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09/07/2024 | FRANCE | N°23BX01717

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 5ème chambre, 09 juillet 2024, 23BX01717


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Bordeaux ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. D... C... relative aux travaux de surélévation d'un immeuble situé 28 rue Baste, ainsi que la décision du 23 novembre 2017 par laquelle le maire a rejeté le recours gracieux formé contre cette décision.



Par un jugement n° 1800262 du 28 février 2019, le tribuna

l administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.



Procédure initiale devant la cour :

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Bordeaux ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. D... C... relative aux travaux de surélévation d'un immeuble situé 28 rue Baste, ainsi que la décision du 23 novembre 2017 par laquelle le maire a rejeté le recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1800262 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure initiale devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 avril 2019 et 12 mars 2020, M. A..., représenté par Me Achou-Lepage, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 28 février 2019 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Bordeaux ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. C..., ainsi que la décision du 23 novembre 2017 par laquelle le maire a rejeté le recours gracieux formé contre cette décision ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bordeaux une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité en ce que les premiers juges n'ont pas suffisamment expliqué les raisons pour lesquelles le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 2.4.1.2.1 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme devait être écarté ;

- en l'absence de précision sur le mode opératoire, le contenu du dossier de déclaration préalable n'a pas permis au service instructeur d'apprécier la mise en œuvre des travaux et leur impact sur la construction projetée ;

- le projet méconnait les dispositions de l'article 2.4.1.2 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme relatif à l'aspect extérieur des constructions projetées ;

- le projet méconnait les dispositions de l'article 2.4.1.2.2 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme relatif aux toitures.

Par deux mémoires enregistrés les 12 juin 2019 et 16 juin 2020, la commune de Bordeaux, représentée par Me Bérard, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 8 octobre 2019, M. C..., représenté par Me Ferrer, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A... d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens développés par M. A... ne sont pas fondés.

Par un arrêt n° 19BX01623 du 17 juin 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté la requête de M. A....

Par une décision n° 455734 du 26 juin 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par M. A..., a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Procédure devant la cour après renvoi du Conseil d'Etat :

Par un mémoire enregistré le 5 décembre 2023 et un mémoire en production de pièces enregistré le 12 avril 2024, M. C..., représenté par Me Ferrer, conclut aux mêmes fins que précédemment.

Il soutient que le projet modifie la toiture mais la restitue et la rétablit dans tous ses éléments caractéristiques ; le projet est donc respectueux de l'architecture de l'immeuble et les modifications contribuent même à mettre l'immeuble en valeur conformément au but poursuivi par l'article 2.4.1.2.2 du règlement du PLU.

Par un mémoire enregistré le 26 mars 2024, la société à responsabilité limitée Fort Salier et la Mutuelle des architectes français, représentées par Me Gauci, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. A... le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- en qualité de maître d'œuvre du projet et d'assureur, elles ont intérêt à intervenir dans l'instance à l'appui de la défense ;

- aucune modification de la forme de la toiture, de sa pente et des matériaux de couverture n'est prévue par le projet ; la création de la terrasse doit être distinguée d'une modification de la toiture ; les prescriptions du règlement du PLU relatives aux modifications de toitures ne sont donc pas applicables ; les travaux envisagés respectent ces dispositions ; à supposer ces dispositions applicables, les travaux projetés rétablissent les formes, pentes et matériaux conformément à l'architecture de la construction.

Par un mémoire enregistré le 3 avril 2024, la commune de Bordeaux, représentée par Me Bérard, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable faute pour M. A... de justifier d'un intérêt à agir et du respect de l'article R. 600-4 du code de l'urbanisme ;

- subsidiairement, le projet qui ne fait que prolonger le versant de toiture côté rue et crée une terrasse, respecte l'article 2.4.1.2.2 du règlement du PLU puisqu'il conserve les matériaux de couverture et ne comporte aucune modification, même limitées, des pentes et de la forme de la toiture ;

- très subsidiairement, si la cour estimait que ces dispositions du PLU sont méconnues, il serait sursis à statuer dans l'attente d'une régularisation en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Par deux mémoires enregistrés les 10 avril 2024 et 2 mai 2024, M. A..., représenté par Me Achou-Lepage, conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 28 février 2019, à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de Bordeaux ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. C..., ainsi que de la décision du 23 novembre 2017 par laquelle le maire a rejeté le recours gracieux formé contre cette décision et à ce que soit mis à la charge de la commune de Bordeaux et de M. C... le versement d'une somme globale de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il justifie d'un intérêt à agir ; il est voisin immédiat et le projet lui imposera des nuisances visuelles et sonores et entrainera une vue plongeante de la terrasse sur son jardin ;

- les travaux projetés consistent à surélever la pente avant du toit et à encaisser sur la pente arrière une terrasse en bois aux lieux et place de la toiture existante ; ils ont nécessairement pour objet de modifier la forme de la toiture ;

- la déclaration modificative déposée le 8 avril 2024 n'a pas donné lieu à décision et ne régularise pas, en tout état de cause, le projet initial au regard de l'article 2.4.1.2.2 du règlement du PLU.

Par une ordonnance du 10 avril 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 mai 2024 à 12h00.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- décret n° 2018-617 du 17 juillet 2018 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,

- les conclusions de M. Sébastien Ellie, rapporteur public,

- et les observations de Me Achou-Lepage, représentant M. A..., Me Bérard, représentant la commune de Bordeaux, Me Ferrer, représentant M. C... et Me Gauci, représentant la société Fort Salier et la Mutuelle des architectes français.

1. Le 12 juillet 2017, M. C... a déposé une déclaration préalable de travaux en vue de la surélévation et du réaménagement en duplex, entrainant une augmentation de la surface de plancher de 20,55 m², avec création d'une terrasse tropézienne, de l'appartement du dernier étage de l'immeuble situé au 28 rue Baste à Bordeaux dans le secteur dit de la " ville de pierre ". M. A..., propriétaire voisin, a saisi le tribunal administratif de Bordeau d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de Bordeaux ne s'est pas opposé à cette déclaration et de la décision du 23 novembre 2017 rejetant son recours gracieux dirigé contre cette décision. Il fait appel du jugement du 28 février 2019 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur l'intervention de la société Fort Salier et de la Mutuelle des architectes français :

2. La société Fort Salier, maître d'œuvre du projet de M. C... et son assureur la Mutuelle des architectes français, justifient, eu égard à la nature et à l'objet des questions soulevées par le litige, d'un intérêt suffisant pour intervenir dans la présente instance au soutien de la défense. Leur intervention doit, par suite, être admise.

Sur la recevabilité de la demande de M. A... :

3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

4. Il résulte de l'article L .600-1-2 du code de l'urbanisme qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

5. M. A... produit en appel un avis de taxe foncière établissant sa qualité de propriétaire de l'immeuble situé au 26 rue Baste à Bordeaux, contigu à l'immeuble objet de la déclaration préalable de travaux. Il ressort des pièces du dossier que les travaux projetés, qui ont pour effet de surélever l'arrière de l'immeuble de M. C... et de créer une terrasse avec des baies vitrées, entrainera une perte d'ensoleillement pour la propriété de M. A..., ainsi que, malgré des pare-vues latéraux, une vue de la terrasse sur son jardin. La création d'une terrasse à l'arrière de cet immeuble est également susceptible de créer des nuisances sonores pour les occupants de l'immeuble de M. A.... Dans ces conditions, M. A..., voisin immédiat, justifie d'un intérêt à l'annulation de la décision qu'il conteste.

6. Aux termes de l'article R. 600-4 du code de l'urbanisme : " Les requêtes dirigées contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code doivent, à peine d'irrecevabilité, être accompagnées du titre de propriété, de la promesse de vente, du bail, du contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation, du contrat de bail, ou de tout autre acte de nature à établir le caractère régulier de l'occupation ou de la détention de son bien par le requérant (...) ".

7. La commune de Bordeaux ne peut utilement se prévaloir, pour contester la recevabilité de la demande de M. A..., présentée le 24 janvier 2018, des dispositions citées au point précédent qui, en application de l'article 9 du décret du 17 juillet 2018 portant modification du code de justice administrative et du code de l'urbanisme dont elles sont issues, sont " applicables aux requêtes dirigées contre des décisions intervenues après le 1er octobre 2018 ".

Sur la légalité des décisions contestées :

8. Aux termes de l'article 2.1.4.2.2 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole : " Toitures / Tous travaux entrepris sur les toitures doivent contribuer à maintenir et mettre en valeur la construction. / La modification de la forme de toiture, de la pente et des matériaux de couverture est autorisée : / - si elle rétablit les formes, pentes et matériaux conformes à l'architecture de la construction ; / - dans le cadre d'un raccordement aux héberges et pentes des toitures environnantes. / (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que le projet auquel le maire de Bordeaux ne s'est pas opposé consiste essentiellement à réunir en un seul lot les deux lots du dernier étage de l'immeuble - un studio et un appartement en duplex -, à surélever la partie arrière de ce dernier étage en prolongeant la toiture et à créer une terrasse tropézienne de 4,36 m de profondeur sur cette partie arrière. Ce projet, conduisant notamment à réaliser une terrasse tropézienne couvrant une grande partie de la superficie qui était surmontée par la toiture arrière de l'immeuble, emporte donc modification de la forme de la toiture. Cette modification entre ainsi dans le champ des dispositions précitées de l'article 2.1.4.2.2 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme. Cette modification, qui ne peut être qualifiée de minime, n'est pas prévue dans le cadre d'un raccordement aux héberges et pentes des toitures avoisinantes et il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'elle pourrait être regardée comme rétablissant les formes, pentes et matériaux conformes à l'architecture de la construction. Dans ces conditions, la décision de non-opposition au projet méconnaît les dispositions de l'article 2.1.4.2.2 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole.

Sur les conséquences de l'illégalité des décisions contestées :

10. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux (...) ".

11. Le vice relevé ci-dessus, tenant à la méconnaissance de l'article 2.1.4.2.2 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole n'affecte qu'une partie du projet et peut être régularisé. Si la commune invoque les dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, le juge n'est toutefois pas tenu de surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre une autorisation d'urbanisme si les conditions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme sont réunies et qu'il fait le choix d'y recourir. Par ailleurs, si M. C... produit une déclaration préalable modificative de son projet, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette déclaration ait donné lieu à une nouvelle décision administrative ni, en tout état de cause, que le projet ainsi modifié, qui comporte toujours une modification non négligeable de la forme de la toiture, respecte les dispositions de l'article 2.1.4.2.2 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole. Il y a lieu, dès lors, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... et, s'ils ne sont pas fondés, de faire application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme.

12. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

13. Il ressort des pièces du dossier que devant le tribunal, M. A..., après avoir cité les dispositions de l'article 2.4.1.2.1 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole aux termes desquelles " (...) la création de baies doivent s'accorder au calepinage et être adaptés au caractère de la construction et participer à sa mise en valeur (...) les ouvrants à la française ne peuvent être remplacés par des ouvrants anglais ou coulissants ", se bornait à soutenir que le projet comporterait des " ventaux manifestement coulissants et ce, alors même que le règlement d'urbanisme n'autorise que des ouvrants à la française ". Le tribunal administratif a, dans le point 13 de son jugement, répondu à l'argumentation développée par le requérant et a exposé les raisons pour lesquelles la pose d'ouvrants lors de la création d'une baie ne méconnaissait pas les dispositions de l'article 2.4.1.2.1 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole. Ces indications ont permis à M. A... de comprendre et de contester utilement l'appréciation ainsi portée par les premiers juges au regard de la seule argumentation qu'il avait développée à l'appui du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 2.4.1.2.1 du règlement de la zone Up1 qui ne faisait pas état de ce que le projet de baie n'était pas adapté au caractère de la construction et ne participait pas à sa mise en valeur. Par suite, contrairement à ce que soutient l'appelant, le jugement est suffisamment motivé.

14. M. A... se borne à reprendre en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif sur ce point, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de déclaration préalable. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

15. Aux termes de l'article 2.1.5 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole : " (...) a/ Constructions protégées : / Les constructions protégées au titre du présent PLU en application du Code de l'urbanisme sont des constructions à préserver et à mettre en valeur pour des motifs d'ordre architectural, urbain, historique et/ou culturel. Elles sont repérées sur les plans au 1/1000° dits "ville de pierre" par des traits rouges ou verts passant devant les constructions, plans permettant l'application des dispositions particulières prises au titre de la protection du patrimoine bâti. / Les travaux sur les constructions protégées doivent respecter les prescriptions règlementaires des articles du présent règlement écrit et des plans au 1/1000° dits "ville de pierre". Ils doivent assurer la conservation et la mise en valeur des clôtures, des bâtiments, des structures, des matériaux, des éléments et des décors qui les caractérisent et qui leur confèrent une valeur architecturale, urbaine, historique et/ou culturelle. / (...) à condition de ne pas en altérer le caractère, les travaux de démolition de constructions parasites et d'additions inadaptées, les travaux de reconstruction ponctuelle ou de reconstitution d'éléments endommagés, la modification de l'aspect extérieur des façades, les travaux de surélévation et/ou d'extension peuvent être autorisés s'ils améliorent la qualité des constructions protégées, leur aspect extérieur, leur insertion dans le paysage urbain et/ou dans l'environnement (...) ". Aux termes de l'article 2.4.1.2 de ce règlement : " (...) Par sa conception et par sa mise en œuvre, toute intervention sur une construction protégée doit assurer la conservation et la mise en valeur des caractères de la construction et de ses éléments sans les altérer. / Tout élément d'architecture et de décor faisant partie de la construction par nature ou destination, tels que façade, toiture, lucarne, clôture, maçonnerie, escalier, sculpture, menuiserie, devanture, ferronnerie, fresque, peinture murale, inscription, et contribuant à l'intérêt de la construction, doit être mis en valeur, restauré et le cas échéant restitué (...) ".

16. Ainsi qu'il a été dit, les travaux projetés résident en la réunion de deux lots de l'immeuble, la création d'une terrasse et la surélévation de l'arrière du quatrième et dernier étage de cet immeuble en prolongeant la toiture. Il ressort notamment des photographies aériennes versées au dossier, d'une part, que si la façade de l'immeuble en litige donnant sur la rue Baste présente une continuité architecturale avec les façades voisines, l'arrière des immeubles de la rue Baste ne présente aucune homogénéité architecturale et, d'autre part, que la toiture de l'immeuble en cause est dissymétrique et comportait, à la date du dépôt de la déclaration préalable, un décalage entre le pan avant et le pan arrière de la toiture lequel avait subi des modifications, notamment avec la pose d'une fenêtre de toit et d'une verrière. La prolongation de la toiture prévue par le projet ne modifie pas les caractéristiques architecturales de l'immeuble visibles depuis la voie publique dès lors que la pente de la toiture n'est pas modifiée, que le matériau utilisé, la tuile romane canal, est identique à l'existant et que la prolongation sur l'arrière ne sera pas perceptible de la rue. En outre, le projet en cause, qui prévoit sur l'arrière de la construction une terrasse en bois, un bardage bois en ton naturel, des menuiseries en aluminium gris foncé, un garde-corps en métal et en verre et des pare-vues en bois et enduits d'un ton pierre, matériaux qui permettent l'insertion de la terrasse projetée dans le paysage urbain et les lieux environnants, doit être regardé comme mettant en valeur l'immeuble protégé. Ainsi, et dès lors que les travaux objet de la déclaration préalable déposée par M. C... ne font pas obstacle à la conservation, au maintien et à la mise en valeur des caractères de la construction et de ses éléments, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 2.4.1.2 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole doit être écarté.

17. Enfin, les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, M. A... ne peut utilement se prévaloir, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision contestée, de ce que le pignon de sa propriété pourrait être impacté par le projet alors qu'il n'a pas donné son accord.

18. Il résulte de tout ce qui précède que les autres moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés et qu'il y a lieu de faire application de l'article L. 600-5 précité du code de l'urbanisme et d'annuler les décisions contestées seulement en tant qu'elles méconnaissent l'article 2.1.4.2.2 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de fixer un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, dans lequel M. C... pourra demander la régularisation de la décision de non-opposition à son projet.

Sur les frais liés au litige :

19. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Bordeaux et de M. C... le versement à M. A... des sommes de 1 250 euros chacun. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, en revanche, obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement des sommes que demandent la commune de Bordeaux et M. C... au titre des frais d'instance qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens. Ces dispositions font également obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur ce point par la société Fort Salier et la Mutuelle des architectes français qui, en tant qu'intervenantes, n'ont pas la qualité de parties à l'instance.

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de la société Fort Salier et de la Mutuelle des architectes français est admise.

Article 2 : La décision implicite de non-opposition du maire de Bordeaux au projet déclaré le 12 juillet 2017 par M. C... et la décision de rejet du recours gracieux de M. A... du 23 novembre 2017 sont annulées en tant qu'elles méconnaissent l'article 2.1.4.2.2 du règlement de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole. M. C... pourra demander la régularisation de la décision de non-opposition à son projet dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement du 28 février 2019 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : La commune de Bordeaux et M. C... verseront, chacun, la somme de 1 250 euros à M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 6 : Les conclusions de la commune de Bordeaux, de M. C..., de la société Fort Salier et de la Mutuelle des architectes français tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la commune de Bordeaux, à M. D... C..., à la société Fort Salier et à la Mutuelle des architectes français.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Karine Butéri, présidente assesseure,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juillet 2024.

La présidente assesseure,

Karine ButériLa présidente-rapporteure

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX01717


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01717
Date de la décision : 09/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. ELLIE
Avocat(s) : FERRER;FERRER;BERARD

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-09;23bx01717 ?
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