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18/04/2024 | FRANCE | N°23MA01572

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 1ère chambre, 18 avril 2024, 23MA01572


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SAS Academic Golf de Roquebrune, l'ASL Les Rives du Golf, Mme G... D..., Mme E... C..., M. H... F... M. A... J..., et M. N... L... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 3 avril 2019 par lequel le maire de la commune de Roquebrune-sur-Argens a délivré à la Société Bouygues Immobilier un permis de construire pour quarante-six logements dont vingt-trois logements locatifs sociaux sur un terrain situé Le Perrussier et cadastré section BO n° 270

, 28 et 78 pour une surface de plancher créée de 3 041 m2 sur le territoire communal ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Academic Golf de Roquebrune, l'ASL Les Rives du Golf, Mme G... D..., Mme E... C..., M. H... F... M. A... J..., et M. N... L... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 3 avril 2019 par lequel le maire de la commune de Roquebrune-sur-Argens a délivré à la Société Bouygues Immobilier un permis de construire pour quarante-six logements dont vingt-trois logements locatifs sociaux sur un terrain situé Le Perrussier et cadastré section BO n° 270, 28 et 78 pour une surface de plancher créée de 3 041 m2 sur le territoire communal et ensemble la décision de rejet explicite de leurs recours gracieux respectifs des 26 juin 2019 et 9 juillet 2019.

Par un jugement n° 1902928 et 1903147 du 7 juillet 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leurs demandes à fin d'annulation.

Par un arrêt n° 20MA03263 20MA03399 du 28 octobre 2021, la Cour, n'a pas admis l'intervention de M. K..., a annulé le jugement du tribunal administratif de Toulon du 7 juillet 2020, ainsi que l'arrêté du 3 avril 2019 par lequel le maire de la commune de Roquebrune-sur-Argens a délivré à la Société Bouygues Immobilier un permis de construire, ensemble les décisions de rejet des recours gracieux du 26 juin 2019 et du 9 juillet 2019.

Par une décision du 12 juin 2023 le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par la société Bouygues Immobilier, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 28 octobre 2021 et a renvoyé l'affaire devant la même Cour.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête n° 20MA03263 enregistrée le 31 août 2020 et un mémoire complémentaire, enregistré le 8 mars 2021, la SAS Academic Golf de Roquebrune, représentée par Me Masquelier, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon n° 1902928 et 1903147 du 7 juillet 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 avril 2019 par lequel le maire de la commune de Roquebrune-sur-Argens a délivré à la Société Bouygues Immobilier un permis de construire pour quarante-six logements dont vingt-trois logements locatifs sociaux sur un terrain situé Le Perrussier et ensemble la décision de rejet explicite de son recours gracieux du 26 juin 2019 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Roquebrune-sur-Argens la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la requête est recevable ;

- la décision attaquée est illégale en raison de l'incompétence de son auteur ;

- la décision attaquée est illégale en méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme ;

- la décision attaquée est illégale en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ;

- la décision attaquée est illégale en méconnaissance de la réglementation sur le défrichement et en particulier l'article L. 341-3 du code forestier ;

- la décision attaquée est illégale en méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et des règles de sécurité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2020, la commune de Roquebrune-sur-Argens, représentée par Me Garcia, conclut au rejet de la requête et demande à ce qu'il soit mis à la charge des requérants la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable pour défaut de justification de l'intérêt à agir de la SAS Academic Golf de Roquebrune ;

- les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2021, la société Bouygues Immobilier, représentée par Me Raoul, conclut au rejet de la requête, demande qu'il soit fait usage, en tant que de besoin des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et demande à ce qu'il soit mis à la charge des requérants la somme de 4500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable pour défaut d'intérêt à agir et la requête n'est pas signée par son auteur ;

- les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 20 juillet 2023, sous le n° 23MA01572, la SAS Academic Golf de Roquebrune, reprend les moyens soulevés dans ses écritures précédentes et demande qu'il soit mis à la charge de la commune de Roquebrune-sur-Argens la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2023, la société Bouygues Immobilier reprend les moyens soulevés dans ses écritures précédentes et demande à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

II. Par une requête n° 20MA03399 enregistrée le 3 septembre 2020 et un mémoire complémentaire, enregistré le 19 février 2021, l'ASL Les Rives du Golf, M. A... J..., ayant été désigné comme représentant unique en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, M. N... L..., et M. M... K..., ce dernier agissant en qualité d'intervenant, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon n° 1902928 et 1903147 du 7 juillet 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 avril 2019 par lequel le maire de la commune de Roquebrune-sur-Argens a délivré à la Société Bouygues Immobilier un permis de construire pour quarante-six logements dont vingt-trois logements locatifs sociaux sur un terrain situé Le Perrussier et ensemble la décision de rejet explicite de leur recours gracieux du 9 juillet 2019.

3°) de mettre à la charge de la commune de Roquebrune-sur-Argens la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la requête est recevable ;

- la décision attaquée est illégale en méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme ;

- la décision attaquée est illégale en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 13 novembre 2020 et le 9 mars 2021, la commune de Roquebrune-sur-Argens, représentée par Me Garcia, conclut au rejet de la requête et demande à ce qu'il soit mis à la charge des requérants la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable pour défaut de notification de la requête d'appel aux parties en méconnaissance des dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme et s'agissant de l'intervention de M. K... à défaut d'intervention par un mémoire distinct en méconnaissance des dispositions de l'article R. 632-1 du code de justice administrative et de justification de son intérêt à agir ;

- les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 janvier 2021 et le 17 mars 2021, la société Bouygues Immobilier, représentée par Me Raoul, conclut au rejet de la requête, demande qu'il soit fait usage, en tant que de besoin des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et demande à ce qu'il soit mis à la charge des requérants la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable pour défaut d'intérêt à agir de l'ASL car il n'est pas établi que le projet va affecter les parties communes de l'ASL ;

- la requête est irrecevable car les autres requérants personnes physiques ne disposent pas d'un intérêt à agir au regard des dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ; les requérants ne sont pas des voisins immédiats du projet contrairement à ce qu'ils soutiennent ; ils ne démontrent pas par des éléments précis et étayés qu'ils disposent d'un intérêt à agir ;

- l'intervention de M. K... est irrecevable à défaut de présentation par un mémoire distinct en méconnaissance des dispositions de l'article R. 632-1 du code de justice administrative ;

- les autres moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 15 septembre 2023, la Société Bouygues Immobilier conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens.

Par un mémoire enregistré le 16 janvier 2024, sous le n° 23MA01699, l'ASL Les Rives du Golf, et les autres requérants reprennent les moyens soulevés dans leurs précédentes écritures et demandent en outre à la Cour de mettre à la charge de la commune de Roquebrune-sur-Argens la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent en outre que :

- la décision attaquée est illégale en méconnaissance des dispositions des articles L. 424-1 et L153-11 du code de l'urbanisme ;

- la décision attaquée est illégale en méconnaissance des dispositions des articles R. 111-17, R. 111-18 et R. 111-27 du code de l'urbanisme ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code forestier ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Angéniol,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- et les observations de Me Quema, représentant la SAS Academic Golf de Roquebrune, et de Me Le Neel, représentant la Société Bouygues Immobilier.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 3 avril 2019, le maire de la commune de Roquebrune-sur-Argens a délivré à la Société Bouygues Immobilier un permis de construire pour quarante-six logements dont vingt-trois logements locatifs sociaux sur un terrain situé Le Perrussier et cadastré section BO n° 270, 28 et 78 pour une surface de plancher créée de 3 041 m2 sur le territoire communal. Par un jugement du 7 juillet 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté les demandes de La SAS Academic Golf de Roquebrune, l'ASL Les Rives du Golf, M. A... J..., M. K... et M. L... tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 avril 2019, ensemble la décision de rejet explicite de leurs recours gracieux respectifs des 26 juin 2019 et 9 juillet 2019. Par un arrêt du 28 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Marseille, saisie en appel par la SAS Academic Golf de Roquebrune, l'ASL Les Rives du Golf, et M. A... J..., M. N... L... et M. M... K..., a refusé d'admettre l'intervention de M. K... et annulé le jugement précité et l'arrêté du 3 avril 2019 Par une décision n° 454844 du 23 juin 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt, et renvoyé l'affaire devant la Cour.

2. Les requêtes n° 23MA01572 et 23MA01699 sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger de questions semblables. Il y a lieu de les joindre pour statuer dans un même jugement.

Sur l'intervention :

3. Aux termes de l'article R. 632-1 du code de justice administrative : " L'intervention est formée par mémoire distinct ". L'intervention de M. M... K... n'a pas été présentée par un mémoire distinct. Elle n'est dès lors pas recevable.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité externe

4. D'une part, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la commune n'apporte pas la preuve que le préfet du Var a été saisi pour avis conforme en application de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal aux points 2 et 3 du jugement.

5. D'autre part aux termes des dispositions de l'article L. 2131-3 du code général des collectivités territoriales : " Les arrêtés du maire ne sont exécutoires qu'après avoir été portés à la connaissance des intéressés, par voie de publication ou d'affiches, toutes les fois qu'ils contiennent des dispositions générales et, dans les autres cas, par voie de notification individuelle ". Si, aux termes des dispositions de l'article L. 2122-29 du même code : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, les arrêtés municipaux à caractère réglementaire sont publiés dans un recueil des actes administratifs dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ", ces dispositions n'ont pas dérogé au principe fixé au premier alinéa selon lequel la formalité de publicité qui conditionne l'entrée en vigueur des actes réglementaires du maire peut être soit la publication, soit l'affichage. Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu par les appelants, le maire de la commune de Roquebrune sur Argens n'était pas tenu de procéder à la publication dans un recueil des actes administratifs de la délégation de fonctions accordée à M. B... I..., quatrième adjoint, par arrêté municipal du 30 novembre 2018, la formalité de publicité qui conditionne l'entrée en vigueur des actes réglementaires du maire ayant été remplie du seul fait d'un affichage, dont il est ici apporté la preuve par un certificat du 5 juin 2019. Par ailleurs, il n'est pas utilement contesté que cette délégation de fonctions en matière d'urbanisme a été transmise en préfecture du Var le 3 décembre 2018, ainsi qu'il résulte de la mention figurant sur l'arrêté de délégation. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaqué ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement " et aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : " En l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune ".

7. D'une part, il résulte des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme précité, que dans les communes littorales, au nombre desquelles figure celle de Roquebrune-sur-Argens, l'extension de l'urbanisation ne peut se faire qu'en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, soit en hameau nouveau intégré à l'environnement délimité en tant que tel par le plan local d'urbanisme de la commune.

8. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme qu'en l'absence de plan local d'urbanisme sont interdites les constructions implantées en dehors " des parties urbanisées de la commune " c'est-à-dire des parties du territoire communal qui comportent déjà un nombre et une densité significatifs de constructions. Ainsi, en dehors du cas où elles relèvent des exceptions expressément et limitativement prévues par l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, inapplicables en l'espèce, les constructions ne peuvent être autorisées dès lors que leur réalisation a pour effet d'étendre la partie actuellement urbanisée de la commune.

9. Tout d'abord, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe à l'ouest d'un lotissement qui comprend environ une vingtaine d'habitations dans un rayon de 100 mètres, en continuité de deux autres lotissements d'envergure, à savoir " Les Rives du Golf " qui comprend 97 logements, composés de 69 villas et 28 logements collectifs soit une surface de plancher de près de 10.000 m² et " Les Jardins d'Auréliens " qui comprennent 15 villas de plus de 1 500 m². Par ailleurs, ces lotissements sont jouxtés par des équipements et lieux collectifs administratifs comportant notamment un complexe sportif et un centre de loisir. Par suite, le projet doit être regardé comme s'inscrivant en bordure immédiate d'une zone qui par sa caractérisation relève des parties urbanisées de la commune au sens des dispositions précitées de l'article L. 11-3 du code de l'urbanisme.

10. Ensuite, compte tenu de la proximité immédiate du terrain d'assiette du projet concerné de la zone urbanisée précédemment évoquée, de la desserte de la parcelle concernée par la voie du lotissement et par l'intégralité des réseaux et du fait qu'il ne s'agit que le terrain d'assiette du projet comporte déjà un bâtiment qui doit être démoli, une telle opération ne peut être regardée comme une extension d'une zone urbanisée prohibée par l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, mais comme relevant d'une intégration admise au sein dudit secteur.

11. Enfin, la zone urbanisée, dont il vient d'être fait mention, peut également être regardée, compte tenu de ses particularités, comme une agglomération au sens des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, qui autorise dans ce cas la construction projetée en continuité de cette zone, le fait que le secteur concerné soit issu d'une opération de lotissement étant indifférent quant à la caractérisation d'une zone urbanisée au sens des dispositions de ce même article L. 121-8.

12. Les requérants ne sont dès lors pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal a écarté les moyens tirés de la méconnaissance par l'arrêté du 3 avril 2019 des dispositions des articles L. 111-3 et L. 121-8 du code de l'urbanisme.

13. En deuxième lieu, Il y a lieu d'écarter les moyens tirés de ce que l'arrêté attaqué méconnait les dispositions des articles L. 425-6 du code de l'urbanisme et de l'article L. 341-3 du code forestier en l'absence d'autorisation de défrichement par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal aux points 11 et 12 du jugement.

14. En troisième lieu aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

15. Les requérants soutiennent que la nouvelle construction, qui sera beaucoup plus haute que le bâtiment actuel, sera exposée aux risques d'accident de balles de golf dès lors qu'elle se situera à proximité immédiate des greens dudit golf. La nature du risque ainsi invoqué et susceptible de porter atteinte à la sécurité publique n'est toutefois pas suffisamment documentée

pour qu'il puisse être utilement apprécié. Par ailleurs et en tout état de cause il n'est pas utilement contesté qu'un rideau d'arbre sera maintenu entre le golf et la nouvelle construction.

16. En quatrième lieu, le dernier alinéa de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme dispose que : " L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable. ". Aux termes de l'article L. 424-1 de ce code : " Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus (...) aux articles L. 153-11 (...) du présent code ".

17. Un sursis à statuer ne peut être opposé à une demande de permis de construire, sur le fondement de ces dispositions, postérieurement au débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable (PADD), qu'en vertu d'orientations ou de règles que le futur plan local d'urbanisme pourrait légalement prévoir et à la condition que la construction, l'installation ou l'opération envisagée soit de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse son exécution.

18. Il est soutenu, pour la première fois en cause d'appel, que le maire de la commune de Roquebrune-sur-Argens aurait commis une erreur manifeste d'appréciation, faute d'avoir sursis à statuer sur la demande de permis de construire litigieuse, au motif qu'un projet de règlement du plan local d'urbanisme, qui n'est au demeurant pas produit à l'instance, était en cours à la date de délivrance du permis contesté. Les requérants indiquent cependant eux-mêmes, d'une part, qu'une délibération du conseil municipal du 17 décembre 2019 a rapporté ce projet et, d'autre part, qu'ils leur sembleraient que le projet méconnaitrait une emprise au sol maximale désormais fixée à 20 %. Ce faisant, lesdits requérants n'apportent pas d'éléments suffisamment précis et circonstanciés de nature à établir que le projet compromettrait l'exécution du futur PLU ou la rendrait plus onéreuse. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de la commune de Roquebrune-sur-Argens aurait commis une erreur manifeste d'appréciation, faute d'avoir sursis à statuer sur la demande de permis de construire litigieuse.

19. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme :" A moins que le bâtiment à construire ne jouxte la limite parcellaire, la distance comptée horizontalement de tout point de ce bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à trois mètres ".

20. Les requérants soutiennent que le projet ne respecte pas les dispositions précitées de l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme au motif que le plan de masse ne permet pas de s'assurer que la distance séparant la construction de la limite séparative serait respectée, dans la mesure où cette distance oscille entre 3 et 4m50, alors que le projet culmine à 9 mètres. Il appartient toutefois aux requérants d'assortir leur moyen d'éléments suffisamment précis pour en apprécier le bienfondé. Toutefois, ce moyen n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

21. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ". Aux termes de l'article R. 111-28 du même code : " Dans les secteurs déjà partiellement bâtis, présentant une unité d'aspect et non compris dans des programmes de rénovation, l'autorisation de construire à une hauteur supérieure à la hauteur moyenne des constructions avoisinantes peut être refusée ou subordonnée à des prescriptions particulières ". Si le projet est un immeuble d'habitation à deux étages et va comporter 46 logements, d'une part, il s'implante au sein d'une zone pavillonnaire qui comporte déjà des immeubles d'habitations relativement de même ampleur, d'autre part, cet immeuble, par son aspect et notamment sa toiture de type provençale et au regard de ses façades, de ses matériaux et de ses teintes, s'harmonise avec le bâti traditionnel de la zone. L'arrêté contesté n'est donc pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées des articles R. 111-27 et R. 111-28 du code de l'urbanisme.

22. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

23. Les dispositions susvisées font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Roquebrune-sur-Argens et de la société Bouygues Immobilier, qui ne sont pas dans les présentes instances les parties tenues aux dépens ou les parties perdantes, quelque somme que ce soit, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge, d'une part, de la SAS Academic Golf de Roquebrune, et d'autre part de l'ASL Les Rives du Golf, de M. A... J..., M. N... L..., chacun la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Roquebrune-sur-Argens et à la société Bouygues Immobilier sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : L'intervention de M. M... K... n'est pas admise.

Article 2 : Les requêtes 23MA01572 et 23MA01699 sont rejetées.

Article 3 : la SAS Academic Golf de Roquebrune versera la somme de 1 500 euros à la société Bouygues Immobilier et une somme identique à la commune de Roquebrune-sur-Argens sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : L'ASL Les Rives du Golf, M. A... J..., M. N... L... pris ensemble verseront la somme de 1 500 euros à la commune de Roquebrune-sur-Argens et une somme identique à la Société Bouygues Immobilier sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à l'encontre de la société Bouygues Immobilier et de la commune de Roquebrune-sur-Argens sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Academic Golf de Roquebrune, à M. A... J..., ayant été désigné comme représentant unique en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative dans le dossier 23MA01699, à la commune de Roquebrune-sur-Argens et à la société Bouygues Immobilier.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2024, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. Claudé-Mougel, président assesseur,

- M. Angéniol, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 avril 2024.

2

N° 23MA01572, 23MA01699

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23MA01572
Date de la décision : 18/04/2024

Analyses

68-01-01-02-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU). - Application des règles fixées par les POS ou les PLU. - Application dans le temps. - Mesures de sauvegarde - Sursis à statuer.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Patrice ANGENIOL
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : SCP JEAN-PHILIPPE CASTON;LLC & ASSOCIES;SCP JEAN-PHILIPPE CASTON

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-18;23ma01572 ?
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