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06/06/2024 | FRANCE | N°22MA02733

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 3ème chambre, 06 juin 2024, 22MA02733


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Par une première demande, Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 56 664,36 euros procédant d'une mise en demeure de payer émise le 9 octobre 2015 par le comptable public de Cannes.



Par une ordonnance n° 1602229 du 2 octobre 2018, le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.



Par arrêt n°19MA00111 du 16 juin 2020, la cour administra

tive d'appel de Marseille a annulé l'ordonnance n° 1602229 du président du tribunal administratif de Nice et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première demande, Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 56 664,36 euros procédant d'une mise en demeure de payer émise le 9 octobre 2015 par le comptable public de Cannes.

Par une ordonnance n° 1602229 du 2 octobre 2018, le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Par arrêt n°19MA00111 du 16 juin 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé l'ordonnance n° 1602229 du président du tribunal administratif de Nice et a renvoyé Mme B... devant le tribunal administratif de Nice pour qu'il soit statué sur sa demande.

Par une seconde demande, Mme B... a demandé au tribunal de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 53 822,29 euros procédant d'une mise en demeure de payer émise le 11 avril 2019 par le comptable public de Cannes, de l'obligation de payer la somme de 52 431,94 euros procédant de deux saisies administratives à tiers détenteur émises le 30 mars 2021 par le même comptable, et de l'obligation de payer la somme de 52 228,91 euros procédant de trois saisies administratives à tiers détenteur émises le 20 avril 2021 et le 29 juin 2021 par le même comptable.

Par un jugement n° 2002418, 2104569 du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 novembre 2022, Mme B..., représentée par Me Gerval, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 16 juin 2022 ;

2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer procédant des mises en demeure de payer du 9 octobre 2015 et du 11 avril 2019, et des saisies administratives à tiers détenteur du 30 mars 2021, du 20 avril 2021 et du 29 juin 2021 ;

3°) de prononcer la mainlevée et l'annulation des compensations du 25 janvier 2005, du 25 juin 2009 et du 25 septembre 2009 et de leurs effets ;

4°) de prononcer la mainlevée de tous les actes de poursuite pris par l'administration à son encontre ;

5°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à sa charge la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne la prescription de l'action en recouvrement et le caractère erroné du montant de la dette ;

- le tribunal administratif de Nice a omis de statuer sur le moyen relatif à la doctrine administrative référencée BOI-REC-EVTS-30-20 n° 210 ;

- le tribunal administratif de Nice n'a pas communiqué à l'administration les notes en délibéré du 23 mai 2022 ;

- le tribunal administratif de Nice ne s'est pas déclaré incompétent dans son dispositif sur le moyen tiré de l'irrégularité en la forme d'un acte de poursuite ;

- l'action en recouvrement était prescrite en l'absence d'acte interruptif entre le 5 avril 2001 et le 20 juin 2006 ;

- l'administration méconnaît la doctrine administrative référencée BOI-REC-EVTS-30-20 n° 210 ;

- l'action en recouvrement était prescrite en l'absence d'acte interruptif depuis le 25 janvier 2005 ;

- l'administration méconnaît la doctrine administrative référencée BOI-REC-EVTS-30-20 n° 20 ;

- le montant de la dette est erroné ;

- l'administration méconnaît les doctrines administratives référencées BOI-REC-PREA-10-30 n° 90 et 100, BOI-RECT-EVTS-30-20, n° 280, et 12 C 2214 n° 60 ;

- la procédure menée à son encontre est injuste.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête et demande à la cour de condamner Mme B... aux entiers dépens.

Il fait valoir que :

- les conclusions tendant à la mainlevée et à l'annulation des compensations sont irrecevables ;

- les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 9 février 2023, Mme B... conclut aux mêmes fins que sa requête et demande en outre à la Cour :

1°) à titre principal, de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt de la Cour de cassation, dont le bureau d'aide juridictionnelle a été saisi à l'encontre d'un arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 17 novembre 2022 ou, à titre subsidiaire, de se déclarer expressément incompétente pour se prononcer sur les moyens tirés de l'irrégularité en la forme des actes de poursuite ;

2°) à titre principal, de surseoir à statuer dans l'attente du jugement du juge de l'exécution près le tribunal judiciaire de Grasse, saisi par une assignation du 26 décembre 2022, ou, à titre subsidiaire, de se déclarer expressément incompétente pour prononcer la mainlevée et l'annulation des compensations opérées par l'administration en 2005 et 2009 ;

3°) de supprimer les passages calomnieux contenus dans le mémoire du ministre.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions tendant à la mainlevée et à l'annulation des compensations et de leurs effets, et à la mainlevée de tous les actes de poursuite pris par l'administration à l'encontre de Mme B... ont le caractère de conclusions nouvelles en appel et sont par suite irrecevables.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 8 mai 2024, Mme B... a répondu au moyen d'ordre public, conclut aux mêmes fins que sa requête et demande en outre à la Cour de renvoyer l'affaire au Tribunal des conflits, et de surseoir à statuer dans l'attente de sa décision.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la consommation ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mastrantuono,

- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,

- et les observations de Me Gerval, représentant Mme B....

Une note en délibéré présentée pour M. B... a été enregistrée le 23 mai 2024.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle, Mme B... a notamment été assujettie à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 1990. En vue du recouvrement de cette imposition, le comptable public en charge du service des impôts des particuliers de Cannes a émis à l'encontre de Mme B... des mises en demeure de payer le 9 octobre 2015, puis le 11 avril 2019, puis lui a décerné des saisies administratives à tiers détenteur le 30 mars 2021, le 20 avril 2021 et le 29 juin 2021. Mme B... fait appel du jugement du 16 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant de ces mises en demeure et de ces saisies administratives à tiers détenteur.

Sur la compétence de la Cour :

2. Le jugement attaqué, qui a été rendu en premier ressort dans une matière ne relevant pas des contentieux mentionnés à l'article R. 811-1 du code de justice administrative, est susceptible d'appel devant la cour administrative d'appel qui est, par suite, compétente pour en connaître, sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'elle serait susceptible d'écarter comme inopérant un moyen relatif à la régularité en la forme d'un acte de poursuite relevant de la compétence du juge de l'exécution. Dès lors, les conclusions de Mme B... tendant à ce que la Cour décline sa compétence ne sauraient être accueillies.

Sur la recevabilité des conclusions tendant à la mainlevée et à l'annulation des compensations et de leurs effets, et à la mainlevée de tous les actes de poursuite pris par l'administration à l'encontre de Mme B... :

3. Les conclusions de la requête tendant à ce que la Cour prononce la mainlevée et l'annulation des compensations et de leurs effets, ainsi que la mainlevée de tous les actes de poursuite pris par l'administration à l'encontre de Mme B... ont le caractère de conclusions nouvelles en appel et sont, par suite, irrecevables.

Sur la régularité du jugement :

4. En premier lieu, les demandes présentées par Mme B... devant le tribunal administratif de Nice tendaient principalement à la décharge de l'obligation de payer procédant d'actes de recouvrement de l'impôt. Le litige relevait ainsi, en vertu de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, de la compétence du tribunal administratif, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le tribunal a écarté comme inopérant un moyen relatif à la régularité en la forme d'un acte de poursuite relevant de la compétence du juge de l'exécution. Dès lors, contrairement à ce qui est soutenu, le tribunal administratif n'était pas tenu de se déclarer incompétent sur le moyen tiré de l'irrégularité en la forme d'un acte de poursuite.

5. En deuxième lieu, le tribunal a expressément répondu aux moyens soulevés par Mme B..., tirés de ce que la prescription de l'action en recouvrement serait acquise et le montant de la dette serait erroné. Ainsi, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments présentés par la requérante, a répondu sur ces points de manière suffisante aux moyens invoqués.

6. En troisième lieu, le tribunal administratif n'était, en tout état de cause, pas tenu de répondre à l'argumentation de Mme B... au soutien de son interprétation de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, faisant état de la documentation administrative référencée BOI-REC-EVTS-30-20 n° 210 relative à la reconnaissance de dette, dès lors que la requérante n'invoquait pas le bénéfice de la garantie prévue par l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

7. En quatrième lieu, les notes en délibéré que Mme B... a produites, enregistrées au greffe du tribunal administratif de Nice le 23 mai 2022, après la séance publique, mais avant la lecture de la décision, ont été visées dans le jugement attaqué. Si ces notes comportaient en annexe des " oppositions à contrainte et à poursuite contre les effets de compensations légales " adressées à l'administration par Mme B... le 22 mai 2022, elles ne contenaient l'exposé d'aucune circonstance de droit rendant nécessaire la réouverture de l'instruction, ni d'aucune circonstance de fait dont Mme B... n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le tribunal n'aurait pu ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts. Par suite, en ne décidant pas, à la réception de ces notes en délibéré, de rouvrir l'instruction, le tribunal administratif n'a pas méconnu l'étendue de ses obligations.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la prescription de l'action en recouvrement :

8. Aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les comptables publics des administrations fiscales qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable (...) ". Aux termes de l'article L. 281 du même livre, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts (...) dont la perception incombe aux comptables publics (...) doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / Les contestations ne peuvent porter que : / 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199 ".

9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 331-2 du code de la consommation, alors en vigueur, relatif à la commission de surendettement des particuliers : " La commission a pour mission de traiter, dans les conditions prévues par le présent chapitre, la situation de surendettement des personnes physiques, caractérisée par l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir (...) ". Aux termes de l'article L. 331-3 du même code : " I.-La procédure est engagée devant la commission à la demande du débiteur, qui lui déclare les éléments actifs et passifs de son patrimoine. (...) / II.-La commission dresse l'état d'endettement du débiteur après avoir, le cas échéant, fait publier un appel aux créanciers (...) ". Aux termes de l'article L. 331-6 de ce code : " La commission a pour mission de concilier les parties en vue de l'élaboration d'un plan conventionnel de redressement approuvé par le débiteur et ses principaux créanciers (...) ". Aux termes de l'article L. 331-7 du même code : " En cas d'échec de sa mission de conciliation, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, recommander tout ou partie des mesures suivantes (...). / La demande du débiteur formée en application du premier alinéa interrompt la prescription et les délais pour agir ".

10. D'une part, il résulte de l'instruction et il est constant que la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle Mme B... a été assujettie au titre de l'année 1990 a été mise en recouvrement le 31 mai 1994, et que le délai de prescription de l'action en recouvrement, qui a été suspendu par la réclamation de Mme B... présentée le 5 septembre 1996, a recommencé à courir à compter du jugement n°9701163 rendu par le tribunal administratif de Nice le 5 avril 2001. Il ressort des termes de la lettre de la commission de surendettement des particuliers des Alpes-Maritimes adressée au Trésor public de Cannes le 29 juillet 2002, visant notamment l'impôt sur le revenu de l'année 1990, que Mme B... a sollicité le même jour l'ouverture d'une phase de recommandation, l'avis circonstancié de la commission sur les mesures recommandées ayant été notifié à l'administration fiscale le 14 octobre 2002. Par conséquent, quand bien même Mme B... aurait seulement entendu échelonner sa dette vis-à-vis d'une compagnie d'assurances, la prescription de recouvrement a été interrompue le 29 juillet 2002 par sa demande tendant au bénéfice des mesures recommandées présentée sur le fondement de l'article L. 331-7 du code de la consommation. Par suite, contrairement à ce qui est soutenu, l'action en recouvrement de la cotisation litigieuse n'était en tout état de cause pas prescrite à la date du 20 juin 2006, à laquelle une saisie vente mobilière a été notifiée à Mme B....

11. D'autre part, il résulte de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales que le juge de l'impôt n'est pas compétent pour connaître du moyen tiré de ce que le commandement de payer du 19 juin 2001 n'a pu interrompre le cours de la prescription au motif qu'il est intervenu irrégulièrement. Par suite, et alors qu'il résulte en tout état de cause de ce qui a été dit au point précédent que la prescription a été interrompue le 29 juillet 2002 par la demande tendant au bénéfice des mesures recommandées présentée par Mme B..., cette dernière ne peut utilement se prévaloir de ce moyen dans la présente instance.

12. En deuxième lieu, Mme B... invoque, à l'appui de son moyen tiré de la prescription de l'action en recouvrement, la caducité des actes de poursuite émis entre le 11 août 2006 et le 23 décembre 2011 qui résulterait des compensations correspondant à l'affectation par l'administration au paiement de l'impôt sur le revenu de l'année 1990 d'un dégrèvement de taxe foncière de l'année 2004 pour un montant de 2 310 euros. Toutefois, alors au demeurant qu'en cas de mise en œuvre de la compensation de recouvrement, les effets d'un acte de poursuite sont frappés de caducité seulement à hauteur du montant ayant fait l'objet de la compensation, la caducité d'un acte de poursuite ne prive pas l'acte en question de son effet interruptif de la prescription de l'action en recouvrement de la somme qu'il réclame. Par suite, contrairement à ce qui est soutenu, l'action en recouvrement de la cotisation litigieuse n'était en tout état de cause pas prescrite à la date à laquelle la mise en demeure de payer du 23 décembre 2011 a été notifiée à Mme B....

13. En troisième lieu, il résulte de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales que le juge de l'impôt n'est pas compétent pour connaître du moyen tiré de l'absence de notification au contribuable de l'avis prévu par les dispositions précitées de l'article R. 257 B-1 du même livre. Par suite, Mme B... ne peut utilement se prévaloir de ce moyen dans la présente instance.

14. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / (...) Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt (...) ".

15. Mme B... n'est fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ni de la doctrine administrative référencée BOI-REC-EVTS-30-20 n° 210, relative à la reconnaissance de dette, ni de la doctrine administrative référencée BOI-REC-EVTS-30-20 n° 20, relative à la saisie effectuée entre les mains d'un tiers non dénoncée au débiteur, dès lors qu'elles ne comportent pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt.

En ce qui concerne le montant de la dette :

16. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment de la décision du 9 décembre 2015 rejetant l'opposition à contrainte relative à la mise en demeure du 9 octobre 2015 ainsi que des décomptes des paiements que le montant de la dette figurant sur les actes de recouvrement en cause correspond au montant de l'imposition initiale et de la majoration de 10 %, augmenté du montant des frais de poursuite et diminué de divers versements. Ces versements comprennent exclusivement une somme de 530,92 euros, correspondant à une saisie pratiquée sur le compte bancaire de Mme B... le 20 octobre 2008, ainsi que des sommes correspondant à des prélèvements sur les retraites de Mme B..., versés par la CAVOM en exécution d'un avis à tiers détenteur du 10 mars 2009, comprises entre 193,88 et 203,03 euros. Mme B... ne soutient pas qu'elle aurait effectué des paiements supérieurs à ceux pris en compte par l'administration, ni que l'administration aurait omis de prendre en compte une compensation effectuée par elle. Dans ces conditions, la discordance entre les montants des versements mentionnés sur deux bordereaux de situation du 25 mai 2009 et du 6 septembre 2021 et la discordance entre les décomptes des paiements sont sans incidence sur le caractère exact du montant de la dette. Il en va de même de la circonstance que l'administration aurait irrégulièrement opéré des compensations de recouvrement, dès lors qu'aucun dégrèvement n'a finalement été imputé sur la dette et qu'il n'est pas soutenu qu'il aurait dû l'être. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le montant de la dette serait erroné.

17. En deuxième lieu, pour le motif exposé au point 13, la requérante ne peut se prévaloir de la doctrine administrative publiée sous les références BOI-REC-PREA-10-30 n° 90 et 100, BOI-RECT-EVTS-30-20, n° 280, et 12 C 2214 n° 60, prévoyant la notification d'un avis de compensation par lettre recommandée.

En ce qui concerne les autres moyens :

18. En premier lieu, Mme B... ne saurait utilement invoquer, à l'appui de ses conclusions à fin de décharge de son obligation de payer, ni l'existence de mentions erronées des voies et délais de recours figurant sur la décision de rejet de son opposition à poursuites du 9 décembre 2015, ni la circonstance que la décision de rejet de son opposition à poursuites du 27 juin 2022 comporterait des erreurs. Ces moyens, inopérants, doivent être écartés.

19. En deuxième lieu, en faisant valoir que la procédure menée à son encontre serait " injuste " au motif que l'administration aurait commis un détournement de procédure dans le cadre de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont elle a fait l'objet, Mme B... soulève un moyen relatif au contentieux de l'assiette. Ainsi, ce moyen est en tout état de cause irrecevable à l'appui de la présente requête, qui relève du contentieux du recouvrement.

20. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer dans l'attente de décisions du juge judiciaire, ni de renvoyer l'affaire au Tribunal des conflits et de surseoir à statuer dans l'attente de sa décision, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes.

Sur la suppression de passages injurieux, outrageants ou diffamatoires :

21. Si les dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, reproduites à l'article L. 741-2 du code de justice administrative, permettent aux juridictions, dans les causes dont elles sont saisies, de prononcer la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires, aucun passage figurant dans le mémoire du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ne présente ce caractère.

22. En revanche, les passages de la requête introductive d'instance de Mme B..., enregistrée le 7 novembre 2022, page 2, 7ème paragraphe, commençant par " L'administration ne craint " et se terminant par " sauver sa procédure ! ", page 3, 2ème paragraphe, commençant par " Si l'administration fiscale ose " et se terminant par " les conséquences de droit ... ", page 20, 6ème paragraphe, commençant par " Comme indiqué " et se terminant par " la présente instance ", ainsi que page 26, 4ème paragraphe, commençant par " Voilà ce qu'il advient " et se terminant par " à son égard ! " excèdent le droit à la libre discussion et présentent un caractère outrageant et diffamatoire. Il en va de même des passages du mémoire en réplique de Mme B..., enregistré le 9 février 2023, page 2, 4ème paragraphe, commençant par " Une telle allégation " et se terminant par " d'être innocente ", 5ème paragraphe, commençant par " l'administration " et se terminant par " l'article 226-10 du code pénal ", 9ème paragraphe, commençant par " si elle accorde " et se terminant par " de l'administration ", page 3, 4ème paragraphe, commençant par " aux allégations " et se terminant par " de l'administration fiscale ... ", 5ème paragraphe, commençant par " Hormis le " et se terminant par " écritures d'appel ", page 12, 6ème paragraphe, commençant par " qui en arrive à " et se terminant par " ou à ". Il en va de même du passage du mémoire en réplique de Mme B..., enregistré le 8 mai 2024, page 5, 2ème paragraphe, commençant par " A cause de " et se terminant par " de l'administration fiscale ". Dès lors, il y a lieu d'en prononcer la suppression en application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative.

Sur les frais liés au litige :

23. En premier lieu, la présente affaire n'a donné lieu à aucun dépens. Par suite, les conclusions présentées par Mme B... et celles présentées par le ministre sur le fondement des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

24. En second lieu, les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à Mme B... de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les passages, mentionnés au point 22 des motifs de la présente décision, de la requête du 7 novembre 2022, du mémoire du 9 février 2023 et du mémoire du 8 mai 2024 de Mme B... sont supprimés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à Me Gerval et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2024, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juin 2024.

2

N° 22MA02733


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA02733
Date de la décision : 06/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-05-01 Contributions et taxes. - Généralités. - Recouvrement. - Action en recouvrement.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : GERVAL CHARLES-ELOI

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-06;22ma02733 ?
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