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01/12/2022 | FRANCE | N°21LY02089

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 01 décembre 2022, 21LY02089


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 1909614 du 18 mai 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 24 juin 2021 et le 24 novembre 2021, M. C... et Mme B... A..., représentés par Me Narjoz Delatour, avo

cat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 ma...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 1909614 du 18 mai 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 24 juin 2021 et le 24 novembre 2021, M. C... et Mme B... A..., représentés par Me Narjoz Delatour, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 mai 2021 ;

2°) de leur accorder la décharge demandée.

Ils soutiennent que :

- l'administration ne pouvait s'appuyer sur les éléments recueillis lors de la vérification de comptabilité de la société Techni-Therm 01 et seuls les éléments d'enquête sur lesquels le tribunal correctionnel s'est appuyé permettent de déterminer le montant des prélèvements réellement effectués par Mme A... ; ainsi, il existe un écart de 12 204 euros injustifié entre les sommes identifiées au cours de l'enquête pénale et les écritures passées par la société Techni-Therm 01 sur le compte de Mme A... ;

- l'assiette des revenus distribués en litige doit être fixée conformément aux sommes établies par le tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse dans son jugement du 6 janvier 2021 ;

- les sommes pour lesquelles le tribunal correctionnel a prononcé la relaxe doivent être déduites de la base d'imposition ;

- la société Techni-Therm 01 a imputé de manière frauduleuse sur le compte de Mme A... pour un montant global de 3 418,71 euros des sommes qu'elle n'a jamais encaissées.

Par un mémoire enregistré le 25 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les requérants n'apportent pas la preuve que la somme de 12 204 euros ne constitue pas un revenu distribué, ni celle du caractère exagéré de l'imposition mise à leur charge ;

- il en est de même des dépenses correspondant à un montant total de 7 882 euros dont le tribunal correctionnel a estimé qu'elles ne pouvaient être considérées comme constituant un abus de biens sociaux.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'une vérification de comptabilité de la société Techni-Therm 01 portant sur la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016, l'administration a constaté que le compte-courant d'associé de Mme A... présentait un solde débiteur au 31 décembre 2015. La variation du solde débiteur de ce compte-courant s'est élevée à 42 382 euros au titre de 2015. L'administration a estimé que cette somme constituait des revenus distribués au profit de Mme A.... Par une proposition de rectification du 21 novembre 2018, l'administration a notifié à M. et Mme A... une cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu sur cette somme de 42 382 euros dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2015, sur le fondement du a de l'article 111 du code général des impôts. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 18 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge de cette cotisation supplémentaire.

2. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes. / (...) ".

3. D'une part, en application de ces dispositions, doivent être regardées comme des revenus distribués, sauf preuve contraire, les montants des soldes débiteurs des comptes courants ouverts dans les écritures d'une société au nom de ses associés, actionnaires ou porteurs de parts au 31 décembre de l'année en cause. En cas de variation de ce solde d'une année civile sur l'autre, seule la différence positive entre ces deux soldes peut légalement être incluse dans le revenu imposable de l'associé, l'actionnaire ou le porteur de parts pour l'année en cause.

4. D'autre part, les détournements de biens sociaux commis par un associé doivent être regardés comme des revenus distribués à cet associé que l'administration peut imposer sur le fondement des dispositions précitées du a. de l'article 111 du code général des impôts, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

5. Enfin, aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré ".

6. Après avoir demandé, une prorogation du délai de trente jours pour répondre à la proposition de rectification, du 21 novembre 2018, M. et Mme A... ont présenté des observations après l'expiration du délai supplémentaire qui leur avait été accordé. La charge de la preuve du caractère infondé ou exagéré des impositions supplémentaires leur incombe donc.

7. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'administration a évalué le montant des distributions litigieuses à partir des pièces comptables fournies par la société Techni-Therm 01, laissant ressortir que le compte-courant d'associé ouvert au nom de Mme A... présentait, au 31 décembre 2015, un solde débiteur de 66 560,60 euros, alors que " l'à nouveau " de ce compte s'élevait au 1er janvier 2015 à la somme de 24 178,13 euros. Les requérants font valoir que la société Techni-Therm 01 a imputé de manière frauduleuse des sommes sur le compte-courant d'associé de Mme A... et que les montants des distributions constatés par l'administration ne correspondent pas à ceux retenus par le tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse, dans son jugement du 6 janvier 2021 et par les éléments de l'enquête judiciaire sur laquelle ce tribunal s'est fondé et qui permettent, selon eux de connaître le montant des prélèvements réellement effectués par Mme A.... Toutefois, ils n'apportent aucun élément, notamment de nature comptable, permettant de justifier la remise en cause des indications chiffrées que l'administration a tirées des écritures de la société, lors de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet.

8. En deuxième lieu, les requérants soutiennent que l'assiette des revenus distribués en litige doit être fixée conformément aux sommes établies par le tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse dans son jugement du 6 janvier 2021, au titre des détournements de fonds constitutifs d'abus de biens sociaux. Toutefois, l'autorité de la chose jugée qui appartient aux décisions des juges répressifs devenues définitives s'attache à la constatation matérielle des faits mentionnés dans le jugement, support nécessaire du dispositif, et à leur qualification sur le plan pénal. En revanche, elle ne s'attache pas à l'appréciation de ces mêmes faits au regard de la loi fiscale, notamment en ce qui concerne l'évaluation des bases d'imposition. Ainsi, si le jugement du tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse du 6 janvier 2021 a reconnu M. et Mme A... coupables des faits reprochés et a évalué globalement, pour l'ensemble de la période pluriannuelle visée par les poursuites, les montants détournés, cette décision de l'autorité judiciaire, n'avait pas pour objet d'établir le montant des revenus imposables des intéressés, et n'est pas, à cet égard, revêtue de l'autorité de la chose jugée. De même, la circonstance que certaines des sommes en litige n'aient pas fait l'objet de la procédure judiciaire qui a permis d'évaluer le montant des crédits obtenus de manière frauduleuse par Mme A... ne suffit pas à établir que ces sommes ne puissent être regardées comme des revenus imposables entre les mains des intéressés. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les bases imposables devaient être limitées au montant des détournements évalués par le juge pénal.

9. En troisième lieu, l'autorité de chose jugée par une juridiction pénale française ne s'impose au juge administratif qu'en ce qui concerne les constatations de fait qu'elle a retenues et qui sont le support nécessaire du dispositif d'un jugement qu'elle a rendu et qui est devenu définitif, tandis que la même autorité ne saurait s'attacher aux motifs d'un jugement de relaxe ou d'acquittement tirés de ce que les faits reprochés ne sont pas établis ou de ce qu'un doute subsiste sur leur réalité.

10. Dans son jugement du 6 janvier 2021, le tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse n'a fait que prononcer la relaxe de Mme A... concernant les dépenses dont les requérants font état. Ainsi, la circonstance que le juge pénal a pu considérer que les faits litigieux n'étaient pas établis ou que la preuve du caractère non professionnel de certaines dépenses n'était pas apportée, ne saurait s'imposer à l'administration fiscale, ni au juge de l'impôt. Sur ce point, les éléments produits par les requérants tant en appel qu'en première instance ne permettent pas d'établir que les dépenses de réception correspondant à une somme de 2 014,87 euros, les dépenses de garage correspondant à une somme de 178 euros, de gas-oil correspondant à une somme de 1 549,64 euros et pour lesquelles la seule attestation produite ne permet pas d'établir qu'elles concerneraient un véhicule de la société utilisé par un salarié, et de fournitures (une cartouche d'encre pour 13,50 euros et des programmes informatiques pour 85,85 euros), n'auraient pas la nature de revenus distribués, alors même que le tribunal correctionnel a considéré qu'ils ne pouvaient constituer des faits d'abus de biens sociaux.

11. Enfin, si les requérants soutiennent que le tribunal correctionnel a considéré que Mme A... justifiait de ce qu'à hauteur de la somme de 3 600 euros, des versements correspondaient à des salaires qui lui étaient dus au titre de l'année 2015, en se bornant à produire le détail de ces sommes, des bulletins de salaires de Mme A..., ainsi que leur déclaration de revenus de l'année 2015, ils n'établissent pas que les sommes inscrites sur le compte-courant d'associé de Mme A... n'auraient pas la nature de revenus distribués.

12. En dernier lieu, si les requérants soutiennent que la société Techni-Therm 01 a imputé de manière frauduleuse sur le compte de Mme A... pour un montant global de 3 418,71 euros des sommes qu'elle n'a jamais encaissées et qui, pour certaines, résulteraient de chèques signés par le gérant au profit d'un tiers ou même que le gérant a encaissé lui-même, ils n'apportent aucun élément permettant d'établir le bien-fondé de leurs allégations.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2015.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2022 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2022.

La rapporteure,

P. Dèche

Le président,

F. Bourrachot

La greffière,

A.-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY02089

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02089
Date de la décision : 01/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : JURIS FRANCHE-COMTE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-12-01;21ly02089 ?
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