Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2012, présentée pour la société par actions simplifiée (SAS) ELSE FRANCE, dont le siège est 56, quai de Dion Bouton à Puteaux (92800), par Me Hazan, avocat ;
La société ELSE FRANCE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1002886 en date du 8 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge partielle, en droits et pénalités, des cotisations minimales de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006 et 2007 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses pour un montant de 66 264 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- les recettes à retenir pour déterminer le champ d'application à la cotisation minimale de taxe professionnelle sont les mêmes que pour la base imposable à la taxe professionnelle, or, le conseil d'Etat, dans son arrêt du 20 mars 1996 M.A..., et la doctrine, dans une réponse écrite à M.B..., député et dans un rescrit à portée générale, ont considéré que les recettes à retenir sont les recettes nettes encaissées pour le compte du commettant, dès lors que la taxe repose sur l'enrichissement effectif de l'entreprise ;
- l'approche de l'administration aboutit à une discrimination de fait en matière de taxe professionnelle et de cotisation minimale de taxe professionnelle ;
- seules les commissions constituent un revenu professionnel au sens de l'article 1447 du code général des impôts et doivent entrer dans le calcul du champ d'application de la cotisation minimal de taxe professionnelle ; le chiffre d'affaires perçu par elle pour le compte du commettant ne constitue pas une recette professionnelle liée à la production courante de la société et ne doit donc pas être pris en compte pour déterminer " l'excédent hors taxe de la production sur la consommation des tiers " au sens de l'article 1647 B du code général des impôts ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mars 2014 :
- le rapport de Mme Van Muylder, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Garrec, rapporteur public ;
- et les observations de Me Hazan, pour la société ELSE FRANCE ;
1. Considérant que la société ELSE FRANCE, qui exerce une activité de commerce en gros de produits de parfumerie et de beauté, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour les exercices clos en 2005, 2006 et 2007 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration a considéré que la société était redevable de la cotisation minimale de taxe professionnelle prévue à l'article 1647 E du CGI pour les années 2006 et 2007 ; que la société relève appel du jugement en date du 8 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge partielle, en droits et pénalités, des cotisations minimales de taxe professionnelle qui lui ont été réclamées au titre des années 2006 et 2007 ;
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
2. Considérant en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article 1647 E du code général des impôts : " La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7 600 000 euros est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie au II de l'article 1647 B sexies. Le chiffre d'affaires et la valeur ajoutée à prendre en compte sont ceux de l'exercice de douze mois clos pendant l'année d'imposition ou, à défaut d'un tel exercice, ceux de l'année d'imposition (...) " ; que le chiffre d'affaires à retenir pour apprécier si un intermédiaire agissant en son nom propre pour le compte d'autrui doit être soumis à la cotisation minimale de taxe professionnelle correspond au montant total du prix des biens vendus ou des prestations assurées ;
3. Considérant qu'il est constant que la société ELSE FRANCE agissait en son nom propre, en qualité de commissionnaire opaque ; que l'administration a ainsi pu légalement, pour apprécier le montant du chiffre d'affaires réalisé par la société au titre des années 2006 et 2007 en vue de déterminer leur assujettissement à la cotisation minimale de taxe professionnelle prévue par l'article 1647 E du code général des impôts, prendre en compte le montant total des sommes encaissées par la société procédant de la vente des produits et non des seules commissions perçues pour leur entremise ;
4. Considérant en deuxième lieu, que la société ELSE FRANCE ne peut utilement soutenir que l'assujettissement à la cotisation minimale de taxe professionnelle des entreprises, tel que prévu à l'article 1647 E du code général des impôts, méconnaît le principe d'égalité des citoyens devant l'impôt en ce qu'il induit une inégalité entre les commissionnaires opaques et les commissionnaires transparents, dès lors que les contribuables placés dans une situation semblable sont traités de la même façon ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, alors en vigueur : " (...) II. 1. La valeur ajoutée (...) est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers (...). / Pour la généralité des entreprises, la production de l'exercice est égale à la différence entre : / D'une part, les ventes, les travaux, les prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les stocks à la fin de l'exercice ; / Et, d'autre part, les achats de matières et marchandises, droits de douane compris ; les réductions sur ventes ; les stocks au début de l'exercice. / Les consommations de biens et services en provenance de tiers comprennent : les travaux, fournitures et services extérieurs, à l'exception des loyers afférents aux biens pris en crédit-bail, ou des loyers afférents à des biens, visés au a du 1° de l'article 1467, pris en location par un assujetti à la taxe professionnelle pour une durée de plus de six mois ou des redevances afférentes à ces biens résultant d'une convention de location-gérance, les frais de transports et déplacements, les frais divers de gestion (... ) " ; que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ; que, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux dispositions du plan comptable général dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée ; qu'aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt. " ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le calcul de la valeur ajoutée a été fait à partir des produits des ventes comptabilisés par la société, qui exerce une activité de commerce en gros de produits manufacturés ; qu'au vu de cette activité, la valeur ajoutée a été calculée conformément aux dispositions de l'article 1647 B sexies du code général des impôts ;
En ce qui concerne l'application de la doctrine :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) " ;
8. Considérant que la société ELSE FRANCE n'est pas fondée à se prévaloir de la décision de rescrit n° 2005/21/IDL du 6 septembre 2005, publiée sous le titre " modalités d'imposition des commissionnaires à la taxe professionnelle ", ainsi que la réponse faite à M. B..., député, qui se prononcent uniquement sur la base d'imposition à la taxe professionnelle des commissionnaires et n'ont pas trait à la question de la détermination du seuil d'assujettissement à la cotisation minimale de taxe professionnelle ; qu'elles ne peuvent, dès lors, être regardées comme comportant une interprétation formelle de l'article 1647 E du code général des impôts que la société requérante pourrait invoquer sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société ELSE FRANCE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions contestées ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société ELSE FRANCE est rejetée.
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N° 12VE00060