Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2011, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1105924/6-1 en date du 14 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 4 mars 2011 refusant de délivrer à Mme E...G...C...un titre de séjour, faisant à celle-ci_obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un titre de séjour ;
2°) de rejeter la demande de Mme C...devant le Tribunal administratif de Paris ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2012 :
- le rapport de M. Boissy, rapporteur,
- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,
- et les observations de Me B...D..., pour MmeC... ;
Considérant que MmeC..., née en 1962, de nationalité ivoirienne, est entrée en France, selon ses déclarations, le 29 décembre 2003 ; qu'elle a présenté, le 29 décembre 2010, une demande de titre de séjour temporaire sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté daté du 4 mars 2011, le PREFET DE POLICE, après avoir examiné sa situation au regard des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 de ce code, a refusé de l'admettre au séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée ; que, par la présente requête, le PREFET DE POLICE fait appel du jugement du 14 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 4 mars 2011 et lui a ordonné de délivrer Mme C...un titre de séjour ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la fille de MmeC..., âgée de 15 ans et élève en classe de seconde à la date de l'arrêté contesté, ne pourrait pas accompagner sa mère en Cote d'Ivoire, pays dans lequel elle a vécu jusqu'à l'âge de 8 ans, où réside également son père, qui exerce la profession de diplomate, et où elle pourrait poursuivre des études secondaires qui ne présentent actuellement aucune particularité justifiant sa présence en France ; que la circonstance que les deux autres enfants de MmeC..., qui sont tous les deux majeurs, résident régulièrement en France reste à cet égard sans incidence ; que, dans ces conditions, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en se fondant sur la violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C...devant le Tribunal administratif de Paris et la Cour administrative d'appel de Paris ;
Considérant, en premier lieu, que l'arrêté contesté a été signé par M.F..., attaché principal d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer qui dispose d'une délégation de signature en vertu de l'arrêté n° 2010-00694 du 20 septembre 2010 régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la Ville de Paris n° 76 du 24 septembre 2010 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le signataire de l'arrêté contesté n'aurait pas été titulaire d'une délégation régulière manque en fait ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-21 du même code : " Pour l'application du 7° de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
Considérant que s'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que le fils aîné de MmeC..., âgé de 24 ans à la date de l'arrêté contesté, qui a obtenu en 2008 une " licence professionnelle réseaux et télécommunications " délivrée par l'IUT de Vélizy, est titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " valable jusqu'au 4 mai 2012, exerce une activité professionnelle en qualité de consultant en réseaux et télécommunications, que son fils cadet, âgé de 22 ans, qui bénéficie pour sa part d'une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " valable jusqu'au 31 mars 2012, poursuit des études en deuxième année de licence de droit et que sa fille, âgée de 15 ans, suit une scolarité satisfaisante en classe de seconde, Mme C... n'établit en revanche pas, par les seules pièces qu'elle produit et en particulier une promesse d'embauche de technicien de surface datée de décembre 2010, être intégrée de manière significative en France ; que si Mme C...soutient être divorcée de son mari resté en Côte d'Ivoire, elle ne l'établit pas ; que le seul document, manuscrit, en date du 7 mars 2011, par lequel Mme C...et M.A..., son époux, déclarent divorcer par consentement mutuel, et qui n'est par ailleurs authentifié ou corroboré par aucun document officiel attestant d'une procédure de divorce ou aucun autre élément du dossier, ne présente pas un caractère probant de nature à établir la réalité de la rupture des liens conjugaux entre les époux ; que, dans ces conditions, et même si ses parents sont décédés, Mme C...ne peut pas être regardée comme étant dépourvue d'attaches familiales et privées en Côte d'Ivoire, pays dans lequel elle a vécu 39 ans, où réside encore son mari et dans lequel sa fille mineure a vocation à l'accompagner ; que, dans ces circonstances, et compte tenu également de la durée et des conditions de séjour de l'intéressée en France, l'arrêté contesté n'a en l'espèce pas porté au droit de Mme C...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, le PREFET DE POLICE n'a pas davantage entaché l'arrêté contesté d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de MmeC... ;
Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. La carte porte la mention " salarié " lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention " travailleur temporaire " lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'arrêté du 18 janvier 2008 susvisé : " La situation de l'emploi ou l'absence de recherche préalable de candidats déjà présents sur le marché du travail n'est pas opposable à une demande d'autorisation de travail présentée pour un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse souhaitant exercer une activité professionnelle dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur la liste annexée au présent arrêté " ;
Considérant que, saisie d'une demande présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par un étranger qui n'est pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présente pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ;
Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit précédemment et de l'emploi pour lequel Mme C... disposerait d'une promesse d'embauche, qui ne présente aucune particularité, le PREFET DE POLICE, en estimant que l'admission exceptionnelle au séjour de l'intéressée ne répondait pas à des considérations humanitaires et ne se justifiait pas davantage au regard de motifs exceptionnels, n'a pas entaché l'arrêté contesté d'une erreur manifeste d'appréciation ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit par suite être écarté ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la demande de Mme C... ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que demande Mme C...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1105924/6-1 en date du 14 novembre 2011 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme C...devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions d'appel sont rejetées.
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N° 11PA05309