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17/04/2025 | FRANCE | N°25LY00254

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 17 avril 2025, 25LY00254


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



M. C... A..., représentant unique des salariés de la société Imperiales Wheels, et le comité social et économique (CSE) de la société ont demandé au tribunal administratif d'Orléans, qui a transmis leur demande au tribunal administratif de Lyon, d'annuler la décision du 4 juillet 2024 par laquelle le directeur régional de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités Centre-Val de Loire a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde

de l'emploi de la société Imperiales Wheels.



Par un jugement n° 2408832 du 3 décembre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... A..., représentant unique des salariés de la société Imperiales Wheels, et le comité social et économique (CSE) de la société ont demandé au tribunal administratif d'Orléans, qui a transmis leur demande au tribunal administratif de Lyon, d'annuler la décision du 4 juillet 2024 par laquelle le directeur régional de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités Centre-Val de Loire a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Imperiales Wheels.

Par un jugement n° 2408832 du 3 décembre 2024, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires enregistrés les 31 janvier, 17 et 24 mars 2025, ce dernier non communiqué, M. C... A..., représentant unique de cent-vingt-cinq salariés de la société Imperiales Wheels, et le CSE de la société, représentés par Me Gstalder, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 4 juillet 2024 d'homologation unilatérale du plan de sauvegarde de l'emploi ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 600 euros à verser à chacun d'eux en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- en méconnaissance de l'article L. 5 du code de justice administrative, ils n'ont pas disposé d'un délai suffisant pour répondre aux mémoires en défense de la préfecture et de la liquidatrice judiciaire ;

- le jugement, qui est insuffisamment motivé, méconnaît l'article L. 9 du code de justice administrative ;

- les premiers juges ont commis des erreurs de droit en regardant comme inopérants les moyens soulevés relatifs à l'absence de proportionnalité des moyens du plan de sauvegarde de l'emploi au regard des moyens financiers de l'entreprise, à l'absence de contrôle de l'étendue des moyens financiers de l'entreprise, à l'absence de contrôle des mesures du plan au regard des efforts préalables de formation et d'adaptation des salariés motif pris que la société était en situation de liquidation judiciaire et à l'absence de pertinence des mesures du plan et donc son insuffisance en refusant de donner toute forme de portée aux données statistiques versées aux débats ;

- la DREETS n'a indiqué aucune méthode ni critère permettant de comprendre son analyse de la proportionnalité du plan de sauvegarde de l'emploi par rapport aux moyens de l'entreprise ; le plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas proportionné aux moyens de l'entreprise ;

- la DREETS aurait dû contrôler l'étendue des fonds propres de l'entreprise, disponibles immédiatement, de plus de deux millions d'euros, et qui pouvaient être utilisés par le liquidateur pour le plan de sauvegarde de l'emploi, ce qu'elle n'a pas fait dans la décision, pour apprécier la proportionnalité du plan de sauvegarde de l'emploi aux moyens financiers de l'entreprise dès lors que l'assurance de garantie des salaires ne peut être sollicitée qu'à titre subsidiaire ;

- la DREETS, qui n'a procédé dans la décision à aucune analyse du plan de développement des compétences mentionné à l'article L. 6312-1 du code du travail, n'a pas recherché quels avaient été les efforts de formation et d'adaptation préalable de l'employeur alors que le 3° de l'article L. 1233-57-3 relatif aux efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés à l'article L. 6321-1 qui est applicable aux entreprises totalement liquidées ;

- l'étude d'employabilité des salariés et du territoire qu'ils ont fournie démontre une inadéquation des mesures sociales du plan et de sa durée, limitée à douze mois, avec le public concerné, dont seulement 20 % pourra effectivement en bénéficier, compte tenu de l'objectif légal de maintien dans l'emploi des salariés licenciés ; l'administration aurait dû exercer un contrôle d'autant plus étroit de ces mesures qu'elles seront essentiellement financées par les fonds publics qui ont été alloués à l'entreprise depuis février 2022 ;

- la décision d'homologation qui valide un plan de sauvegarde de l'emploi, qui n'est pas adapté aux besoins et profil des salariés de la société Imperiales Wheels et ne permet pas au plus grand nombre de salariés de retrouver un emploi, méconnaît l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- compte tenu du contrôle abstrait et inconsistant mené par l'autorité administrative dans le cadre d'une procédure d'homologation sans être pallié par le contrôle opéré par les premiers juges, il y a violation des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantissant le droit à un procès équitable et le droit à un recours effectif ;

- il y a une violation combinée de ces stipulations avec celles de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de la discrimination prohibée ;

- la cour devra se prononcer, dans le cadre de l'effet dévolutif, outre sur les moyens repris dans la présente requête d'appel, sur l'ensemble des moyens qu'ils ont présentés devant le tribunal.

Par un mémoire enregistré le 10 mars 2025, la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. A... et autres ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 17 mars 2025, la Selarl Alliance MJ, prise en la personne de Me Pey-Harvey, es qualité de liquidateur judiciaire de la société Imperiales Wheels, représentée par Me Flicoteaux, conclut au rejet de la requête et qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens présentés par les requérants ne sont pas fondés et qu'elle s'en rapporte pour le surplus à ses écritures de première instance.

Par une ordonnance du 18 mars 2025, l'instruction a été close en dernier lieu au 25 mars 2025.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Gstalder pour M. A... et autres ainsi que celles de Me Flicoteaux pour la Selarl Alliance MJ ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 3 avril 2025, présentée pour M. A... et autres ;

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la déclaration de la cessation de paiement le 20 février 2024 de la société Imperiales Wheels détenue à 77,78 % par la société holding EDS Holding dont le seul actionnaire est M. B... et à 22.22 % par la région Centre-Val de Loire, et l'ouverture le 22 février 2024 d'une procédure collective par le tribunal de commerce de Villefranche-Tarare, sa liquidation judiciaire, avec effet immédiat et sans poursuite d'activité, a été prononcée le 20 juin 2024, entraînant la suppression de l'ensemble des postes. M. A..., salarié de l'entreprise et représentant unique des salariés, mandaté par le comité social et économique, et les membres du comité social et économique, ont demandé au tribunal administratif d'Orléans, qui a transmis leur demande au tribunal administratif de Lyon, l'annulation de la décision du 4 juillet 2024 par laquelle le directeur régional de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS) Centre-Val de Loire a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Imperiales Wheels, concernant, d'après cette décision, la suppression de cent-soixante-treize postes, générant cent-soixante-six licenciements et la rupture de sept contrats d'apprentissage. Par un jugement du 3 décembre 2024 dont ils relèvent appel, le tribunal a rejeté leur demande.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, il ressort du dossier de première instance que la préfète de région et le liquidateur judiciaire ont produit des mémoires en défense enregistrés respectivement les 3 et 4 octobre 2024, qui ont été communiqués le 4 octobre aux requérants qui en ont pris connaissance le même jour. Les requérants ont disposé d'un délai suffisant pour y répondre, la clôture de l'instruction ayant été fixée en dernier lieu au 21 octobre 2024 par une ordonnance du 4 octobre 2024. Par suite, et alors au demeurant qu'un délai de trois mois était imparti au tribunal pour statuer sur leur demande, ils ne sont pas fondés à soutenir que le principe du contradictoire, tel que garanti par l'article L. 5 du code de justice administrative, aurait été méconnu.

3. En deuxième lieu, le jugement litigieux a répondu avec précision à chacun des moyens présentés par les requérants. Le moyen tiré de ce que l'article L. 9 du code de justice administrative, imposant la motivation des jugements, aurait été méconnu, doit être écarté.

4. En troisième lieu, le fait, pour le juge de première instance, d'écarter à tort un moyen comme inopérant ne constitue pas une irrégularité de nature à entraîner l'annulation du jugement par le juge d'appel saisi d'un moyen en ce sens. Il appartient seulement à ce dernier, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel qui est résulté de l'introduction de la requête, et après avoir, en répondant à l'argumentation dont il était saisi, relevé cette erreur, de se prononcer sur le bien-fondé du moyen écarté à tort comme inopérant, puis, le cas échéant, sur les autres moyens invoqués en appel. Dans ces conditions, les erreurs de droit reprochées par les requérants au tribunal administratif sont sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.

5. En dernier lieu, le tribunal a vérifié si le plan de sauvegarde de l'emploi était suffisant au regard des moyens de l'entreprise. Ce contrôle a été effectué de façon concrète, au regard de la situation des salariés et de l'entreprise. Par suite, le moyen tiré de ce que les requérants auraient été privés, en méconnaissance des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'un procès équitable et d'un recours effectif ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

Sur la légalité de la décision d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi :

6. Aux termes de l'article L. 1233-58 du code du travail relatif au licenciement économique dans le cadre d'une sauvegarde, d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire : " II- Pour un licenciement d'au moins dix salariés dans une entreprise d'au moins cinquante salariés, (...) le document mentionné à l'article L. 1233-24-4, élaboré par l'employeur, l'administrateur ou le liquidateur, est homologué dans les conditions fixées aux articles L. 1233-57-1 à L. 1233-57-3, aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 1233-57-4 et à l'article L. 1233-57-7. / Par dérogation au 1° de l'article L. 1233-57-3, sans préjudice de la recherche, selon le cas, par l'administrateur, le liquidateur ou l'employeur, en cas de redressement ou de liquidation judiciaire, des moyens du groupe auquel l'employeur appartient pour l'établissement du plan de sauvegarde de l'emploi, l'autorité administrative homologue le plan de sauvegarde de l'emploi après s'être assurée du respect par celui-ci des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 au regard des moyens dont dispose l'entreprise. ". L'article L. 1233-24-4 du même code prévoit : " A défaut d'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité social et économique fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur. ". Enfin, aux termes de l'article L. 1233-57-3 du même code : " En l'absence d'accord collectif (...), l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique, le respect, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1. Elle s'assure que l'employeur a prévu le recours au contrat de sécurisation professionnelle mentionné à l'article L. 1233-65 ou la mise en place du congé de reclassement mentionné à l'article L. 1233-71. ". Selon l'article 1233-57-4 de ce code, la décision prise par l'autorité administrative est motivée.

7. Lorsque l'administration est saisie d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, il lui appartient, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier, dans le cas des entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire, d'une part, que l'administrateur, le liquidateur ou l'employeur a recherché, pour l'établissement du plan de sauvegarde de l'emploi, les moyens dont disposent l'unité économique et sociale et le groupe auquel l'entreprise appartient et, d'autre part, que le plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas insuffisant au regard des seuls moyens dont dispose l'entreprise. Pour l'application de ces dispositions, les moyens de l'entreprise s'entendent des moyens, notamment financiers, dont elle dispose et, les moyens du groupe de ceux, notamment financiers, dont disposent l'ensemble des entreprises placées sous le contrôle d'une même entreprise dominante.

8. En premier lieu, lorsque le juge de l'excès de pouvoir est saisi d'une requête dirigée contre une décision d'homologation d'un document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi d'une entreprise, il lui appartient de rechercher, au vu non de la seule motivation de la décision administrative mais de l'ensemble des pièces du dossier, si l'autorité administrative a effectivement vérifié le respect des conditions mises en cause et si elle a pu à bon droit considérer qu'elles étaient remplies, sans s'arrêter, sur ce dernier point, sur une erreur susceptible d'affecter, dans le détail de la motivation de la décision administrative, une étape intermédiaire de l'analyse faite par l'administration.

9. Ainsi, le fait que la décision, qui comprend les différents éléments qui doivent y figurer pour être regardée comme suffisamment motivée, et notamment la régularité de la procédure d'information et de consultation des instances représentatives du personnel, le caractère suffisant des mesures contenues dans le plan au regard, dans les entreprises en procédure collective, des moyens de l'entreprise ainsi que, à ce titre, ceux relatifs à la recherche, par l'employeur, des postes de reclassement, ne mentionne ni la méthode ou le critère d'analyse par l'administration du caractère suffisant du plan de sauvegarde de l'emploi au regard des moyens de l'entreprise, ni l'étendue des fonds propres de l'entreprise, ni d'analyse du plan de développement des compétences mentionné à l'article L. 6312-1 du code du travail, ne suffit pas à établir que l'administration n'aurait pas procédé au contrôle de l'ensemble des éléments qu'elle doit examiner. Il n'apparait pas, en particulier, que l'administration n'aurait pas apprécié le caractère suffisant des mesures au regard des moyens dont dispose l'entreprise et pris en compte les éléments dont elle avait connaissance sur les efforts de formation et d'adaptation jusque-là mis en œuvre par l'employeur tels que mentionnés à l'article L. 6321-1 du code du travail.

10. En deuxième lieu, et ainsi que l'a indiqué le tribunal, lorsque l'entreprise demandant l'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, l'article L. 641-13 du code de commerce impose au liquidateur judiciaire l'ordre de paiement des créanciers et le 4° de l'article L. 3253-8 du code du travail dispose que l'assurance de garantie des salaires couvre notamment les mesures d'accompagnement du plan de sauvegarde de l'emploi homologué d'une entreprise en liquidation judiciaire. Par suite, la circonstance que l'actif de l'entreprise est pour partie disponible ne peut utilement être invoquée pour soutenir que le plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas suffisant au regard des moyens de cette entreprise. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la DREETS aurait dû contrôler l'étendue des fonds propres de l'entreprise, de plus de deux millions d'euros, pour apprécier la proportionnalité du plan de sauvegarde de l'emploi aux moyens financiers de celle-ci.

11. En troisième lieu, le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit, au titre des mesures d'accompagnement au retour à l'emploi dans le cadre du reclassement externe, des mesures principales et des mesures subsidiaires. Pour les premières, il s'agit d'abord d'aides à la mobilité géographique constituées d'une prime de mobilité de 1 500 euros bruts, d'un remboursement des frais de double foyer dans la limite de 800 euros TTC par mois pendant trois mois et d'une aide à l'entretien des véhicules dans la limite d'un plafond individuel de 200 euros TTC. Il y a ensuite des aides à la formation constituées d'un crédit individuel de formation plafonné à 3 000 euros TTC par salarié, pouvant être doublé pour les salariés de plus de cinquante ans ou fragilisés, c'est-à-dire bénéficiant d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQ)RQTHpour RQTH), prendre en charge les frais de formation (coûts pédagogiques) d'adaptation à un nouveau poste, de frais de formation de reconversion et de frais engagés dans le cadre du financement d'une validation des acquis de l'expérience. Elles comportent enfin une aide à la reprise ou création d'entreprise, en complément des dispositifs étatiques existants, d'un montant plafond de 2 000 euros bruts, qui peut être doublé à 4 000 euros pour les salariés de plus de cinquante ans et les salariés fragilisés ainsi qu'une aide à l'accès au numérique dans la limite d'un plafond individuel de 150 euros TTC. Pour les secondes, financées directement par l'AGS (assurance de garantie des salaires), elles se présentent sous la forme de remboursements des frais annexes (hébergement, repas, transport) à la formation ou validation des acquis de l'expérience dans la limite d'un plafond de 1 000 euros pouvant être porté à 1 500 euros pour les salariés de plus de cinquante ans et les salariés fragilisés ainsi que de frais de déplacement (dans la limite de 1 000 euros) et de frais de déménagement (dans la limite de 1 000 euros) dans le cadre de la mobilité géographique, le montant global pouvant être porté à 2 500 euros pour les salariés de plus de cinquante ans et les salariés fragilisés, et de frais annexes à la préparation d'un projet de création d'entreprise (rédaction d'actes, conseils juridiques, frais de comptabilité, etc...) dans la limite d'un plafond de 1 500 euros par salarié, qui pourra être porté à 2 000 euros pour les salariés de plus de cinquante ans et les salariés fragilisés. Il y est précisé que le principe est la mutualisation et la réaffectation des sommes non utilisées. Mention est également faite dans le plan de sauvegarde de l'emploi, des possibilités de solliciter le bénéfice d'aides relatives au 1 % logement et de l'activation du " fonds exceptionnel d'accompagnement et de reconversion des salariés licenciés pour motif économique de la filière automobile ". Ce dernier dispositif prévoit la prise en charge des coûts pédagogiques et des équipements nécessaires au suivi des formations qualifiantes et de reconversion, dans la limite de 15 000 euros par salarié, des aides à la création ou la reprise d'entreprise, dans la même limite, des aides à la mobilité géographique, dans la limite de 5 000 euros, des aides aux familles, avec un plafond de 2 000 euros par foyer ou 3 000 euros en cas de parent isolé, une prime exceptionnelle de 5 000 euros en cas de retour durable à l'emploi, une indemnité différentielle de revenu, une aide exceptionnelle au maintien du niveau de rémunération pendant six mois et une aide au rachat de trimestres de retraite, ainsi qu'un accompagnement par un opérateur unique dans le cadre de la cellule d'appui à la sécurisation professionnelle. L'ensemble de ces aides est mobilisable en complément du dispositif du contrat de sécurisation professionnelle.

12. Si les requérants indiquent que le plan de sauvegarde de l'entreprise ne serait pas proportionné aux moyens de l'entreprise, il ressort des pièces du dossier que lors de la liquidation judiciaire, l'actif de la société a été évalué, selon la déclaration de cessation de paiements, à 27,3 millions d'euros dont 1,7 millions d'euros disponibles et, selon l'inventaire du commissaire de justice, à 21 millions d'euros en valeur d'exploitation tandis que son passif a été évalué, selon la déclaration de cessation de paiement, à 50,3 millions d'euros, dont 7,1 millions d'euros de passif échu et, selon l'état du mandataire judiciaire, à 68 millions d'euros dont 21 millions échus. Le liquidateur judiciaire a sollicité auprès de EDS Holding et de la région Centre Val de Loire, actionnaires de la société, l'abondement du plan. Alors que l'entreprise disposait de moyens limités, les mesures prévues par le plan représentent, hors garantie directe AGS et fonds automobile, un montant de 300 000 euros, soit un budget individuel moyen de l'ordre de 1 850 euros, étant précisé que le plan prévoit que les sommes non utilisées pourront être mutualisées et réaffectées à d'autres mesures du plan de sauvegarde de l'emploi moins dotées ou consommées et réaffectés à certains salariés qui auraient un besoin supérieur aux plafonds prévus. A supposer même qu'il faille examiner le caractère suffisant du plan de sauvegarde de l'emploi au regard des fonds propres dont disposait la société lors de la liquidation, de l'ordre de 2 000 000 euros, la somme allouée n'apparaît pas, en l'espèce, insuffisante.

13. Par ailleurs, les requérants soutiennent, comme ils l'avaient fait devant le tribunal, que ces mesures sont insuffisantes et ineffectives au regard du profil des salariés concernés, composés d'hommes pour 94 %, ouvriers-employés-techniciens pour 81 %, de plus de cinquante ans pour 52 %, et du bassin d'emploi, l'Indre étant caractérisé par un retour partiel à l'emploi après dix-sept mois de chômage pour la catégorie concernée. Toutefois, et ainsi que l'a indiqué le tribunal, ces seuls éléments ne suffisent pas à remettre en cause la pertinence des mesures individuelles précitées, qui intègrent la situation particulière des personnes âgées de plus de cinquante ans pour lesquelles des mesures complémentaires ont été prises, à savoir une majoration de 100 % de l'aide à la formation et de celle à la création ou à la reprise d'entreprise, ni la pertinence de la durée de validité de douze mois, plutôt que vingt-quatre, de ces mesures, lesquelles permettent un accompagnement spécifique pendant une durée suffisamment significative, ces mesures devant permettre aux salariés concernés de retrouver un emploi plus rapidement et dans de meilleures conditions que les personnes ne bénéficiant pas d'un tel accompagnement.

14. Ainsi, au regard des moyens de l'entreprise rappelés ci-dessus, les mesures ainsi mises en œuvre pouvaient être légalement regardées par l'administration comme étant, prises dans leur ensemble, suffisantes et propres à satisfaire aux objectifs mentionnés par les articles précités du code du travail et ce alors même que la société avait bénéficié d'importants fonds publics pendant la période antérieure à sa liquidation.

15. En quatrième lieu, et compte tenu de ce qui vient d'être indiqué, la décision d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi, qui prévoit des mesures concrètes d'accompagnement des salariés dont rien ne permet de dire qu'elles ne pourraient être mobilisées pour certaines catégories de salariés, ne méconnaît ni, en tout état de cause, l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni l'article 8 de cette convention.

16. En dernier lieu, le plan de sauvegarde de l'emploi n'induit pas de discrimination prohibée par les stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles cités au paragraphe précédent.

17. Il résulte de ce qui précède que M. A... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté leur demande. Leur requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.

18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge des requérants une somme à verser à la Selarl Alliance MJ en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... et autres est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la Selarl Alliance MJ sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., en qualité de représentant unique des requérants, à la Selarl Alliance MJ et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.

Copie en sera adressée au directeur régional de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités Centre-Val de Loire

Délibéré après l'audience du 3 avril 2025 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 avril 2025.

La rapporteure,

A. Duguit-LarcherLe président,

V.M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 25LY00254

kc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 25LY00254
Date de la décision : 17/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : GSTALDER

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-17;25ly00254 ?
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