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11/05/2006 | FRANCE | N°03VE02996

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ere chambre, 11 mai 2006, 03VE02996


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour Mme Jocelyne X, demeurant au ..., par Me Coudray ;

Vu la requête, enregistr

ée le 28 juillet 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour Mme Jocelyne X, demeurant au ..., par Me Coudray ;

Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris par laquelle Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0200921 du 5 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 janvier 2002 par laquelle le ministre de l'emploi et de la solidarité a autorisé le licenciement de Mme X ;

2°) d'annuler cette décision ;

3 °) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 600 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement viole l'article R. 741-2 du code de justice administrative puisqu'il ne mentionne pas l'ensemble des pièces de la procédure ; que lorsque le ministre annule la décision de son subordonné il doit énoncer les considérations de fait qui constituent le fondement de sa décision ; qu'alors que l'inspecteur du travail avait considéré que la proposition de l'employeur ne satisfaisait pas à ses obligations de reclassement, le ministre ne pouvait se borner à indiquer que les propositions de reclassement était suffisantes ; que c'est à tort que le ministre a estimé que le motif économique invoqué par l'employeur était de nature à justifier que l'autorisation soit accordée ; que le ministre a, en outre, commis une erreur de droit en fondant sa décision sur d'autres éléments que ceux existant à la date de la décision initiale ; qu'il a tenu compte des propositions de reclassement faites ultérieurement par l'entreprise puisque sa décision mentionne plusieurs propositions alors qu'à la date de la décision de l'inspecteur du travail une seule proposition avait été faite le 12 février 2001 ; que l'employeur n'a pas satisfait à ses obligations de recherche de reclassement car la proposition de reclassement ne comporte aucune précision sur les modalités de rémunération et les conditions dans lesquelles le contrat de travail serait poursuivi ; que la discrimination est établie ; que, par suite, le ministre était en situation de compétence liée pour refuser le licenciement ;

………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 avril 2006 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller ;

- les observations de Me Saint-Sauveur, pour la société Dunlopillo ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le 12 février 2001, la société Dunlopillo a informé Mme X, qui occupait depuis 1979 un poste d'agent commercial à Nantes-Orvault, qu'elle allait procéder à la centralisation de l'ensemble de la chaîne logistique à Limay et supprimer ses centres régionaux dont celui d'Orvault ; cette lettre qui indiquait à Mme X que figuraient en annexe « les mesures incitatives et alternatives au transfert » et que l'employeur « espérait qu'elle serait en mesure de le suivre dans ce nouveau lieu de travail » précisait qu'en cas de refus de sa part des mesures d'accompagnement et du plan social joint, elle procéderait à son licenciement pour motif économique suivant la procédure exceptionnelle applicable aux salariés protégés ; qu'à la suite du refus opposé par Mme X, déléguée du personnel suppléante et représentante syndicale au comité d'entreprise, et après consultation du comité d'entreprise, la direction de la société a demandé à l'inspecteur du travail l'autorisation de la licencier le 21 mai 2001 ; que la décision de refus de l'inspecteur du travail prise le 16 juillet 2001 a été annulée sur recours hiérarchique de la société par une décision prise par le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle le 17 janvier 2002 autorisant le licenciement ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle, doit être autorisé par l'inspecteur du travail ; qu'aux termes de l'article R. 436-6 du code du travail : « Le ministre compétent peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet. Ce recours doit être introduit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur. » ; qu'en vertu de ces dispositions la décision de l'inspecteur du travail accordant ou refusant l'autorisation de licencier un salarié protégé est soumise au contrôle hiérarchique dans les conditions du droit commun ; que dans le cas où l'inspecteur a refusé l'autorisation de licenciement, la décision ainsi prise, qui a créé des droits au profit du salarié intéressé, ne peut être annulée ou réformée par le ministre compétent que pour des motifs de légalité compte tenu des circonstances de droit et de fait existant à la date à laquelle l'inspecteur du travail s'est prononcé ;

Considérant que Mme X fait valoir que la lettre du 12 février 2001 ne comportait aucune offre réelle de reclassement faute de précision au regard de son contrat de travail et du montant de sa rémunération ; qu'il ressort des pièces du dossier que cette proposition très vague n'était que la traduction du plan social qui était joint en annexe à la lettre et ne peut être regardée comme une mesure individuelle de reclassement, prise en fonction de sa situation personnelle et notamment des caractéristiques de son contrat de travail et du montant de sa rémunération ; que, par suite, Mme X est fondée à soutenir que l'offre de « reclassement » qui lui a été faite ne satisfaisait pas à l'obligation qui incombe à l'employeur eu égard à la protection dont elle bénéficiait ; que si le ministre, pour autoriser le licenciement, s'est fondé sur « des propositions de reclassement » intervenues postérieurement à la décision de son subordonné, il ne pouvait fonder sa décision sur celles-ci sans commettre d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de condamner l'Etat à payer à Mme X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°0200921 du 5 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de Mme X, ensemble la décision du 17 janvier 2002 par laquelle le ministre de l'emploi et de la solidarité a autorisé son licenciement sont annulés.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mme X la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 03VE02996
Date de la décision : 11/05/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : DE SAINT SAUVEUR

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-05-11;03ve02996 ?
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