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24/11/2020 | FRANCE | N°19PA00948

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 24 novembre 2020, 19PA00948


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Apollo a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007, de réparer les erreurs commises par l'administration dans la détermination du résultat déficitaire des exercices clos en 2006 et 2008 et de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 149 703 euros.

Par un

jugement n° 1303516 du 18 décembre 2014, le Tribunal administratif de Melun a, d'une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Apollo a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007, de réparer les erreurs commises par l'administration dans la détermination du résultat déficitaire des exercices clos en 2006 et 2008 et de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 149 703 euros.

Par un jugement n° 1303516 du 18 décembre 2014, le Tribunal administratif de Melun a, d'une part, réduit les bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés de la requérante pour les exercices clos en 2006, 2007 et 2008 respectivement de 70 306,83 euros,

16 026,40 euros et 1 076,40 euros et l'a déchargée des cotisations d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondant à la réduction de ces bases d'imposition et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un arrêt n° 15PA00797 du 10 juin 2016, la Cour administrative d'appel de Paris a, premièrement, fixé le résultat déficitaire de la société au titre de l'exercice clos en 2006 à 157 583 euros et le résultat bénéficiaire au titre de l'exercice clos en 2007 à 91 648 euros, deuxièmement, déchargé la société des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes mises à sa charge au titre de l'année 2007 à hauteur de la réduction des bases prononcée, enfin, rejeté le surplus de ses conclusions d'appel contre ce jugement.

Par une décision n° 401938 du 27 février 2019, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté pour la SCI Apollo, a annulé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 10 juin 2016 en tant qu'il s'est prononcé, s'agissant de l'impôt sur les sociétés, sur la renonciation à recettes résultant de la vente du lot n° 5, et a renvoyé l'affaire devant la même Cour, dans cette mesure.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 20 février 2015,

25 novembre 2015, 25 janvier 2016, 1er février 2016, 29 avril 2016, 20 mai 2016, 31 mai 2016 et 8 avril 2019, la SCI Apollo, représentée par Me B..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1303516 du 18 décembre 2014 en tant qu'il lui est défavorable ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur les sociétés restant en litige auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SCI Apollo soutient que le service a, à tort, estimé que le prix de vente du lot n° 5 était anormalement bas et était constitutif d'un acte anormal de gestion.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 juin 2015, 22 avril 2016, et 28 mars 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'il apporte bien la preuve d'une minoration du prix de vente et d'un acte anormal de gestion, s'agissant de la renonciation à recettes pour la vente du lot n° 5.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. À la suite d'une vérification de la comptabilité de la SCI Apollo, qui exerçait une activité de marchand de biens, l'administration lui a notamment notifié, par une proposition de rectification du 10 mai 2010, selon la procédure contradictoire, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2007, et la modification de son résultat déficitaire au titre des exercices clos en 2006 et 2008. La SCI Apollo a fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Melun a, d'une part, réduit les bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés de la requérante pour les exercices clos en 2006, 2007 et 2008 respectivement de 70 306,83 euros, 16 026,40 euros et 1 076,40 euros et l'a déchargée des cotisations d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondant à la réduction de ces bases d'imposition et, d'autre part, rejeté le surplus de ses demandes. Par l'arrêt n° 15PA00797 du 10 juin 2016, la Cour administrative d'appel de Paris a, premièrement, fixé le résultat déficitaire de la société au titre de l'exercice clos en 2006 à 157 583 euros et le résultat bénéficiaire au titre de l'exercice clos en 2007 à 91 648 euros, deuxièmement, déchargé la société des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes mises à sa charge au titre de l'année 2007 à hauteur de la réduction des bases prononcée, enfin, rejeté le surplus de ses conclusions d'appel contre ce jugement. Par une décision n° 401938 du 27 février 2019, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté pour la SCI Apollo, a annulé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 10 juin 2016 en tant qu'il s'est prononcé, s'agissant de l'impôt sur les sociétés, sur la renonciation à recettes résultant de la vente du lot n° 5, et a renvoyé l'affaire devant la même Cour, dans cette mesure.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. Il appartient, en règle générale, à l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal.

3. Il résulte de l'instruction que la société Apollo a vendu les lots nos 5, 6, 7 et 8 d'un ensemble immobilier situé 10 rue Charles Deguy à Montgeron (91) respectivement les 25 juillet 2007, 3 août 2007, 20 juillet 2007 et 30 juin 2007. A l'issue des opérations de contrôle, l'administration a estimé que la société avait vendu le lot n° 5 à un prix anormalement bas en comparaison des prix auxquels elle avait cédé les autres lots et qu'elle avait, ce faisant, commis un acte anormal de gestion.

4. Pour établir que l'écart de prix constaté avait le caractère d'une minoration susceptible de caractériser un acte anormal de gestion, l'administration s'est bornée à invoquer la différence de prix au m² avec les autres lots vendus entre juin et août 2007 et à indiquer que rien ne la justifiait, sans s'appuyer sur des éléments relatifs à l'état concret du bien au moment de sa vente. La SCI Apollo fait valoir que, compte tenu, d'une part, de difficultés financières, nées de la découverte d'un vice caché dans l'un des lots en cause, entraînant un important surcoût de construction, l'amenant à ne pas honorer des échéances de son emprunt bancaire et à se voir, en mars 2007, demander son remboursement anticipé, et, d'autre part, de l'acceptation du futur propriétaire, elle n'a pas réalisé de travaux sur le lot n° 5, contrairement aux autres lots cédés à la même période, et l'a ainsi vendu " brut de béton " à un prix n'étant pas majoré de la valeur de travaux de second oeuvre, s'élevant à 1 200 euros le m² dans les autres lots. Il ressort de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 17 janvier 2011, suivi par l'administration, que la commission a proposé, " au vu des arguments échangés et des documents présentés en séance ", " compte tenu des conditions particulières de la cession ", que le prix de vente retenu pour le lot litigieux par le service devait être diminué par prise en compte du prix de cession du lot n° 7, le moins onéreux, et application de deux décotes de 5 %. Elle doit par suite être regardée comme ayant considéré que l'état du lot n°5 n'était pas similaire à celui des autres biens vendus en 2007. Le ministre, qui n'invoque aucun élément de nature à remettre en cause les constats au support de cet avis, se borne à faire valoir que l'acte de vente ne comportait aucune mention spéciale sur l'état du lot n° 5. Dans ces conditions, cette seule circonstance n'est pas de nature à établir que, contrairement à ce que soutient la société requérante, l'état du lot n°5 était similaire à celui des autres lots retenus comme termes de comparaison. L'administration n'apporte dès lors pas la preuve que la société aurait cédé le lot n° 5 à un prix inférieur à sa valeur vénale et aurait ainsi commis un acte anormal de gestion.

5. Par suite, la SCI Apollo est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007, s'agissant de la renonciation à recettes, ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des conclusions de la SCI Apollo présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La SCI Apollo est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2007, à raison de la renonciation à recettes de 70 217 euros, et des pénalités correspondantes.

Article 2 : Le jugement n° 1303516 du 18 décembre 2014 du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à la SCI Apollo la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Apollo et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré).

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme A..., présidente assesseure,

- M. C..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 novembre 2020.

Le rapporteur,

A. C...Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA00948 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-082 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Acte anormal de gestion.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Alexandre SEGRETAIN
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : DELAIT ; DELAIT ; DELAIT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Date de la décision : 24/11/2020
Date de l'import : 05/12/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19PA00948
Numéro NOR : CETATEXT000042569224 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-11-24;19pa00948 ?
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