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11/05/2021 | FRANCE | N°20MA03950

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 11 mai 2021, 20MA03950


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme I... B... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 26 mai 2020 par lequel le préfet du Var lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 2001797 du 21 septembre 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2020, Mme B... épouse D..., représentée pa

r Me H..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 21 septembre 2020 ;

2°) d'annuler les ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme I... B... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 26 mai 2020 par lequel le préfet du Var lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 2001797 du 21 septembre 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2020, Mme B... épouse D..., représentée par Me H..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 21 septembre 2020 ;

2°) d'annuler les décisions précitées résultant de l'arrêté préfectoral du 26 mai 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont considéré à tort que l'arrêté contesté était suffisamment motivé alors qu'une partie du texte de cet acte est illisible en raison des " post-it " qui y sont apposés et qui ont été photocopiés sur l'exemplaire qui lui a été transmis par les services préfectoraux ;

- contrairement à ce qu'ont retenu le préfet et les premiers juges, sa date d'entrée sur le territoire français est bien établie à compter du 31 décembre 2015 et elle a entamé une activité professionnelle dès le mois de juillet 2016 ;

- elle remplit toutes les conditions fixées par l'article 2.2. de la circulaire du 28 novembre 2012, que le préfet a entendu appliquer, et celles de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile tenant à l'admission exceptionnelle au séjour ; à cet égard, les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation en considérant qu'elle n'avait pas travaillé pendant les périodes où elle a exercé sous l'identité de sa cousine ;

- contrairement à ce qu'ont estimé le préfet et les premiers juges, elle justifie de liens personnels et familiaux ainsi que d'une insertion dans la société française lui permettant la délivrance d'un titre de séjour ;

- le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français violent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit d'observations en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné, par décision du 19 mars 2021, Mme Mylène E..., présidente, pour assurer les fonctions de présidente par intérim de la 3ème chambre à compter du 20 mars 2021, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les observations de Me H... représentant Mme B... épouse D....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... épouse D..., de nationalité ivoirienne, née le 26 juillet 1978, a fait l'objet d'un arrêté en date du 26 mai 2020 par lequel le préfet du Var a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. L'intéressée relève appel du jugement du 21 septembre 2020 du tribunal administratif de Toulon ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) constituent une mesure de police... ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". Le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose en outre que : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) ".

3. Il ressort des mentions mêmes de l'arrêté en litige que ce dernier vise l'ensemble des dispositions applicables, notamment l'article L. 313-14 et le 3° du I de l'article L. 511 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et mentionne de façon suffisamment circonstanciée les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, et en particulier les motifs qui ont conduit le préfet à refuser la délivrance du titre de séjour sollicité et à considérer que cette décision n'était pas de nature à méconnaître les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Pour contester la motivation de cet arrêté, la requérante soutient, comme en première instance, que l'exemplaire qui lui a été communiqué comporte deux considérants qui ne sont " guère intelligibles " en raison de la présence de deux " post-it " qui y ont été apposés et photocopiés en même temps que l'arrêté. Cependant, ce simple constat n'est pas constitutif d'une irrégularité formelle, l'arrêté préfectoral comportant par ailleurs une motivation très détaillée et émise dès son édiction. Il appartenait en revanche à l'intéressée de signaler aux services préfectoraux la présence de ces éléments gênant la lecture d'une partie du document et d'en solliciter un exemplaire exempt de " post-it " lui en permettant une lecture complète.

5. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté préfectoral ne peut qu'être écarté.

6. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient Mme B..., et quand bien même le préfet du Var s'est lui-même référé à la circulaire du 28 novembre 2012, elle ne peut utilement en invoquer les énonciations, dès lors, d'une part, que celle-ci ne revêt pas un caractère réglementaire et, d'autre part, que les critères de régularisation y figurant ne présentent pas le caractère de lignes directrices susceptibles d'être invoquées mais constituent de simples orientations pour l'exercice, par le préfet, de son pouvoir de régularisation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par la décision de refus de séjour attaquée des énonciations de cette circulaire ne peut qu'être écarté.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ".

8. Si la requérante affirme, comme en première instance, être entrée en France le 31 décembre 2015, elle ne le justifie pas en se bornant à faire valoir qu'elle a perdu son passeport en se prévalant d'une main-courante effectuée auprès des services de police le 17 février 2019, plus de trois ans après la survenance des faits, et à produire un billet de train non nominatif daté du " 31 décembre ", sans précision de l'année, et des cartes d'embarquement pour des vols vers Dubaï et Milan. Par ailleurs, par les pièces versées tant en première instance qu'en appel, elle n'établit pas davantage avoir travaillé en France à compter du mois de juillet 2016 alors que le contrat en qualité d'agent de service et ses avenants ainsi que les fiches de paie produits sont tous établis au nom de Mme A... J... F.... Si la requérante produit une " attestation de concordance " en date du 15 avril 2019, par laquelle l'employeur reconnaît que Mme F... et Mme B... sont les mêmes personnes, cette seule attestation n'est pas de nature à établir que l'intéressée aurait effectivement exercé une activité professionnelle depuis juillet 2016, cette dernière ne donnant, par ailleurs, aucune explication sur le motif de son recours à une fausse identité. En outre, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, à supposer même que la requérante ait effectivement exercé une activité de femme de ménage depuis le mois de juillet 2016, sous une fausse identité et sans en déclarer les revenus, cette activité serait exercée depuis moins de quatre ans à la date de la décision attaquée, essentiellement à temps partiel et pour des volumes horaires très restreints la première année, circonstances qui ne constituent pas, par elles-mêmes, des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels de nature à justifier son admission au séjour. Enfin, si l'appelante se prévaut également de sa situation personnelle en France, se caractérisant par la relation qu'elle entretient avec un ressortissant français depuis une date incertaine, elle ne peut utilement se prévaloir de son mariage avec ce dernier le 22 août 2020 et de son état de grossesse, lesquels sont postérieurs à la date de cette décision. Elle n'établit pas davantage être isolée dans son pays d'origine alors que son fils et l'ensemble de ses frères et soeurs résident en Côte d'Ivoire, où elle a vécu jusqu'à son entrée en France, alors qu'elle était âgée, selon ses dires, de trente-sept ans. Les circonstances ainsi invoquées par la requérante ne suffisent donc pas à caractériser, au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels permettant une admission exceptionnelle au séjour de Mme B... tant au titre d'une activité salariée qu'au titre de la vie privée et familiale.

9. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8 ci-dessus, les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ne méconnaissent pas les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être également rejetées ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'allocation de frais liés au litige.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme I... B... épouse D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 22 avril 2021, où siégeaient :

- Mme E..., présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme C..., première conseillère,

- Mme G..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 mai 2021.

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N° 20MA03950

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA03950
Date de la décision : 11/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme BERNABEU
Rapporteur ?: Mme Mylène BERNABEU
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : GARA-ROMEO

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-05-11;20ma03950 ?
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