société Hawkins Resources, dont ils étaient les uniques bénéficiaires économiques et à la vente d'une centaine de lingots d'or. Le 19 juin 2014, le service vérificateur a adressé une demande d'informations et de justifications à Mme C... sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs non déclarés et, en l'absence d'informations suffisantes, a mis en demeure cette dernière de compléter sa réponse, par deux courriers des 9 septembre et 12 décembre 2014. Pour procéder à ce contrôle sur pièces, l'administration s'est fondée sur les dispositions de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales, lesquelles prévoient que l'administration peut demander, indépendamment d'une procédure d'examen de situation fiscale personnelle, à la personne physique n'ayant pas déclaré l'existence d'un compte bancaire ouvert à l'étranger toutes informations ou justifications sur l'origine et les modalités d'acquisition des avoirs figurant sur le compte. Ce faisant, l'administration n'a fait que tirer les conséquences des informations communiquées par les requérants et, après avoir constaté que les déclarations de revenus ne mentionnaient pas l'existence de revenus de capitaux mobiliers et n'étaient accompagnées d'aucune des informations requises par l'article 50 septies de l'annexe II du code général des impôts, a exercé son droit de reprise. Elle ne s'est pas livrée à un contrôle de la cohérence entre, d'une part, les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal. En outre, il résulte également de l'instruction que l'administration s'est uniquement fondée sur les réponses des requérants à ses demandes d'informations et de justifications pour procéder aux rectifications en litige. Par suite, le moyen tiré de ce que l'administration fiscale aurait engagé à leur encontre une procédure d'examen contradictoire de situation fiscale personnelle, sans respecter les garanties accordées au contribuable dans le cadre d'un tel examen, doit être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
4. Aux termes de l'article 123 bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " 1. Lorsqu'une personne physique domiciliée en France détient directement ou indirectement 10 % au moins des actions, parts, droits financiers ou droits de vote dans une entité juridique-personne morale, organisme, fiducie ou institution comparable-établie ou constituée hors de France et soumise à un régime fiscal privilégié, les bénéfices ou les revenus positifs de cette entité juridique sont réputés constituer un revenu de capitaux mobiliers de cette personne physique dans la proportion des actions, parts ou droits financiers qu'elle détient directement ou indirectement lorsque l'actif ou les biens de la personne morale, de l'organisme, de la fiducie ou de l'institution comparable sont principalement constitués de valeurs mobilières, de créances, de dépôts ou de comptes courants. Pour l'application du premier alinéa, le caractère privilégié d'un régime fiscal est déterminé conformément aux dispositions de l'article 238 A par comparaison avec le régime fiscal applicable à une société ou collectivité mentionnée au 1 de l'article 206. [...]. 3. Les bénéfices ou les revenus positifs mentionnés au 1 sont réputés acquis le premier jour du mois qui suit la clôture de l'exercice de l'entité juridique établie ou constituée hors de France ou, en l'absence d'exercice clos au cours d'une année, le 31 décembre. Ils sont déterminés selon les règles fixées par le présent code comme si l'entité juridique était imposable à l'impôt sur les sociétés en France. L'impôt acquitté localement sur les bénéfices ou revenus positifs en cause par l'entité juridique est déductible du revenu réputé constituer un revenu de capitaux mobiliers de la personne physique, dans la proportion mentionnée au 1, à condition d'être comparable à l'impôt sur les sociétés. Toutefois, lorsque l'entité juridique est établie ou constituée dans un Etat ou territoire n'ayant pas conclu de convention d'assistance administrative avec la France, ou qui est non coopératif au sens de l'article 238-0 A le revenu imposable de la personne physique ne peut être inférieur au produit de la fraction de l'actif net ou de la valeur nette des biens de la personne morale, de l'organisme, de la fiducie ou de l'institution comparable, calculée dans les conditions fixées au 1, par un taux égal à celui mentionné au 3° du 1 de l'article 39. [...] ".
5. En premier lieu, par sa décision n° 2016-614 QPC du 1er mars 2017, le Conseil Constitutionnel a jugé que les dispositions du second alinéa du 3 de l'article 123 bis du code général des impôts, dans sa version issue de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009, ne sauraient, sans porter une atteinte disproportionnée au principe d'égalité devant les charges publiques, faire obstacle à ce que le contribuable puisse être autorisé à apporter la preuve que le revenu réellement perçu par l'intermédiaire de l'entité juridique est inférieur au revenu défini forfaitairement en application de ces dispositions, et ne les a déclarées conformes à la Constitution que sous cette réserve. Dès lors que la version initiale de cet alinéa, issue de la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 et applicable au présent litige, est similaire dans sa substance à celle sur laquelle le Conseil Constitutionnel s'est prononcé dans sa décision du 1er mars 2017, il y a lieu de considérer que les dispositions applicables à l'espèce doivent être interprétées suivant la même réserve.
6. Pour déterminer les revenus taxables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années en litige, l'administration fiscale a relevé, dans les propositions de rectification du 15 octobre 2015, que Mme C... n'avait pu faire état d'aucune taxation des résultats de la société Laverna Finance au titre des années 2006 à 2009, dont elle était l'unique bénéficiaire économique, dès lors qu'aucun impôt sur les bénéfices n'existait dans les Iles Vierges britanniques. Elle a également relevé que M. B... n'avait pu faire état d'aucun impôt payé sur les produits réalisés par la société Hawkins Resources en 2009 et 2010, dont il est l'associé unique, la réglementation fiscale panaméenne ne taxant que les revenus générés au Panama alors que l'intégralité de l'actif de la société était détenue au sein de son compte bancaire luxembourgeois. Après avoir constaté que les conventions d'assistance administrative avec la France n'étaient pas encore entrées en vigueur pour ces deux pays, l'administration a alors calculé les rehaussements, selon la présomption prévue au deuxième alinéa du 3 de l'article 123 bis, en appliquant le taux de référence mentionné au 3° du 1 de l'article 39 du code général des impôts à la valeur de l'actif net pour chacune des deux sociétés, lequel correspond aux seuls montants figurant sur les relevés bancaires au 31 décembre de chaque année.
7. Mme C... et M. B... soutiennent qu'ils apportent la preuve, conformément à la réserve d'interprétation formulée par le Conseil Constitutionnel, que les revenus réellement perçus par l'intermédiaire des sociétés Laverna Finance et Hawkins Resources, au titre des années en litige, étaient inférieurs au revenu défini forfaitairement par le 3° de l'article 123 bis du code général des impôts et dont l'administration fiscale a fait application. Outre les déclarations rectificatives d'impôt de solidarité sur la fortune, ils produisent à cet effet, pour la première fois en appel, notamment des relevés fiscaux, fournis par la banque Edmond de Rothschild pour la société Laverna Finance au titre des années 2006 à 2009 et par la banque CBP Quilvest pour la société Hawkins Resources au titre des années 2009 et 2010.
8. Il résulte de l'instruction, d'une part, que pour déterminer les revenus du compte de la société Laverna entre 2006 et 2009, les requérants ont retenu, au titre des produits, les intérêts de comptes et obligations, les dividendes ainsi que les plus ou moins-values nettes, réalisées et non-réalisées, et au titre des charges, les frais de banque ainsi que le montant de l'impôt retenu à la source sur les dividendes. Ils ont ainsi calculé leurs revenus réellement perçus par l'intermédiaire de la société Laverna selon les règles fixées par le code général des impôts comme si celle-ci était imposable à l'impôt sur les sociétés en France, aboutissant à un bénéfice net de 179 104 euros au titre de l'année 2006 et à des pertes respectives de 17 730 euros, 1 314 355 euros et 31 728 euros au titre des années 2007, 2008 et 2009. Les montants retenus par les requérants correspondent en outre à ceux détaillés dans les relevés fiscaux de la société Laverna Finance, lesquels comportent l'ensemble des informations relatives à l'évaluation du patrimoine, aux intérêts, aux dividendes, aux plus-values et moins-values réalisées et non réalisées, ainsi qu'aux droits de garde, commissions de gestion et frais de tenue de compte. Dans ces conditions, et alors que le ministre, qui se borne à soutenir que la société Laverna n'a tenu aucune écriture comptable, ne conteste sérieusement en défense ni ces données ni ce mode de calcul, , Mme C... et M. B... doivent être regardés comme apportant la preuve que les revenus réellement perçus par l'intermédiaire de la société Laverna Finance, au titre des années 2006 à 2009, étaient inférieurs au revenu défini forfaitairement par le 3 de l'article 123 bis du code général des impôts. Par suite, ils sont fondés à demander, d'une part, la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels il ont été assujettis au titre de l'année 2006, correspondant à la différence entre les revenus réellement perçus à hauteur de 179 104 euros et le revenu forfaitaire retenu par l'administration pour un montant de 190 114 euros, et, d'autre part, la décharge de ces mêmes impositions, compte tenu des pertes établies, au titre des années 2007, 2008 et 2009.
9. Il résulte de l'instruction, d'autre part, que pour déterminer les revenus du compte de la société Hawkins Resources en 2009, les requérants soutiennent que ce compte bancaire, qui a été ouvert le 9 février 2009, a uniquement été alimenté par un versement de fonds de 400 000 euros en provenance de la société Laverna Finance et par le dépôt puis le produit de la vente de cent lingots d'or le 11 décembre 2009 pour 2 477 500 euros en provenance de cette même société, soit une somme globale de 2 877 500 euros, alors que le solde au 31 décembre 2009 était de 2 736 167 euros. Ils font valoir également que les revenus étaient nuls, les produits constitués des intérêts de comptes et obligations s'élevant à 260 euros alors que les charges constituées des frais de banque s'élevaient à 4 479 euros.
10. Toutefois, les relevés fiscaux émis par la banque CBP Quilvest, moins exhaustifs et précis, ne permettent pas de s'assurer des revenus dégagés au titre de l'année 2009. En effet, pour avancer la somme de 260 euros, les requérants font valoir le solde net des intérêts sur compte courant, sans toutefois prendre en compte les transactions sur titres qui, potentiellement, ont dégagé des plus-values, alors même que le tableau figurant dans le relevé récapitule les ventes et cessions pour leurs montants bruts à la ligne " vente d'options (ouverture) du 15 octobre 2009 " mais ne comporte aucune information détaillée sur les plus ou moins-values réalisées. En outre, ces relevés fiscaux ne font état de la vente que de cent lingots d'or le 11 décembre 2009, alors qu'il résulte de l'instruction, notamment de l'attestation de la banque Edmond de Rothschild en date du 23 janvier 2014, que cent-deux lingots d'or ont été acquis les 28 janvier 2008 et 8 octobre 2008 pour un montant de 2 052 219 euros, et ne mentionnent la réalisation d'aucune plus-value lors de la revente des lingots apportés antérieurement en dépit d'un contexte de forte fluctuation à la hausse à l'époque. Enfin, il est constant au surplus, qu'il n'a pas été établi, au titre de la première année d'imposition de la société Hawkins Resources, créée en 2009, de bilan de départ au sens de l'article 50 ter de l'annexe 2 du code général des impôts dont l'actif net de ce bilan sert de base à la détermination des résultats. Ainsi, faute d'établir la valeur des lingots apportés et la plus-value dégagée lors de leur revente et d'identifier la plus-value dégagée pour la ligne " vente d'options du 15 octobre 2009 ", les relevés fiscaux produits sont insuffisamment probants. S'agissant de l'année 2010, le solde du compte bancaire s'établit à 2 630 660 euros et les requérants font valoir que les revenus étaient inexistants compte tenu des produits d'intérêts de comptes et obligations pour 70 euros et des charges constituées de frais bancaires à hauteur de 1 623 euros, ainsi que d'une variation de l'actif net de - 105 507 euros. Cependant, comme précédemment, le document récapitulatif des transactions sur titres fait état d'un grand nombre d'opérations mais ne comporte aucune information relative aux plus ou moins-values réalisées. Les relevés fiscaux produits ne permettent pas d'établir que les revenus auraient été inférieurs au montant retenu par l'administration. Dès lors, compte tenu de l'imprécision des données produites quant aux revenus réellement perçus par la société Hawkins Resources au titre des années 2009 et 2010, les requérants n'apportent pas la preuve que ceux-ci étaient inférieurs au revenu défini forfaitairement par le 3 de l'article 123 bis du code général des impôts.
11. En deuxième lieu, les dispositions de l'article 123 bis du code général des impôts s'appliquent aux bénéfices ou revenus positifs des personnes morales, organismes, fiducies ou institutions comparables dont l'actif ou les biens sont principalement constitués de valeurs mobilières, de créances, de dépôts ou de comptes courants. Les requérants soutiennent que ces dispositions ne trouvent pas à s'appliquer aux actifs détenus par la société Laverna Finance puis, à compter de l'année 2009, par la société Hawkins Resources, dès lors que ceux-ci étaient principalement composés de lingots d'or, lesquels ne constituent pas des actifs financiers et ne produisent aucun revenu de capitaux mobiliers. Toutefois, ainsi que le fait valoir l'administration fiscale, ces lingots d'or, acquis en janvier et octobre 2008 et revendus en décembre 2009, concourent à l'actif des deux sociétés, en tant que produits de dépôt inscrits sur le compte courant de la société Laverna Finance puis de la société Hawkins Resources, doivent être regardés comme des dépôts au sens de ces dispositions. Dès lors, l'actif de ces deux sociétés répondait aux conditions posées par le premier alinéa du 1 de l'article 123 bis du code général des impôts. Par suite, ce moyen, qui ne demeure en tout état de cause opérant, compte tenu de la décharge prononcée au point 8, qu'au titre de l'année 2009 pour l'actif de la société Hawkins Resources, ne peut qu'être écarté.
12. En troisième et dernier lieu, si Mme C... et M. B... soutiennent que le service vérificateur a pris en compte le solde de chacun des deux comptes bancaires pour le calcul des revenus imposables au titre de l'année 2009, alors que les avoirs de la société Laverna Finance avaient intégralement été transférés sur le compte de la société Hawkins Resources dès le mois d'avril 2009, ils ne résulte d'aucun des relevés fiscaux produits ni d'aucun autre élément que le solde du compte bancaire de la société Hawkins Resources serait intégralement constitué, au 31 décembre 2009, des fonds de la société Laverna Finance transférés en avril 2009. En tout état de cause, compte tenu de la décharge des impositions au titre de l'année 2009 s'agissant des revenus de la société Laverna Finance, les requérants ne sauraient se prévaloir d'un risque de double imposition.
Sur les pénalités :
13. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : (...) c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat ou en cas d'application de l'article 792 bis. ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, (...) la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration. ".
14. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 8, les requérants sont fondés à demander la décharge de la majoration de 80% prévue par les dispositions précitées appliquée sur le montant des revenus de capitaux mobiliers en provenance de la société Laverna Finance au titre des années 2008 et 2009.
15. En second lieu, pour appliquer cette majoration aux rehaussements relatifs aux revenus en provenance de la société Hawkins Resources au titre des années 2009 et 2010, correspondant à la période pendant laquelle Mme C... et M. B... étaient mariés, l'administration s'est fondée sur la circonstance que les requérants ont procédé à des transferts d'avoirs entre plusieurs structures qu'ils ont créés dans des États à fiscalité privilégiée, et, en particulier, que Mme C..., qui était seule bénéficiaire depuis le 20 novembre 2003 de la société Laverna Finance, établie aux Iles Vierges Britanniques, a acquis, en 2008, cent-deux lingots d'or avec une partie des fonds de cette société et a organisé le transfert des avoirs de cette entité au crédit du compte bancaire luxembourgeois de la société Hawkins Resources, société de droit panaméen constituée en 2009 par son mari, M. B.... Si les requérants soutiennent que cette pénalité est injustifiée dès lors qu'ils ne se sont rendus coupables d'aucune manœuvre frauduleuse mais ont au contraire cherché à régulariser leur situation fiscale, en déposant spontanément des déclarations rectificatives en matière d'impôt sur la fortune, il est constant que ces déclarations n'étaient accompagnées d'aucune déclaration complémentaire, notamment des revenus de capitaux mobiliers tirés de ce patrimoine, ainsi que le soutient le ministre en défense. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe que les requérants, par ces agissements, ont cherché à restreindre ou égarer le pouvoir de contrôle de l'administration. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a infligé aux requérants la pénalité prévue par les dispositions précitées du c. de l'article 1729 du code général des impôts aux revenus de la société Hawkins Resources au titre des années 2009 et 2010.
16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... et M. B... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande de décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2006 à 2010 à raison, d'une part, de la réduction du montant des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2006, correspondant à la différence entre les revenus réellement perçus par la société Laverna Finance à hauteur de 179 104 euros et le revenu forfaitaire retenu par l'administration pour un montant de 190 114 euros, et, d'autre part, de la décharge de ces mêmes impositions au titre des années 2007, 2008 et 2009 à raison des revenus de capitaux mobiliers correspondant aux bénéfices de la société Laverna Finance ainsi que de la majoration de 80% correspondante, au titre des années 2008 et 2009.
Sur les frais liés au litige :
17. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Mme C... est déchargée, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2006 correspondant à la différence entre les revenus réellement perçus par la société Laverna Finance à hauteur de 179 104 euros et le revenu forfaitaire retenu par l'administration pour un montant de 190 114 euros.
Article 2 : Mme C... est déchargée, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2007.
Article 3 : Mme C... épouse B... et M. B... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009, à raison des revenus de capitaux mobiliers correspondant aux bénéfices de la société Laverna Finance, ainsi que de la majoration de 80% correspondante.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 23 juin 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : L'État versera à Mme C... épouse B... et M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié Mme A... C... épouse B..., à M. D... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 13 décembre 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Danielian, présidente,
M. Lerooy, premier conseiller,
Mme Liogier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 janvier 2023.
Le rapporteur,
D. LerooyLa présidente,
I. Danielian
La greffière,
A. Audrain-FoulonLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
Le greffier,
2
N° 20VE02075