Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... M'Kouboi a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, d'une part, d'annuler l'arrêté du 15 décembre 2020 par lequel le préfet du Cantal a rejeté sa demande de renouvellement de carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " qui lui avait été délivrée en qualité de mère de Français mineur, lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et a désigné Les Comores, État dont elle est ressortissante, comme pays de destination, d'autre part, d'enjoindre sous astreinte à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa demande ;
Par jugement n° 2100017 du 27 mai 2021, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 4 octobre 2021, Mme M'Kouboi, représentée par Me Portal Meral, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ainsi que l'arrêté du 15 décembre 2020 ;
2°) d'enjoindre au préfet du Cantal, dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte journalière de 50 euros, de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa demande après remise d'une autorisation provisoire de séjour ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 100 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le refus de renouvellement de carte de séjour de plein droit en qualité de parent de Français méconnaît le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que la condition de la preuve de l'entretien de l'enfant par le parent ayant reconnu la paternité ou de l'attente excessive portée à la vie privée et familiale, entrée en vigueur au 1er mars 2019, n'est pas opposable au renouvellement d'un titre délivré avant cette date ;
- subsidiairement, elle établit que le père, auteur de la reconnaissance de paternité, subvient au besoin de leur enfant et qu'un refus de titre porterait une atteinte excessive à son droit de mener une vie privée et familiale normale et léserait l'intérêt supérieur de son enfant ;
- dès lors qu'elle était éligible au titre de plein de droit, le refus aurait dû être précédé de la consultation de la commission du titre de séjour, en vertu de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par mémoire enregistré le 18 novembre 2021, le préfet du Cantal conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Mme M'Kouboi a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 2 septembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention internationale sur les droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 ;
- le décret n° 2019-141 du 27 février 2019 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Arbarétaz, président ;
- et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
Sur les conclusions à fins d'annulation et d'injonction :
1. Mme M'Kouboi, ressortissante comorienne, serait entrée en France en décembre 2015. Mère d'un enfant français né en 2017 de sa relation avec un Français, elle a bénéficié, à compter du 4 juillet 2018, d'une carte de séjour temporaire en qualité de mère d'enfant français, renouvelée une fois. Au visa du second aliéna du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Cantal a, par arrêté du 15 décembre 2020 portant obligation de quitter le territoire sous trente jours et désignation des Comores comme pays de destination, rejeté la seconde demande de renouvellement de ce titre au motif que n'était pas rapportée la preuve d'une prise en charge effective par le père de l'enfant, auteur de la reconnaissance de paternité, et, subsidiairement, que n'était pas porté d'atteinte excessive au droit à la vie privée et familiale de Mme M'Kouboi et que l'intérêt supérieur de l'enfant n'était pas lésé. Mme M'Kouboi relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande d'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction applicable à compter du 1er mars 2019 en vertu de la combinaison du IV de l'article 71 de la loi du 10 septembre 2018 et du I de l'article 52 du décret du 27 février 2019 susvisés : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger (...) qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ".
3. D'une part, la légalité d'une décision administrative s'apprécie, sauf disposition contraire, en fonction des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de son édiction. Le second alinéa de l'article L. 313-11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue du I de l'article 55 de la loi du 10 septembre 2018, étant entré en vigueur le 1er mars 2019, ainsi qu'il est dit au point 2, il était applicable à la décision statuant sur la seconde demande de renouvellement de titre, prise après cette date. D'autre part, sauf disposition contraire, l'étranger qui demande le renouvellement d'un titre de séjour ne peut se prévaloir du maintien des conditions en vigueur à la date de délivrance du titre originel et doit répondre aux conditions exigibles pour le titre qu'il demande, à la date à laquelle l'administration statue sur sa demande. Les dispositions du 6° de l'article L. 313-11, en vigueur au 15 décembre 2020, ne comportant aucune dérogation en faveur des étrangers qui, parents d'enfants français, avaient obtenu une carte de séjour temporaire en cette qualité avant le 1er mars 2019, la demande de renouvellement présentée par Mme M'Kouboi devait être appuyée soit des justificatifs de la contribution effective du père français aux besoins matériels et éducatifs de son enfant soit d'une décision de justice et, à défaut, soumise à l'appréciation de l'incidence d'un refus sur la vie privée et familiale et l'intérêt supérieur de l'enfant. Il suit de là que Mme M'Kouboi n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Cantal aurait méconnu les dispositions de l'article L. 313-11, dans leur rédaction en vigueur à la date de délivrance de sa carte de séjour temporaire originelle, en lui opposant le second alinéa de cet article issu de la loi du 10 septembre 2018.
4. Or, il ressort des pièces du dossier que les manifestations d'intérêt du père français sont épisodiques et ne traduisent, à la date de l'arrêté attaqué, pas de participation effective aux besoins matériels et moraux de l'enfant de Mme M'Kouboi, aucune décision de justice n'étant produite. Mme M'Kouboi ne se prévaut pas de liens d'une particulière intensité sur le territoire tandis qu'elle a vécu jusqu'à l'âge de trente ans aux Comores où elle a nécessairement conservé des liens. Enfin, la quasi-inexistence des liens entre l'enfant et son père français ne permet pas d'en déduire une lésion de l'intérêt supérieur de cet enfant. Il s'ensuit que le préfet du Cantal n'a pas méconnu les dispositions citées au point 2 en refusant de renouveler le titre de Mme M'Kouboi.
5. En vertu des dispositions alors codifiées à l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des étrangers dont la situation relève effectivement d'une carte de séjour temporaire de plein droit. Or, ainsi qu'il vient d'être dit, Mme M'Kouboi n'entrait pas dans les catégories d'étrangers éligibles de plein droit à la délivrance d'une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale ". Par suite, le préfet du Cantal n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme M'Kouboi n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande d'annulation du refus de carte de séjour temporaire et, par voie de conséquence, de l'obligation de quitter le territoire sous trente jours avec désignation des Comores comme pays de destination. Les conclusions de la requête présentées aux mêmes fins doivent être rejetées.
7. Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 par Mme M'Kouboi, partie perdante, doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme M'Kouboi est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... M'Kouboi et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Cantal.
Délibéré après l'audience du 28 avril 2022 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mai 2022.
Le président, rapporteur,
Ph. ArbarétazLe président assesseur,
Ph. Seillet
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY03201
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