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12/10/2023 | FRANCE | N°22DA00908

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 12 octobre 2023, 22DA00908


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen, par une demande et par une réclamation transmise d'office par la directrice régionale des finances publiques de Normandie, de prononcer la réduction, après réévaluation du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement (CIMR) auquel son foyer fiscal pouvait prétendre, de la cotisation d'impôt sur le revenu acquittée par ce foyer au titre de l'année 2018.

Par un jugement n° 2001364 du 1er mars 2022, le tribunal administratif de Ro

uen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mém...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen, par une demande et par une réclamation transmise d'office par la directrice régionale des finances publiques de Normandie, de prononcer la réduction, après réévaluation du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement (CIMR) auquel son foyer fiscal pouvait prétendre, de la cotisation d'impôt sur le revenu acquittée par ce foyer au titre de l'année 2018.

Par un jugement n° 2001364 du 1er mars 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 avril 2022 et le 3 octobre 2022, M. et Mme A..., représentés par Me Basson, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la réduction demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de même que les entiers dépens de l'instance.

Ils soutiennent que :

- la totalité de la somme de 418 181 euros portée sur leur déclaration de revenus de l'année 2018 comme correspondant à la gratification reçue par M. A... dans le cadre du plan d'intéressement de longue durée instauré par son employeur n'était pas imposable au titre de l'année 2018 dans la catégorie des traitements et salaires, dès lors qu'une part, représentant un montant de 48 208,93 euros, aurait dû être regardée, au vu des dispositions du règlement du plan, comme ayant la nature d'un produit financier acquis et imposable au prélèvement forfaitaire unique prévu par l'article 200 A du code général des impôts au titre de l'année 2016, qui est aujourd'hui prescrite ;

- cette gratification, qui ne constitue pas un revenu exceptionnel relevant de l'une des catégories visées aux 1° à 15° du C du II de l'article 60 de la loi de finances pour 2017, et qui n'est, en particulier, pas surérogatoire, au sens du 13° de ce C, mais qui présente un caractère habituel, tant dans sa fréquence que dans son montant, qui n'est pas discrétionnaire et qui est susceptible d'être recueillie annuellement, a été regardée à tort comme non éligible au CIMR, alors qu'elle correspondait à un usage dans l'entreprise versante et devait, par suite, être regardée comme prévue par le contrat de travail de M. A... ; les paragraphes n°160, 190, 200, 220 et 250 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-IR-PAS-50-10-20-10 confortent cette analyse sur ce point.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions de la requête tendant à la réduction de l'imposition en litige ne sont susceptibles d'être accueillies que dans la limite du montant de 171 975 euros ayant fait l'objet de la réclamation initialement formée par M. A..., étant précisé que le montant de 48 209 euros dont font état les appelants correspond à un revenu imposable de 39 049 euros ;

- l'interprétation, par M. et Mme A..., des dispositions du règlement du plan d'intéressement à long terme dont a bénéficié M. A..., selon laquelle ce plan inclurait l'attribution, d'une part, d'une gratification et, d'autre part, de produits financiers, ne peut pas être retenue ; l'administration a dès lors retenu, à juste titre et à bon droit, que la totalité des sommes perçues, dans le cadre de ce plan par M. A... au cours de l'année 2018 était imposable, au titre de cette année, dans la catégorie des traitements et salaires ;

- ces sommes, qui ont la nature d'une gratification non prévue par le contrat de travail de M. A... et qui présentent un caractère surérogatoire, ont, par suite, été exclues à bon droit du bénéfice du CIMR ; dans ces conditions et dès lors que cette gratification ne présente pas un caractère habituel, que son attribution est discrétionnaire et que son montant est supérieur à ceux que l'employeur de M. A... avait précédemment versés, d'ailleurs dans le cadre de dispositifs distincts, à certains des collaborateurs du groupe, M. et Mme A... n'entrent pas dans les prévisions des extraits de la doctrine administrative dont ils se prévalent.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me Basson, représentant M. et Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., employé par la société anonyme (SA) Legrand en tant que directeur financier, a été désigné comme l'un des bénéficiaires du plan d'intéressement à long terme instauré par une délibération du 6 mars 2013 du conseil d'administration de cette société, afin de renforcer le lien entre, d'une part, la rémunération des mandataires sociaux et de certains salariés du groupe dont cette société est la mère et, d'autre part, les performances économiques réalisées, à moyen terme, par ce groupe. Ce plan s'est traduit par l'attribution, aux bénéficiaires, d'unités de performance future indexées (UPFI) destinées à se traduire par le versement d'une gratification. M. A... a perçu, à ce titre, au cours de l'année 2018, une gratification d'un montant de 516 273 euros. M. et Mme A... ont porté le revenu net imposable correspondant à cette gratification, soit 418 181 euros, dans la déclaration de revenus qu'ils ont souscrite au titre de l'année 2018, dans la rubrique réservée aux rémunérations exceptionnelles. Ils ont toutefois accompagné cette inscription d'une mention expresse, aux termes de laquelle ils précisaient à l'administration que le revenu en cause constituait, à leurs yeux, un revenu de nature non exceptionnelle éligible au crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement (CIMR) instauré par l'article 60 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017. L'administration a cependant, au vu de cette déclaration, déterminé sans prendre en compte cette gratification le CIMR auquel M. et Mme A... étaient susceptibles de prétendre au titre de l'année 2018. M. A... a formé une réclamation et, après son rejet, a porté le litige devant le tribunal administratif de Rouen, auquel, au cours de la procédure, a été soumise d'office, par la directrice régionale des finances publiques de Normandie, une autre réclamation formée par l'intéressé. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 1er mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande et cette réclamation, tendant à la réduction de leur cotisation d'impôt sur le revenu acquittée au titre de l'année 2018.

2. Il résulte de l'instruction et notamment du règlement du plan d'intéressement à long terme instauré en 2013, dont a bénéficié M. A..., lequel règlement a été approuvé le 6 mars 2013 par le conseil d'administration de la SA Legrand, que bénéficient des unités de performance future indexées (UPFI), en vertu du plan, certains salariés ou mandataires sociaux, discrétionnairement désignés par le conseil d'administration, à partir d'une liste proposée par la direction générale de la société, l'objectif visé par ce plan étant d'encourager leurs initiatives individuelles ou collectives ou de récompenser leur contribution à la bonne marche des affaires du groupe Legrand, sous réserve que ces bénéficiaires pressentis remplissent, à la date d'attribution fixée par le plan, certaines conditions prévues par celui-ci, tenant à leur présence effective à l'effectif du groupe, en tant que salarié ou mandataire social, à l'absence de préavis de licenciement, de rupture conventionnelle ou de démission et à avoir accusé réception, par un acte valant acceptation et adressé à la société dans le délai fixé, du plan et de la notification individuelle d'attribution émise pour son exécution. Ce règlement précise que, dans le cadre de la mise en œuvre du plan, le conseil d'administration a tous pouvoirs notamment pour, de manière discrétionnaire, vérifier la réalisation des conditions de présence et de performance auxquelles les UPFI ont été assujetties et déterminer, en conséquence, le nombre final d'UPFI acquises par les bénéficiaires respectant les conditions de présence. Le même règlement ajoute qu'à compter du 6 mars 2013, date à laquelle le conseil d'administration a attribué aux bénéficiaires un nombre initial d'UPFI, commence à courir la période d'acquisition, jusqu'au 6 mars 2016 à minuit, terme auquel les conditions de présence et de performance sont appréciées pour le calcul du nombre définitif d'UPFI attribué à chaque bénéficiaire. Enfin, selon le règlement, ces derniers ont la possibilité, à compter du 7 mars 2016 et jusqu'au 7 mars 2018 à minuit, de fixer la valeur des UPFI qu'ils détiennent, en adressant à la société une demande de désindexation au prix de clôture de l'action Legrand sur le marché NYSE Euronext Paris au jour de la demande ou de laisser cette valeur se fixer au terme de cette période de fixation.

Sur l'éligibilité au crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

3. Aux termes du II de l'article 60 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016, portant loi de finances pour 2017, dans sa rédaction applicable au présent litige : " A. - Les contribuables bénéficient, à raison des revenus non exceptionnels entrant dans le champ du prélèvement mentionné à l'article 204 A du code général des impôts, tel qu'il résulte de la présente loi, perçus ou réalisés en 2018, d'un crédit d'impôt modernisation du recouvrement destiné à assurer, pour ces revenus, l'absence de double contribution aux charges publiques en 2019 au titre de l'impôt sur le revenu. / B. - Le crédit d'impôt prévu au A du présent II est égal au montant de l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2018 résultant de l'application des règles prévues aux 1 à 4 du I de l'article 197 du code général des impôts ou, le cas échéant, à l'article 197 A du même code multiplié par le rapport entre les montants nets imposables des revenus non exceptionnels mentionnés au 1 de l'article 204 A dudit code, les déficits étant retenus pour une valeur nulle, et le revenu net imposable au barème progressif de l'impôt sur le revenu, hors déficits, charges et abattements déductibles du revenu global. Le montant obtenu est diminué des crédits d'impôt prévus par les conventions fiscales internationales afférents aux revenus mentionnés au 1 du même article 204 A. / C. - Sont pris en compte au numérateur du rapport prévu au B du présent II, pour le calcul du crédit d'impôt prévu au A, les montants nets imposables suivant les règles applicables aux salaires, aux pensions ou aux rentes viagères, à l'exception : / (...) / 13° Des gratifications surérogatoires, qui s'entendent des gratifications accordées sans lien avec le contrat de travail ou le mandat social ou allant au-delà de ce qu'ils prévoient, quelle que soit la dénomination retenue ; / 14° Des revenus qui correspondent par leur date normale d'échéance à une ou plusieurs années antérieures ou postérieures ; / 15° De tout autre revenu qui, par sa nature, n'est pas susceptible d'être recueilli annuellement. / (...) ".

4. Cet article 60 de la loi du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, modifié notamment par l'ordonnance du 22 septembre 2017 relative au décalage d'un an de l'entrée en vigueur du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, instaure, à compter des revenus de l'année 2018 et pour ceux qui entrent dans son champ d'application, le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu. Ce prélèvement est opéré, pour les revenus salariaux et les revenus de remplacement, par l'employeur ou l'organisme versant. Les dispositions du I de l'article 60 déterminent les modalités de ce prélèvement. Les dispositions de son paragraphe II fixent les modalités de la transition entre les règles antérieures de paiement de l'impôt sur le revenu et le prélèvement à la source, afin que les contribuables ne paient pas, en 2019, l'impôt sur le revenu dû à la fois sur les revenus de l'année 2018 et sur ceux de l'année 2019, en instituant un crédit d'impôt dit de modernisation du recouvrement ayant pour objet d'effacer le montant de l'impôt dû au titre de 2018 correspondant aux revenus non exceptionnels de cette année.

5. Il résulte des termes mêmes des dispositions du II de cet article 60, au demeurant éclairées par les travaux parlementaires qui ont conduit à leur adoption, que le législateur a entendu exclure du bénéfice du crédit d'impôt qu'elles instaurent, afin de prévenir tout comportement d'optimisation fiscale, les revenus qui présentent, par leur nature ou leur montant, un caractère exceptionnel, notamment en raison de leur caractère surérogatoire ou parce qu'ils ne sont pas susceptibles d'être recueillis annuellement.

6. D'une part, il résulte de l'instruction que la gratification faisant l'objet du présent litige, qui a été accordée à M. A... en exécution du plan d'intéressement à long terme instauré en 2013 au sein du groupe Legrand, a fait l'objet d'un versement unique au cours de l'année 2018 correspondant à l'intégralité des droits acquis par M. A... au titre de ce plan.

7. D'autre part, quand bien même d'autres plans d'intéressement ont été instaurés, au cours des années antérieures et postérieures à l'année 2013, au sein du groupe Legrand, le versement de la gratification en litige ne peut pas être regardé comme s'inscrivant dans le prolongement de plans antérieurs, dès lors que ces plans n'ont, à l'exception, il est vrai, de celui conclu au titre de l'année 2014, pas porté sur le versement, à leurs bénéficiaires, d'une gratification en numéraire, mais sur l'attribution préférentielle d'actions gratuites de la SA Legrand et, le cas échéant, de bons de souscription ou d'achat d'actions.

8. Dans ces conditions, la gratification en cause, compte tenu de son montant et dès lors qu'elle était en l'espèce insusceptible d'être recueillie annuellement, était au nombre des revenus exceptionnels inéligibles au crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement prévu au A du II de l'article 60 de la loi du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

En ce qui concerne le bénéfice de l'interprétation administrative de la loi fiscale :

9. En vertu du dernier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente.

10. Eu égard à l'argumentation qu'ils développent dans leur requête, M. et Mme A... doivent être regardés comme invoquant le bénéfice, sur le fondement de ces dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations des paragraphes n°160, 190, 200, 220 et 250 de la doctrine administrative publiée le 1er août 2018 sous la référence BOI-IR-PAS-50-10-20-10.

11. Toutefois, ces énonciations ne peuvent être appréhendées séparément mais elles doivent être lues ensemble et en tenant compte de l'économie globale de la doctrine administrative dans laquelle elles s'insèrent. Or, selon le paragraphe n°150 de cette doctrine, d'une part, les gratifications surérogatoires perçues en 2018, qui s'entendent des gratifications accordées sans lien avec le contrat de travail ou le mandat social ou allant au-delà de ce qu'ils prévoient, quelle que soit la dénomination retenue, n'ouvrent pas droit au bénéfice du CIMR pour leur totalité et, d'autre part, une gratification non surérogatoire peut néanmoins être exclue du bénéfice du CIMR s'il s'agit d'un revenu exceptionnel, en particulier s'il s'agit d'un revenu non susceptible d'être recueilli annuellement. Ces prévisions, qui ne font que reprendre les principes énoncés par les dispositions législatives citées au point 3 et dont les paragraphes suivants, invoqués par M. et Mme A..., ont pour seul objet de proposer des exemples d'application, ne comportent aucune interprétation formelle de la loi fiscale qui soit susceptible d'être opposée à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

12. En tout état de cause, il n'est pas contesté que la gratification perçue par M. A... dans le cadre du plan d'intéressement de long terme instauré en 2013 au sein du groupe Legrand n'était pas mentionnée dans le contrat de travail de l'intéressé, de sorte que M. et Mme A... n'entrent pas dans les prévisions du paragraphe n°160 qu'ils invoquent et qui énonce que ne sont pas considérées comme surérogatoires les gratifications prévues par le contrat de travail du bénéficiaire.

13. Si les contribuables se prévalent de l'exception prévue, en ce qui concerne les gratifications non prévues au contrat de travail, par le paragraphe n°190 de cette doctrine, selon lequel ne seront pas considérées comme surérogatoires les gratifications attribuées et versées de manière habituelle et dont le montant ne va pas au-delà de celui attribué habituellement, d'une part, le paragraphe n°200 définit une gratification habituelle, pour le salarié, comme une gratification qui lui est attribuée et versée de manière régulière, chaque année, ou à l'occasion d'événements intervenant régulièrement, en précisant que ses conditions d'attribution et de versement en 2018 doivent être similaires à celles prévalant les années précédentes et, d'autre part, le paragraphe n°220 précise que le montant de la gratification perçue en 2018 ne doit pas aller au-delà de celui attribué habituellement dans des conditions similaires et que l'appréciation se fait pour le salarié en comparant le montant et les conditions de versement de sa gratification par l'entreprise en 2018 avec ceux des années précédentes. Or, il résulte de l'instruction que, comme il a été dit, si M. A... a été bénéficiaire, au titre d'années précédant 2018, de plans d'intéressement à long terme, ces plans n'ont pas porté sur le versement, à leurs bénéficiaires, d'une gratification en numéraire, mais sur l'attribution préférentielle d'actions gratuites de la SA Legrand et, le cas échéant, de bons de souscription ou d'achat d'actions. Par suite, la gratification perçue en 2018 par M. A... ne peut pas être regardée, au sens du paragraphe n°190 de la doctrine administrative invoquée, rapproché des énonciations des paragraphes nos 200 et 220 de la même doctrine, comme attribuée et versée de manière habituelle.

14. Dans ces conditions et quand bien même M. et Mme A... seraient fondés à soutenir que la gratification en cause ne constitue pas un revenu se rapportant à une ou plusieurs années antérieures ou postérieures à 2018, que le paragraphe n°250 de l'instruction invite les services à regarder comme un revenu exceptionnel n'ouvrant pas droit au bénéfice du CIMR, ils n'entrent pas dans les prévisions des extraits de doctrine administrative qu'ils invoquent et ne sont, dès lors, pas fondés à s'en prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

Sur la quotité imposable dans la catégorie des traitements et salaires :

15. Il résulte des termes mêmes du règlement du plan d'intéressement à long terme instauré en 2013 au sein du groupe Legrand, tels qu'exposés au point 2, que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme A..., les bénéficiaires désignés par le conseil d'administration de la SA Legrand ne disposent pas dès la date d'acquisition, c'est-à-dire dès le 7 mars 2016, de l'attribution, même provisoire, d'un montant de gratification, mais seulement d'un nombre définitif d'UPFI. En effet, selon le règlement, ce n'est qu'à compter de cette date et jusqu'au 7 mars 2018 à minuit, que les bénéficiaires pourront fixer la valeur des UPFI qu'ils détiennent, en adressant à la société la demande de désindexation prévue par le règlement du plan et ce n'est qu'à la date de cette demande ou, au plus tard, au terme, le 7 mars 2018 à minuit, de la période de fixation, qu'ils pourront connaître le montant de la gratification à laquelle les UPFI dont ils ont bénéficié peuvent leur faire prétendre. Dès lors, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que le plan d'intéressement devrait s'analyser comme l'attribution, dans un premier temps, le 7 mars 2016, d'un montant de gratification imposable dans la catégorie des traitements et salaires, puis, dans un second temps, le 7 mars 2018 au plus tard, d'un montant complémentaire ayant la nature d'un produit financier imposable au prélèvement forfaitaire unique prévu par l'article 200 A du code général des impôts au titre de l'année 2016, année au cours de laquelle M. A... a formé sa demande de désindexation. Il suit de là que leur moyen tiré de ce qu'une partie de la gratification en cause devrait être exclue, comme prescrite, de la base imposable qui leur a été assignée au titre de l'année 2018 ne peut qu'être écarté.

16. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande et leur réclamation. Par voie de conséquence, les conclusions qu'ils présentent au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Enfin, il doit en être de même, en tout état de cause, de leurs conclusions relatives à la charge des dépens de l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... A..., ainsi qu'au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administratrice générale des finances publiques chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 28 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2023.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé : M. B...

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

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N°22DA00908

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00908
Date de la décision : 12/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : INLO AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-10-12;22da00908 ?
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