Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 4 avril 2023 par lequel le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2305188 du 27 octobre 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 novembre 2023 et des pièces enregistrées le 14 décembre 2024, M. B..., représenté par Me Lemkhairi, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 27 octobre 2023 ;
2°) d'annuler les décisions du 4 avril 2023 de refus de titre de séjour, d'obligation de quitter le territoire français, de refus d'octroi de délai de départ volontaire et d'interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans prises à son encontre ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les décisions de refus de titre de séjour et d'éloignement sont insuffisamment motivées ;
- elles sont entachées d'erreurs de fait, quant à l'authenticité de la promesse d'embauche qu'il a adressée et quant à l'ancienneté de sa résidence habituelle en France ;
- le préfet a méconnu l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en estimant que sa situation ne répondait pas à des considérations humanitaires ou à des motifs exceptionnels justifiant son admission exceptionnelle au séjour ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté litigieux méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2024, le préfet du Val-d'Oise conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens présentés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain né le 5 novembre 1981 à Fam El Hisn, qui a déclaré être entré en France le 28 février 2010, a sollicité le 2 mars 2020 son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 4 avril 2023, le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. B... relève appel du jugement du 27 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la recevabilité des conclusions d'annulation dirigées contre la décision portant de refus de délai de départ volontaire :
2. Il ressort des termes de l'arrêté litigieux que le préfet du Val-d'Oise a accordé à M. B... un délai de trente jours pour exécuter la décision d'éloignement prise à son encontre. Le requérant n'est donc pas recevable à demander l'annulation d'une décision portant refus de délai de départ volontaire, que le préfet n'a pas prise.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :
3. M. B... soutient vivre habituellement en France au moins depuis 2010. Il affirme que s'y trouve le centre de ses intérêts privés et familiaux tandis qu'il n'a plus d'attaches au Maroc. Cependant M. B..., célibataire et sans charge de famille, a déjà fait l'objet en 2017 d'une mesure d'éloignement qu'il n'allègue pas avoir exécutée. Il ne conteste pas que ses parents vivent au Maroc. De plus, il ne justifie pas d'une intégration sociale ni professionnelle particulière sur le territoire national, alors même qu'entre 2012 et 2021, il a occupé, successivement, ponctuellement et pour des employeurs divers, des emplois de manutentionnaire, agent de ménage ou de service, plongeur, vendeur, employé dans une épicerie, technicien installateur de la fibre et électricien. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en prenant l'arrêté contesté, le préfet aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée avec les objectifs en vue desquels il a été pris. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit ainsi être écarté.
En ce qui concerne le refus de titre de séjour et la décision d'éloignement :
4. Ces décisions comportent les éléments de droit et de fait qui les fondent. Elles sont suffisamment motivées.
5. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".
6. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 435-1 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est simplement relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée, et il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié. En revanche, en l'absence de stipulations de l'accord franco-marocain régissant l'admission au séjour en France des ressortissants marocain au titre de la vie privée et familiale, les ressortissants marocains peuvent utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui d'une demande de régularisation exceptionnelle de leur situation sur ce dernier fondement.
7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 du présent arrêt, M. B... ne justifie d'aucune considération humanitaire ou motif exceptionnel à laquelle répondrait son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale et fait état d'éléments qui ne suffisent pas à caractériser une erreur manifeste qu'aurait commise le préfet dans l'appréciation de sa situation en refusant de l'admettre au séjour en tant que salarié dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire de régularisation.
8. M. B... ne peut utilement contester une erreur de fait quant à l'ancienneté de son séjour en France alors que précisément le préfet, qui a saisi la commission du titre de séjour, ne conteste pas l'ancienneté dont il allègue. Si le requérant affirme, sans plus de précision, que le préfet aurait commis une erreur de fait en retenant que la promesse d'embauche qu'il a fournie n'a pu être authentifiée, toutefois, vu les motifs exposés au point précédent du présent arrêt, cette prétendue erreur de fait serait restée, en tout état de cause, sans incidence sur le sens et la légalité des décisions contestées.
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans :
9. Il ressort des termes de la décision contestée que pour la prendre le préfet a constaté la précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet, la durée de son séjour sur le territoire français, ses liens personnels sur place et ceux qu'il conserve dans son pays d'origine, évalué la qualité de l'intégration sociale et professionnelle en France de l'intéressé et a estimé que la décision litigieuse ne portait pas au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale, telle qu'elle ressortait de l'examen approfondi qui a été mené ainsi que, notamment, de ses déclarations, une atteinte disproportionnée. Cette motivation atteste de la prise en compte par le préfet de l'ensemble des critères prévus par les dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.
10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 du présent arrêt, c'est sans méconnaître les dispositions de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet a prononcé à l'encontre de l'intéressé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
11. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par M. B... doivent être rejetées. Il en va de même, par voie de conséquence, de l'ensemble de ses conclusions présentées à titre accessoire, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Versol, présidente de chambre,
Mme Le Gars, présidente-assesseure,
Mme Hameau, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2025.
La rapporteure,
M. HameauLa présidente,
F. VersolLa greffière,
A. Gauthier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 23VE02609