La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/12/2024 | FRANCE | N°23PA03040

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 13 décembre 2024, 23PA03040


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société à responsabilité limitée Mesnil Gardiennage a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision en date du 13 juillet 2022 par laquelle le directeur général des finances publiques a rejeté ses demandes d'aides " coûts fixes novembre ", " coûts fixes " et " coûts fixes consolidation " au titre des mois de novembre 2021 à mai 2022 et d'enjoindre au directeur général des finances publiques de lui accorder les aides sollicitées.


> Par un jugement n° 2213923 du 11 mai 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Mesnil Gardiennage a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision en date du 13 juillet 2022 par laquelle le directeur général des finances publiques a rejeté ses demandes d'aides " coûts fixes novembre ", " coûts fixes " et " coûts fixes consolidation " au titre des mois de novembre 2021 à mai 2022 et d'enjoindre au directeur général des finances publiques de lui accorder les aides sollicitées.

Par un jugement n° 2213923 du 11 mai 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de la société Mesnil Gardiennage.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 juillet 2023, la SARL Mesnil Gardiennage, représentée par Me Sardet, demande à la Cour :

1°) d' annuler le jugement n° 2213923 du tribunal administratif de Montreuil en date du 11 mai 2023 ;

2°) d'annuler la décision en date du 13 juillet 2022 par laquelle le directeur général des finances publiques a rejeté ses demandes d'aides " coûts fixes novembre ", " coûts fixes " et " coûts fixes consolidation " au titre des mois de novembre 2021 à mai 2022 ;

3°) d'enjoindre au directeur général des finances publiques de lui accorder les aides sollicitées pour un montant total de 180 745 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a déposé ses demandes d'aides avant l'expiration du délai de dépôt des demandes ; si elle a alors déposé une copie papier des formulaires de demande, elle s'est simplement conformée aux recommandations du service des impôts des entreprises, qui a accepté ce dépôt ;

- l'ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 n'impose pas la dématérialisation des demandes d'aides et les décrets n° 2022-111 et n° 2022-222 des 2 et 21 février 2022 ne prévoient aucune sanction en cas de dépôt papier des demandes d'aide ;

- elle remplit les conditions d'éligibilité prévues pour pouvoir bénéficier des aides sollicitées ;

- des problèmes informatiques l'ont empêchée de présenter ses demandes d'aide le 15 juin 2022 par voie dématérialisée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 octobre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les demandes présentées au titre des mois de novembre 2021 à janvier 2022 ont été présentées après les dates-limites de dépôt des demandes fixées par les décrets des 2 et 21 février 2022 ;

- la SARL Mesnil Gardiennage ne pouvait pas prétendre, au titre du mois de février 2022, au bénéfice de l'aide dite " coûts fixes novembre ", qui ne pouvait être accordée qu'au titre du mois de novembre 2021 ;

- aucune aide " coûts fixes " n'a été prévue pour les mois de mars 2022 à mai 2022, en raison de la fin de la crise sanitaire et de la fin de la dérogation accordée par la commission européenne.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 ;

- le décret n° 2022-111 du 2 février 2022 ;

- le décret n° 2022-222 du 21 février 2022 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lemaire,

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,

- et les observations de Me Binassoua Yehouessi, substituant Me Sardet, représentant la SARL Mesnil Gardiennage.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Mesnil Gardiennage, qui exerce une activité de sécurité privée, a sollicité, par le dépôt le 15 juin 2022, au guichet du service des impôts des entreprises de Villepinte, de formulaires datés du 5 juin 2022, puis par voie dématérialisée le 29 juin 2022, le bénéfice, d'une part, au titre du mois de novembre 2021, de l'aide dite " coûts fixes novembre " prévue par le décret du 21 février 2022 susvisé, d'autre part, au titre des mois de décembre 2021 et janvier 2022, de l'aide dite " coûts fixes consolidation " prévue par le décret du 2 février 2022 susvisé et, enfin, au titre des mois de février à mai 2022, d'une aide sur le fondement du décret du 21 février 2022 susvisé. Par une décision en date du 13 juillet 2022, le directeur général des finances publiques a rejeté ces demandes au motif qu'elles n'avaient pas été présentées par voie dématérialisée dans les délais prévus. La SARL Mesnil Gardiennage relève appel du jugement en date du 11 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui verser la somme totale de 180 745 euros au titre des aides sollicitées.

2. Aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 25 mars 2020 susvisée, portant création d'un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation : " Il est institué, jusqu'au 31 décembre 2021, un fonds de solidarité ayant pour objet le versement d'aides financières aux personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du covid-19 et des mesures prises pour en limiter la propagation. / Sa durée d'intervention peut être prolongée par décret pour une durée d'au plus six mois ". Aux termes de l'article 3 de cette ordonnance : " Un décret fixe le champ d'application du dispositif, les conditions d'éligibilité et d'attribution des aides, leur montant ainsi que les conditions de fonctionnement et de gestion du fonds. / (...) ".

3. Aux termes de l'article 1er du décret du 21 février 2022 susvisé, instituant au titre du mois de novembre 2021 une aide dite " coûts fixes novembre " visant à compenser les charges fixes non couvertes des entreprises dont l'activité est particulièrement affectée par les mesures sanitaires de lutte contre l'épidémie de covid-19 : " I. - Les entreprises (...) peuvent bénéficier, au cours de la période comprise entre le 1er novembre 2021 et le 30 novembre 2021 dite période éligible, d'une aide destinée à compenser leurs coûts fixes non couverts par les contributions aux bénéfices (...) ". Aux termes de l'article 4 de ce décret : " I. - A. - La demande au titre de la période éligible de novembre 2021 est déposée, par voie dématérialisée, avant le 30 avril 2022. / (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 2 février 2022 susvisé, instituant une aide dite " coûts fixes consolidation " visant à compenser les charges fixes non couvertes des entreprises dont l'activité est particulièrement affectée par l'épidémie de covid-19 : " I. - Les entreprises (...) peuvent bénéficier, au cours de la période éligible comprise entre le 1er décembre 2021 et le 31 janvier 2022, d'une aide mensuelle (...) destinée à compenser leurs coûts fixes non couverts par les contributions aux bénéfices (...) ". Aux termes de l'article 4 de ce décret : " I. - A. - La demande au titre de la période éligible comprise entre le 1er décembre 2021 et le 31 janvier 2022 est déposée, par voie dématérialisée, entre le 3 février 2022 et le 31 mars 2022. / (...) ".

4. En premier lieu, il est constant que les demandes de la SARL Mesnil Gardiennage tendant au bénéfice, d'une part, de l'aide dite " coûts fixes novembre " au titre du mois de novembre 2021 et, d'autre part, de l'aide dite " coûts fixes consolidation " au titre des mois de décembre 2021 et janvier 2022 ont été présentées après la date-limite de dépôt des demandes, fixée au 30 avril 2022 pour l'aide dite " coûts fixes novembre " par les dispositions précitées de l'article 4 du décret du 21 février 2022 susvisé et au 31 mars 2022 pour l'aide dite " coûts fixes consolidation " par celles du I de l'article 4 du décret du 2 février 2022. La SARL Mesnil Gardiennage ne saurait utilement faire valoir qu'elle a déposé les formulaires de demande le 15 juin 2022 au guichet du service des impôts des entreprises de Villepinte conformément aux recommandations qui lui auraient été données, à les supposer établies. Par suite, la SARL Mesnil Gardiennage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le directeur général des finances publiques a, pour ce motif, rejeté les demandes qu'elle avait présentées au titre des mois de novembre 2021 à janvier 2022.

5. En second lieu, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

6. Ainsi que le fait valoir l'administration en défense, l'aide dite " coûts fixes novembre " prévue par le décret du 21 février 2022 ne pouvait être versée qu'au titre de la période de référence correspondant au mois de novembre 2021. En outre, aucune disposition ne prévoit le bénéfice d'une aide à raison des coûts fixes au titre des mois de mars 2022 à mai 2022. La SARL Mesnil Gardiennage ne pouvait dès lors pas prétendre au bénéfice des aides qu'elle avait sollicitées sur le fondement de ce décret au titre des mois de février 2022 à mai 2022. Il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle avait entendu se fonder initialement sur ces motifs, qu'il y a lieu de substituer aux motifs initialement retenus, tirés de la tardiveté des demandes et de leur présentation sous forme papier, cette substitution ne privant la société requérante d'aucune garantie procédurale.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Mesnil Gardiennage n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Les conclusions de la SARL Mesnil Gardiennage à fin d'annulation doivent dès lors être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Mesnil Gardiennage est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Mesnil Gardiennage et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Lemaire, président assesseur,

- Mme Boizot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 13 décembre 2024.

Le rapporteur,

O. LEMAIRE

Le président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 23PA03040


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03040
Date de la décision : 13/12/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: M. Olivier LEMAIRE
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : SARDET

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-13;23pa03040 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award